Les infractions de prévention, Argonautes de la lutte contre le terrorisme
Depuis une vingtaine d’années, la lutte contre le terrorisme a favorisé l’émergence des infractions de prévention (ou infraction préventive). Elles visent la prévention des actes de terrorisme par l’incrimination de leurs actes préparatoires et ce en l’absence de réalisation de l’acte redouté. Le Conseil constitutionnel a été amené récemment à se prononcer sur deux d’entre elles (le délit de consultation habituelle de site djihadiste et le délit de participation à une entreprise individuelle terroriste). La présente contribution est l’occasion de faire retour sur une catégorie d’infractions très discutée au sein de la communauté des pénalistes.
Par Anne PONSEILLE, Maître de Conférences à l’Université de Montpellier et membre du CERCOP
Véritable défi pour les sociétés démocratiques contemporaines, la lutte contre le terrorisme est une priorité des pouvoirs publics français depuis maintenant trente ans et conduit, par une hyperactivité du législateur, au développement en ce domaine d’un arsenal impressionnant de moyens de diverses natures. Ces dernières années, ce travail d’élaboration d’une stratégie pour combattre cette délinquance si particulière a été le fruit le plus souvent d’une réaction épidermique aux évènements qui ont endeuillé la France, bien plus qu’il n’a été dicté par une réflexion globale : ceci explique un empilement de dispositifs multiples définis tout à la fois et notamment dans le Code pénal, le Code de procédure pénale et le Code de la sécurité intérieure, instruments qui, en raison de cette dispersion, s’entrechoquent parfois et dont on peine à éprouver l’efficacité. Mais il convient surtout de souligner que c’est aussi dans un contexte d’état d’urgence que cette intervention législative s’est emballée, intensifiée : si la législation pénale en matière de lutte contre le terrorisme s’est longtemps développée en marge de toute déclaration d’état d’urgence, elle s’est précisée ces derniers mois dans ce cadre-là et parfois même au sein des lois de prorogation de l’état d’urgence[1].
Parmi les différents outils imaginés pour mener ce combat sans relâche, le recours à l’incrimination pénale a sans aucun doute une place de choix, « la réaction au terrorisme (étant) d’abord une affaire d’incrimination »[2], et a l’avantage d’afficher de manière immédiate la réprobation d’une société démocratique à l’égard de comportements dont la gravité est insoutenable.
L’incrimination de faits de terrorisme s’inscrit dans une histoire mouvementée. Pendant longtemps, le législateur a fait le choix de ne pas créer d’infractions spécifiques : la loi n°86-1020 du 9 septembre 1986 relative à la lutte contre le terrorisme et aux atteintes à la sûreté de l’Etat[3], première loi d’une longue série en ce domaine, avait essentiellement pour ambition de définir la notion de terrorisme et de poser un cadre procédural pour son traitement mais elle n’avait pas érigé d’infractions spéciales. Tout au plus avait-elle créé une nouvelle catégorie d’infractions[4]. Bien que la recherche d’une définition de la notion-même de terrorisme ait été considérée comme « un entreprise périlleuse »[5], cette loi s’y est essayée en disposant que reçoivent la qualification de « terroristes », pour être soumises à des règles procédurales dérogatoires au droit commun, certaines infractions « lorsqu’elles sont en relation avec une entreprise individuelle ou collective ayant pour but de troubler gravement l’ordre public par l’intimidation ou la terreur »[6]. Identifiant un critère objectif et un critère subjectif de qualification, une doctrine majoritaire a cependant souligné leur caractère imprécis[7]. Celle-là a également fustigé une décision du Conseil constitutionnel qui avait considéré de manière péremptoire la définition de la notion comme suffisamment claire et précise pour répondre aux exigences de l’article 8 DDHC[8], conformité constitutionnelle rappelée d’ailleurs tout récemment[9].
Par la suite, d’abord lors de la réforme du Code pénal en 1992 puis avec la loi n°96-647 du 22 juillet 1996 tendant à renforcer la répression du terrorisme[10], le législateur a procédé différemment en recourant à deux formes d’incrimination, l’incrimination d’un « terrorisme dérivé », partant d’infractions préexistantes, et l’incrimination d’un « terrorisme qualifié », créant des infractions autonomes[11]. Regroupées dans un chapitre du Code pénal intitulé « Des actes de terrorisme »[12], les « infractions terroristes » sont visées et/ou définies aux articles 421-1 à 421-6. Cette catégorie d’infractions n’a ainsi jamais cessé à la faveur de lois successives de s’enrichir de nouvelles incriminations[13], avec une facilité déconcertante favorisée par l’absence de « critère prédéfini d’inclusion » dans la liste des actes terroristes[14].
Le législateur s’est ainsi attaché à bâtir, pierre par pierre, un véritable « droit pénal spécial du terrorisme »[15] qui se compose de deux catégories d’infractions : celles matérielles ou de lésion, pour la constitution desquelles est exigé un résultat dommageable, une lésion portée à un bien juridique pénalement protégé[16] et les infractions de prévention qui ne supposent pas une telle exigence pour leur consommation[17]. C’est cette seconde catégorie d’infractions qui retiendra notre attention. La raison de cet intérêt ne tient assurément pas dans le fait qu’elles ont en matière de terrorisme une existence spécifique car il n’en est rien. En effet, cette technique de pénalisation a essaimé dans de nombreux autres contentieux répressifs et bien avant la création d’infractions terroristes (infractions au Code de la route, infractions de mise en danger des mineurs, délits de risques causés à autrui, d’embuscade, de participation à une association de malfaiteurs…). Plus généralement connues sous la dénomination d’infraction formelle, de mise en danger ou obstacle, l’infraction de prévention possède une structure polymorphe et présente l’indéniable avantage de permettre l’appréhension pénale de comportements avant qu’ils ne dégénèrent en dommages irrémédiables. Le législateur ne se prive pas d’utiliser dans cette perspective, sans doute de manière excessive, ce mode d’incrimination pénale séduisant qui procède d’une atrophie de l’élément matériel et d’une hypertrophie de l’élément moral de l’infraction[18]. La lutte contre le terrorisme est ainsi une aire idéale pour l’expérimentation de ce modèle d’incrimination afin d’éviter des atteintes aux personnes et aux biens : voici donnée la première raison d’une étude consacrée aux infractions de prévention terroristes et la doctrine s’est d’ailleurs saisie de cette thématique soulignant leur prolifération en ce domaine[19].
Le combat livré contre le terrorisme suppose, plus que dans d’autres domaines, une intervention précoce de la répression, un anéantissement de projets terroristes alors qu’ils ne sont qu’en germe car leur réalisation est grandement redoutée. Aussi gravitant autour du noyau dur que constituent les infractions de lésion terroristes regroupées au sein de l’article 421-1 du Code pénal (infractions d’atteintes aux personnes et aux biens), les dernières infractions créées en ce domaine sont exclusivement des infractions de prévention comme l’a très justement fait remarquer une auteure[20] : il s’agit là d’une raison supplémentaire pour qu’on s’y intéresse.
Leur identification est en général aisée : les termes utilisés pour définir les comportements incriminés évoquent la plupart du temps l’absence de résultat dommageable réalisé ou de l’acte redouté : « indépendamment de la survenance éventuelle d’un tel acte »[21], « même lorsqu’il n’a pas été suivi d’effet »[22]… D’autres fois, le comportement pénalement appréhendé précède ou sert nécessairement et techniquement la réalisation d’un acte lésionnaire redouté, ce qui justifie dans l’esprit du législateur sa répression. Ainsi en est-il par exemple de la participation à un groupe de combat ou de la fourniture de logement à un auteur de faits de terrorisme[23], des infractions liées au trafic d’armes dans un contexte terroriste[24], du « fait de préparer l’une des infractions » terroristes de manière isolée[25]… étant précisé que la lecture des articles 421-1 et suivants du Code pénal, siège du droit pénal spécial en matière de terrorisme, n’épuise pas selon nous l’énumération des infractions de prévention en ce domaine comme nous le verrons.
Enfin, ultime raison justifiant de les examiner, elles font l’objet d’une critique nourrie en ce qu’elles participent à une (r)évolution du droit pénal.
L’oxymore contenu dans l’expression « infraction de prévention » révèle la singularité de ce mode d’incrimination : la technique de l’incrimination de prévention permet une « prévention pénale »[26], une « anticipation de la répression »[27], s’inscrit dans une logique de « prévention punitive »[28], dans une logique prédictive qui caractérise un droit pénal de la dangerosité[29].
Le foisonnement dans le droit pénal français des infractions de prévention pour lutter contre le terrorisme s’accompagne d’une évolution du recours à ce mode d’incrimination (I) qui n’est pas sans conséquence sur l’évolution du droit pénal lui-même (II).
