Données personnelles et transparence de la vie publique
Depuis 2013, l’essor de la transparence de la vie publique s’est traduit par une amplification considérable des déclarations obligatoires imposées aux gouvernants et par l’ouverture au public de certaines de leurs données personnelles. Pour que chacun puisse évaluer dans quelle mesure le droit au respect de la vie privée des responsables publics et de leur entourage est atteint par l’exigence de transparence, il importe de faire la lumière sur les personnes assujetties à cette exigence, les données personnelles visées par celle-ci et les destinataires des données diffusées au nom de la transparence 1.
Charles-Édouard Sénac, professeur de droit public à l’Université de Bordeaux – CERCCLE (EA 7436) – CURAPP ESS (UMR 7319)
I. Les personnes assujetties à l’exigence de transparence
A. Les fonctions ciblées
B. Les entourages touchés
II. Les données personnelles visées par l’exigence de transparence
A. Les données contenues dans la déclaration de situation patrimoniale
B. Les données présentes dans la déclaration d’intérêts
III. Les destinataires des données personnelles
A. La transparence sans publicité
B. La transparence avec publicité
« Je n’ai pas, je n’ai jamais eu de compte à l’étranger, ni maintenant, ni avant » (Jérôme Cahuzac, le 5 décembre 2012, à l’Assemblée nationale).
« On nous parle souvent de corruption, de fortunes scandaleuses. Pour connaître de quel côté a été la corruption, je demande que chaque député soit tenu de donner l’état détaillé de sa fortune ; que cet état soit imprimé ; et que celui qui aurait fait un faux bilan, soit déclaré infâme », s’exclama un membre de la Convention nationale lors de la séance du 14 mai 1793[1]. Aussitôt formulée, la proposition suscita la controverse au sein des révolutionnaires. Pour Cambacérès, la mesure « est sans utilité pour la chose publique ; elle est de plus immorale, et ne tend à rien moins qu’à compromettre la propriété et la sûreté de chacun de nous ». Le girondin Buzot la juge, en l’état, insuffisante. À ses yeux, la chambre doit décréter que « tous les députés à l’Assemblée constituante, à l’Assemblée législative, ou à la Convention, dont la fortune s’est accrue [depuis les débuts de la Révolution], seront tenus de déclarer, dans le délai d’un mois, par quels moyens ils l’ont augmentée, sous peine d’être condamnés à dix années de fers, et d’avoir leurs biens confisqués ». La Convention adoptera finalement, sur la proposition de Barbaroux, une déclaration de principe suivant laquelle « les représentants du peuple sont à chaque instant comptables à la Nation de l’état de leur fortune ». Et, deux années plus tard, elle consacrera la position défendue par le défunt Buzot, reprise par un autre girondin, Garrau. Le 4 vendémiaire an IV, elle décrète que « chaque représentant du peuple sera tenu, dans le délai d’une décade, et dans celui de deux décades pour ceux qui sont négociants ou marchands, de déposer au comité des décrets la déclaration, écrite et signée par chaque déclarant, de la fortune qu’il avait au commencement de la Révolution et de celle qu’il possède actuellement ; que cette déclaration sera imprimée et envoyée à toutes les communes, pour y être publiée, affichée, et soumise à la censure publique »[2]. Ainsi, la transparence de la vie publique était née.
La postérité de ces décrets révolutionnaires, au demeurant peu appliqués, sera faible, voire nulle[3]. L’idée de soumettre les élus à des obligations de déclaration des éléments de leur patrimoine – ou d’autres données personnelles – dans le but de contrôler leur intégrité et leur probité, tombe rapidement dans l’oubli. Il faut attendre la Cinquième République et la réaction législative à l’un de ses premiers scandales politico-financiers pour que l’exigence juridique de transparence de la vie publique voit véritablement le jour. Le scandale en question est l’affaire de la « Garantie foncière », du nom de la société civile de placement immobilier impliquée dans une vaste affaire d’escroquerie, dans laquelle le député UDR André Rives-Henrÿs, proche de Jacques Chaban-Delmas et ancien directeur de la société, fut inculpé d’escroquerie, d’abus de confiance et d’abus de biens sociaux, puis finalement condamné pour usage irrégulier de son titre de député à des fins publicitaires[4]. La réaction du législateur, initiée par l’Exécutif, consiste dans l’adoption de la loi organique du 24 janvier 1972, dont l’article 3 instaure une double obligation déclarative à la charge des députés et sénateurs[5]. Chaque parlementaire doit, d’une part, dans les huit jours qui suivent son entrée en fonction, « déclarer au bureau de l’Assemblée à laquelle il appartient toute activité professionnelle qu’il envisage de conserver » et, d’autre part, « déclarer toute activité professionnelle nouvelle qu’il envisage d’exercer » au cours de son mandat[6]. Depuis cette date, les déclarations obligatoires intègrent l’arsenal parlementaire de lutte contre les manquements à la probité des élus, à côté d’autres mesures telles que l’établissement d’une commission d’enquête ou le renforcement du régime des incompatibilités. La transparence de la vie publique revient périodiquement dans l’agenda du législateur, le plus souvent lorsqu’un scandale dégrade l’image de la classe politique française et accrédite l’idée d’une perte de confiance des citoyens dans leurs représentants. En 1988, les deux premières lois en matière de transparence financière de la vie politique sont adoptées à la suite des affaires « Luchaire »[7] et « Carrefour du développement »[8]. Elles exigent le dépôt obligatoire d’une déclaration de patrimoine pour un certain nombre de dirigeants publics, ainsi que pour les candidats à l’élection présidentielle, et créent une commission chargée de les contrôler[9]. En 1995, la législation relative aux déclarations de patrimoine des élus est sensiblement renforcée[10] dans un contexte marqué par de nombreux scandales politiques[11]. En 2013, même si les lois relatives à la transparence de la vie publique s’inspirent des travaux des commissions Sauvé et Jospin[12], la cause première de leur adoption est la retentissante affaire « Cahuzac »[13]. Ces lois instituent une Haute autorité pour la transparence de la vie publique (HATVP), à la place de la commission créée en 1988, amplifient les déclarations obligatoires imposées aux gouvernants, imposent la publication de la « réserve parlementaire »[14] et développent l’accès du public à certaines données personnelles[15]. La dernière réforme en date ne dévie pas du modus operandi du législateur : les lois du 15 septembre 2017 pour la confiance dans la vie politique sont le contrecoup des révélations, au cours de la campagne précédant l’élection présidentielle de 2017, sur les emplois familiaux de complaisance par François Fillon[16]. Si les mesures les plus emblématiques de ces lois, comme l’interdiction pour certains responsables publics de recruter comme collaborateur un proche parent ou la suppression de la « réserve parlementaire »[17], ne concernent pas la transparence, ces textes apportent néanmoins des changements au régime des déclarations obligatoires[18].
Le développement des exigences législatives en matière de transparence de la vie publique s’est fait au détriment du droit au respect de la vie privée des élus. En effet, dans la mesure où la transparence entraîne la diffusion de données personnelles (patrimoine, activités professionnelles et bénévoles, rémunérations, etc.), les obligations déclaratives portent nécessairement atteinte au droit à la confidentialité de ces données[19]. Or, en France comme ailleurs, le droit au respect de la vie privée est un droit fondamental pour tout individu, quel que soit son emploi ou à sa fonction[20]. En outre, en France plus qu’ailleurs, les médias et la population sont traditionnellement sensibles à la préservation de la vie privée de leurs dirigeants. Toutefois, la vie privée des puissants n’est plus le sanctuaire qu’elle était il y a une quarantaine d’années. D’une part, l’émotion de la population, à la suite de la divulgation de scandales, financiers ou non, a débouché sur une demande populaire de transparence. D’autre part, les élus eux-mêmes reconnaissent que leur vie privée peut intéresser l’opinion publique et font parfois le choix de la porter à la connaissance du public par le moyen des médias ou l’utilisation des réseaux sociaux.
