Le droit à un recours effectif au sens de la Convention européenne des droits de l’homme [Résumé de thèse]
Le droit à un recours effectif au sens de la Convention européenne des droits de l’homme
Par Gabriela RUSU
Thèse soutenue à l’Université Montpellier I le 14 janvier 2013
Composition du jury : Monsieur le Professeur Joël Andriantsimbazovina, Université de La Rochelle, Rapporteur ; Madame le Professeur Peggy Ducoulombier, Université de Perpignan Via Domitia, Rapporteur ; Madame le Professeur Laure Milano, Université d’Avignon et des Pays de Vaucluse, Présidente ; Monsieur le Professeur Frédéric Sudre, Université Montpellier I, Directeur de thèse
Dans le système européen des droits de l’homme, l’article 13 de la Convention représente une disposition clé en raison de son rôle, qui est d’assurer l’effectivité des autres droits conventionnels. Cette disposition permet à tout particulier de faire valoir ses droits conventionnels devant une autorité nationale afin de prévenir leur violation ou, le cas échéant, d’obtenir réparation. Ainsi, par le biais du droit à un recours effectif, la protection des droits garantis par la Convention est renforcée.
L’article 13 constitue l’expression du principe de subsidiarité qui est au cœur de la Convention et qui est de plus en plus mis en avant par le juge supranational. Dans l’arrêt de Grande Chambre De Souza Ribeiro c. France, rendu le 13 décembre 2012, la Cour a réaffirmé l’importance de l’article 13 dans le maintien du caractère subsidiaire du système de la Convention. L’article 13 permet aux Etats de remédier, au niveau national, aux éventuelles violations de la Convention. Dans des arrêts récents de 2011 et 2012 comme M.S.S. (GC, 21 janvier 2011), Ahmade (25 septembre 2012) ou Singh (2 octobre 2012), la Cour de Strasbourg a souligné qu’il appartient aux autorités nationales de se prononcer en premier lieu sur le respect des droits conventionnels, le juge européen venant ensuite vérifier le respect de cette obligation sur le terrain de l’article 13.
Il est ainsi possible d’affirmer qu’aujourd’hui on assiste à une revalorisation du droit à un recours effectif. Cette disposition est essentielle pour la sauvegarde du système conventionnel comme le démontrent les débats récents sur l’avenir de la Cour européenne des droits de l’homme. Néanmoins, il est difficile, voire impossible, d’affirmer clairement s’il s’agit d’un droit subjectif, d’une obligation étatique ou d’un mode de sauvegarde. Or, cette qualification influe sur la portée et le contenu de l’article 13.
En posant comme hypothèse de recherche la spécificité de la nature juridique du droit à recours effectif dans le système de la Convention européenne des droits de l’homme, la thèse défendue vise à démontrer que le droit à un recours effectif a une nature juridique sui generis étant à la fois (indistinctement) et dans le même temps (simultanément) un mode de sauvegarde, un droit subjectif et une obligation étatique.
L’analyse du droit à un recours effectif a ainsi été faite à travers l’osmose de toutes ces formes afin de présenter le contenu et la portée de l’article 13 qui, comme le souligne la doctrine, « est probablement, de toutes les dispositions de la Convention, celle dont le sens et la portée sont les plus malaisés à cerner » (G. Malinverni).
La première partie, portant sur l’autonomisation du droit à un recours effectif en tant que droit-moyen,met en relief la spécificité de l’article 13 dans le système conventionnel et la relation nécessaire qu’il entretient avec les autres droits matériels ou procéduraux. Cette analyse montre la valorisation du droit à un recours effectif, mais soulève également plusieurs interrogations quant à l’avenir de l’article 13. Un mouvement paradoxal pourrait apparaître : l’élargissement du champ d’application de l’article 13 grâce à la jurisprudence évolutive de la Cour et l’utilisation réduite de cette disposition due à la procéduralisation des droits substantiels.
La deuxième partie, concernant la procéduralisation du droit subjectif à un recours effectif, vise à apporter une réflexion sur les garanties du recours et sur son éventuelle juridictionnalisation. A la différence de l’article 6 de la Convention, l’article 13 n’énonce pas les garanties procédurales que le recours doit remplir et n’impose pas que celui-ci soit porté devant une juridiction. Cette partie présente ainsi le contenu entièrement prétorien du droit à un recours effectif et la façon dont le juge européen adapte les garanties exigées sur le terrain du droit à un tribunal. Un deuxième paradoxe peut être constaté : malgré l’affirmation constante que l’article 13 n’impose pas un recours devant un tribunal, afin de garantir l’effectivité du recours, le juge européen semble le juridictionnaliser.
La troisième partie, consacrée au renforcement de l’obligation étatique d’offrir un recours effectif, met en lumière le caractère prioritaire et substitutif du recours national par rapport au recours européen et la marge d’appréciation laissée aux Etats parties. L’analyse montre le lien indispensable qui existe entre l’article 13 et le principe de subsidiarité et la nature des obligations pesant sur les autorités étatiques.
Cette étude a permis de s’interroger en conclusion sur une éventuelle juridictionnalisation officielle, mais également sur la transformation du droit à un recours effectif en moteur du système conventionnel.
beaucoup d’éléments pertinents. merci pour cette belle analyse!