I – Les manifestations du déploiement des infractions de prévention terroristes
Dans une étude récente et particulièrement fouillée, un auteur explique comment se sont succédé, sous l’effet d’un amoncellement de textes, plusieurs générations d’infractions de prévention[30]. Il nous semble possible de dégager deux mouvements législatifs dans la répression des actes de terrorisme par le recours à l’incrimination préventive. Le premier est modéré dans la mesure où le législateur se contente de dupliquer une technique d’incrimination déjà utilisée pour la prévention d’autres types de délinquance (A). Le second mouvement inaugure une digression ou torsion de cette méthode d’incrimination afin de saisir des comportements, encore plus éloignés sur la chaine causale conduisant aux actes dommageables éminemment redoutés. Pareille évolution de cette technique de pénalisation est sans aucun doute une caractéristique des infractions de prévention créées en matière de terrorisme (B).
A – La déclinaison de l’incrimination de prévention dans le champ de la répression du terrorisme
Ce mode d’incrimination qu’est l’infraction de prévention opère de manière longitudinale, c’est-à-dire en remontant l’iter criminis, pour attirer dans le champ pénal des comportements en amont de la constitution de l’infraction lésionnaire. C’est sur ce premier modèle traditionnel que sont construites certaines des infractions de prévention définies par les articles 421-1 et suivants du Code pénal. Par un aménagement des théories de la tentative et de la complicité punissables, sont pénalement appréhendés de manière autonome des commencements d’exécution, des actes préparatoires (1) ou encore des actes d’aide ou d’incitation à commettre des infractions terroristes (2).
1. L’incrimination autonome d’un commencement d’exécution et d’actes préparatoires
Cet éclatement de l’incrimination se manifeste par l’appréhension pénale de deux types de comportements échappant, par principe et dans une conception objective du droit pénal, à la répression[31].
Ainsi, le simple commencement d’exécution[32], s’il n’est pas complété par un désistement involontaire, ne peut être pénalement sanctionné au titre de la tentative[33] et reste dans ce cas impuni. Aussi, le législateur incrimine-t-il à titre spécifique des comportements s’apparentant à des commencements d’exécution. Un exemple nous est donné par l’infraction définie à l’article 421-2 du Code pénal consistant dans l’introduction « dans l’atmosphère, sur le sol, dans le sous-sol, dans les aliments ou les composants alimentaires ou dans les eaux, y compris celles de la mer territoriale, (d’) une substance de nature à mettre en péril la santé de l’homme ou des animaux ou le milieu naturel », constitutive d’un acte de terrorisme « lorsqu’il est intentionnellement en relation avec une entreprise individuelle ou collective ayant pour but de troubler gravement l’ordre public par l’intimidation ou la terreur ». La précision suivant laquelle il n’est pas exigé pour la consommation de ladite infraction que les produits litigieux aient porté atteinte à la santé des hommes, de la faune ou de la flore, la seule mise en péril suffisant à cette fin, fait de cette incrimination une infraction de prévention constituée indépendamment de la survenance d’un dommage[34]. Il s’agit là de ce qu’une doctrine très majoritaire nomme « infraction formelle »[35].
Cette attraction pénale s’exprime plus fréquemment par l’incrimination sui generis d’actes préparatoires[36]. Les infractions terroristes offrent de multiples exemples. Certaines sont des infractions déjà existantes simplement déclinées dans un contexte terroriste : ainsi en est-il des infractions relatives au trafic d’armes (transport, détention, acquisition, cession…) visées à l’article 421-1-4° du Code pénal. Issu de la loi n°96-647 du 22 juillet 1996[37], l’article 421-2-1 du Code pénal incrimine « le fait de participer à un groupement formé ou à une entente établie en vue de la préparation, caractérisée par un ou plusieurs faits matériels, d’un des actes de terrorisme mentionnés aux articles précédents ». Si des peines spécifiques ont ensuite été prévues à l’article 421-6 par la loi n°2006-64 du 23 janvier 2006[38], cette infraction constitue le duplicata tardif du délit de participation à une association de malfaiteurs, très ancien, prévu à l’article 450-1 du Code pénal[39] qui est en plus l’archétype de l’infraction dite collective[40]. Plus complexe dans sa structure mais véritable avatar de la précédente infraction de prévention évoquée, le délit de l’article 421-2-6 du Code pénal permet la répression d’une participation individuelle à un projet terroriste[41]. Innovation remarquée de la loi n°2014-1353 du 13 novembre 2014 renforçant les dispositions relatives à la lutte contre le terrorisme[42], cette incrimination a pour ratio legis la crainte inspirée par l’activité du « loup solitaire » ou des microcellules terroristes[43], du terroriste « auto-entrepreneur »[44] en somme.
La création d’infractions de prévention se fait encore par l’appréhension pénale de comportements s’apparentant à une aide apportée ou une incitation à l’activité terroriste.
2. L’incrimination autonome d’actes d’aide ou d’incitation
En vertu de l’article 121-7 du Code pénal, la complicité ne peut être retenue qu’en présence d’un fait principal punissable, c’est-à-dire si l’infraction commise par l’auteur est consommée ou au moins tentée. Afin d’éviter que le hasard ne devienne un critère de répression et pour ne pas faire dépendre la responsabilité pénale du complice de l’activité d’un tiers, le législateur a érigé en infractions autonomes les actes de complicité définis à l’article précité[45]. Ces infractions sont par nature des infractions de prévention. Les articles 421-1 et s. du Code pénal en recèlent quelques exemples. Certaines d’entre elles permettent l’incrimination ad hoc d’une aide au sens de l’alinéa 1er de l’article 121-7 du Code pénal. L’article 421-1-3° du Code pénal incrimine l’aide logistique apportée à l’entreprise terroriste par renvoi à l’article 434-6 du même Code relatif à la fourniture aux auteurs et complices de telles infractions d’un logement, d’un lieu de retraite, de subsides, de moyens d’existence ou de tout autre moyen permettant de les soustraire aux recherches ou à l’arrestation ; l’article 421-2-2 du Code pénal réprime le soutien financier apporté aux entreprises terroristes, infraction créée par la loi n°2001-1062 du 15 novembre 2001 relative à la sécurité quotidienne[46]. Sont également constitutifs d’une aide incriminée à titre autonome, la détention et le transport « de substances ou produits incendiaires ou explosifs ainsi que d’éléments ou substances destinés à entrer dans la composition de produits ou engins incendiaires ou explosifs en vue de la préparation, caractérisée par un ou plusieurs faits matériels » d’infractions d’atteintes aux biens dangereuses pour les personnes ou d’atteintes aux personnes[47].
D’autres infractions de prévention définissent de manière autonome une incitation à commettre des infractions indépendamment de leur réalisation, consistant aux termes de l’alinéa 2nd de l’article 121-7 du Code pénal soit en une provocation à la commission d’une infraction, soit en une fourniture d’instructions pour sa réalisation. Ainsi, l’incrimination de la direction ou de l’organisation d’une association de terroristes[48] peut être assimilée à la répression d’un acte consistant dans la fourniture d’instructions. L’art.421-2-5 du Code pénal définissant les délits de provocation directe à des actes de terrorisme et d’apologie de ce type d’actes assure la répression d’actes d’incitation générale à la commission d’infractions terroristes. Ces derniers délits ne sont pas à proprement parler une création de la loi n°2014-1353 du 13 novembre 2014 renforçant les dispositions relatives à la lutte contre le terrorisme[49] : ils ont été exfiltré au moyen de ce texte de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse[50]. En revanche, le fait d’adresser à une personne des offres ou des promesses, de lui proposer des dons, présents ou avantages quelconques, de la menacer ou d’exercer sur elle des pressions afin qu’elle commette certaines actes même lorsqu’il n’a pas été suivi d’effet, correspond à l’incrimination d’une incitation plus ciblée d’autrui à commettre des infractions terroristes[51], infraction connue également en droit commun[52].
Ainsi, le recours à la technique de l’incrimination de prévention en matière de terrorisme n’a a priori rien de spécifique tant sa structure ressemble à celle de l’incrimination de prévention utilisée pour prévenir d’autres types de délinquance. Pourtant, une étude plus attentive des infractions de prévention terroristes invite à constater une évolution particulièrement sensible de ce mode d’incrimination qui permet de saisir également des comportements qui n’entretiennent qu’un lien très distendu avec les infractions redoutées. C’est en ce sens que l’usage de ce mode d’incrimination devient spécifique en ce domaine car il a un caractère « systématique, expansif et englobant »[53].
B – Une digression de l’incrimination de prévention en matière de lutte contre le terrorisme
Cette orientation spécifique à la répression du terrorisme se traduit à la fois par une dilatation de l’incrimination de prévention dans sa structure (1) et par une dérivation de son objet (2).
1. La dilatation de l’incrimination de prévention
Alors que les infractions de prévention précédemment évoquées sont constituées d’actes préparatoires ou d’actes de complicité érigés en incriminations autonomes, d’autres infractions définies par le Code pénal dans la partie réservée à l’énumération des actes de terrorisme consistent en des comportements eux-mêmes préparatoires à des infractions de prévention terroristes ou d’aide apportées à de telles infractions : elles permettent en quelque sorte une incrimination de prévention au carré.