Quoi qu’il en soit, le maintien d’un dispositif attentatoire au droit à la confidentialité des données personnelles n’est légitime que s’il satisfait à deux exigences élémentaires : l’efficacité du dispositif et la proportionnalité de l’atteinte. Concernant l’efficacité des déclarations obligatoires, il est encore trop tôt pour apprécier l’influence d’un dispositif profondément réformé en 2013 et retouché à plusieurs reprises depuis, tant sur l’objectif éthique – garantir la probité et l’intégrité des responsables publics – que sur la finalité politique – rétablir la confiance des gouvernés dans les gouvernants. S’agissant de la proportionnalité de l’atteinte, trois indicateurs sont, à nos yeux, déterminants pour évaluer sa portée. D’abord, il faut prendre en considération le type de données personnelles dont la communication est exigée : celles qui se rattachent à l’intimité de l’être (santé, convictions, orientation sexuelle, etc.) impliquent, selon nous, une protection accrue par rapport aux autres données personnelles. Ensuite, il faut regarder, d’une part, les personnes soumises à l’obligation de déclarer leurs données et, d’autre part, celles qui ont accès aux données d’autrui. Dans les deux cas, plus le nombre de personnes est potentiellement élevé, plus l’atteinte est forte. Pour que chacun puisse évaluer dans quelle mesure le droit à la confidentialité des données personnelles des responsables publics est atteint par les règles de transparence de la vie publique, nous présenterons les personnes assujetties à l’exigence de transparence (I), puis les données personnelles visées par celle-ci (II) et, enfin, les destinataires des données diffusées au nom de la transparence (III).
I. Les personnes assujetties à l’exigence de transparence
Depuis 1972, le cercle des individus assujettis à l’exigence de transparence de la vie publique n’a cessé de s’élargir. Initialement limité aux titulaires des plus hautes fonctions électives, ce sont désormais des dizaines de milliers de personnes qui sont soumises aux obligations déclaratives prévues par le droit français. D’une part, le nombre de fonctions publiques ou privées placées sous surveillance a considérablement augmenté au fil des années (A) ; d’autre part, l’exigence de transparence s’étend désormais à l’entourage familial et professionnel de certains titulaires de fonctions publiques (B).
A. Les fonctions ciblées
Au terme – sans doute provisoire – de l’évolution du champ des fonctions visées par l’exigence de transparence de la vie publique, les secteurs concernés par des obligations déclaratives sont au nombre de quatre.
Le premier secteur est celui des responsables politiques, au sens large du terme. Avec les élargissements successifs réalisés par les lois de mars 1988, de février 1995 et d’octobre 2013, ce sont désormais de nombreuses fonctions qui sont soumises à l’obligation de déposer une déclaration de situation patrimoniale et, depuis 2013, une déclaration d’intérêts. Au niveau national, sont visés les titulaires des fonctions de député[21], sénateur[22], député européen[23] et membre du gouvernement[24]. Le Chef de l’État est aussi concerné, de même que tous ceux qui ont été déclarés candidats à l’élection à la présidence de la République par le Conseil constitutionnel[25]. Les collaborateurs du Président de la République, du Président de l’Assemblée nationale, du Président du Sénat, et les membres des cabinets ministériels doivent également satisfaire à ces obligations déclaratives[26].
Au niveau local, les déclarations obligatoires imposées au nom de la transparence de la vie publique touchent les titulaires des fonctions de président de conseil régional, président de conseil départemental, président d’une assemblée territoriale d’outre-mer, président élu d’un exécutif d’une collectivité d’outre-mer, de maire d’une commune de plus de 20 000 habitants, et celles de président d’autres organes délibérants ou d’autres organes exécutifs locaux[27]. Depuis avril 2016, les directeurs, directeurs adjoints et chefs de cabinet de ces autorités territoriales sont également visés[28]. Qui plus est, l’exigence de transparence touche les conseillers régionaux, les conseillers départementaux, les conseillers à l’assemblée de Guyane et ceux à l’assemblée de Martinique, les conseillers exécutifs de Martinique et ceux de Corse, les adjoints aux maires des communes de plus de 100 000 habitants et certains vice-présidents des établissements publics de coopération intercommunale[29].
Deuxièmement, l’exigence de transparence s’étend à de nombreuses fonctions au sein du secteur public. Depuis les lois « Cahuzac » de 2013, les membres des collèges et, le cas échéant, les membres des commissions investies de pouvoirs de sanction, ainsi que les directeurs généraux et secrétaires généraux et leurs adjoints, de nombreuses agences publiques sont assujettis à des obligations déclaratives[30]. Sont aussi concernés le déontologue de l’Assemblée nationale[31], les présidents et directeurs généraux de nombreuses sociétés d’économie mixte, d’établissements publics nationaux à caractère industriel et commercial, de certains offices publics de l’habitat[32], ainsi que les présidents des fédérations sportives et des ligues professionnelles, du Comité national olympique et sportif français et du Comité paralympique et sportif français[33]. Plus généralement, toute personne exerçant un emploi à la décision du Gouvernement pour lequel elle a été nommée en conseil des ministres est astreinte à des obligations déclaratives[34].
On peut ajouter à cette liste déjà longue de nombreux agents publics depuis que la loi du 20 avril 2016 relative à la déontologie et aux droits et obligations des fonctionnaires a étendu à certains agents publics la quête de transparence[35]. Avant cette loi, certains d’entre eux étaient certes déjà assujettis à des déclarations obligatoires. À ceux entrant dans le champ d’application de la législation d’octobre 2013, s’ajoutaient certains agents travaillant dans le domaine de la santé publique et soumis, depuis la réaction législative au scandale du Médiator, à des obligations déclaratives[36]. En 2016, le législateur a manifesté son intention d’élargir encore plus le champ des agents publics placés sous surveillance. Il a habilité le pouvoir réglementaire à fixer les listes des emplois et fonctions dont le niveau hiérarchique ou la nature justifie que le fonctionnaire, l’agent contractuel ou le militaire l’occupant ou en voie de l’occuper soit soumis à des déclarations obligatoires[37]. Les emplois et fonctions concernés sont détaillés dans deux décrets du 28 décembre 2016 pour la fonction publique[38] et un décret du 2 février 2018 pour le personnel militaire[39]. Conformément à ce qu’avait souhaité le législateur, le périmètre des agents astreints à déclarer leur patrimoine est plus restreint que celui des agents soumis à déclaration de leurs intérêts.
Le troisième secteur auquel ont été étendues les exigences de la transparence est celui de la justice. La loi du 20 avril 2016 a imposé des déclarations de données personnelles aux membres du Conseil d’État[40], conseillers des tribunaux administratifs et des cours administratives d’appel[41], membres et personnels de la Cour des comptes[42], magistrats du siège des chambres régionales des comptes, procureurs financiers et aux personnes mises à disposition pour exercer les fonctions de rapporteur auprès des chambres régionales des comptes[43]. Tous doivent fournir une déclaration d’intérêts mais seuls le vice-président et les présidents de section du Conseil d’État, les présidents des tribunaux administratifs et des cours administratives d’appel, le premier président, le procureur général et les présidents de chambre de la Cour des comptes, les présidents de chambre régionale des comptes et les procureurs financiers sont soumis à l’obligation de déposer une déclaration de situation patrimoniale[44]. Le législateur organique a souhaité transposer ce système aux magistrats judiciaires et aux membres du Conseil supérieur de la magistrature (CSM). Initialement, la déclaration d’intérêts devait être remplie par tous et la déclaration de patrimoine par les seuls membres du CSM, premier président et présidents de chambre de la Cour de cassation, procureur général et premiers avocats généraux près la Cour de cassation, premiers présidents des cours d’appel et procureurs généraux près les cours d’appel, présidents des tribunaux de première instance et procureurs de la République près les tribunaux de première instance. Toutefois, le Conseil constitutionnel, au titre de son contrôle obligatoire des lois organiques avant leur promulgation, a jugé contraire au principe d’égalité devant la loi la discrimination établie entre ces magistrats judiciaires et les autres[45], ce qui laisse planer un doute sérieux sur la constitutionnalité des dispositions similaires du code de justice administrative et du code des juridictions financières. En tout état de cause, la censure de la loi organique sur ce point a conduit à supprimer l’obligation de déclaration de situation patrimoine pour tous les magistrats judiciaires[46]. Désormais seuls les membres du CSM y sont assujettis ; tous sont en revanche soumis à l’obligation de déclarer leurs intérêts et activités[47].
