Le juge français et la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne : le cas du juge administratif
Christophe Roux est Professeur de droit public, Directeur de l’EDPL (EA 666) – Université Jean Moulin – Lyon 3
Si le chercheur est souvent découragé par le « trop » de littérature sur un sujet donné – lequel semble ruiner avant l’heure toute forme d’originalité (« tout est dit et l’on vient trop tard »[1]) –, il demeure assez pénible d’arpenter des champs qui, pour ainsi dire, n’ont jamais été véritablement défrichés par le passé[2]. Pour preuve, voilà un an, Serge Slama et Mayeul Kauffman faisaient déjà ce constat quant au sujet que les organisateurs de la présente manifestation (que l’on remercie tout de même !) ont bien voulu nous confier. Ces derniers, en effet, ne pointaient qu’une étude sur la thématique[3], une conférence donnée par Bernard Stirn en 2019, lequel constatait schématiquement l’impact plus que limité de la Charte sur le contentieux administratif. Aux termes de leur propre étude juridico-statistique menée auprès des juridictions du fond de la Région Auvergne-Rhône-Alpes entre 2009 et 2019[4], nos collègues tiraient de leurs côtés l’implacable constat suivant : si la Charte est, au moins depuis 2013, de plus en plus fréquemment invoquée dans les prétoires administratifs, en particulier dans le contentieux des étrangers, il n’en ressortait pas moins que la Charte n’avait jamais eu (selon leurs conclusions dressées à l’issue de la lecture de 1 729 jugements et arrêts) une quelconque influence réelle sur l’issue du litige.
L’on admettra qu’il y a plus engageant pour entamer une recherche et, de fait, les constats livrés ici seront au diapason de ceux dressés antérieurement par mes prédécesseurs, le « fabuleux destin »[5] prêté à la Charte peinant à connaître de réelles efflorescences devant le juge administratif, confirmant que celle-ci possède trop régulièrement, peut-être, les atours d’une « auberge espagnole contentieuse »[6] : de fait, on y sert souvent de la mauvaise soupe juridique, les rares ivresses contentieuses peinant par ailleurs à masquer les innombrables échecs, les amours entre la Charte et le juge administratif restant donc, à ce stade, bien contrariées. Faute de de travaux de première ou de seconde main, c’est (comme la plupart des intervenants du présent colloque) naturellement que l’on s’est réfugié dans la recherche fondamentale, en dépouillant systématiquement les occurrences glanées sur Légifrance. L’on précisera que la recherche a été effectuée à partir des mots-clés suivants : « Charte des droits fondamentaux » ; l’on s’en est par ailleurs tenu, temporellement, à la période allant du 1er janvier 2020 au 30 mai 2022 (soit deux ans et demi) et surtout, matériellement, aux seules décisions du Conseil d’État ce qui, inévitablement, présente un biais méthodologique (il nous a paru toutefois compléter utilement l’analyse de nos collègues, concentrée sur les juridictions du fond). C’est ainsi 198 occurrences que nous avons pu éplucher, l’échantillon apparaissant suffisamment dense et représentatif pour livrer un regard suffisamment précis et fidèle de l’instrumentalisation de la Charte devant le juge administratif.
Comme les propos suivants se chargeront de l’étayer, le dépouillement vient globalement conforter les lignes forces esquissées jusqu’alors par la doctrine. S’il a pu être écrit que grâce à la Charte, l’Union était passée d’un « fond de placements commun » à un « fonds commun de valeurs »[7], le bénéfice tiré de l’invocabilité de la Charte semble encore et toujours confiner au jeu à somme nulle devant le juge administratif, lequel montrerait – sans doute à mesure de l’intérêt que lui portent les requérants – une indifférence assez généralisée à son égard, son usage se révélant neutre et platonique (I). Il reste que, en s’armant d’une sérieuse dose d’optimisme et en tentant de se saisir du verre à moitié plein, il apparaît possible de démontrer la plus-value diffuse et, peut-être, en devenir de la Charte, quelques « success stories » – pour reprendre le mot de Jeremie Van Merbeek[8] – pouvant même être relevées. La tonalité se voudra donc, dans un second temps, raisonnablement mais résolument positive, surtout si l’on accepte de ne pas sacrifier à une vision strictement contentieuse de la question. Ainsi, en tentant de débusquer les effets ricochets ou diffus impulsés par la Charte, celle-ci paraît susceptible, par capillarité, d’enrichir le contrôle du juge administratif autant que son dialogue fécond avec la Cour de Justice de l’Union européenne (II)
I- Une instrumentalisation neutre et platonique
Les mêmes causes produisant les mêmes effets (devant d’autres juridictions internes), les premières comme les seconds se retrouvent – logiquement – devant le juge administratif, l’instrumentalisation de la Charte se révélant platonique à plusieurs enseignes.
Une invocation discrète. En premier lieu, et quoique le décompte soit approximatif, parmi les 198 décisions décortiquées, c’est une bonne moitié d’entre elles qui se contente de mentionner la Charte dans les visas sans, par la suite, puiser à sa source dans le corps du dispositif, signe d’une mention généralement formelle quand elle n’est pas purement rhétorique, la présence dans les visas laissant entendre que les moyens soulevés par les requérants ont été, au moins implicitement, examinés[9]. Lorsque la référence est reprise dans le corps de l’arrêt, celle-ci est généralement de faible ampleur et, presque systématiquement nous y reviendrons, l’invocation de la charte ne constitue pas le nœud gordien de l’affaire. Très régulièrement, le moyen est écarté sans ambages par la haute juridiction administrative, faute d’avoir été suffisamment étayé par le requérant. Selon les formules consacrées, lorsque ce dernier « se borne, par des allégations très générales et non développées » à invoquer la charte, que le moyen « n’est pas assorti des précisions qui permettraient d’en apprécier le bien-fondé » ou, encore, qu’il ne présente « aucun élément de nature à établir » sa pertinence au regard de sa propre situation, le juge l’écartera aux termes d’une motivation que l’on qualifiera de liquidative[10]. En bref, si certains auteurs ont appelé à ce que la Charte soit « prise au sérieux » par le juge administratif[11], il n’est pas certain que les parties l’encouragent dans cette démarche en faisant montre de la même vertu.