Les comportements ainsi réprimés sont périphériques à d’autres infractions de prévention de sorte que le lien avec les infractions redoutées d’atteintes aux biens et aux personnes est extrêmement ténu.
Pour exemple, la provocation à la participation à un groupement ou à une entente terroriste, même non suivie d’effet, qui correspond à ce que l’on pourrait nommer un recrutement, constitue clairement un acte d’incitation à la commission de l’infraction de participation à une association terroriste, elle-même infraction de prévention, et incriminé de manière spécifique. Créée par la loi n°2012-1432 du 21 décembre 2012 relative à la sécurité et à la lutte contre le terrorisme[54], cette infraction est prévue à l’article 421-2-4 du Code pénal[55]. De même, le délit d’entrave aux procédures de blocage de sites djihadistes tel que défini à l’article 421-2-5-1 du Code pénal depuis la loi n°2016-731 du 3 juin 2016[56] a vocation à empêcher la commission du délit de consultation habituelle de tels sites prévu à l’article 421-2-5-2 du Code pénal qui est lui-même une infraction de prévention. Enfin, l’incrimination de la diffusion de recettes pour la fabrication d’engins explosifs[57] constitue un acte d’aide appréhendé de manière autonome pour la réalisation de l’infraction, elle-même de prévention, de participation à une association terroriste ou à une entreprise individuelle de même nature.
Ajoutons à cela la possibilité d’une répression de la complicité de toutes les infractions de prévention et la répression de leur tentative selon les modalités prévues par la loi : la tentative de tous les crimes de prévention terroristes est punissable, même si la doctrine a pu considérer qu’elle serait sans doute difficile sinon impossible à retenir[58] ; quant à la tentative des délits de prévention terroristes et conformément à l’article 121-4 du Code pénal[59], le législateur prévoit sa répression dans certains cas : il en est ainsi de l’art.421-5 al.3 du Code pénal qui incrimine la tentative du délit de financement d’une entreprise terroriste que nous avons pu qualifier d’infraction de prévention dans la mesure où il est constitué indépendamment de la constitution d’une telle entreprise[60]. Dès lors, le champ de la répression s’en trouve élargi d’autant, le nombre de personnes susceptibles d’être concernées augmenté.
A côté de cette première expression de la digression de ce mode d’incrimination dans le périmètre de la répression du terrorisme, une autre illustration nous est donnée par le choix législatif d’une répression pénale de comportements satellites aux infractions terroristes redoutées. Cette logique d’une intervention pénale « hyper-anticipée » conduit au développement d’infractions de prévention qui ne sont ni en relation causale, ni même en relation de proximité avec les dommages dont l’évitement est recherché.
2. La dérivation de l’incrimination de prévention
Cette répression centrifuge est permise par une évolution de la technique-même d’incrimination de prévention comme dispositif de lutte contre le terrorisme, conduisant à repousser les bornes de la pénalité de manière inédite. Cette forme d’incrimination assure ainsi l’appréhension pénale de comportements sans lien direct avec les actes terroristes redoutés. Cette répression intégrée se traduit par la multiplication d’ « infractions administrativo-pénales »[61].
Ces infractions de prévention d’un nouveau genre forment la bordure externe d’une répression qui intervient sous forme de cercle concentrique s’éloignant toujours plus du cœur du droit pénal spécial terroriste composé des infractions terroristes d’atteintes aux personnes et aux biens. S’opère dès lors pour cette répression périphérique un glissement du Code pénal vers le Code de la sécurité intérieure et la loi n° 55-385 du 3 avril 1955 relative à l’état d’urgence telle que modifiée par les lois de prorogation successives promulguées ces deux dernières années, qui définissent notamment de telles infractions de prévention. Bien que les textes ne fassent pas toujours référence à une volonté affichée d’éviter la commission d’infractions terroristes, c’est pourtant ce qui motive la création de pareilles incriminations : celles contenues dans le Code de la sécurité intérieure peuvent être qualifiées de pérennes à la différence de celles figurant dans la loi sur l’état d’urgence qui, par définition, n’ont vocation à exister que le temps pendant lequel sera maintenu l’état d’urgence.
Concernant les infractions administrativo-pénales pérennes, plusieurs illustrations peuvent en être données : la loi du 13 novembre 2014 a défini aux articles L.224-1 et s. du Code de la sacurité intérieure la procédure administrative d’interdiction de sortie du territoire applicable aux Français[62]. Outre cette décision d’interdiction qui peut être prise sous certaines conditions, il est imposé à la personne concernée l’obligation de restitution de son passeport et de sa carte nationale d’identité. Le fait de quitter ou de tenter de quitter le territoire français au mépris de l’interdiction ainsi posée est puni de trois ans d’emprisonnement et de 45.000 € d’amende, le défaut de restitution des documents d’identité sanctionné de deux ans d’emprisonnement et de 4.500 €[63]. Il n’y a ici aucun doute quant à l’intention du législateur qui est bien d’éviter la participation de la personne concernée à une entreprise terroriste en dehors du territoire national. En effet, l’article L.224-1 du Code de la sécurité intérieure énumérant les conditions devant être remplies pour qu’une telle décision d’interdiction puisse être prise, précise que cet individu doit projeter soit « des déplacements à l’étranger ayant pour objet la participation à des activités terroristes », soit « des déplacements à l’étranger sur un théâtre d’opérations de groupements terroristes, dans des conditions susceptibles de le conduire à porter atteinte à la sécurité publique lors de son retour sur le territoire français ». L’autre exemple pouvant être donné est celui du non-respect des restrictions pouvant être posées dans le cadre du contrôle administratif décidé à l’égard de la personne de retour en France « qui a quitté le territoire national et dont il existe des raisons sérieuses de penser que ce déplacement a pour but de rejoindre un théâtre d’opérations de groupements terroristes dans des conditions susceptibles de la conduire à porter atteinte à la sécurité publique lors de son retour sur le territoire français »[64]. Peuvent être décidées les obligations de résider dans un périmètre géographique déterminé, de se présenter périodiquement aux services de police ou aux unités de gendarmerie[65], de déclarer son domicile et tout changement de domicile, ainsi que l’interdiction de « se trouver en relation directe ou indirecte avec certaines personnes, nommément désignées, dont il existe des raisons sérieuses de penser que leur comportement constitue une menace pour la sécurité et l’ordre publics »[66], pendant un délai maximum légalement prévu. Issu de la loi du 3 juin 2016 précitée, l’article L.225-7 du Code de la sécurité intérieure incrimine le fait de se soustraire à ces obligations et interdiction et prévoit au titre des peines encourues trois ans d’emprisonnement et 45.000 € d’amende.
Si ces incriminations sont pensées comme rempart à la commission d’infractions de terrorisme, elles ne sont pas contenues dans le Code pénal et n’intègrent donc pas la catégorie des actes de terrorisme. Pourtant, sont prévues des peines plus élevées que certaines encourues par les auteurs de comportements définis aux articles 421-1 et suivants du Code pénal. Par ailleurs, il n’est pas certain qu’elles soient encore fondées sur un « principe de prévention ». Elles traduisent plutôt une immixtion du « principe de précaution » dans le droit pénal. Il s’agit d’incriminer ici des comportements très en amont d’hypothétiques actes terroristes tels que définis par le Code pénal, si bien que c’est en réalité un lien de causalité fantasmé qui fonde à ce stade la répression. Cette affirmation n’est pas démentie par l’indication selon laquelle l’interdiction du territoire peut être décidée « lorsqu’il existe des raisons sérieuses de penser » que la personne projette les déplacements précités ou un contrôle des retours exercé lorsqu’« il existe des raisons sérieuses de penser que (son) comportement constitue une menace pour la sécurité et l’ordre publics », mais sans précision sur la source de ces « raisons sérieuses », ce qui conduit à s’interroger sur le degré d’exigence probatoire requis[67].