Enfin, le quatrième secteur visé par l’exigence de transparence de la vie publique ne concerne pas des responsables publics mais certains de leurs interlocuteurs : les représentants d’intérêts (ou « lobbyistes »), que la loi du 9 décembre 2016 dite « Sapin 2 » définit comme les personnes morales de droit privé, les établissements publics ou groupements publics exerçant une activité industrielle et commerciale, les chambres de commerce et de l’industrie et les chambres des métiers et de l’artisanat, dont un dirigeant, un employé ou un membre a pour activité principale ou régulière d’influer sur la décision publique ou bien comme les personnes physiques qui exercent à titre individuel une activité professionnelle ayant cette finalité[48]. Cette même loi instaure à la charge de ces représentants une obligation de se déclarer auprès de la HATVP et, notamment, de communiquer certaines données relatives à leur personnel[49]. L’identité du représentant d’intérêt, ainsi que l’ensemble des données transmises, sont mises à la disposition du public grâce à un registre numérique des représentants d’intérêts tenu par la Haute autorité[50]. Ce faisant, la loi prend le relais de pratiques mises en place à partir de 2009 par les chambres du Parlement pour encadrer l’activité de lobbying auprès des parlementaires[51], en posant des règles contraignantes, comme l’avait suggéré le président de la HATVP dans un rapport remis au Chef de l’État en janvier 2015[52]. Au demeurant, les obligations déclaratives imposées aux représentants d’intérêts sont bien moins intrusives que celles applicables aux responsables publics : aucune déclaration de patrimoine ou déclaration d’intérêts n’est exigée d’eux.
B. Les entourages touchés
La recherche de l’efficacité des mécanismes de déclarations obligatoires destinés à promouvoir l’exemplarité des responsables publics a conduit le législateur à étendre à leurs entourages les effets de la transparence. Sur ce sujet, comme d’autres, l’élargissement de la perspective est l’œuvre des lois d’octobre 2013. Ces dernières ont, comme on l’a vu, contraint les collaborateurs des plus hauts dirigeants politiques à remplir eux-mêmes des déclarations comprenant des données personnelles. Mais elles ont également astreint certains responsables publics à déclarer des informations relatives à leur entourage professionnel ou familial, et donc à divulguer des données personnelles d’autrui. Concernant l’entourage professionnel, seuls les parlementaires sont tenus de communiquer des informations personnelles d’autrui : ils doivent indiquer sur leurs déclarations d’activités et d’intérêts « les noms des collaborateurs parlementaires ainsi que les autres activités professionnelles déclarées par eux »[53]. En revanche, l’entourage familial de l’ensemble des personnes assujetties aux déclarations obligatoires est touché par les exigences de la transparence de la vie publique. En premier lieu, s’inspirant de l’adage selon lequel « la femme de César doit être au-dessus de tout soupçon », les pouvoirs publics ont décidé que les déclarations d’intérêts et d’activités des responsables publics doivent mentionner les activités professionnelles exercées à la date de la nomination ou de l’élection par leur conjoint, leur partenaire lié par un pacte civil de solidarité ou leur concubin[54]. À l’origine, les déclarations devaient également inclure les activités professionnelles des enfants et des parents mais le Conseil constitutionnel a jugé que, pour ces proches, l’atteinte au droit au respect de la vie privée était disproportionnée et, partant, s’y est opposé[55]. En second lieu, la déclaration de situation patrimoniale doit préciser à chaque fois si le bien déclaré est un bien propre, un bien de la communauté ou un bien indivis[56]. Dans ces deux derniers cas, la déclaration de patrimoine du responsable public dévoile, le cas échéant, des informations patrimoniales d’autrui.
II. Les données personnelles visées par l’exigence de transparence
La détermination du type de données personnelles soumis à communication dépend de la finalité de la transparence. S’il s’agit de lutter contre l’enrichissement frauduleux des dirigeants publics ou, plus généralement, l’utilisation détournée des fonds publics, les données patrimoniales sont la cible principale, voire exclusive, des obligations déclaratives. À partir du moment où la transparence s’est imposée, plus largement, comme un instrument de lutte contre les conflits d’intérêts, définis par les lois de 2013 comme « toute situation d’interférence entre un intérêt public et des intérêts publics ou privés qui est de nature à influencer ou paraître influencer l’exercice indépendant, impartial et objectif d’une fonction », le champ des données dont la communication paraît légitime croît sensiblement. Aux données patrimoniales qui font l’objet d’une déclaration spécifique (A) se sont ajoutées diverses informations qui sont regroupées dans une déclaration d’intérêts (B).
A. Les données contenues dans la déclaration de situation patrimoniale
Les lois de mars 1988 relatives à la transparence financière de la vie politique constituent la base du système de déclaration obligatoire de la situation patrimoniale des gouvernants. Elles prévoyaient que chaque responsable public concerné dépose une déclaration « de sa situation patrimoniale concernant notamment la totalité de ses biens propres ainsi que, éventuellement, ceux de la communauté ou les biens réputés indivis » au moment de son entrée en fonction et une seconde déclaration du même type à la sortie de fonction[57]. Si les lois exigèrent une double déclaration, permettant de contrôler la variation du patrimoine du décideur public et ainsi de s’assurer qu’il n’a pas mis à profit sa fonction pour s’enrichir indument, elles ne détaillèrent pas leur contenu. Les lois de janvier et février de 1995 ne précisèrent pas les éléments devant intégrer les déclarations mais ajoutèrent l’obligation pour les déclarants de communiquer « toutes les modifications substantielles de leur patrimoine, chaque fois qu’ils le jugent utile » et exonérèrent les déclarants de l’obligation de déposer une déclaration de sortie dans le cas où ils ont établi depuis moins de six mois leur déclaration de sa situation patrimoniale[58].
En 2013, les pouvoirs publics profitent de la profonde refonte du droit de la transparence pour détailler le contenu des deux déclarations de patrimoine dans la loi et le règlement[59]. D’une part, les lois « Cahuzac » précisent que la déclaration initiale doit porter sur les dix éléments suivants : « les immeubles bâtis et non bâtis », « les valeurs mobilières », « les assurances vie », « les comptes bancaires courants ou d’épargne, les livrets et les autres produits d’épargne », « les biens mobiliers divers d’une valeur supérieure à un montant fixé par voie réglementaire », « les véhicules terrestres à moteur, bateaux et avions », « les fonds de commerce ou clientèles et les charges et offices », « les biens mobiliers, immobiliers et les comptes détenus à l’étranger », « les autres biens » et les éléments du « passif »[60]. La déclaration finale doit mentionner les mêmes éléments, auxquels s’ajoute une présentation des événements majeurs ayant affecté la composition du patrimoine depuis la précédente déclaration, présentation qui n’exonère pas de l’obligation de déclarer dans un délai de deux mois toute modification substantielle de la situation patrimoniale. Pour les deux déclarations, les lois d’octobre 2013 exigent que la déclaration de situation patrimoniale indique, pour chaque élément mentionné, s’il s’agit de biens propres, de biens de la communauté ou de biens indivis. D’autre part, un décret du 23 décembre 2013 complète le dispositif législatif en fixant à 10 000 euros le seuil au-dessus duquel un bien doit être déclaré et en déterminant minutieusement les informations devant figurer dans les déclarations patrimoniales[61]. Par exemple, pour la déclaration de compte bancaire, le déclarant doit indiquer le nom du titulaire du compte, l’établissement teneur du compte, la nature et le numéro de compte, le solde du compte à la date du fait générateur de la déclaration. Pour les immeubles bâtis et non bâtis, il doit mentionner l’adresse, la nature et la superficie du bien, son mode, sa date et son prix d’acquisition, sa nature juridique (bien propre, commun ou indivis), la quote-part du bien détenue par le déclarant ou, le cas échéant, par la communauté, le droit réel exercé sur le bien par le déclarant ou, le cas échéant, par la communauté (pleine propriété, usufruit ou nue-propriété), le montant des travaux effectués, le cas échéant, depuis l’acquisition, la valeur vénale, à la date du fait générateur de la déclaration, de la quote-part du bien détenue par le déclarant ou, le cas échéant, par la communauté.