Une invocabilité restreinte. En second lieu, le contentieux administratif souffre, comme les autres, du champ d’application restreint de la Charte puisque, inutile de répéter l’antienne[12], celle-ci n’a vocation à s’appliquer que lorsque le litige se rattache à la mise en œuvre du droit de l’Union européenne ou lorsqu’un acte de l’Union permet aux États membres de déroger à cette mise en œuvre[13], comme l’a admis le juge administratif par l’arrêt Halifa[14]. Même si le Conseil d’État sait se montrer bienveillant en la matière[15], et sans qu’il soit nécessaire de s’y attarder longuement, une petite légion de décisions viennent de ce seul fait écarter l’applicabilité même de la Charte au litige[16]. On ne s’en étonnera guère, par exemple, en matière fiscale[17], ce domaine de souveraineté faisant seulement l’objet d’une simple compétence d’harmonisation au niveau de l’Union[18] (ceci confirmant combien l’application de la Charte reste tributaire du principe d’attribution des compétences européennes[19]). On retrouve encore, au sein de la période sous revue, de telles mises à l’écart s’agissant de l’article 31 CEDF relatif au « droit à congés payés de travailleurs » ou de l’article 27 CEDF (relatif à l’information des travailleurs), la base légale contestée n’étant pas considérée comme assurant la mise en œuvre du droit de l’Union[20]. Dans le même ordre d’idée, l’applicabilité des dispositions de la Charte est parfois écartée sommairement, comme si certaines d’entre elles étaient dépourvues de normativité : sans entrer de plain-pied dans la distinction entre « droits » et « principes » contenus dans la Charte[21], c’est ainsi que le bénéfice de l’article 35 CEDF relatif au « droit à la santé » a été rejeté, celui-ci ne créant aucune « obligation positive » de mise en place de registres consignant les malformations génitales, ces derniers étant ici réclamés pour prouver l’effet néfaste des pesticides sur la santé[22].
Une invocation supplétive ou surabondante. En troisième lieu, et en supposant donc que les deux premiers écueils aient été bravés, il est extrêmement rare pour ne pas dire inexistant que les dispositions de la Charte soient invoquées ut singuli et de manière autonome. En bref, la Charte ne constitue ni le point de droit central de l’affaire ni, a fortiori, son deus ex machina ; l’immense majorité du temps, la source n’est qu’un affluent d’un fleuve de dispositions aux confins bien plus larges. Ainsi, la Charte est parfois mobilisée de concert avec d’autres dispositions issues du droit primaire de l’Union ou, encore et plus régulièrement, avec des sources issues du droit dérivé, lesquelles font l’objet de la plus grande part d’attention par le juge administratif. Ce constat somme toute classique – dès lors qu’on le retrouve au sujet des autres juridictions nationales – appelle trois observations complémentaires. D’abord, c’est rationnellement que le juge administratif accorde sa préférence pour le contrôle au regard des normes de droit dérivé. Au-delà – certainement – de l’habitude qui est la sienne depuis l’avènement du contrôle de conventionalité des lois, elles disposent de la même primauté que les celles issues de la Charte ; leur effet direct (certes en théorie à géométrie variable en fonction de leur nature même – règlement ou directive – et de leur qualité propre – caractère inconditionnel et précis des directives) n’est, en tout état de cause, pas moindre que celui accordé à la Charte dont certaines dispositions n’ont en effet qu’une valeur principielle dont l’effet direct semble pour le moins incertain au regard de la jurisprudence administrative la plus classique[23]. Mieux vaut, dès lors, certainement se réfugier vers d’autres dispositifs, dont le caractère « relatif et contingent »[24] prête moins à discussion. Par nature enfin, ces actes sont dotés d’une précision plus intense et c’est dès lors logiquement que le contrôle de conventionnalité s’y amarre, d’autant plus que, dans ce cadre, le juge administratif se plait régulièrement à reprendre la jurisprudence de la Cour de justice sur ces dispositions, telles qu’interprétées à la lumière de la Charte, cette dernière étant in fine diluée au stade du contrôle juridictionnel. C’est ce qu’illustre de manière topique, par exemple, les décisions « La Quadrature du net » et « French Data network » où le Conseil d’État vient reprendre mots pour mots l’appréciation de la Cour[25]. Ensuite, sauf à envisager – l’on y reviendra – une éventuelle question préjudicielle à la Cour pour connaître de la compatibilité des actes de droit dérivé par rapport aux dispositions de la Charte, cette dernière n’a jamais pour effet d’étirer les notions issues des premiers et, ce faisant, pour finalité d’étendre soit organiquement le champ des bénéficiaires des libertés et droits fondamentaux soit, matériellement, le périmètre de la protection conférée. Un bon exemple réside dans la décision du 30 novembre 2020[26] où il était contesté, schématiquement, le fait que les détenus-travailleurs ne disposent pas des droits à congés hebdomadaires, annuels ou « payés », protégés respectivement par la directive 2003/88/CE et l’article 31 CEDF. S’abritant sous la jurisprudence de la Cour[27] – sans totalement convaincre du reste –, le Conseil d’État est venu ici écarter le bénéfice du droit protégé, ce dernier n’ayant ni pour objet ni pour effet de tordre la notion de « travailleur », telle qu’elle est entendue dans le cadre du droit dérivé. En conséquence, les détenus ne pouvaient être assimilés à cette catégorie et prétendre, par ricochet, aux droits afférents (invoqués). On relèvera que l’appréciation n’est pas propre au juge administratif ; elle relèverait plutôt du mimétisme, lors même que la Cour de justice développe exactement la même démarche lorsqu’elle est saisie[28]. Pour finir, au sein même du droit primaire c’est-à-dire lorsque le droit des traités et les dispositions de la Charte sont invoqués de concert, la tendance à examiner le moyen prioritairement au regard des premiers est patente. On pourrait certes le déplorer ; mais force est d’admettre qu’un certain nombre de droits consacrés par la Charte ne sont que la reprise de ceux déjà inscrits dans les traités. Au demeurant, sur cet aspect, ce serait sans doute intenter un mauvais procès au juge administratif : dans cette conjecture, il a pu être efficacement démontré que la Cour de justice de l’Union européenne faisait montre des mêmes travers, en diluant par exemple presque totalement les droits économiques contenus au sein de la Charte dans les règles (de droit primaire) relatives aux libertés de circulation du marché intérieur[29].