Cet ensemble de remarques vaut aussi pour les infractions de prévention temporaires contenues dans la loi n°55-385 du 3 avril 1955 relative à l’état d’urgence modifiée. L’article 13 de ladite loi fait de la violation des différentes interdictions et obligations qui accompagnent les mesures administratives décidées dans le cadre de l’état d’urgence, des infractions dont on ne peut douter, compte tenu du contexte, qu’elles aient pour justification l’évitement d’infractions terroristes : il s’agit donc d’infractions de prévention. Ainsi par exemple, le non-respect de la fermeture provisoire de certains lieux et de la tenue de réunion (art.8) et le non-respect de l’obligation de remettre des armes (art.9) sont punis de six mois d’emprisonnement et de 7.500 € d’amende. Le non-respect des horaires et du lieu de l’assignation à résidence administrative décidée en application de l’article 6 de la loi de 1955 est puni de trois ans d’emprisonnement et de 45.000 € d’amende. Pour la mise en œuvre de cette mesure administrative, sont enfin punis d’un an d’emprisonnement et de 15.000 € d’amende le manquement à l’obligation de se présenter périodiquement aux services de police ou de gendarmerie, de remettre des documents justificatifs d’identité, la violation de l’interdiction d’entrer en contact avec telles personnes désignées et le non-respect du placement sous surveillance électronique mobile. A cela, il convient d’ajouter la reconstitution d’association ou de groupement ayant fait l’objet d’une dissolution par décret en Conseil des Ministres pour la raison qu’ils participaient à la commission d’actes portant une atteinte grave à l’ordre public, facilitaient ou incitaient à leur commission (art.6-1), de tels agissements étant punis, par renvoi aux articles 431-15 et 431-17 à 431-21 du Code pénal, de peines pouvant s’élever jusqu’à sept ans d’emprisonnement et 100.000 € d’amende. Il s’agit encore d’infractions qui ont vocation à éviter de manière extrêmement anticipée la commission d’infractions terroristes, si bien que ce qui est incriminé est là encore le seul risque de réalisation de telles infractions.
Cette dernière variété d’infractions de prévention ne saisit pas des actes préparatoires mais des actes simplement antécédents ou préalables à des comportements terroristes plus graves dont la survenance est à ce stade seulement hypothétique. La législation pénale en matière de terrorisme se caractérise ainsi par le recours renforcé à un mode d’incrimination s’apparentant à une véritable « technique de l’encerclement »[68].
Les manifestations diverses du déploiement des infractions de prévention terroristes participent d’une « approche proactive du droit pénal du terrorisme »[69]. L’usage intensif en ce domaine de cette forme d’incrimination se double d’une extension de son champ d’action, ce qui permet de repousser toujours un peu plus loin les limites de la répression, sans certitude toutefois de son efficacité dans la lutte contre le terrorisme. Elles opèrent une sorte de « dilatation de la responsabilité »[70] qui n’est pas neutre au regard du respect des droits et libertés fondamentaux. De plus, l’attachement du législateur à l’incrimination préventive comme moyen privilégié de défense contre le terrorisme a des incidences sur le droit pénal.
II – Les implications du déploiement des infractions de prévention terroristes
L’engouement non maîtrisé du législateur à recourir à l’infraction de prévention notamment en matière de terrorisme n’est pas sans conséquence sur la manière dont évolue le droit pénal contemporain : l’utilisation de ce mode d’incrimination perturbe la physionomie classique du droit pénal (A) dont l’intégrité n’est finalement protégée que de manière incertaine (B).
A – Une perturbation constatée du droit pénal
Le dispositif antiterroriste proposé par le droit pénal substantif est donc essentiellement fondé sur une intervention préventive du législateur. Celle-ci contribue, d’une part, à une altération du droit pénal au regard de sa cohérence (1) et conduit, d’autre part, à son instrumentalisation (2).
1. L’altération entretenue du droit pénal
Comme en d’autres domaines, le recours à la technique de l’incrimination de prévention en matière de lutte contre le terrorisme contrarie, mais sans doute de manière plus appuyée ici, certaines théories générales du droit pénal. En outre, alors que l’on pourrait s’attendre à ce que soit applicable aux infractions de prévention terroristes un régime particulier eu égard à leur structure spécifique, il n’en est rien et c’est au contraire un régime totalement illisible auquel elles sont soumises.
Le droit pénal français est un droit pénal objectif donc attaché au fait, à l’acte, au comportement, laissant hors d’atteinte la seule intention conformément à l’idée selon laquelle « le droit pénal ne s’occupe pas du for intérieur qui est le domaine réservé de la morale et de la religion »[71]. A l’occasion de la réforme du Code pénal en 1992, cette conception classique du droit pénal a été réaffirmée avec force, le législateur choisissant de procéder dans la partie spéciale du Code pénal à l’incrimination d’un « fait »[72] et de définir comme par le passé une « matérialité infractionnelle »[73]. De même, dans la partie générale de ce Code, ont été définies la tentative et la complicité punissables, s’inspirant pour ce faire des définitions antérieures données par le Code pénal de 1810. La lecture de l’article 121-5 du Code pénal nous apprend que « la tentative est constituée dès lors que, manifestée par un commencement d’exécution, elle n’a été suspendue ou n’a manqué son effet qu’en raison de circonstances indépendantes de la volonté de son auteur ». Restent, par conséquent et par principe, en dehors du champ de la répression les actes se situant en deçà d’un commencement d’exécution sur l’iter criminis tels que les actes préparatoires, pour la raison qu’il s’agit d’actes univoques ne permettant pas de révéler de manière certaine l’intention infractionnelle. L’article 121-7 du Code pénal impose, quant à lui, pour que puisse être retenue une complicité, un acte principal punissable[74]. Si cette condition n’est pas remplie, l’acte d’aide, d’assistance ou d’instigation tel que décrit par cette disposition légale reste hors d’atteinte de la répression comme l’a indiqué une jurisprudence bien connue et commentée[75].
Or, par une déformation des théories générales de la tentative et de la complicité, sont créées des infractions de prévention qui permettent l’appréhension pénale de comportements situés en amont des actes dommageables redoutés[76]. L’exemple des infractions de prévention en matière de terrorisme est sans nul doute une illustration extrême de ce mouvement tant cette altération des règles de la tentative et de la complicité conduit en ce domaine à l’appréhension d’un nombre important de comportements très variés, comme nous l’avons vu, sans lien de causalité avéré pour certains avec les actes lésionnaires craints, incriminés en raison de leur seule potentialité d’y conduire. Le recours au mode d’incrimination de prévention pour lutter contre le terrorisme est donc une des illustrations d’un double discours de politique criminelle tenu dans le Code pénal et dénoncé par la doctrine[77] : la structure matérielle de certaines incriminations contenues dans la partie spéciale du Code pénal est définie en contradiction avec les règles générales de la tentative et de la complicité énoncées dans la partie générale de ce même Code. Prenant le prétexte d’un renforcement de la sécurité dont nul ne pourrait contester la nécessité en ce domaine, le législateur défend une élasticité de la responsabilité pénale. La multiplication des infractions de prévention terroristes traduit une « aporie du droit pénal face au terrorisme, en tout cas du droit pénal « classique » (…) construit sur le modèle de la responsabilité individuelle d’un auteur sanctionné pour avoir matériellement et en toute connaissance de cause commis un acte qualifié criminel en général directement dommageable pour les personnes ou les biens »[78]. Ces concessions faites avec les théories de la participation pénale encore plus ébréchées en cette matière normalisent une répression pénale fondée sur une once de matérialité à laquelle il est difficile sinon impossible de rattacher l’intention réprouvée, de sorte que l’on assiste dans le même temps à une « dilution du principe de culpabilité »[79]. L’utilisation de l’incrimination de prévention permet enfin au législateur de s’affranchir de la règle de la discontinuité du droit pénal, garante d’un droit pénal démocratique, puisque presque tout comportement en lien même très lâche avec une entreprise collective ou individuelle terroriste peut conduire au prononcé d’une peine.
Si la création d’infractions de prévention en matière de terrorisme heurte dans sa cohérence un droit pénal objectif, protecteur des libertés individuelles, cette cohérence s’en trouve également affectée par la complexité du régime qui leur est applicable.
Compte tenu de la différence structurelle entre les infractions de lésion terroristes et les infractions de prévention terroristes, l’application d’un régime différencié procédural aurait pu être imaginée. En parcourant le chapitre premier du titre II « Du terrorisme » contenu dans le Livre IV relatifs aux crimes et délits contre la nation, l’Etat et la paix publique du Code pénal, on s’aperçoit que malgré l’intitulé « Des actes de terrorisme » qui pourrait faire penser qu’un tel chapitre réunit exclusivement des comportements incriminés recevant cette qualification, force est de constater qu’il n’en est rien. En effet, les articles 421-1 à 421-6 incriminent des comportements tantôt qualifiés expressément d’actes de terrorisme[80], tantôt non qualifiés comme tels[81]. Si les actes incriminés dénommés « actes de terrorisme » relèvent de la catégorie des infractions de lésion[82] ou de la catégorie des infractions de prévention[83], en revanche, le défaut de qualification légale expresse ne concerne que des comportements incriminés comme infractions de prévention. Pour autant, l’existence ou non d’une telle qualification expressément donnée par le texte incriminateur ne semble pas avoir d’incidence sur le régime procédural applicable. En effet, le Code de procédure pénale prévoit l’application de règles de procédure pénale dérogatoires pour le traitement des infractions de terrorisme[84] sans faire a priori de distinction. L’article 706-16 du Code de procédure pénale dispose en son 1er alinéa que « Les actes de terrorisme incriminés par les articles 421-1 à 421-6 du code pénal, ainsi que les infractions connexes sont poursuivis, instruits et jugés selon les règles du présent code sous réserve des dispositions du présent titre ».