B. Les données présentes dans la déclaration d’intérêts
Suivant les recommandations de la Commissions Sauvé formulées en 2011, reprises par la Commission Jospin en 2012, les lois « Cahuzac » ont consacré dans le domaine de vie publique les dispositifs de déclaration obligatoire d’intérêts. Ainsi que le soulignent les travaux de la Commission Sauvé, ces dispositifs « ont surtout vocation à prévenir des situations de conflit d’intérêts ponctuelles et à imposer l’abstention en cas de risque d’un tel conflit. Ils assurent une certaine transparence d’intérêts qui, sans nécessairement justifier immédiatement une mesure contraignante (comme l’obligation de s’en défaire), imposent une certaine vigilance »[62]. La déclaration vise donc à identifier les intérêts qu’un responsable public détient en relation avec les fonctions exercées ou susceptibles de l’être, qui pourraient susciter un doute raisonnable sur son impartialité et son objectivité. De la même manière que pour les déclarations de situation patrimoniale, le législateur et le pouvoir réglementaire ont défini avec précision le contenu des déclarations d’intérêts et d’activités[63]. Plusieurs éléments sont communs à toutes les déclarations ; d’autres diffèrent selon le type de déclarants.
Les informations dont la déclaration est exigée pour tous les responsables publics sont au nombre de six. D’abord, doivent être mentionnées les activités professionnelles donnant lieu à rémunération ou gratification et les activités de consultant exercées à la date de l’élection ou de la nomination et au cours des cinq dernières années précédant la déclaration, la participation aux organes dirigeants d’un organisme public ou privé ou d’une société à la date de l’élection ou de la nomination et au cours des cinq années précédant la date de la déclaration. Pour chacune de ces trois entrées, le déclarant doit préciser l’identification de l’employeur, la description de l’activité exercée, sa période d’exercice et la rémunération ou la gratification perçue annuellement pour chaque activité. La déclaration doit également faire état des participations financières directes dans le capital d’une société à la date de l’élection ou de la nomination, en détaillant le nom de la société, le nombre de part détenues dans la société et, lorsqu’il est connu, le pourcentage du capital social détenu, l’évaluation de la participation financière, et la rémunération ou la gratification perçue pendant l’année précédant l’élection ou la nomination. En outre, les déclarants doivent mentionner, le cas échéant, les fonctions et mandats électifs exercés à la date de l’élection ou de la nomination, en présentant la nature des fonctions et des mandats exercés, la date de début et de fin de fonction ou de mandat et les rémunérations, indemnités ou gratifications perçues annuellement pour chaque fonction ou mandat. Enfin, obligation est faite aux déclarants, comme on l’a vu, d’indiquer les activités professionnelles exercées à la date de l’élection ou de la nomination par le conjoint, le partenaire lié par un pacte civil de solidarité ou le concubin. Sur ce dernier point, l’étendue des obligations est plus limitée : le déclarant précise l’identité de son conjoint, partenaire, ou concubin et de son employeur et indique l’activité professionnelle exercée mais non le montant de la rémunération ou la période d’exercice de l’activité.
Une septième information est présente dans certaines déclarations d’intérêts et selon une portée qui diffère : les fonctions bénévoles susceptibles de faire naître un conflit d’intérêts. L’exigence de préciser le nom et l’objet social de la structure dans laquelle ces fonctions sont exercée et la nature de ces activités vaut pour tous les responsables publics, à l’exception des fonctionnaires, agents publics contractuels et militaires exerçant les fonctions ou emplois visés par la loi du 20 avril 2016[64]. De plus, certains déclarants sont contraints de mentionner, non seulement leurs fonctions bénévoles susceptibles de faire naître un conflit d’intérêts, mais également celles de leur conjoint, partenaire, ou concubin. Cette exigence supplémentaire, absente des lois « Cahuzac », s’applique aux juges administratifs financiers, mais pas aux magistrats judiciaires[65].
Au sein des responsables publics, certains sont astreints à des obligations déclaratives supplémentaires. La déclaration d’intérêts des députés et sénateurs doit indiquer, comme on l’a vu, les noms de leurs collaborateurs et les autres activités professionnelles déclarées par ces derniers. En outre, la déclaration des parlementaires, ainsi que celles qui seront remplies par les candidats à la prochaine élection présidentielle, doivent mentionner les activités professionnelles ou d’intérêt général, même non rémunérées, que l’élu ou le candidat envisage de conserver durant l’exercice de son mandat[66]. Enfin, les lois du 15 septembre 2017 pour la confiance dans la vie politique ont ajouté une rubrique supplémentaire aux déclarations d’intérêts des parlementaires, applicables aux candidats à l’Élysée et aux députés européens[67]. Ces déclarants doivent mentionner les participations directes ou indirectes détenues à la date de leur entrée en fonction qui leur confèrent le contrôle d’une société dont l’activité consiste principalement dans la fourniture de prestations de conseil[68]. À côté de ces règles législatives, les textes internes aux chambres sont également sources d’obligations déontologiques pour les députés et les sénateurs. En effet, l’article 7 du code de déontologie de l’Assemblée nationale oblige les députés à déclarer au déontologue de la chambre « tout don, invitation à un événement sportif ou culturel ou avantage d’une valeur qu’ils estiment supérieure à 150 euros dont ils ont bénéficié en lien avec leur mandat » et « toute acceptation d’une invitation de voyage émanant d’une personne morale ou physique ». De son côté, l’article 20 bis de l’Instruction générale du Bureau du Sénat prévoient que les sénateurs déclarent « les invitations à des déplacements financées par des organismes extérieurs au Sénat [à l’exception de ceux effectués à l’invitation des autorités étatiques françaises ou dans le cadre d’un mandat local], ainsi que les cadeaux, dons et avantages en nature – à l’exception des invitations à des manifestations culturelles ou sportives en métropole et des cadeaux d’usage – qu’ils pourraient être amenés à recevoir, dès lors que la valeur de ces invitations, cadeaux, dons ou avantages excède un montant de 150 euros ».
III. Les destinataires des données personnelles
La transparence implique une mise à disposition d’informations à destination d’autrui, en d’autres termes un dévoilement. Le cercle des personnes destinataires des informations dévoilées peut être plus ou moins large. Schématiquement, on peut distinguer deux systèmes de transparence. Le premier met en place une transparence sans publicité, autrement dit une transparence qui préserve en grande partie la confidentialité des données transmises. Le destinataire de la transparence n’est pas le public mais une (ou plusieurs) autorité habilitée, chargée de contrôler les informations et, in fine, de veiller à la probité des décideurs publics. Ce système implique que l’autorité concernée maintienne la confidentialité pour que le public n’ait pas accès aux informations communiquées. Le second système embrasse pleinement la philosophie de Jeremy Bentham selon laquelle « l’œil du public rend l’homme d’État vertueux »[69]. Il instaure une transparence avec publicité des données dévoilées : la population est le destinataire des informations et chacun peut, s’il le souhaite, les consulter. En France, la transparence sans publicité a pendant longtemps été la règle et la transparence avec publicité l’exception. Les lois d’octobre 2013 ont cependant réalisé une avancée majeure dans ce domaine : le public devient – enfin – le destinataire d’informations dont la connaissance est supposée rétablir sa confiance dans ses représentants. Si le droit positif met donc en œuvre les deux types de transparence, le champ de la transparence sans publicité (A) demeure plus vaste que celui de la transparence avec publicité (B).
A. La transparence sans publicité
Aussi paradoxal que cela puisse paraître, la transparence peut exister sans publicité. En effet, le droit peut instaurer une obligation de dévoiler des informations sans pour autant permettre à toute personne d’y accéder. Dans ce cas, une autorité est habilitée pour recevoir ces informations, en contrôler le contenu et veiller au respect de leur confidentialité. Telle a été la particularité du droit français applicable aux responsables publics jusqu’en 2013. Depuis, si certaines déclarations sont rendues publiques, il existe encore des déclarations qui demeurent confidentielles et dont le contrôle impartit exclusivement aux gardiens de la déontologie publique.