… et subsidiaire. En quatrième et dernier lieu, la Charte est, on le sait, souvent invoquée simultanément avec des dispositions de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme (Conv. EDH) ou, encore, des dispositions constitutionnelles. Or à supposer que le(s) moyen(s) prospère(nt), il est dans cette hypothèse très délicat de déterminer le poids qu’a pu jouer la Charte dans la solution finale, surtout quand le juge navigue, au gré et sans cap apparent, d’une source à l’autre sans faire preuve de la moindre constance[30]. Au sein du cocktail normatif, sa saveur a-t-elle été dominante ? « P’t’être ben que oui, p’t’être ben que non » pour s’entourer d’une réponse de normand ; au fond du trou, la motivation du Palais-Royal se révèle en tout état de cause d’une aide bien relative pour le discerner… Avec un peu de mauvais esprit et en préférant regarder le verre à moitié vide[31], l’on aurait tout de même tendance à se ranger en faveur de la seconde branche de l’alternative, la complémentarité des instrumentum, parfois plébiscitée, laissant place à une concurrence de mauvais aloi, celle-ci semblant faussée au profit de l’instrument conventionnel[32]. Outre que, sémantiquement et chronologiquement, la référence à la Charte est presque systématiquement secondaire (ce qui n’est pas anodin, selon nous), il n’est pas rare que le juge administratif mentionne les articles 52 et 53 de la Charte relatifs à l’équivalence des protections et au « standard le plus élevé » pour s’en remettre aux dispositions conventionnelles ou constitutionnelles, dont l’avantage concurrentiel semble difficile à faire vaciller[33]. Pour s’en tenir à un seul exemple sur la période, si la Charte a été fréquemment invoquée pour contester les mesures de vaccination obligatoire (ou prétendument assimilées comme telles) lors de la crise sanitaire, c’est au regard de l’article 8 Conv. EDH (ou de la Convention d’Oviedo[34]) que le juge administratif s’est alors nettement positionné, l’article 7 de la Charte ayant un caractère supplétif, pour ne pas dire surabondant[35]. On ajoutera, en outre, la (mauvaise) tendance du juge administratif à pratiquer « l’économie de moyens »[36] en venant jouer à l’encontre des dispositions de la Charte, celles-ci faisant souvent partie de la charrette des premiers condamnés ; là encore, il ne faudrait pas s’en étonner outre mesure, la Cour de justice de l’Union européenne n’étant pas plus dispendieuse[37].
En définitive, ces éléments suffiraient à convaincre, probablement, de l’inanité que représente l’invocation de la Charte au sein du contentieux administratif. Toutefois, il convient de relativiser ce premier constat, les bénéfices de la Charte apparaissant certes diffus mais parfois bien réels.
II- Des bénéfices diffus et (peut-être) en devenir…
Un spectre d’invocabilité étendu. Le premier aspect à mettre en avant réside dans l’élargissement du spectre des dispositions de la Charte invoquées. Certes, si l’on s’en tient à l’étude précitée menée par Serge Slama et Mayeul Kauffman[38], le bastion d’invocabilité reste le droit des étrangers. Si l’on s’en tient aux chiffres de cette étude, 95 % des références à la Charte avaient ce contentieux pour terre d’élection, chiffre à ramener cependant avec la part même qu’il représente au sein des juridictions du fond (41,7 % auprès des TA ; 53,6 % devant les CAA)[39]. Devant le Conseil d’État (et logiquement puisque, pour s’en tenir à ce seul cas, le contentieux des étrangers n’y représente plus que 15,9 %[40]), une autre lecture se dévoile : certes, les articles 4 (traitements inhumains et dégradants) 7 (respect de la vie privée) 8 (protection des données à caractère personnel) et 41 (droit à la bonne administration) continuent de former le gros bataillon des articles invocables. Mais au-delà, et sans prétendre à l’exhaustivité, les occurrences dépouillées démontrent la plus grande diversité des fondements mobilisés ; ainsi, les articles 1er, 2, 3, 17, 20, 21, 26, 27, 31, 35, 37, 38, 39, 47, 48, 49 et 54 ont également été invoqués dans la période sous revue, preuve peut-être d’un « réflexe – Charte » plus intense et de la recherche accrue de ses potentialités. Il faut néanmoins tempérer le propos. Régulièrement, le juge administratif convoque à leur égard l’article 52 § 1 CEDF en faisant, en quelque sorte, une instrumentalisation à front renversée de la Charte. Selon cette disposition, les droits contenus dans la Charte ne possèdent aucun caractère absolu ; comme tels, ils peuvent donc être affectés de limitations, pour peu qu’elles soient guidées par des objectifs légitimes et sous réserve de nécessité et de proportionnalité. Ce faisant, le Conseil d’État ne se prive guère de le rappeler, la Charte ayant alors paradoxalement une fonction légitimatrice quant aux restrictions susceptibles d’être apportées aux libertés et droits fondamentaux[41].