Cependant, dans le même titre, l’article 706-24-1 prévoit que les dispositions spéciales en matière de garde à vue et de perquisitions applicables à la criminalité et la délinquance organisée dont relève le terrorisme[85] ne sont pas applicables aux infractions définies aux articles 421-2-5 à 421-2-5-2 du Code pénal[86], laissant en revanche la possibilité d’appliquer pour le traitement de ces infractions les autres dispositions particulières en matière d’interceptions de correspondances, de sonorisation et fixation d’images de certains lieux et véhicules, de captation de données informatiques[87]. De telles prévisions textuelles inspirent plusieurs remarques : premièrement, les infractions ainsi visées par l’exclusion représentent seulement certaines des infractions de prévention terroristes et les faits incriminés ne sont pas expressément qualifiées d’actes de terrorisme ; deuxièmement, n’est pas visé dans cette liste l’article 421-2-4 qui définit également une infraction de prévention réprimant un comportement non qualifié d’acte de terrorisme ; troisièmement et enfin, il est réservé un sort particulier à la première infraction de cette liste, le délit d’apologie et de provocation au terrorisme qui est un délit de prévention et qui était également un délit de presse. Afin de prendre en compte une « réalité d’ordre criminologie », ce délit a vu son régime évolué dans le sens d’un durcissement[88] d’abord avec la loi n°2012-1432 du 21 décembre 2012 qui a augmenté le délai prescription de l’action publique pour cette infraction et prévu la possibilité du placement en détention provisoire, puis avec la loi n°2014-1353 du 13 novembre 2014 qui a extrait ce délit de la loi sur la liberté de la presse de 1881 pour l’insérer dans un nouvel article 421-2-5 du Code pénal[89]. Mais, dans le même temps, le traitement de ce délit échappe à l’application de règles procédurales plus coercitives applicables aux infractions terroristes. Ces seules remarques montrent l’absence d’un régime procédural défini en considération de la structure matérielle de l’infraction.
Par ailleurs, que convient-il d’entendre par « infractions connexes » au sens de l’article 706-16 du Code de procédure pénale, soumises au même titre que les actes de terrorisme à une procédure pénale dérogatoire au droit commun ? Peut-on y inclure les infractions de prévention prévues par le Code de la sécurité intérieure ou encore celles définies par la loi sur l’état d’urgence et précédemment évoquées ? Une réponse peut être en partie trouvée à la lecture de l’article 706-25-4 du Code de procédure pénale qui détermine le contenu du fichier judiciaire national automatisé des auteurs d’infractions terroristes. L’inscription dans ce fichier concerne les décisions prises relatives aux « infractions mentionnées aux articles 421-1 à 421-6 du code pénal, à l’exclusion de celles mentionnées aux articles 421-2-5 à 421-2-5-2 du même code, ainsi que les infractions mentionnées aux articles L. 224-1 et L. 225-7 du code de la sécurité intérieure ». On retrouve ici la même exclusion que celle précédemment signalée. En revanche, font l’objet d’une inscription dans ce fichier les décisions relatives à la violation de l’interdiction de sortie du territoire et à la violation des obligations fixées pour le contrôle des retours sur le territoire national que nous avons qualifiées d’infractions de prévention terroristes d’un genre nouveau. Enfin, l’exclusion concernant certaines infractions de prévention terroristes des procédures dérogatoires se retrouve encore pour l’application de dispositions concernant l’exécution des peines. Comme l’a souligné la doctrine[90], des lois du 3 juin et du 21 juillet 2016 a émergé un véritable droit spécial de l’application des peines en matière de terrorisme. Ainsi, la loi du 3 juin 2016 a durci les conditions d’octroi de la libération conditionnelle à l’égard de la personne « condamnée à une peine privative de liberté pour une ou plusieurs infractions mentionnées aux articles 421-1 à 421-6 du code pénal, à l’exclusion de celles définies aux articles 421-2-5 à 421-2-5-2 du même code »[91]. La loi du 21 juillet 2016 a exclu quant à elle du bénéfice de la suspension et du fractionnement de peine[92], de la semi-liberté et du placement à l’extérieur[93] et des crédits de réduction de peine[94] les personnes condamnées pour les infractions terroristes des articles 421-1 à 421-6 du Code pénal, à l’exception encore de celles définies aux articles 421-2-5 à 421-2-5-2 du même Code. Là encore, ce n’est pas la qualification d’infractions de prévention qui dicte cette différence de régime puisque s’agissant de celles les plus sévèrement punies, délits pour lesquels une peine de dix ans d’emprisonnement est encourue[95] ou crimes[96], la période de sûreté s’applique sans distinction selon les modalités définies à l’article 421-7 du Code pénal et la peine de suivi socio-judiciaire de l’art.131-36-1 du même Code, applicable en matière de terrorisme depuis la loi du 3 juin 2016, est encourue quelle que soit l’infraction terroriste considérée[97].
Même si les infractions de prévention possèdent une identité structurelle, il faut se rendre à l’évidence : celle-ci n’a pas d’incidence sur le régime auquel elles sont soumises tant au plan procédural qu’au plan de l’exécution des peines. C’est même un régime hétérogène qui leur est applicable et les critères retenus d’inclusion ou d’exclusion pour la mise en œuvre de ces règles dérogatoires, ne sont pas clairement identifiables.
Ce chamboulement du droit pénal opéré par un recours appuyé à l’incrimination de prévention dans le champ de la lutte antiterroriste cache une fonction utilitaire prégnante de ce mode d’incrimination.
2. L’instrumentalisation assumée du droit pénal
Plus qu’une atteinte à la cohérence interne du droit pénal, l’emploi de l’incrimination de prévention en matière de terrorisme porte également atteinte à sa fonction-même.
Il convient d’avoir à l’esprit que la législation antiterroriste est caractérisée par un double mouvement parfaitement décrit par nombre de commentateurs. En assurant l’appréhension de comportements toujours plus en amont des actes lésionnaires terroristes, le droit pénal a empiété sur un domaine traditionnellement réservé à la police administrative : la prévention. Dans un temps très voisin, les autorités administratives ont vu augmenter leurs pouvoirs pour intervenir préventivement dans la lutte contre le terrorisme grâce aux prérogatives qui leur ont été accordées en matière de renseignement[98], aux pouvoirs d’enquête renforcés et à la multiplication des mesures restrictives de nombreuses libertés pouvant être décidées en application du Code de la sécurité intérieure ou de la loi de 1955 relative à l’état d’urgence modifiée[99]. Ainsi, s’est progressivement dessiné « un basculement vers la revanche du droit administratif »[100] dans la lutte antiterroriste, le droit pénal apparaissant comme un « droit supplétif » permettant de sanctionner le non-respect de mesures administratives.
L’infraction de prévention est donc un mode d’incrimination qui fait de la fonction préventive du droit pénal une fonction cardinale, gommant la distinction entre le droit administratif tourné vers la prévention et le droit pénal orienté naturellement vers la répression. Mais il ne faut pas se méprendre : la prévention dont il s’agit n’est qu’un prétexte et l’incrimination de prévention sert en réalité à renforcer répression[101], à étendre le filet pénal au-delà de ce que permet le droit répressif classique. Ce droit pénal post-moderne[102] n’a plus vocation seulement à réprimer un comportement pour éviter sa réitération, traduction de la fonction de prévention classique du droit pénal, mais à réprimer un comportement en raison de la dangerosité qu’il représente, qui lui est intrinsèque, et parfois même en raison de la dangerosité qui pourrait en découler.
La dernière génération d’infractions de prévention décrite, que la doctrine nomme « infractions administrativo-pénales », est une des expressions paroxystiques de cette mutation du droit pénal classique puisqu’elle permet la répression de comportements qui ne sont en réalité que la violation de mesures administratives. Si cette intervention pénale ne permet pas d’appréhender un comportement s’inscrivant ostensiblement dans un processus terroriste, elle autorise le déclenchement de poursuites, le début d’une enquête et un glissement aisé vers des qualifications contiguës comme la participation à un groupement ou entente terroriste ou à une entreprise individuelle de même nature qui permettront l’application des règles dérogatoires de procédure pénale, de mesures coercitives administratives ou pénales ainsi que des sanctions pénales et administratives[103].
Par ailleurs, l’utilisation de cette forme d’incrimination préventive emporte au moins deux autres conséquences : elle permet en premier lieu la sanction dans un contexte d’état d’urgence ou en dehors d’un tel cadre du non-respect de mesures administratives restrictives de libertés fondamentales telle que la liberté d’aller et de venir ou la liberté de réunion.