Le droit français de la transparence de la vie publique est traditionnellement un droit protecteur de la confidentialité des données personnelles. En effet, les lois de mars 1988 ont mis en place un dispositif largement dominé par l’objectif de préserver la vie privée des déclarants. En premier lieu, une seule autorité était, en principe, habilitée à recevoir les déclarations et à en contrôler le contenu : le Bureau de la chambre à laquelle appartient le parlementaire déclarant[70] et la Commission instaurée par la loi pour les déclarations des membres du Gouvernement et des plus hautes autorités locales[71]. Toutefois, pour ces dernières, si le déclarant est aussi parlementaire, le Bureau de la chambre concernée était également destinataire de la déclaration[72]. En outre, les déclarations des candidats à l’élection présidentielle étaient déposées sous pli scellé auprès du seul Conseil constitutionnel qui ne pouvait ouvrir que celle du candidat finalement proclamé élu, en vue de sa publication[73]. En second lieu, les lois de 1988 s’opposent à la publicité des informations contenues dans les déclarations : l’autorité destinataire n’a le droit de les communiquer à autrui qu’avec l’autorisation expresse du déclarant ou de ses ayant droit ou bien sur demande des autorités judiciaires à la condition que cette communication soit nécessaire à la solution du litige ou utile pour la découverte de la vérité. Les lois de 1995 ont réformé partiellement ce système en consacrant le principe d’un gardien unique des déclarations de situation patrimoniale. La Commission pour la transparence financière de la vie politique est alors le destinataire exclusif de ces déclarations, y compris-celles des députés et sénateurs[74], à l’exception toutefois de celles des candidats à l’élection présidentielle. Les lois d’octobre 2013, en remplaçant la Commission par la HATVP[75], ont maintenu la règle selon laquelle toute déclaration de situation patrimoniale doit être transmise au nouveau gardien de la déontologie de la vie publique, en l’élargissant aux candidats à l’élection présidentielle. Elles font également de la Haute autorité le destinataire systématique, mais pas exclusif, des nouvelles déclarations d’intérêts. Si l’une des innovations majeures des lois « Cahuzac » consiste, comme on le verra, à mettre un terme au caractère secret de certaines informations contenues dans ces déclarations, un grand nombre de données personnelles demeure protégé par le droit au respect de la vie privée. À cet égard, le nouveau dispositif prévoit que la publication d’informations dont la diffusion n’est pas autorisée est passible des peines prévues à l’article 226-1 du code pénal, soit un an d’emprisonnement et 45 000 euros d’amende[76].
Depuis la loi du 20 avril 2016 relative à la déontologie et aux droits et obligations des fonctionnaires, la Haute autorité présidée par Jean-Louis Nadal n’est plus l’unique destinataire des déclarations qui demeurent confidentielles. Face à l’augmentation massive du nombre de décideurs publics soumis aux exigences de la transparence, le législateur n’a pas souhaité alourdir outre mesure la charge de travail de la Haute autorité[77]. Seules les déclarations de situation patrimoniale remplies par les fonctionnaires et agents contractuels, militaires, juges administratifs et financiers, magistrats judiciaires et membres du CSM sont communiquées à la Haute autorité qui veille au maintien de leur confidentialité[78]. Les déclarations d’intérêts ne lui sont pas transmises mais adressées à différentes autorités selon le type de déclarant. Par exemple, le fonctionnaire qui va être nommé dans l’un des emplois assujettis à l’obligation de déclaration d’intérêts doit préalablement transmettre sa déclaration à l’autorité investie du pouvoir de nomination, laquelle sera chargée, après la nomination, de transmettre ladite déclaration à l’autorité hiérarchique dont relèvera le fonctionnaire dans l’exercice de ses nouvelles fonctions[79]. Le magistrat d’un tribunal administratif ou d’une cour administrative d’appel remet une déclaration de ses intérêts au chef de la juridiction à laquelle il a été affecté et au vice-président du Conseil d’État ; le chef de l’une de ces juridictions transmet sa déclaration au président de la mission d’inspection des juridictions administratives et au vice-président du Conseil d’État[80]. La Haute autorité n’est pourtant pas totalement absente du dispositif de contrôle des déclarations d’intérêts. Les statuts de la fonction publique prévoient que l’autorité destinataire de la déclaration peut, en cas de difficulté pour apprécier si l’agent public déclarant est dans un cas de conflit d’intérêts, transmettre sa déclaration à la HATVP qui, après examen de l’affaire, adressera, le cas échéant, une recommandation en vue de faire cesser le conflit d’intérêts[81]. En tout état de cause, l’ensemble des déclarations dont le dépôt est rendu obligatoire par la loi du 20 avril 2016, ainsi que par la loi organique du 8 août 2016 pour les magistrats judiciaires et membres du CSM, doivent demeurer confidentielles. Les textes prévoient à cet égard que les déclarations de situation patrimoniale et d’intérêts ne sont ni versées au dossier de l’intéressé, ni communicables aux tiers. Sur ce point, leur régime est radicalement différent de celui prévu par les lois d’octobre 2013 pour certaines déclarations.
B. La transparence avec publicité
Pendant longtemps, la population a été tenue à l’écart de la transparence de la vie publique. À la différence de l’Allemagne et du Royaume-Uni, la publicité des déclarations des gouvernants était exclue[82], sauf pour une fonction publique. La loi organique de mars 1988 prévoyait la publication au Journal officiel de la République française de la déclaration de situation patrimoniale du candidat élu Président de la République et celle du Président à la fin de son mandat[83]. Les déclarations de patrimoine des autres responsables publics demeuraient confidentielles et les révélations de la presse d’investigation étaient la seule source d’information disponible pour la population. Les lois « Cahuzac » ont ébranlé le système français de la transparence-opaque en organisant la diffusion des déclarations de patrimoine et, dans une plus large mesure, des déclarations d’intérêts. Pour ce faire, deux mécanismes de publicité ont été mis en œuvre : la mise en ligne, sous la forme de données ouvertes, et la consultation en préfecture.
Une donnée ouverte (ou open data) est une information qui est librement accessible et réutilisable par tous. Si ce mode de publicité, indissociable de l’essor des nouvelles technologies de l’information et de la communication, est principalement utilisé pour faciliter la consultation d’informations administratives[84], il s’applique à certaines données personnelles des gouvernants depuis 2013. Concernant les déclarations de situation patrimoniale, les lois « Cahuzac » ont instauré une publication en ligne des informations déclarées par les membres du gouvernement, les membres de la HATVP et les candidats à l’élection présidentielle, sous quelques réserves destinées à protéger la vie privée des déclarants, de leur entourage familial ou d’autres personnes. Les déclarations des membres du gouvernement et de la Haute autorité sont mises en ligne par la HATVP dans un délai maximal de quatre mois environ à la suite de leur transmission[85]. Celles des candidats à la présidence de la République sont rendues publiques par la HATVP au moins quinze jours avant le premier tour de scrutin[86]. Dans les deux cas, la loi interdit que soient rendus publics les éléments suivants : l’adresse personnelle du déclarant, les noms du conjoint, du partenaire lié par un pacte civil de solidarité ou du concubin et des autres membres de la famille, les indications, autres que le nom du département, relatives à la localisation des biens, ainsi que les noms des personnes qui possédaient auparavant les biens mentionnés dans la déclaration et, le cas échéant, les noms des autres propriétaires indivis, les noms des usufruitiers, les noms des nus-propriétaires.
Le champ des déclarations d’intérêts mis en ligne sur le site www.hatvp.fr, qui accueille également le répertoire numérique sur les relations entre les représentants d’intérêts et les pouvoirs publics, est amplement plus vaste que celui des déclarations de patrimoine. En plus des membres du gouvernement et des candidats à l’élection présidentielle – la publication est alors réalisée dans les mêmes conditions que celles applicables aux déclarations de patrimoine – toutes les fonctions visées par l’article 11 de la loi du 11 octobre 2013 sont touchées. Les responsables politiques et les agents du secteur public, à l’exception de ceux relevant des régimes de déclarations obligatoires instaurés par la loi du 20 avril 2016, voient leur déclaration d’intérêts accessible en ligne. Ceci étant, certaines informations nominatives ne sont pas publiées par la HATVP pour préserver la vie privée des personnes concernées. Ainsi, il est interdit de divulguer l’adresse personnelle du déclarant, les noms du conjoint, du partenaire lié par un pacte civil de solidarité ou du concubin et des autres membres de la famille et, s’agissant des instruments financiers, les adresses des établissements financiers et les numéros des comptes. On notera, par ailleurs, que la diffusion en ligne des déclarations d’intérêts n’empêche pas leur transmission préalable à d’autres autorités que la HATVP. Par exemple, le bureau de la chambre est destinataire des déclarations d’intérêts des députés et sénateurs[87] et le Premier ministre est destinataire des déclarations d’intérêts des membres du Gouvernement[88].