Quelques réussites contentieuses. Le second aspect (plus) positif réside dans le fait que, parfois, le moyen tiré de la méconnaissance même de la Charte fonctionne. En 2019, Bernard Stirn faisait état d’une seule jurisprudence en ce sens, un jugement du tribunal administratif de Paris de 2017 reconnaissant, dans une affaire relative au gel des avoirs irakiens, la méconnaissance combinée des articles 17 et 47 de la Charte protégeant respectivement le droit de propriété et le droit à l’exécution des décisions de justice[42]. L’on a retrouvé trace d’une deuxième : la décision du 8 septembre 2021 par laquelle le Conseil d’État a pu annuler, sur le fondement de l’article 21 CEDF (principe de non-discrimination), certaines dispositions du décret du 4 mai 1972 relatif à École nationale de la magistrature (ENM) prévoyant que seuls les candidats âgés de plus de 31 ans pouvaient présenter leur candidature pour obtenir leur nomination en tant qu’auditeurs de justice sur titre[43]. Sans vouloir faire retomber le soufflé, on relèvera tout de même que le Conseil d’État s’est également appuyé sur la directive 2000/78/CE[44] ; l’article 18 TUE aurait par ailleurs certainement suffi à entériner la même solution. À la suite d’autres[45], l’on y verra en tout état de cause l’attitude bienveillante du Conseil d’État quant à l’applicabilité de la Charte, dans le cadre d’une affaire où il n’apparaissait nullement évident qu’elle entre dans le champ d’application du droit de l’Union, ce que le rapporteur public, du reste, n’avait lui-même pas caché[46]. On relèvera enfin, une troisième annulation plus récente[47], mais au fond assez classique, les juges du palais-Royal venant la fonder sur le fait que la juridiction d’appel n’avait pas, à la date de la décision litigieuse, procédé à un examen approfondi de la situation du requérant-réfugié renvoyé en Russie (au regard des traitements inhumains et dégradants qu’il serait, là-bas, susceptible de subir), la méconnaissance combinée des articles 4 et 19 de la Charte étant in fine retenue. Dans d’autres hypothèses, enfin, la plus-value de la charte présente un caractère plus diffus mais notable. On pense ici à la décision en référé du 8 juin 2020 laquelle, passée peut-être trop inaperçue, a conduit le Conseil d’État à suspendre l’exécution de l’article 4-1 de l’ordonnance du 25 mars 2020, lequel venait généraliser la faculté, pour la CNDA en période de COVID, de statuer selon le procédé du juge unique au détriment de la collégialité[48]. Décision intéressante dans la mesure où, au sein du dispositif, le juge des référés ne s’est appuyé spécifiquement sur aucune norme pour motiver ce doute sérieux ; c’est alors à la lumière des visas, tirés principalement de la Déclaration des droits de l’Homme, de la Charte et de la directive 2013/32/UE[49] que le juge a vraisemblablement assis sa conviction, laissant à penser que la Charte a pu constituer, certes avec d’autres, un élément déterminant pour emporter sa conviction (ou plutôt, en l’espèce, ses doutes).
Plus-value interprétative. Au fond, en sortant d’un prisme contentieux au sens strict du terme, la réelle plus-value de la Charte nous semble résider dans son invocabilité d’interprétation, notamment via le mécanisme des questions préjudicielles. Certes, si on s’en tient aux statistiques, les demandes – souvent subsidiaires, voire infiniment subsidiaires – en ce sens présentées par les requérants ne prospèrent guère, en l’absence de tout doute raisonnable quant à la portée des dispositions de la Charte[50]. Il n’en demeure pas moins que le juge administratif, d’une part, pour en écarter le bien-fondé, est conduit à interpréter le droit dérivé et les dispositions de la Charte, ce qui tend à enrichir son instrumentalisation[51]. D’autre part, il arrive que la demande soit accordée, comme en a témoigné la décision du 25 juin 2021 relative à la protection du secret professionnel des avocats, une question préjudicielle ayant été accordée quant à la violation éventuelle des articles 7 et 47 de la Charte par la directive 2011/16/UE du 15 février 2021[52]. C’est encore ce qu’ont démontré avec éclat les questions préjudicielles dans les affaires « Quadratures du Net » et « French data network »[53]. Le Conseil d’État s’est alors nettement appuyé sur la réponse donnée par la Cour pour trancher le litige ; or c’est toujours au regard des dispositions de droit dérivé lues à la lumière de la Charte que celui-ci s’est positionné. En somme, à défaut d’entrain palpable en faveur de la Charte, il y a bien, par effets agglomérés, un phénomène de spill-over protecteur inhérent à cette dernière, lequel passe, on l’aura compris, par un dialogue nourri entre les juridictions. Ce faisant (et l’on sera plus court sur cet aspect qui agit dans le prolongement du premier), il nous semble qu’une seconde plus-value ressort de l’invocation de la Charte via l’effet direct ou indirect des questions préjudicielles : l’enrichissement de la motivation juridictionnelle et la volonté délibérée de se placer dans les standards (triple test, principe de proportionnalité[54]) européens, ce qui ne fait jamais de mal pour un juge qui a souvent préféré s’en tenir à des motivations plus affirmatives que discursives[55], même si – l’on n’est jamais content – on se serait peut-être passé de la décision-fleuve du 21 avril 2021 aux 99 considérants[56]. L’on conviendra toutefois que la motivation reste en-deçà des attentes en matière de référés, l’absence de doute sérieux quant à la légalité de la décision étant plus souvent postulée que démontrée au regard des dispositions de la Charte[57], le juge trouvant au surplus appui, parfois, dans la jurisprudence de la Cour de justice[58].
Champ des plausibles. Pour achever cette communication, il reste à caresser le champ des plausibles, en tentant de débusquer, peut-être, les plus-values futures et/ou espérées de la Charte au sein du contentieux administratif. Sur un plan matériel, en se tournant vers les dispositions les plus « administrativisées » (ou les plus originales au regard d’autres normes, comme s’agissant de l’article 8 relatif à la protection des données à caractère personnel[59] ou, encore, des droits relatifs à la solidarité ou la citoyenneté européenne[60]), il serait certes attrayant d’espérer une belle destinée à l’article 36 faisant état de l’accessibilité au service d’intérêt économique général[61], lors même que le standard de l’accessibilité ne se confond pas avec le seul principe d’égalité dans l’accès au service public. Mais, par-delà son caractère principiel, il y a sans doute fort peu à en attendre, dès lors qu’il ne fait que reprendre certaines dispositions du TFUE. L’on pourrait espérer, également, une extension du champ d’application de l’article 41 de la Charte relatif au principe de bonne administration[62], lequel, en droit administratif interne, voit son irradiation cantonnée, pour l’essentiel, à la seule justice administrative, sans du reste qu’il soit fait spécifiquement mention de la disposition européenne et sans que sa consistance soit bien certaine[63]. Mais, après avoir livré son lot d’espoirs notamment dans le contentieux des étrangers[64], depuis deux arrêts de 2014[65], eux-mêmes précédés d’une « danthonysation » à l’européenne[66], la Cour a fermé la porte à double tour en estimant que, par dérogation à l’article 51 § 1 CEDF, cette disposition ne s’applique qu’aux organes et institutions de l’Union européenne. Nul doute, pourtant, que si la disposition-gigogne était élevée (et même surélevée), elle renforcerait la démocratie administrative[67], les droits des administrés, la procédure administrative non-contentieuse ou, encore, le « mieux légiférer »[68] le terme entendu lato sensu. Nul doute, encore, que si la disposition connaissait un autre dessein, l’on aimerait la confronter à la décriée jurisprudence Czabaj[69] et son (malheureusement) fameux délai raisonnable d’un an pour intenter un recours contentieux en l’absence de mention des voies de recours dans l’acte individuel, sa motivation étant précisément – et paradoxalement – fondée sur l’idée d’une bonne administration de la justice[70]. En est-il toutefois besoin dès lors que le principe général du droit de l’Union européenne éponyme est censé assurer son effectivité quand le litige se noue dans la mise en œuvre du droit de l’Union européenne[71] ?