Elle pourrait augurer en second lieu une sollicitation renforcée du juge pénal pour vérifier la légalité des actes administratifs en application de l’article 111-5 du Code pénal dès lors que des poursuites seraient engagées sur le fondement des textes définissant de telles infractions de prévention. Les développements jurisprudentiels récents peuvent néanmoins faire douter de l’essor d’un tel contentieux. Par une formule quelque peu énigmatique, l’article 14-1 de la loi de 1955 prévoit qu’« A l’exception des peines prévues à l’article 13, les mesures prises sur le fondement de la présente loi sont soumises au contrôle du juge administratif (…) ». Cette disposition semble a priori écarter le juge judiciaire du contrôle de telles mesures administratives. Mais il peut être amené à le réaliser, certes a posteriori et à titre incident, quand de la légalité de la mesure administrative contenant des obligations ou interdictions dépend la constitution de l’infraction de prévention consistant dans leur violation. Aux termes de l’article 111-5 du Code pénal, « les juridictions pénales sont compétentes pour interpréter les actes administratifs, réglementaires ou individuels et pour en apprécier la légalité lorsque, de cet examen, dépend la solution du procès pénal qui leur est soumis ». Il s’agit d’une expression de la plénitude de juridiction du juge pénal en même temps que d’une dérogation au principe de séparation des autorités administrative et judiciaire. Cette exception d’illégalité doit être soulevée in limine litis et peut l’être d’office par le juge. La Cour de cassation a jugé que si la culpabilité ou l’innocence d’un individu dépendait de la légalité d’un acte administratif, le juge pénal n’était pas tenu de surseoir à statuer dans l’attente de la décision du juge administratif[104] et il avait même pour devoir de statuer sur toute question dont dépend selon lui l’application de la loi pénale[105]. Les premières décisions rendues dans le cadre de l’état d’urgence sur le fondement de l’article 111-5 du Code pénal concernaient exclusivement la légalité de perquisitions administratives et l’incidence de leur éventuelle illégalité sur la validité des actes accomplis au cours de la procédure pénale[106]. Cependant, la Cour de cassation a très récemment rendu une décision, étonnamment non publiée malgré l’intérêt certain qu’elle présente, relative à la contestation de la légalité d’assignations à résidence sur le fondement de l’article 111-5 précité, à l’occasion de poursuites engagées contre deux personnes faisant l’objet de telles mesures en application de la loi de 1955, pour violation de l’obligation de résidence imposée. Condamnés à cinq et trois mois d’emprisonnement pour cette raison par la Cour d’appel de Colmar, elles forment un pourvoi. La Cour de cassation répond au visa des articles 2 de la DDHC, 111-5 du Code pénal et 6 de la loi de 1955 modifiée. Elle rappelle que « le droit à la sûreté garanti par l’article 2 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen commande au juge pénal, lorsqu’il envisage, dans un cas prévu par la loi, de prononcer une peine privative de liberté à l’encontre d’une personne poursuivie au seul motif qu’elle s’est soustraite à l’exécution d’un acte administratif la concernant, de s’assurer préalablement que l’obligation dont la violation est alléguée était nécessaire et proportionnée ». Elle reprend le contenu des dispositions du Code pénal et de la loi de 1955 précitées. La Haute juridiction censure l’arrêt des juges du fond en indiquant que « s’il appartient au prévenu, poursuivi pour non-respect de l’assignation à résidence prononcée par le ministre de l’intérieur dans le cadre de l’état d’urgence, de préciser sur quels éléments porte sa contestation des raisons retenues par l’arrêté ministériel permettant de penser que son comportement constitue une menace pour la sécurité et l’ordre publics, il incombe au juge répressif, compétent pour apprécier la légalité des arrêtés d’assignation à résidence, de répondre aux griefs invoqués par le prévenu à l’encontre de cet acte administratif, sans faire peser la charge de la preuve sur le seul intéressé et en sollicitant, le cas échéant, le ministère public afin d’obtenir de l’autorité administrative les éléments factuels sur lesquels celle-ci s’était fondée pour prendre sa décision »[107]. Cette décision a priori favorable aux prévenus fait écho à deux précédents arrêts rendus le 28 mars 2017 par la même juridiction[108] publiées au Bulletin criminel qui imposent au juge pénal, avant de statuer sur l’exception d’illégalité dont il est saisi, de mettre en mesure l’autorité administrative auteur de la mesure litigieuse d’apporter, par l’intermédiaire du Ministère public, les éléments factuels à partir desquels la décision a été prise. Ces décisions ont été vivement critiquées en ce qu’elles inventaient une « procédure de consultation obligatoire et préalable de l’autorité administrative » et « offrait une session de rattrapage » à celle-ci pour préciser la motivation des décisions prises dans le cadre de l’état d’urgence[109]. Pareille exigence prétorienne ne risque-t-elle pas dès lors de détourner de l’utilisation d’une telle voie de droit quiconque sera poursuivi pénalement pour n’avoir pas respecté les mesures administratives prises dans le cadre de l’état d’urgence ou en application du Code de la sécurité intérieure ?
Ceci nous amène à remarquer avec d’autres auteurs une « intrication du droit pénal et du droit administratif »[110], des « interférences entre le droit pénal et le droit administratif »[111], un « brouillage entre police judiciaire et police administrative, autrement dit entre répression et prévention »[112], la « création d’une zone de chevauchement entre police administrative et police judiciaire »[113]. Un tel constat conduit à s’interroger de nouveau sur la pertinence du critère retenu par le Conseil constitutionnel fondé sur la nature administrative de la mesure décidée, en dehors de celle privative de liberté, pour déterminer la compétence du juge administratif pour le contrôle desdites mesures.
Aussi, pour les raisons précédemment évoquées et comme l’a souligné une auteure[114], cet ébranlement du droit pénal classique est-il parfaitement assumé par le législateur et justifié par le contexte terroriste. La multiplication des infractions de prévention en ce domaine est une des illustrations emblématiques d’un « droit pénal de la dangerosité » qui est « un droit pénal rongé de l’intérieur »[115].
La dégradation constatée de la conception objective du droit pénal sous l’effet notamment d’un recours considérable à l’incrimination préventive en matière de terrorisme apparait difficilement réversible. S’il n’est pas possible d’en appeler à la sagesse du législateur, le Conseil constitutionnel peut-il contenir la prolifération des infractions de prévention en ce domaine et participer ainsi à la protection de ce droit pénal perturbé ?
B – Une protection contrastée du droit pénal
Erigé en véritable « acteur de la politique pénale » grâce à ses censures et réserves d’interprétation à l’occasion de l’examen de dispositions législatives pénales[116], le Conseil constitutionnel peut-il par sa jurisprudence infléchir la création d’infractions de prévention terroristes par la censure des dispositions qui les définissent pour la raison qu’elles portent atteintes aux principes à valeur constitutionnelle s’appliquant en droit pénal ? L’intensité du contrôle opéré d’où découle le degré de protection accordée aux principes dont la méconnaissance est soutenue à l’occasion de sa saisine pourrait être un début de réponse (1)(2).
1. Un contrôle relâché exercé par le Conseil constitutionnel
Les censures fondées sur une violation du principe de légalité des délits et des peines et du principe de proportionnalité des peines pourraient inviter le législateur à limiter le recours à un tel mode d’incrimination. Mais il semble que Conseil soit peu enclin à s’engager dans cette voie.
Par leur nature-même, les infractions de prévention s’appuient sur un élément matériel et un élément moral équivoques mettant pour cette seule raison à mal le principe de légalité dont le Conseil constitutionnel rappelle depuis longtemps qu’il implique une définition des infractions en termes suffisamment clairs et précis[117]. La trop grande distance temporelle et causale séparant les actes incriminés, actes préparatoires voire simplement actes antécédents, et les comportements lésionnaires redoutés empêche une telle précision. Pour illustrer un droit pénal devenu « liquide » sous l’effet de revendications toujours plus sécuritaires, deux auteurs prennent précisément l’exemple des infractions de prévention réprimant la préparation d’infractions ou même la préparation de préparation[118] et y voient « un affaissement voire un écroulement du principe de légalité » tel que défini à l’article 8 DDHC et à l’article 7 Conv. EDH[119]. La doctrine n’a eu de cesse que de relever cette contrariété avec le principe de légalité à propos de maintes infractions de prévention terroristes. Ainsi par exemple, elle a pu dénoncer la « matérialité douteuse » de l’infraction de non-justification de ressources de l’article 421-2-3 du Code pénal ou la « matérialité incertaine » des infractions de fourniture d’armes, de financement, de participation à une association terroriste[120]. Une auteure a encore remarqué que « réduite à l’adoption d’un comportement ou à l’emploi d’un procédé la matérialité du soutien au terrorisme (confinait) au néant »[121]. A l’occasion du transfert précédemment évoqué du délit d’apologie et de provocation au terrorisme dans le Code pénal à l’article 421-2-5 par la loi n°2014-1353 du 13 novembre 2014, les commentateurs de cette loi n’ont pas manqué d’émettre des doutes quant au respect de la légalité pénale du texte incriminateur en raison de la disparition de la référence textuelle aux moyens utilisés pour commettre les faits incriminés[122].