La mise en ligne des déclarations des responsables publics constitue une avancée majeure pour la transparence démocratique qui, pourtant, ne s’applique pas intégralement aux premiers représentants de la Nation que sont les députés et les sénateurs. Dans le but de limiter la publicité de leurs déclarations de patrimoine par rapport à celles des ministres, les parlementaires ont opté pour une modalité de consultation qui paraît archaïque. Elles ne sont pas publiées sous la forme de données ouvertes mais tenues à la disposition des personnes inscrites sur les listes électorales qui peuvent les consulter en préfecture mais non les reproduire ou les réutiliser[89]. En revanche, les mêmes omissions d’informations nominatives sont faites que pour les déclarations de situation patrimoniale des membres du gouvernement. Bien que ce mode de publicité tronquée ait été critiqué, notamment, par l’organe anti-corruption du Conseil de l’Europe[90], le législateur français n’a pas souhaité le modifier. Malgré cette résistance des parlementaires, la diffusion en ligne des données des responsables publics paraît s’imposer dans l’avenir comme le mode de publicité privilégié pour satisfaire les objectifs de transparence, en particulier le rétablissement de la confiance de la population dans ses dirigeants. Le droit au respect de la vie privée des gouvernants se trouve désormais confronté à la montée en puissance d’un droit de savoir et d’un pouvoir d’influence des gouvernés qu’ils veulent exercer pleinement[91]. Plus de deux siècles après son inscription à l’article 15 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen, le droit de la société « de demander compte à tout agent public de son administration » semble enfin prendre vie.
[1] Archives parlementaires, vol. 64, séance du 14 mai 1793, p. 676.
[2] Bulletin des lois de la République française, vol. 6, n° 1132.
[3] Sur l’adoption du décret du 4 vendémiaire et sa mise en œuvre, v. P. Bourin, « Démocratie tronquée, Convention transparente. Les Deux Tiers au crible des déclarations individuelles d’état-civil et de patrimoine », Annales historiques de la Révolution française, 2015, n° 381, p. 155-187.
[4] Les dirigeants de la « Garantie foncière » avaient mis en place une escroquerie sur le modèle de la « pyramide de Ponzy » pour attirer plusieurs dizaines de milliers d’investisseurs. Sur cette affaire, v. J. Garrigues, Les scandales de la République. De Panama à l’affaire Cahuzac, Nouveau Monde éditions, 2013, coll. « Poche-Documents », p. 273 et s.
[5] La loi renforce également le régime des incompatibilités parlementaires. Sur ce point, v. F. Ancel, Les incompatibilités parlementaires sous la Vème République, PUF, coll. « Travaux et recherches de l’Université de droit, d’économie et de sciences sociales de Paris », série « Science politique », n° 4, 1975, p. 77 et s.
[6] Loi organique n° 72-64 du 24 janvier 1972 modifiant certaines dispositions du titre II de l’ordonnance n° 58-998 du 24 octobre 1958 portant loi organique relative aux conditions d’éligibilité et aux incompatibilités parlementaires.
[7] L’affaire « Luchaire », du nom de la société française accusée d’exportation illégale d’armes à destination de l’Iran entre 1983 et 1986 et soupçonnée de financement illégal du parti socialiste, éclate en 1987. Elle implique plusieurs personnalités politiques, dont le ministre de la Défense de l’époque, Charles Hernu. Sur cette affaire, v. J. Garrigues, op. cit., p. 387 et s.
[8] L’affaire « Carrefour du développement », du nom d’une association créée en 1983 à l’initiative du ministre délégué à la Coopération et au développement, Christian Nucci, éclate en juin 1986 lorsque son successeur, Michel Aurillac, diffuse un rapport de la Cour des comptes dévoilant que plusieurs millions de francs de fonds publics ont été détournés par les responsables de l’association. Sur cette affaire, v. J. Garrigues, op. cit., p. 395 et s.
[9] Loi organique n° 88-226 du 11 mars 1988 et loi n° 88-227 du 11 mars 1988 relatives à la transparence financière de la vie politique.
[10] Loi organique n° 95-63 du 19 janvier 1995 relative à la déclaration de patrimoine des membres du Parlement et aux incompatibilités applicables aux membres du Parlement et à ceux du Conseil constitutionnel ; loi n° 95-126 du 8 février 1995 relative à la déclaration de patrimoine des membres du Gouvernement et des titulaires de certaines fonctions.
[11] Parmi les scandales ayant éclaté en 1994 figurent l’affaire « Dauphiné News », du nom d’un journal grenoblois créé à l’initiative d’Alain Carignon, qui entraîne en juillet sa démission du gouvernement avant sa mise en examen pour recel d’abus de sociaux, et l’affaire des HLM de la Ville de Paris qui provoque la démission du ministre Michel Roussin en novembre à la suite de sa mise en examen pour recel d’abus de biens sociaux. Un autre ministre, Gérard Longuet, démissionne en octobre avant d’être mis en examen dans deux affaires, l’une relative au financement occulte du Parti républicain et l’autre concernant le financement de sa villa tropézienne. Sur ces affaires, v. J. Garrigues, op. cit., p. 476-478, p. 484-486, p. 456-459 ; J. Georgel, A.-M. Thorel, Dictionnaire des « affaires ». Argent et Politique, Éditions Apogée, 1997, p. 50-54, p. 134-146, p. 107-109 et 147-154.
[12] La Commission de réflexion sur la prévention des conflits d’intérêts dans la vie publique, présidée par Jean-Marc Sauvé, a présenté ses conclusions le 26 janvier 2011. La Commission de rénovation et de déontologie de la vie publique, présidée par Lionel Jospin, a remis son rapport le 9 novembre 2012.
[13] En décembre 2012, Jérôme Cahuzac, ministre délégué chargé du Budget, est accusé par le site d’information en ligne Mediapart d’avoir possédé des fonds non déclarés sur un compte en Suisse. Il démissionne le 19 mars 2013, après l’ouverture d’une information judiciaire contre X pour blanchiment de fraude fiscale, et finit par avouer les faits le 2 avril 2013. Sur cette affaire, J. Garrigues, op. cit., p. 554 et s.
[14] La « réserve parlementaire » est un ensemble de subventions d’État votées et modifiées en lois de finances initiales ou rectificatives permettant aux parlementaires de soutenir financièrement des investissements de proximité décidés par des collectivités locales et des activités menées par des associations.
[15] Loi organique n° 2013-906 et loi n° 2013-907 du 11 octobre 2013 relatives à la transparence de la vie publique.
[16] Loi organique n° 2017-1338 et loi n° 2017-1339 du 15 septembre 2017 pour la confiance dans la vie politique.
[17] La suppression de la « réserve parlementaire » met logiquement fin à sa publication.
[18] Par ex., à propos de l’obligation désormais faite aux candidats à l’élection présidentielle de déposer une déclaration d’intérêts (art. 1er, de la loi organique n° 2017-1338 préc.).
[19] Ainsi que le rappelle le Conseil constitutionnel (CC, n° 2013-675 DC, 9 octobre 2013, cons. 6 ; CC, n° 2013-676 DC, 9 octobre 2013, cons. 13 ; CC, n° 2016-732 DC, 28 juillet 2016, cons. 48).
[20] Le droit au respect de la vie privée est garanti par l’article 2 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789, tel qu’interprété par le Conseil constitutionnel (CC, n° 99-416 DC, 23 juillet 1999, cons. 45), et l’article 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales.
[21] Art. LO 135-1 du code électoral.
[22] Les obligations déclaratives imposées aux députés par le code électoral s’appliquent aux sénateurs en vertu de l’article LO 296 du même code.
