Sur une exception française : la procédure de désignation des candidats au poste de juge à la Cour européenne des droits de l’homme

5 commentaires

  1. Bravo pour ce billet d’humeur qui résume parfaitement le triste exceptionnalisme français en la matière. Ajoutons que le Conseil d’Etat est très pointilleux sur la question de l’impartialité dans le fonctionnement universitaire, mais beaucoup moins quand il s’agit de procédures opaques et jouées d’avance qui le concernent.

    • Merci d’avoir porté ces éléments sur la place publique ! Il faudrait ajouter que si les mandats d’expert onusien (comités, rapporteurs spéciaux, groupes de travail…) accueillent des universitaires français, c’est peut être parce qu’ils ne sont pas rémunérés, malgré la lourde charge de travail qu’ils occasionnent…

  2. Merci pour cet article très intéressant. Au regard du propos je trouve dommage en revanche, d’écrire à propos de la nouvelle juge portugaise qu’elle est « avocate » mais pas « professeure»… la noblesse de cette dernière profession empêcherait-elle la féminisation du titre?

  3. Oui, élection assurément sans surprise.

    Elle est sans surprise lorsque l’on connait le principe d’auto-promotion des énarques, consistant à désigner 60% à 75% d’énarques aux postes clés.
    A la CEDH 3 des 5 juges français ad hoc sont énarques.
    Le comité de sélection ad hoc chargé de désignation des candidats juges pour la France à la CEDH comprenait 2 énarques parmi ses trois membres, soit 66%, nommés pour leur mission par des énarques du Conseil d’État où ils sont hégémoniquement majoritaires.
    Le choix de ce comité, ne laisse pas d’alternative au succès de Monsieur Mattias Gyuomar, énarque. Si Madame Champalaune, par exemple, n’a pas démérité, qui pourrait imaginer une spécialiste du droit commercial à la Cour des droit de l’homme. Elle n’avait donc aucune chance, pas plus que Monsieur Tristan Gervais.

    La règle des 60% à 75% porte désormais quasi irréversiblement atteinte au principe de démocratie en France :
    1.
    l’absence de séparation effective des pouvoirs et l’« entre-soi » est inscrite dans l’article 7 de la loi n°86-14 du 6 janvier 1986 prévoyant que les juges administratifs sont désignés à 66% parmi les diplômés de l’Ecole Nationale d’Administration (ENA), à savoir, de la même école dont les hauts fonctionnaires, de l’exécutif, sont recrutés. Cette loi a été expliquée par son promoteur, le Premier ministre de l’époque, par la qualité de la formation de son école, l’Ecole Nationale d’Administration (ENA). Ce premier ministre est devenu depuis Président du Conseil Constitutionnel, nommé à cet autre poste par Monsieur F. H., lui-même un autre diplômé de l’Ecole Nationale d’Administration (ENA).
    2.
    La promotion accélérée par la courte échelle entre les anciens de cette école et la règle des 60 à 75%, appliquées à tous les postes clés des pouvoirs exécutifs (premier ministre, ministres d’Etat, chefs de service, préfets, chefs de cabinets,…), législatif ou juridictionnel, s’agissant du contrôle de l’Etat, de l’administration et des lois (Défenseur des droits, Juges des Tribunaux et Cours dappel de l’ordre administratif, Magistrats du Conseil d’Etat, Magistrats de la Cour des comptes, Conseil Constitutionnel, …), fait que les diplômés de cette école détiennent, quasi exclusivement seuls, tous les postes clés des trois pouvoirs, alors qu’ils ne représentent que 6500/65.000.000 soit 1/10.000 de la population.

    3.
    Au sein de l’administration la proportion de 75% (27/36) d’administrateurs civils (diplômés l’Ecole Nationale d’Administration) parmi les personnes promues, dans l’encadrement au sein de les ministères financiers, dans le décret signé par de M Philippe Parini lui-même ancien de l’ENA illustre ce qui s’y passe (cf. JORF n°0148 du 26 juin 2008
    texte n° 44). Pourtant, il n’y a aucun juridictionnel possible devant une juridiction impartiale.

    4.
    L’impact des décisions du juge administratif diplômé de l’ENA sur sa propre carrière : La « mobilité » entre les services de l’Etat des juges issus de l’ENA, qui leur permet un avancement accéléré dans leur carrière, les mécanismes de nomina le juge Anatole Peny dont on retrouve sur Google les multiples va et vient tantôt délégataire de la signature d’un ministre, qui, à la rotation suivante, intervient en qualité de Juge administratif traitant des litiges des justiciables avec ce même ministère avant de réitérer à plusieurs reprises ce même va et vient.

    Oui, l’élection d’un juge énarque à la CEDH est sans surprise.

Pour citer cet article :

RDLF 2020 chron. n°04 (www.revuedlf.com)

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