Cependant, le Conseil constitutionnel ne semble pas très réceptif à ces remarques comme l’atteste ce qui suit.
L’article 421-2-1 du Code pénal incrimine comme acte terroriste « le fait de participer à un groupement formé ou à une entente établie en vue de la préparation, caractérisée par un ou plusieurs faits matériels, d’un des actes de terrorisme mentionnés aux articles précédents », sans que les modalités de participation, ni les faits matériels qui donnent corps à cette préparation collective, soient précisément déterminés. Cette disposition insérée dans le Code pénal par la loi n°96-647 du 22 juillet 1996 n’a pas été déférée à l’examen du Conseil alors même que d’autres dispositions de ce texte l’avaient été[123]. Une saisine sur QPC n’aurait cependant guère eu de chance de conduire à la reconnaissance d’une violation du principe de légalité. En effet, par sa décision du 2 mars 2004[124], le Conseil a considéré que « n’est ni obscure, ni ambiguë l’expression » bande organisée « , qui est définie par l’article 132-71 du code pénal comme » tout groupement formé ou toute entente établie en vue de la préparation, caractérisée par un ou plusieurs faits matériels, d’une ou de plusieurs infractions « » (Cons.14). Par la suite, à l’occasion de la création de l’infraction de l’article 222-14-2 du Code pénal pour l’incrimination de la préparation d’actes de violences, le Conseil, interrogé sur la méconnaissance par cette disposition du principe de légalité, a indiqué que « la nouvelle incrimination emprunte à la définition de la circonstance aggravante de crime organisé prévue par l’article 132-71 du code pénal les termes de » groupement » et de » préparation, caractérisée par un ou plusieurs faits matériels « », que « ces termes sont repris dans les éléments constitutifs du délit d’association de malfaiteurs prévu par l’article 450-1 du code pénal » et que « la participation constatée est » en vue de la préparation » d’infractions spécifiées », pour conclure que « le délit est ainsi défini en des termes suffisamment clairs et précis pour ne pas méconnaître le principe de légalité des délits »[125]. Nul besoin donc d’interroger le Conseil, la définition de l’incrimination de l’article 421-2-1 du Code pénal sera, pour lui, conforme aux exigences constitutionnelles découlant du principe de légalité. La rédaction répondant aux impératifs de précision et de clarté écarte-t-elle pourtant toute difficulté d’interprétation ? La réponse est manifestement négative si l’on en croit une récente décision de la chambre criminelle de la Cour de cassation venue rappeler que la qualification criminelle de l’association terroriste de l’article 421-6 du Code pénal devait être retenue nonobstant la démonstration de la connaissance précise et concrète par le participant des infractions particulières projetées dès lors qu’il s’était associé à une entreprise terroriste[126].
Par la voie d’une QPC, un requérant reprochait aux dispositions incriminant la violation de l’interdiction administrative de sortie du territoire français et le refus de remise des documents d’identité de méconnaitre le principe de légalité des délits et des peines et de prévisibilité de la loi. Il considérait que les conditions nécessaires au prononcé de l’interdiction de sortie du territoire étaient insuffisamment déterminées. A propos de ces délits que nous avons présentés comme étant une figure ultime des infractions de prévention, le Conseil a répondu, en se contentant d’en reprendre les définitions que « ces infractions, qui ne peuvent être constituées que lorsqu’une interdiction de sortie du territoire a été prononcée, sont définies de manière claire et précise » et « que, par suite, le grief tiré de la méconnaissance du principe de légalité des délits et des peines doit être écarté »[127].
Quant aux dispositions de l’article 421-2-5-2 du Code pénal définissant le délit de consultation habituelle de sites provoquant à la commission d’actes terroristes ou faisant l’apologie de tels actes, elles ont également été déférées à l’examen du Conseil constitutionnel à la suite d’une QPC ayant conduit à sa saisine. Outre le reproche d’une atteinte excessive portée à la liberté de communication par les dispositions contestées, le requérant considérait qu’elles contrevenaient également au principe de légalité des délits et des peines et à l’objectif de valeur constitutionnelle d’accessibilité et d’intelligibilité de la loi en raison de l’imprécision des termes employés pour la définition du délit. Cette analyse est aussi celle d’une partie de la doctrine[128]. Dans sa décision n°2016-611 QPC du 10 février 2017[129], le Conseil fait cependant le choix de ne pas répondre sur le terrain de la méconnaissance du principe de légalité. Mais les juges indiquent, s’interrogeant sur la portée du fait justificatif contenu dans le même texte[130], que « l’incrimination instituée (…) ne requiert pas que l’auteur des faits soit animé d’une intention terroriste. Dès lors, les dispositions contestées font peser une incertitude sur la licéité de la consultation de certains services de communication au public en ligne et, en conséquence, de l’usage d’internet pour rechercher des informations ». N’est-ce pas ici faire référence à un manque de prévisibilité du texte incriminateur et donc par suite à une méconnaissance du principe de légalité dont elle est un des attributs ? A l’occasion de la résurrection de cette incrimination par la loi n°2017-258 du 28 février 2017 relative à la sécurité publique[131] après l’abrogation par la décision du Conseil précitée du texte qui la définissait, le législateur ajoute que le délit ne saurait être constitué que « lorsque cette consultation s’accompagne d’une manifestation de l’adhésion à une idéologie exprimée sur ce service ». Cette précision apportée confirme qu’elle manquait auparavant mais elle a été considéré encore insuffisante[132].
Enfin, le dernier exemple choisi est celui du délit d’entreprise individuelle terroriste défini à l’article 421-2-6 du Code pénal. La proximité de ce délit avec celui de participation à une association terroriste[133] a été soulignée par la circulaire du 5 décembre 2014 de présentation de la loi du 13 novembre 2014[134], sans que cela puisse conférer au premier, au regard de sa définition, un brevet de conformité au principe de légalité. A la suite du renvoi par la Cour de cassation et par arrêt du 25 janvier 2017 d’une QPC devant le Conseil constitutionnel[135], le requérant et l’association intervenante « Ligue des droits de l’Homme » font valoir que les dispositions définissant ce nouveau délit méconnaissent notamment le principe de légalité des délits et des peines car les éléments constitutifs du délit sont définis de manière imprécise et incriminent de très nombreux comportements. Après avoir repris une formule fixée depuis longtemps dans sa jurisprudence et déjà citée[136], le Conseil s’empresse de souligner la complexité structurelle du délit qui consiste dans l’incrimination du « fait de préparer de manière individuelle la commission d’un acte terroriste », en précisant que plusieurs éléments doivent être réunis pour sa constitution. Il énumère les infractions terroristes visées par le texte dont la préparation est projetée, rappelle que cette préparation « doit être intentionnellement en relation avec une entreprise individuelle ayant pour but de troubler gravement l’ordre public par l’intimidation ou la terreur » et indique enfin que la « préparation doit être caractérisée par la réunion de deux faits matériels ». La longueur du texte incriminateur peut à elle seule convaincre que le législateur a eu le souci de se montrer précis dans la définition du délit. Mais le lecteur plus attentif de la décision du Conseil sera moins convaincu. Au lieu de s’intéresser à la précision et à la clarté de la définition du seul comportement incriminé, les juges relèvent que « les infractions dont la commission doit être préparée pour que le délit contesté soit constitué sont clairement définies par le paragraphe II de l’article 421-2-6 et par les dispositions du code pénal auxquelles cet article renvoie »[137]. Le Conseil rappelle également, dans le même paragraphe, que « la notion d’entreprise individuelle ayant pour but de troubler gravement l’ordre public par l’intimidation ou la terreur est énoncée en des termes d’une précision suffisante pour qu’il n’y ait pas méconnaissance du principe de légalité des délits et des peines ». Il mentionne la décision par laquelle il en avait jugé ainsi[138], de sorte qu’il n’y a pas matière à débat[139]. S’attachant davantage à la matérialité du délit, les conseillers de la rue Montpensier indiquent que la préparation doit être caractérisée par la réunion d’au moins deux faits matériels, c’est-à-dire un fait matériel principal tenant dans « le fait de détenir, de rechercher, de se procurer ou de fabriquer des objets ou des substances de nature à créer un danger pour autrui »[140] et un au moins des faits matériels complémentaires consistant dans le recueil de renseignements sur des lieux ou des personnes, l’entraînement ou la formation au combat, à la fabrication d’armes, à la conduite d’engins, la consultation de sites djihadistes ou encore le séjour à l’étranger sur un théâtre d’opérations de groupements terroristes[141]. Ceci précisé, le Conseil conclut d’une manière déroutante à l’absence de violation par les dispositions contestées du principe de légalité des délits et des peines : concernant l’élément moral du délit, il fait seulement mention de l’exigence d’une préparation « intentionnellement en relation avec une entreprise individuelle ayant pour but de troubler gravement l’ordre public par l’intimidation ou la terreur » (§8). Or, il n’est fait référence ici qu’à l’un des aspects de l’élément moral complexe qui caractérise ce délit et pour lequel il conviendrait d’exiger pour cette raison une définition claire et précise. A ce propos et commentant ce nouveau délit, la CNCDH n’avait-elle pas indiqué qu’« une définition plus précise de l’élément moral de ce nouveau délit (s’imposait) » avant de suggérer que « les nouvelles dispositions (devaient prévoir) que les actes accomplis par l’individu isolé ne (pouvaient) s’expliquer que par la volonté d’accomplir l’une des infractions visées par les nouveaux textes »[142] ? Quant à la définition de la matérialité du délit, la description détaillée des comportements constitutifs de la préparation incriminée semble devoir suffire au Conseil pour considérer qu’elle est conforme aux exigences liées au principe de légalité. Pourtant ici aussi et dans l’avis précité[143], la CNCDH avait noté que, parmi les comportements incriminés, « l’action de rechercher évoque une action fort imprécise car située trop en amont du commencement d’exécution de l’infraction », « pouvant donner lieu à une appréciation dangereusement subjective ». Après la promulgation de la loi ayant créé le délit, un auteur avait d’ailleurs prédit un « risque de rupture constitutionnelle en termes de nécessité et de légalité »[144]. Le Conseil constitutionnel censure partiellement les dispositions de l’article 421-2-6 du Code pénal pour la raison qu’est incriminé le fait de « rechercher… des objets ou des substances de nature à créer un danger pour autrui ». Mais il le fait de manière fort surprenante pour méconnaissance non pas du principe de légalité mais du principe de nécessité : il reproche au législateur d’avoir incriminé ce comportement « sans circonscrire les actes pouvant constituer une telle recherche dans le cadre d’une entreprise individuelle terroriste » (§17), ce qui fait pourtant plutôt penser à une critique formulée à l’endroit de la qualité rédactionnelle du texte incriminateur.