[23] Art. 11, § I, 1° de la loi n° 2013-907 préc.
[24] Art. 4 de la loi n° 2013-907 préc.
[25] Art. 3, § I, de la loi n° 62-1292 du 6 novembre 1962 relative à l’élection du Président de la République au suffrage universel.
[26] Art. 11, § I, 4° et 5° de la loi n° 2013-907 préc.
[27] Art. 11, § I, 2° de la loi n° 2013-907 préc. Les autres fonctions visées sont celles de président de l’Assemblée de Corse, de président du conseil exécutif de Corse, de président de l’assemblée de Guyane, de président de l’assemblée de Martinique, de président du conseil exécutif de Martinique, de président du conseil de la métropole de Lyon, de président élu d’un établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre dont la population excède 20 000 habitants ou dont le montant des recettes totales de fonctionnement figurant au dernier compte administratif est supérieur à 5 millions d’euros ainsi que les présidents des autres établissements publics de coopération intercommunale dont le montant des recettes totales de fonctionnement figurant au dernier compte administratif est supérieur à 5 millions d’euros.
[28] Art. 11, § I, 2° de la loi n° 2013-907 préc., dans sa version issue de la loi n° 2016-483 du 20 avril 2016 relative à la déontologie et aux droits et obligations des fonctionnaires.
[29] Art. 11, § I, 3° de la loi n° 2013-907 préc. Les vice-présidents concernés sont ceux des établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre de plus de 100 000 habitants et du conseil de la métropole de Lyon lorsqu’ils sont titulaires d’une délégation de fonction ou de signature, respectivement, du président du conseil régional, du président du conseil exécutif, du président du conseil départemental, du maire, du président de l’établissement public de coopération intercommunale ou du président du conseil de la métropole de Lyon.
[30] La listes des agences, qui comprend notamment la HATVP est fixée à l’art. 11, § I, 6° de la loi n° 2013-907 préc. On peut y ajouter certains médiateurs visés par l’art. 11, § I, 6° bis de la loi n° 2013-907 préc.
[31] Art. 11, § I, 5° bis de la loi n° 2013-907 préc. À la différence du Déontologue de l’Assemblée nationale qui n’est pas un député, les membres du Comité de déontologie parlementaire du Sénat sont déjà soumis aux obligations déclaratives en leur qualité de sénateur.
[32] Sont concernés les présidents et directeurs généraux des sociétés et autres personnes morales dans lesquelles plus de la moitié du capital social est détenue directement par l’État, des établissements publics nationaux à caractère industriel et commercial, des sociétés et autres personnes morales dans lesquelles plus de la moitié du capital social est détenue, directement ou indirectement, séparément ou ensemble, par sociétés d’économie mixte nationales ou des établissements publics nationaux à caractère industriel et commercial, et dont le chiffre d’affaires annuel, au titre du dernier exercice clos avant la date de nomination des intéressés, est supérieur à 10 millions d’euros, des offices publics de l’habitat gérant un parc comprenant plus de 2 000 logements au 31 décembre de l’année précédant celle de la nomination des intéressés, des autres sociétés et personnes morales dont le chiffre d’affaires annuel, au titre du dernier exercice clos avant la date de nomination des intéressés, dépasse 750 000 €, dans lesquelles les collectivités régies par les titres XII et XIII de la Constitution, leurs groupements, leurs établissements publics industriels et commerciaux, leurs sociétés d’économie mixte possèdent, directement ou indirectement, plus de la moitié du capital social ou sont mentionnés au 1° de l’article L. 1525-1 du code général des collectivités territoriales (art. 11, § III de la loi n° 2013-907 préc.).
[33] Art. 11, § III bis de la loi n° 2013-907 préc.
[34] Art. 11, § I, 7° de la loi n° 2013-907 préc.
[35] Loi n° 2016-483 préc.
[36] Le Mediator est un médicament, mis au point et commercialisé par les Laboratoires Servier en 1976, qui se compose d’une molécule, le benfluroex, laquelle peut être à l’origine de graves troubles cardiaques. En dépit de plusieurs mises en garde, son autorisation de mise sur le marché ne sera suspendue que le 25 novembre 2009 par l’Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé, puis retirée le 20 juillet 2010. Un rapport de l’Inspection Générale des Affaires Sociales dénoncera plus tard le comportement des laboratoires Servier « qui, pendant 35 ans, sont intervenus sans relâche auprès des acteurs de la chaîne du médicament pour pouvoir poursuivre la commercialisation du Mediator », ainsi que « l’incompréhensible tolérance de l’Agence à l’égard du Mediator » et « les graves défaillances du système de pharmacovigilance » (IGAS, 15 janvier 2011, « Enquête sur le Mediator », n° RM2011-001P). S’inspirant du Physician Sunshine Act voté en 2010 aux États-Unis, la loi n° 2011-2012 du 29 décembre 2011 relative au renforcement de la sécurité sanitaire du médicament et des produits de santé oblige les professionnels de santé et décideurs publics à déclarer leurs liens d’intérêt et elle contraint à divulguer les avantages consentis par les entreprises du secteur à tous les professionnels de santé, ainsi qu’à leurs associations, fondations, sociétés, etc.
[37] Art. 25 ter et 25 quinquies de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires ; art. L. 4122-6 et L. 4122-8 du code de la défense ; art. 6 de la loi n° 2016-483 préc.
[38] Décret n° 2016-1967 du 28 décembre 2016 relatif à l’obligation de transmission d’une déclaration d’intérêts prévue à l’article 25 ter de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires et décret n° 2016-1968 du 28 décembre 2016 relatif à l’obligation de transmission d’une déclaration de situation patrimoniale prévue à l’article 25 quinquies de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires.
[39] Décret n° 2018-63 du 2 février 2018 relatif aux obligations de transmission de déclarations d’intérêts et de situation patrimoniale prévues aux articles L. 4122-6 et L. 4122-8 du code de la défense. Initialement, les décrets n° 2017-38 du 16 janvier 2017 et n° 2017-39 du 16 janvier 2017 se bornaient à renvoyer aux listes établies par les décrets du 28 décembre 2016 préc.
[40] Art. L. 131-7 du code de justice administrative.
[41] Art. L. 231-4-1 du code de justice administrative.
[42] Art. L. 120-9 du code des juridictions financières.
[43] Art. L. 220-6 du code des juridictions financières.
[44] Art. L. 131-10 du code de justice administrative ; art. L. 120-12 du code des juridictions financières.
[45] CC, n° 2016-732 DC, 28 juillet 2016, cons. 45 et s.
[46] Le Conseil a également censuré la disposition visant à contraindre ses membres à déclarer leur situation patrimoniale et leurs intérêts au motif que l’amendement parlementaire à son origine était un « cavalier organique », c’est-à-dire une disposition ne présentent pas de lien, même indirect, avec celles qui figuraient dans le projet de loi organique (ibid., cons. 101). Sur ce point, v. J. Benetti, « Continuité jurisprudentielle ou (nouveau) revirement ? À propos de la censure de cavaliers organiques par la décision du Conseil constitutionnel du 28 juillet 2016 », Constitutions, 2016, p. 396 et s.
[47] Art. 7-2 et 7-3 de l’ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature et art. 10-1-1 et 10-1-2 de la loi organique n° 94-100 du 5 février 1994 sur le Conseil supérieur de la magistrature, créés par la loi organique n° 2016-1090 du 8 août 2016 relative aux garanties statutaires, aux obligations déontologiques et au recrutement des magistrats ainsi qu’au Conseil supérieur de la magistrature.
[48] Art. 18-2 de la loi n° 2013-907 préc., dans sa rédaction issue de la loi n° 2016-1691 du 9 décembre 2016 relative à la transparence, à la lutte contre la corruption et à la modernisation de la vie économique.
[49] Art. 18-3 de la loi n° 2013-907 préc.
[50] Le répertoire est consultable à l’adresse suivante : http://www.hatvp.fr/le-repertoire. Au 8 février 2018, 958 représentants d’intérêts se sont inscrits.
[51] Sur ces pratiques, v. P. Jan, « Le droit parlementaire à l’épreuve du lobbying », Petites Aff., 11 avril 2013, n° 73, p. 4 et s.
