Liberté et sécurité : les mesures antiterroristes et la Convention européenne des droits de l’homme [Résumé de thèse]
Liberté et sécurité : les mesures antiterroristes et la Convention européenne des droits de l’homme
Par Athanasia Petropoulou
Thèse soutenue le 28 janvier 2013 à l’Université Paris I, Panthéon-Sorbonne devant un jury de thèse composé de Mme Emmanuelle Jouannet, Professeure à l’Université Paris I, Panthéon-Sorbonne (co-directrice de thèse), M. Olivier de Frouville, Professeur à l’Université Paris II, Panthéon-Assas (Rapporteur), M. Alexandre Linos Sicilianos, Juge à la Cour européenne des droits de l’homme (co-directeur de thèse), M. Denys Simon, Professeur à l’Université Paris I, Panthéon-Sorbonne et Mme Françoise Tulkens, ancienne Vice-présidente de la Cour européenne des droits de l’homme (Rapporteur).
La dialectique des rapports entre liberté et sécurité dans le cadre de la lutte contre le terrorisme met en lumière l’ambivalence et les difficultés d’articulation de ces concepts, qui traduisent le dilemme propre aux régimes démocratiques : comment défendre la démocratie sans pour autant la détruire. L’intérêt renouvelé du sujet trouve son origine dans les événements du 11 septembre 2001, macabres témoins de l’ampleur de la dissémination et de la privatisation de la violence qui ont radicalisé les effets et les caractéristiques de la criminalité terroriste. Face à la redoutable force du terrorisme, dont la définition en droit demeure imprécise, la réponse des gouvernements nationaux a consisté essentiellement en l’adoption de dispositifs et de mesures qui défient ouvertement les droits de l’homme et les principes de l’État de droit.
La question de la protection des droits de l’homme dans la lutte contre le terrorisme fait émerger la figure du juge, auquel incombe notamment la mission de brider l’action arbitraire de l’exécutif et les excès d’un législateur « terrorisé ». L’approche de la Convention européenne des droits de l’homme et de la jurisprudence de la Cour de Strasbourg a marqué de son empreinte le débat concernant la protection des droits de l’homme dans la lutte antiterroriste en Europe et dans le monde. L’étude de la jurisprudence en la matière permet de s’interroger sur le fait de savoir si la jurisprudence de la Cour ces dix dernières années s’inscrit dans la continuité de la jurisprudence antérieure et, éventuellement, de quelle manière la prédominance du volet préventif des mesures antiterroristes est parvenue à influer sur le contrôle du juge, qui doit trouver l’équilibre entre la sauvegarde des droits et des libertés et les considérations ayant trait à l’idée de nécessité de défendre la société démocratique. Ainsi, l’analyse du contentieux « terroriste » s’est concentré, dans un premier temps, sur la protection des droits et libertés intimement liés à la prééminence du droit et du pluralisme démocratique, et dans un second, sur la protection de la vie et l’intégrité humaines, toutes deux particulièrement vulnérables dans le cadre de la lutte antiterroriste. Face au risque de recul considérable du contrôle juridictionnel et d’une différenciation systématique de la portée de la protection des droits et des libertés en fonction de la gravité de la menace représentée par le terrorisme, la réponse de la Cour européenne des droits de l’homme fait preuve de l’affirmation des principes conventionnels et des valeurs inhérentes aux droits de l’homme et à la société démocratique.
L’idée de la société démocratique et de ses valeurs, qui transcende l’ensemble de la Convention, devient ainsi l’étalon qui permet de mesurer les instruments revendiqués par les États pour mener la lutte antiterroriste. Ainsi, c’est un « ordre des libertés » que l’État démocratique est tenu de maintenir. En ce sens, la jurisprudence de la Cour contribue également de façon essentielle à la consolidation et à l’approfondissement des principes de protection des droits de l’homme au niveau international dans le cadre de la lutte contre le terrorisme.