Au fond, c’est peut-être au sein du principe d’impartialité et du droit à un recours effectif[72] qu’il faut lover ses espoirs même si, à trois reprises en dix-huit mois, le Conseil d’État a pu écarter leur bien-fondé pour contester, entre autres dans l’arrêt Lactalis[73], le fait que le juge administratif n’est peut-être pas (en tant que juge et partie ; l’argumentation tient la route…) le mieux placé pour engager la responsabilité de l’État du fait d’une décision de justice (administrative… et donc le cas échéant de son fait) qui méconnaîtrait le droit de l’Union européenne[74]. Le même moyen a été écarté au sujet de la formation spécialisée du Conseil d’État, seule chargée d’instruire les affaires relatives à la mise en œuvre de techniques de renseignement dès lors que la sûreté de l’État est en jeu[75]. Le Conseil d’État a, par la suite et pour écarter toute perspective de questions préjudicielles, confirmé qu’il lui appartient bien de statuer sur la violation « jurisprudentielle » du droit de l’Union européenne, pour peu que les membres de la formation de jugement ayant adopté la décision litigieuse s’abstiennent de siéger lors de cette seconde instance[76]. Il reste, enfin, à se demander si le juge du référé-liberté ne pourrait pas, demain, enrichir le catalogue des droits fondamentaux au sens de l’article L. 521-2 CJA en puisant dans la Charte, contribuant ainsi à enrichir la notion même de « droit fondamental »[77]. Après tout, ce dernier l’a déjà fait au regard de la Conv. EDH (droit à la vie)[78] et du droit des traités de l’Union européenne (droit de séjour d’un ascendant d’un ressortissant mineur de l’Union européenne)[79], certaines dispositions de la Charte présentant une véritable originalité par rapport à celles contenues dans d’autres instruments conventionnels[80]. Mais l’on a bien conscience, ici, de se perdre en conjonctures et de quitter le droit positif pour gagner les rives de la réécriture imaginaire du droit, le contrôle de conventionalité restant en plus, à bien des égards, le parent-pauvre du contrôle exercé par le juge des référés[81].
[1] La citation est attribuée à Jean de la Bruyère.
[2] V. tout de même, le « repère » de Denys Simon, L’application de la Charte par les juges administratifs, Europe, 2014, n° 2, repère 2. V. encore S. Perez, Les juridictions administratives françaises et les droits fondamentaux garantis par l’Union européenne, in J. Rideau (dir.), Les droits fondamentaux dans l’Union européenne. Dans le sillage de la Constitution européenne, Bruylant, 2009, p. 321.
[3] B. Stirn, La Charte des droits fondamentaux, source de renouveau constitutionnel européen ?, Colloque organisé par le Carrefour annuel de droit européen à l’Assemblée Nationale, 27 sept. 2019, consultable sur www.conseil-etat.fr
[4] S. Slama et M. Kauffmann, Mesurer les usages et non usages de la Charte des droits fondamentaux par le juge administratif (2009 – 2019). Le juge administratif est-il indifférent à la Charte européenne ?, in R. Tinière et C. Vial (dir.), Les 10 ans de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, Bruylant, 2020, p. 171.
[5] L. Burgorgue-Larsen, La « force de l’évocation » ou le fabuleux destin de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, in Mélanges Pierre Pactet, LGDJ, 2003, p. 77.
[6] A. Rigaux, note sur CJUE ord., 6 juin 2013, aff. C-14/13, Gena Ivanova Cholakova, Europe, 2013, comm. 337.
[7] Le mot est prêté à Guy Braibant, cité par L. Burgorgue-Larsen, note sur CE, 5 janv. 2005, n° 257341, Deprez et Baillard, AJDA, 2005, p. 845.
[8] J. Van Merbeeck, Le point de vue du juge du fond : nemo censetur ignorare caratam ?, Cahiers de droit européen, 2021-1, vol. 57, p. 141.
[9] V. par ex. CE réf., 30 août 2021, n° 455623, inédit.
[10] CE, 10 sept. 2021, n° 456233, inédit – CE, 27 mars 2020, n° 431350, inédit – CE, 11 févr. 2021, n°444972, inédit – CE, 5 mars 2021, n° 433889, inédit.
[11] S. Slama, Prendre au sérieux la Charte des droits fondamentaux en droit des étrangers, Revue des droits de l’Homme, 2016, n° 6, en ligne.
[12] V. CJUE, gr. ch., 26 févr. 2013, aff. C-617/10, Åklagaren c/ Hans Åkerberg Fransson, pt 21 : GADLF, n° 24-25 ; RTDE, 2013, p. 267, note D. Ritleng ; ELR, 2013, n° n° 38, p. 866, nite B. Van Bockel ; CMLR, 2013, n° 50, p. 1411, note E. Hancox ; JDE, 2013, n° 199, p. 184, note J.-Fr. Akandji-Kombé ; CDE, 2014-2, p. 283, note A. Epiney – CJUE, gr. ch., 21 déc. 2011, aff. jtes C-411/10 et C-493/10, N.S. e.a., pt 38 : Rec. CJUE 2011, p. I-13905.
[13] Sur cette question v. I. Gambardella, L’application de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne aux États membres : le critère de la mise en œuvre du droit de l’Union comme obstacle à son effectivité, Cahiers de droit européen, 2021-1, n° 57, p. 241 ; M. Safkan, D. Düsterhaus et A. Guérin, La Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne et les ordres juridiques nationaux, de la mise en œuvre à la mise en balance, RTDE, 2016, p. 219 ; S. Platon, L’applicabilité de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne aux Etats membres. Retour sur l’arrêt Fransson de la Cour de justice du 26 février 2013, in Mélanges François Hervouët, PU Poitiers, 2015, p. 421.
