L’Union européenne, puissance normative ? La politique de coopération au développement en actes [Résumé de thèse]
L’Union européenne, puissance normative ? La politique de coopération au développement en actes
Par Hélène Colineau
Thèse soutenue le 28 mai 2013 à Grenoble sous la direction du Pr. Jean-Charles Froment
L’Union européenne est-elle, comme l’affirme une communication de la Commission et de la Haute représentante pour les affaires étrangères et la politique de sécurité, Catherine Ashton, une « force mondiale au service des droits de l’homme » ? (COM(2011) 886, p.5) En finançant et conduisant des projets de terrain, l’Union souhaite soutenir le développement économique et social, ainsi que l’avancée des droits de l’homme et la promotion de la démocratie, dans des Etats situés au-delà de ses frontières.
La politique de coopération au développement de l’Union constitue un instrument majeur de son action extérieure, bien qu’elle soit rarement étudiée comme telle. Cette thèse s’interroge sur la manière dont les principes inscrits dans les traités européens (démocratie, droits de l’homme et Etat de droit), qualifiés ici de normes, sont promus par le biais de la coopération au développement.
Pour ce faire, le concept de « puissance normative » (Manners, 2002), qui théorise la diffusion des normes dans le cadre international, a été mobilisé afin d’analyser la façon dont l’Union conduit sa politique de coopération au développement. La politique de coopération au développement est étudiée dans sa dimension globale, à travers l’analyse des méthodes européennes (partie 1), et dans sa dimension concrète, c’est-à-dire par l’étude des projets de terrain financés par l’UE dans ses pays partenaires (partie 2). Le cas des projets de soutien à la réforme pénitentiaire a été choisi, afin de comprendre comment se déroule la diffusion des normes sur le terrain, dans un domaine régalien des Etats bénéficiaires, et dans lequel l’UE ne dispose pas d’une compétence interne.
En définitive, l’UE ne dispose pas d’une spécificité normative permettant de la distinguer des autres acteurs du système international en tant que puissance normative. La coopération au développement, qui dispose pourtant d’outils dédiés à la promotion des normes européennes, apparaît subordonnée à la politique extérieure, les préoccupations stratégiques l’emportant alors sur l’objectif de diffusion des normes. Sur le terrain, les projets financés par l’UE répondent à des considérations bureaucratiques portées par les délégations de l’UE. Plus qu’un moyen de diffusion des normes, les projets sont considérés par les agents européens comme un moyen de faire vivre la coopération, quels que soient, au final, leurs résultats. Les normes (droits de l’homme, démocratie et Etat de droit) constituent donc un objectif de la coopération vu comme un cadre surplombant, dans lequel toutes sortes de projets peuvent être menés, sans que l’effet réel de ces projets en matière de promotion des normes soit interrogé par les acteurs européens. Reste alors l’espace d’échange qu’auront ouvert de tels projets, permettant aux experts étrangers et aux fonctionnaires de l’Etat bénéficiaire de confronter leurs pratiques administratives, et d’envisager, éventuellement, de nouvelles « solutions » d’action publique, au service des droits de l’homme et de l’Etat de droit.
SOMMAIRE
PARTIE I – L’ABSENCE DE SPECIFICITE NORMATIVE DE L’UNION EUROPEENNE
Titre 1. La représentation admise de l’Union européenne comme puissance normative
Chapitre 1. Une représentation commune
Chapitre 2. Une représentation confirmée par la politique de coopération au développement
Titre 2. La politique européenne au service des intérêts européens
Chapitre 1. La subordination de fait de la politique de coopération aux intérêts européens
Chapitre 2. Les instruments de la politique de développement mis au service de la sécurité
PARTIE 2 – LES ALEAS DE LA PROMOTION DES NORMES SUR LE TERRAIN
Titre 1. La faible opérationnalisation des normes dans les projets
Chapitre 1. L’expérience limitée de l’UE en matière pénitentiaire
Chapitre 2. Les acteurs européens en retrait dès la définition du projet
Titre 2. Un apport limité des projets de réforme administrative
Chapitre 1. Des projets à la mise en œuvre complexe
Chapitre 2. Des projets aux effets modestes