[52] J.-L. Nadal, Renouer la confiance publique, rapport au Président de la République sur l’exemplarité des responsables publics, 2015 p. 68 et s.
[53] Art. LO 135-1, § III 10°, du code électoral.
[54] Art. LO 135-1, § III 6°, du code électoral ; art. 4, § III, 6°, et art. 11, §I, de la loi n° 2013-907 préc. ; annexe 3, 6°, du décret n° 2013-1212 du 23 décembre 2013 relatif aux déclarations de situation patrimoniale et déclarations d’intérêts adressées à la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique ; art. 7, 6° du décret n° 2016-1967 préc. ; art. R. 131-4, 6° et R. 231-4, 6° du code de justice administrative ; art. R. 120-1 et R. 220-1 du code des juridictions financières ; art. 3 du décret n° 93-21 du 7 janvier 1993 pris pour l’application de l’ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 modifiée portant loi organique relative au statut de la magistrature ; art. R. 4122-37, 6° du code de la défense.
[55] CC, n° 2013-675 DC préc., cons. 29 et 41 ; n° 2013-676 DC préc., cons. 15.
[56] Art. 4, § II, de la loi n° 2013-907 préc.
[57] Les candidats à l’élection présidentielle n’ayant pas remporté l’élection doivent seulement déposer la déclaration initiale.
[58] Art. 1er de la loi organique n° 95-63 préc. ; art. 1er de la loi n° 95-126 préc.
[59] Avant 2013, la Commission pour la transparence financière de la vie politique avait élaboré un modèle de déclaration de patrimoine qui détaillait son contenu mais il n’avait pas valeur contraignante. Le modèle en question, ainsi que les rapports de la Commission, sont consultables sur www.legifrance.gouv.fr.
[60] Art. 4, § II, de la loi n° 2013-907 préc. ; art. LO 135-1, § II, du code électoral.
[61] Annexes 1 et 2 du décret n° 2013-1212 du 23 décembre 2013 préc. Le décret étend aux « autres biens » visés par les lois de 2013 le seuil de dix mille euros en dessous duquel la déclaration n’est pas obligatoire. En outre, il donne un exemple de biens concernés : les comptes courants de société ou les stock-options.
[62] Pour une nouvelle déontologie de la vie publique, rapport de la Commission de réflexion pour la prévention des conflits d’intérêts dans la vie publique, remis au Président de la République le 26 janvier 2011, p. 55.
[63] Art. 4, § III, de la loi n° 2013-907 préc. ; art. LO 135-1, § III, du code électoral ; annexes 3 et 4 du décret n° 2013-1212 préc.
[64] Le décret n° 2016-1967 préc. et le décret n° 2018-63 préc., portant application de la loi d’avril 2016, ne comportent pas cette obligation déclarative.
[65] Art. R. 120-1 et R. 220-1 du code des juridictions financières (dans leur rédaction issue du décret n° 2016-1921 du 28 décembre 2016 relatif à l’obligation de transmission de la déclaration d’intérêts mentionnée aux articles L. 120-9 et L. 220-6 du code des juridictions financières ; art. R. 131-4 et R. 231-4 du code de justice administrative (dans leur rédaction issue du décret n° 2017-12 du 5 janvier 2017 relatif à l’obligation de transmission de la déclaration d’intérêts mentionnée aux articles L. 131-7 et L. 231-4-1 du code de justice administrative).
[66] Art. LO 135-1, § III, 11° du code électoral.
[67] Les représentants français au Parlement européen sont également soumis aux règles déontologiques prévues par le droit parlementaire européen.
[68] Art. LO 135-1, § III, 5° du code électoral (dans sa rédaction issue de l’art. 6 de la loi n° 2017-1338 du 15 septembre 2017).
[69] J. Bentham, The Works of Jeremy Bentham, édité par J. Bowring, William Tait, vol. XIX, 1842, p. 145 (“the eye of the public makes the statesman virtuous”).
[70] Art. 5 de la loi organique n° 88-226 préc. Le bureau est la plus haute autorité collégiale de la chambre ; il se compose de son président et de ses vice-présidents, ainsi que de ses questeurs et secrétaires (soit 22 membres pour l’Assemblée nationale et 26 pour le Sénat).
[71] Art. 1er et 2 de la loi n° 88-227 préc. La commission se composait du vice-président du Conseil d’État et des premiers présidents de la Cour des comptes et de la Cour de cassation.
[72] Art. 2 de la loi n° 88-227 préc.
[73] Art. 1er de la loi organique n° 88-226 préc. V. infra.
[74] Art. 1er de la loi organique n° 95-63 préc.
[75] La HATVP est une autorité administrative indépendante, dont le président est nommé par décret du président de la République et qui comprend, en outre, 2 conseillers d’État élus par l’assemblée générale du Conseil d’État, 2 conseillers à la Cour de cassation élus par l’ensemble des magistrats du siège hors hiérarchie de la cour, 2 conseillers-maîtres à la Cour des comptes élus par la chambre du conseil ; 2 personnalités qualifiées nommée, l’une par le président de l’Assemblée nationale, l’autre par le Président du Sénat, après avis conforme de la commission des lois de la chambre concernée.
[76] Art. 26 de la loi n° 2013-907 préc.
[77] À ce jour, plus de 15 000 responsables publics déclarent leur patrimoine et leurs intérêts auprès de la HATVP.
[78] Art. 25 quinquies de la loi n° 83-634 préc. ; art. 6, 14, § III et IV, 19, § III et IV, de la loi n° 2016-483 préc. ; art. L. 131-10 et L. 231-4-4 du code de justice administrative ; art. L. 120-12 et L. 220-9 du code des juridictions financières ; art. L. 4122-8 du code de la défense ; art. 7-3 de l’ordonnance n° 58-1270 préc.
[79] Art. 25 ter, § I, de la loi n° 83-634 préc.
[80] Art. L. 231-4-1 du code de justice administrative.
[81] Art. 25 ter, § II et III, de la loi n° 83-634 préc.
[82] À propos des déclarations obligatoires des députés, v. C. de Nantois, Le député : une étude comparative, France, Royaume-Uni, Allemagne, LGDJ – Lextenso éditions, coll. « Bibliothèque constitutionnelle et de science politique », 2010, t. 136, p. 150 et s.
[83] Art. 1er de la loi organique n° 88-226 préc.
[84] La plateforme ouverte des données publiques françaises est accessible à l’adresse https://www.data.gouv.fr/fr.
[85] Art. 5, § I, et 19, § IV, de la loi n° 2013-907 préc. Plus précisément, la HATVP transmet la déclaration à l’administration fiscale qui fournit en retour, dans les 30 jours suivant cette transmission, tous les éléments lui permettant d’apprécier l’exhaustivité, l’exactitude et la sincérité de la déclaration de situation patrimoniale. Puis, la HATVP rend publiques la déclaration dans un délai de 3 mois suivant la réception des éléments.
[86] Art. 3, § I, de la loi n° 92-1292 préc.
[87] Art. LO 135-1, § I, du code électoral.
[88] Art. 4, § I, al. 2, de la loi n° 2013-907 préc.
[89] Art. 135-2, § I, du code électoral.
[90] Le rapport d’évaluation de la France par le Groupe d’États contre la corruption du Conseil de l’Europe (GRECO) sur le thème « Prévention de la corruption des parlementaires, juges et procureurs », adopté en mars 2016, est accessible à l’adresse : https://rm.coe.int/16806c5dfc.
[91] B. Nabli, « Fondements de la « moralisation-juridicisation » de la vie politique », Pouvoirs, n° 154, 2015, p. 151-161, p. 160.
Notes:
- Ce texte fait partie des actes du colloque sur Le droit des données personnelles, organisé par Emmanuel Netter à Amiens les 7 et 8 novembre 2016, qui seront publiés prochainement aux éditions du CEPRISCA (www.ceprisca.fr). L’auteur remercie E. Netter et le CEPRISCA d’avoir accepté une publication anticipée de ce texte. ↩
Cet article est intéressant et m’a beaucoup aidé dans la rédaction de mon mémoire. En tout merci l’auteur