[14] CE, 4 juin 2014, n° 370515 ; JCP A, 2014, act. 489, veille L. Erstein ; AJDA 2014, p. 1501, concl. X. Domino ; JCP A 2014, 2355, note G. Marti.
[15] V. implicitement, alors même que le litige excédait de beaucoup la mise en œuvre du droit de l’UE : CE, 7 avr. 2011, SOS Racisme, n° 343387, AJDA, 2011, p. 1438, note D. Bailleul.
[16] V. pour des exemples anciens : CE, 24 févr. 2011, n° 340122, Union nationale des footballeurs professionnels et a. : Lebon T., p. 1313, concl. D. Botteghi ; Jurisport 2011, n° 109, p. 9, note P. Rucipon – CE, 4 juill. 2012, n° 341533, Confédération française pour la promotion sociale des aveugles et des amblyopes : RTDE 2013-4, p. 877, note D. Ritleng ; JCP A, 2013, n° 10, p. 23, note H. Pauliat. V. aussi, C. Nivard, L’effet direct de la Charte sociale européenne devant les juridictions suprêmes françaises : RDLF, 2012, chron. n° 28. Pour des exemples sur la période sous revue, s’agissant de l’article 21 au sujet de l’accessibilité des personnes handicapées au bâti, v. CE, 30 nov. 2021, Association SOS MCS, n° 443406, inédit – au regard de l’article 21 CEDF, CE, 22 mars 2022, n° 453326, inédit – au sujet de l’article 20 CEDF, CE, 27 oct. 2021, n° 457255, inédit.
[17] V. par ex. CE, 31 mars 2021, n° 441918 ; Gaz. Pal., 4 mai 2021, n° 17, p. 38, note N. Frinck et S. Seroc.
[18] Art. 113 TFUE.
[19] V. E. Neframi, Quelques réflexions sur l’application de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne et le principe d’attribution, in Mélanges Claude Blumann, Bruylant, 2015, p. 431.
[20] V. aussi s’agissant de l’article 21 : CE, 22 mars 2022, n° 453326, inédit ; idem s’agissant de la combinaison des articles 21 et 26 : CE, 30 nov. 2021, n° 443406, inédit.
[21] Sur ce point, v. R. Tinière, Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, J.-Cl. Droit international, fasc. 161-25, 2017, § 121.
[22] CE, 18 oct. 2021, n° 444885, inédit. On pourra également mettre en avant l’absence de pleine effectivité de l’article 48 CEDF lequel ne confère pas un véritable droit à la protection du consommateur.
[23] CE Ass., 11 avr. 2012, n° 322326, GISTI, Leb. 142 ; RFDA, 2012, p. 547, concl. G. Dumortier, note M. Gautier ; AJDA, 2012, p. 936, chron. A. Bretonneau et X. Domino ; JCP A, 2012, n° 2171, note A. Minet ; D., 2012, p. 1712, note B. Bonnet ; Dr. adm., 2012-6, p. 9, note M. Gautier ; JCP G, 2012, n° 806, étude P. Cassia, et S. Robin-Olivier ; RTDE, 2012, p. 928, note D. Ritleng.
[24] Pour reprendre la formule du Conseil constitutionnel refusant d’exercer le contrôle de conventionnalité des lois : Cons. const., 15 janv. 1975, n° 74-54, DC, Loi relative à l’IVG, Rec. 19 ; D., 1975, p. 529, note L. Hamon ; AJDA, 1975, p. 134, note J. Rivero ; RIDC, 1975, n° s.n, note J. Robert ; RDP, 19875, n° s. n. ; GADLF, Dalloz, 3e éd., 2021, n° 34-35.
[25] CE Ass., 21 avr. 2021, n° n° 393099 : JCP A, 2021, n° 2223, note M. Bartolucci ; JCP G, 2021, 659, note A. Iliopoulou-Penot ; AJDA 2021, p. 1194, chron. C. Malverti et C. Beaufils ; D. 2021, p. 1268, note T. Douville et H. Gaudin ; AJ pénal 2021, p. 309, chron. A. Archambault ; Dalloz IP/IT 2021, p. 408, obs. B. Bertrand et J. Sirinelli ; Légipresse 2021, p. 253. V. antérieurement, CJUE, gde ch., 6 oct. 2020, aff. C-623/17, Privacy International, C-511/18, C-512/18, C-520/18, La Quadrature du Net e.a. ; Europe 2020, comm. 374, obs. D. Simon ; AJ pénal 2020, p. 531, obs. B. Nicaud ; Dalloz IP/IT 2021, p. 46, obs. E. Daoud, I. Bello et O. Pecriaux. V. également CE, 14 oct. 2021, n° 394925, Assoc. La Quadrature du Net et a., inédit.
[26] CE, 30 nov. 2020, n° 431775, Section française de l’OIP.
[27] CJUE, 26 mars 2015, C-316/13, Gérard Fenoll c/ Centre d’aide par le travail « La Jouvene » et APEI d’Avignon, Europe, 2015, comm. 182 note D. Simon.
[28] M. Safkan, D. Düsterhaus et A. Guérin, La Charte des droits fondamentaux (…), art. préc.
[29] V. M. Combet, La dilution de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne dans les règles relatives aux libertés de circulation du marché intérieur, in R. Tinière et C. Vial (dir.), Les 10 ans de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, Bruylant, 2020, p. 57.
[30] V. par ex. CE, 20 oct. 2021, n° 443306, inédit – CE réf., 2 juin 2020, n° 440449, inédit – CE, 6 mai 2020, n° 440166, inédit – CE, 15 juill. 2020, n° 417706, CGT-FO, inédit – CE, 12 juill. 2021, n° 433869, SCV Les vignerons de Grimaud, inédit.
[31] V. tout de même pour une hypothèse où les dispositions de la Charte sont prioritairement mobilisées dans le contentieux des étrangers (art. 4 CEDF) par rapport à celles issues de la Conv. EDH : CE, 20 oct. 2021, n° 443306, inédit.
[32] V. B. Genevois, La Convention européenne des droits de l’homme et la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne : complémentarité ou concurrence ?, RFDA, 2010, p. 437.
[33] Sur ces dispositions, v. S. Tabani, L’article 52, paragraphe 3 de la Charte des droits fondamentaux : un discours sans la méthode de gestion des rapports de système entre la Charte des droits fondamentaux et la CEDH ?, in R. Tinière et C. Vial (dir.), Les 10 ans de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, Bruylant, 2020, p. 251 ; M. Rota, Le cadre interprétatif de la Charte des droits fondamentaux (articles 52 à 54), in A. Biad et V. Parisot (dir.), La Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne. Bilan d’application, Anthémis-Nemesis, coll. Droit & Justice, n° 117, 2018, p. 77.
[34] V. par ex. CE réf., 30 aout 2021, n° 455623, inédit.
[35] CE 27 oct. 2021, n° 457255, inédit – CE 18 oct. 2021, n° 457213, inédit – CE 18 oct. 2021, n° 457216, inédit.
[36] Sur la question P.-Y. Sagnier, Le juge administratif et l’économie de moyens, LGDJ, BDP, t. 324, 2022.
[37] V. M. Safjan, D. Düsterhaus et A. Guérin, La Charte des droits fondamentaux (…), art préc.
[38] Art. préc.
[39] Conseil d’État, Rapport annuel, Activité juridictionnelle et consultative des juridictions administratives en 2021, La documentation française, p. 38.
[40] Ibid.
[41] V. par ex. CE, 26 avr. 2022, n° 442364, inédit.
[42] TA Paris, 4e sect., 3e ch., 15 juin 2017, Sté Otjiaha BV, n° 1602036 et 1602040, C +.
[43] CE, 8 sept. 2021, n° 453471 : JCP G, 2021, n° 1133, note F. Tarlet ; RDP, 2022, p. 679, chron. H. Pauliat ; AJFP, 2022, p. 47 ; D., 2021, p. 1681 ; AJDA, 2021, p. 165, obs. J.-M. Pastor.
[44] Dir. n° 2000/78/CE du Conseil, 27 nov. 2000, portant création d’un cadre général en faveur de l’égalité de traitement en matière d’emploi et de travail, JOCE, 2 déc. 2000, n° L 303, p. 16.
[45] V. F. Tarlet, note sur CE, 8 sept. 2021, n° 453471, préc.
[46] O. Fuchs, concl. disponibles sur www. conseil-etat.fr/arianeweb.
[47] CE, 28 mars 2022, n° 450618, inédit.
[48] CE réf., 8 avr. 2020, n° 440717, Assoc. ELENA et GISTI, inédit, JCP G, 2020, act. 775.
[49] Dir. n° 2013/32/UE du Parlement européen et du Conseil, 26 juin 2013, relative à des procédures communes pour l’octroi et le retrait de la protection internationale, JOUE, 29 juin 2013, n° L 180, p. 60.
[50] V. par ex. CE, 26 avr. 2022, 449284, inédit – CE, 26 juill. 2021, n° 439902, Assoc. Santé Environnement Combe de Savoie, inédit – CE, 15 oct. 2020, n° 432873, Banque d’escompte, AJDA, 2021, p. 448, note C. Faure. V. auparavant déjà CE, 6 mai 2019, n° 416088, RTDE, 2019, p. 432, note D. Ritleng ; JCP A, 2019, n° 43-44, p. 35, note G. Marti.
[51] CE, 6 mai 2019, n° 416088, mentionné aux tables ; AJDA, 2019, p. 967, obs. J.-M. Pastor
[52] CE, 25 juin 2021, n° 449060, Institut de droit pénal fiscal et financier ; Dr. fisc. 2021, comm. 466, note N. Vergnet.
[53] CE Ass., 21 avr. 2021, n° 393099, préc
[54] V. par ex., pour une référence nette au triple test, CE, 29 avr. 2022, n° 449527, inédit. V. également CE, 30 déc. 2021, n° 440376, inédit.
[55] Sur le sujet, v. entre autres J. Petit, La motivation des décisions du juge administratif, in S. Caudal (dir.), La motivation en droit public, Dalloz, 2013, p. 213 ; F. Malhière, Les méthodes de rédaction de décisions de justice du droit administratif, in AFDA, Les méthodes en droit administratif, Dalloz, 2018, p. 57 ; M. Monot-Fouletier, Quelques réflexions sur l’évolution du langage du juge administratif, in Mélanges B. Pacteau, Mare & Martin, 2018, p. 505 ; S. Monchambert, L’office du juge et la motivation des décisions de justice, in J.-F. Lafaix (dir.), Le renouvellement de l’office du juge administratif, Berger-Levrault, 2017, p. 275 ; A. Meynaud-Zeroual, La motivation en droit du procès administratif, Revue de droit d’Assas, 2019, n° 19, p. 52 ; Ch. Roux, La motivation des décisions du juge administratif – Présentation générale, in V. Le Bihan (dir.), La motivation des décisions de justice, https://transversales.org/, mars 2021.
[56] CE Ass., 21 avr. 2021, n° 393099, préc.
[57] Par ex. CE, 27 oct. 2021, n° 457277, inédit.
[58] CE réf., 23 déc. 2021, n° 458989, Assoc. Solidarité Renouvelables et a., BDEI, 2022, p. 30, chron J.-N. Clément, A. Bouillié et L. Dufour.
[59] Le RGPD, toutefois, semble lui avoir grillé la priorité. V. par ex. durant la période sous revue, CE, 30 déc. 2021, n° 440376, inédit.
[60] V. E. Muir, La plus-value de la Charte : à la croisée de plusieurs systèmes juridiques, Cahiers de droit européen, 2021-1, vol. 57, p. 55.
[61] Sur la question, M. Dony, L’accès aux services d’intérêt général : un droit fondamental ?, in J. Rideau (dir.), Les droits fondamentaux dans l’Union européenne. Dans le sillage de la Constitution européenne, Bruylant, 2009, p. 163.
[62] Sur ce principe, v. L. Azoulai et L. Clément-Wilz, La bonne administration, in J.-B. Auby et J. Dutheil de la Rochère (dir.), Traité de droit administratif européen, Bruylant, 2e éd., 2016, p. 671 ; J.-P. Jacqué, Le droit à une bonne administration dans la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, RFAP, 2011-1, n° 137-138, p. 79.
[63] V. A. Meynaud, La bonne administration de la justice et le juge administratif, RFDA 2013, p. 1029. V. également, J. Sirinelli, L’influence du droit de l’Union sur le contentieux administratif, in J.-B. Auby et J. Dutheil de la Rochère (dir.), Traité de droit administratif européen, Bruylant, 2e éd, 2016, p. 12 ; H. Apchain, Retour sur la notion de bonne administration de la justice, AJDA, 2012, p. 587.
[64] V. notamment R. Bousta, Droit des étrangers : mais à quoi sert le droit à une bonne administration ?, Revue des droits de l’Homme, 2017-12, en ligne ; N. Lepoutre, Le droit d’être entendu avant l’adoption d’une mesure d’éloignement, un droit fondamental réduit à portion congrue, Revue des droits de l’Homme, 2015, en ligne ; M.-L. Basilien-Gainche et T. Racho, Quand le souci d’efficacité de l’éloignement l’emporte sur l’application effective des droits fondamentaux, Revue des droits de l’Homme, 2014, en ligne. V. également CAA Nancy, 9 déc. 2013, n° 12NC01705, M. O., AJDA, 2014, p. 42, note M. Wiernasz ; CE, 4 juin 2014, n° 370515, M. Halifa ; AJDA, 2014, p. 1501, concl. X. Domino.
[65] V. respectivement CJUE, 5 nov. 2014, C-166/13, Sophie Mukarubega c/ Préfet de police et Préfet de la Seine-Saint-Denis et CJUE, 11 déc. 2014, C-249/13, Khaled Boudjlida c/ Préfet des Pyrénées-Atlantiques ; RTDE, 2016, p. 372, note F. Benoît-Rohmer ; Gaz. Pal., 2015, n° 79-80, p. 14, note J.-N. Caubet-Hilloutou ; JCP A, 2015, n° 5, p. 23, note E. Chevalier ; AJDA, 2015, p. 334, chron. E. Broussy, H. Cassagnabère, Ch. Gänser ; Europe, 2015-1, p. 10, note D. Simon.
[66] CJUE, 10 sept. 2013, C-383/13, MG et NR c/ Staatssecretaris van Veiligheid en Justitie, JCP G, 2013, act. 970 ; AJDA, 2013, p. 2307, chron. M. Aubert, E. Broussy et H. Cassagnabère.
[67] Sur cette liaison, v. R. Mehdi, La démocratie administrative en droit de l’Union européenne, jouvence ou illusion ?, in Mélanges Frédéric Sudre, LexisNexis, 2018, p. 461.
[68] V. notamment J.-P. Jacqué, Le droit à une bonne administration dans la Charte (…), art. préc.
[69] CE Ass., 13 juill. 2016, Czabaj, Leb. 340 : RFDA, 2016, p. 927, concl. O. Henrard ; AJDA, 2016, p. 1629, chron. L. Dutheillet de Lamothe et G. Odinet ; Dr. adm. 2012, comm. 63, note G. Eveillard ; JCP A, 2016, n° 2238, note H. Pauliat ; JCP G, 2016, n° 1396, note X. Souvignet.
[70] V. H. Pauliat, Qu’entend-on par « bonne administration de la justice » (administrative) ? Retour sur 40 ans de fonctionnement de la juridiction administrative, JCP A, 2021, n° 2241.
[71] CJCE, 31 mars 1992, C-255/90 P, Jean-Louis Burban c/ Parlement, Rec. I-2253.
[72] CEDF, art. 47. V. sur le sujet J. Wildemeersch, L’avènement de l’article 47 de la Charte des droits fondamentaux et de l’article 19, paragraphe 1, second alinéa TUE. Un droit renouvelé à la protection juridictionnelle effective, Cahiers de droit européen, 2021-3, p. 867.
[73] CE, 9 oct. 2020, n° 414423, Sté Lactalis Ingérdients, Leb. 338, concl. R. Chambon ; Dr. adm. 2020, alerte 166 ; Procédures, 2020, comm. 239, note N. Chifflot ; JCP A, 2021, n° 2024, note G. Wernert ; RTDE, 2021, p. 479, note D. Ritleng ; Dr. adm., 2020-12, p. 8 ; AJDA, 2020, p. 2579, note A. Jacquemet-Gauché
[74] V. notamment en ce sens A. Jacquemet-Gauché, note sur CE, 9 oct. 2020, n° 414423, préc.
[75] CE, 14 janv. 2021, n° 394925, inédit.
[76] CE, 1er avr. 2022, n° 443882, Sté Kermadec, JCP G, 2022, act. 457, obs. L. Ernstein.
[77] V. plus largement C. Paulet, La Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne et la notion de droit fondamental, RDLF, 2021, chron. 14.
[78] CE, sect., 16 nov. 2011, n° 353172, n° 353173, Ville Paris ; JCP G, 2011, 1330, obs. C.-A. Dubreuil ; JCP G, 2012, 1, note O. Le Bot ; JCP A, 2012, n° 2017, note B. Pacteau ; Procédures, 2012, comm. 27, note S. Deygas.
[79] CE, 9 déc. 2014, n° 386029, P. : AJDA, 2015, p. 1116, note M. Gautier ; JCP G, 2015, 129, note J.-G. Sorbara.
[80] Il reste que le juge a tendance à englober certaines dispositions originales dans des droits matriciels. Ainsi de la protection des données à caractère personnel, considérée comme une ramification du droit au respect de la vie privée : CE, 13 oct. 2020, n° 444937, Assoc. CNLL et a. ; JCP A, 30 août 2021, n° 35, p. 17, note Ch. Paillard ; AJDA, 2021, p. 741, note L. Cluzel-Métayer ; Dalloz IP/IT, 2021, p. 107, note O. de Maison Rouge.
[81] Ce contrôle n’étant exercé, a priori, qu’en présence d’une « atteinte manifeste » au droit de l’Union européenne (CE, 16 juin 2010, n° 340250, Diakité ; AJDA, 2010, p. 1663, note O. Le Bot ; JCP G, 2010, n° 739, note P. Cassia ; Procédures, 2010, comm. 332, obs. S. Deygas.
Bonjour, merci pour cet article très intéressant. Cordialement