L’exigence de qualité dans la rédaction des textes définissant des incriminations de prévention n’est pourtant pas superflue. En effet, le « flou de l’incrimination » peut entraîner un « flou dans l’administration de la preuve »[145].
Compte tenu de la réticence du Conseil constitutionnel à censurer les dispositions définissant des infractions de prévention en se plaçant sur le terrain de la légalité criminelle, une protection du droit pénal contre l’assaut de ce type d’incriminations pourrait être envisagée à travers le contrôle du respect du principe de proportionnalité des peines.
La diversité des comportements incriminés au titre des infractions de prévention terroristes expliquent la variété des quanta des peines privatives de liberté et d’amende. Par définition, ne peuvent être prises en considération la réalité et la gravité des dommages redoutés pour la détermination de ces quanta. D’ailleurs, le législateur tient parfois expressément compte de cet élément pour opérer une gradation des peines : les comportements incriminés au titre du terrorisme écologique[146] sont punis de vingt ans de réclusion criminelle et de 350.000 € d’amende, là où ils sont punis de réclusion criminelle à perpétuité et de 750.000 € d’amende lorsqu’ils ont entraîné la mort d’une ou plusieurs personnes[147]. Si l’on s’en tient à l’examen du Code pénal, on remarquera l’amplitude importante des peines encourues pour des infractions appartenant à la même catégorie d’infractions, celle des infractions de prévention terroristes, amplitude justifiée par des gravités propres aux comportements incriminés qui diffèrent grandement les uns des autres. Ainsi, l’infraction de prévention la plus sévèrement sanctionnée est le crime de direction et d’organisation d’une association terroriste ou la participation à un groupement ou une entente terroriste, pour la répression duquel sont prévues la peine de réclusion criminelle à perpétuité et celle de 500.000 € d’amende, dans l’hypothèse où l’entente ou le groupement prépare des infractions terroristes parmi les plus graves[148]. A l’autre extrémité, est puni de deux ans d’emprisonnement et de 30.000 € d’amende le délit de consultation de sites djihadistes de l’article 421-2-5-2 du Code pénal. Ce seul examen permet de conclure qu’indéniablement les peines prévues pour la répression des infractions de prévention terroristes sont globalement lourdes, alors même que les dommages ou actes redoutés ne sont pas réalisés[149]. Ne peut-on pas suspecter dans la détermination par le législateur des peines encourues une disproportion entre les quanta celles-ci et la gravité intrinsèque des comportements incriminés, d’autant que la réalité de la relation causale entre les comportements incriminés et les dommages redoutés n’est souvent que supposée ? Aussi ne peut-il être relevé dans certaines hypothèses une atteinte au principe de proportionnalité des peines découlant de l’article 8 DDHC ?
Il est fréquent que le Conseil constitutionnel soit interrogé sur l’éventuelle méconnaissance d’un tel principe, lorsqu’une loi déférée à son examen crée de nouvelles incriminations ou que son application est envisagée dans le cadre d’une instance pénale. Mais, il est assez rare qu’il réponde à cette question par l’affirmative même si une inflexion récente de la jurisprudence constitutionnelle en ce domaine a pu être relevée par la doctrine[150]. Visant l’article 8 DDHC précité, le Conseil prend le soin de rappeler systématiquement que « si la nécessité des peines attachées aux infractions relève du pouvoir d’appréciation du législateur, il incombe au Conseil constitutionnel de s’assurer de l’absence de disproportion manifeste entre l’infraction et la peine encourue ». C’est donc un contrôle tout en retenue qu’opèrent les conseillers. La décision du 7 avril 2017 précitée rendue sur une question prioritaire de constitutionnalité en est une illustration. Le requérant et l’association intervenante contestaient la constitutionnalité des dispositions légales définissant le délit de participation à une entreprise individuelle terroriste à plusieurs égards, notamment pour la méconnaissance des principes visés à l’article 8 ou découlant de celui-ci. Répondant au grief tiré de la méconnaissance du principe de proportionnalité des peines, le Conseil reprend comme à l’accoutumée la formule précitée avant, sans grande surprise, de considérer qu’il n’en est rien. Il relève qu’en réprimant des peines prévues à l’al.4ème de l’art.421-5 du Code pénal « la préparation d’actes susceptibles de constituer des atteintes à la personne humaine en relation avec une entreprise individuelle ayant pour but de troubler gravement l’ordre public par l’intimidation ou la terreur, le législateur n’a pas institué une peine manifestement disproportionnée » et conclut au défaut de méconnaissance du principe de proportionnalité des peines (§19). Cependant, il convient de noter que cette absence de disproportion manifeste relevée tient moins dans la gravité des actes préparatoires incriminés que dans la prise en considération du contexte terroriste et de la gravité des infractions redoutées qui, pourtant et par définition, n’ont pas été commises. Est-ce à dire que la réponse du Conseil serait différente pour l’appréciation des peines encourues pour des infractions de prévention réprimant des comportements très éloignés de la survenance des dommages redoutés et telles que présentées précédemment[151] ? La réponse est incertaine.
L’appréciation de la disproportion manifeste s’avère éminemment délicate et le rehaussement récent du quantum de certaines peines encourues pour ces infractions complique sans doute un peu plus cette tâche[152]. Au cours des débats parlementaires relatifs à la loi renforçant la lutte contre le crime organisé, le terrorisme et leur financement, devenue loi du 3 juin 2016, avait été envisagée la création d’un nouveau cas de criminalisation du délit d’association de malfaiteurs en lien avec une entreprise terroriste, dans l’hypothèse où cette participation terroriste serait intervenue à l’occasion d’un séjour à l’étranger sur un théâtre d’opérations terroristes et précédant un tel séjour[153]. Elle n’avait finalement pas été retenue car la criminalisation accrue des comportements terroristes aurait entrainé un encombrement ingérable de la Cour d’assises de Paris et conduit à une correctionnalisation par les magistrats de nombreuses affaires[154]. La détermination des peines par le législateur est donc davantage fonction de contraintes matérielles que de la recherche d’une juste répression.
Cette protection assurément minimale par le Conseil constitutionnel des principes de légalité des délits et des peines et de proportionnalité des peines n’est pas de nature à inciter le législateur à un usage parcimonieux de la technique de l’incrimination de prévention en matière de terrorisme. Il n’est même pas certain pour autant qu’un contrôle plus resserré opéré par le Conseil du respect d’autres principes serait à même d’endiguer la progression des incriminations de prévention terroristes ou les poursuites fondées sur les textes qui les définissent.
2. Un contrôle resserré exercé par Conseil constitutionnel
Il semble que le Conseil soit plus enclin à la censure dès lors que les dispositions définissant des infractions de prévention sont confrontées au principe de nécessité des délits et des peines.
Le législateur avait imaginé faire de l’infraction d’aide à l’entrée, à la circulation et au séjour irréguliers d’un étranger sur le territoire français telle que définie à l’époque par l’article 21 de l’ordonnance n°45-2658 du 2 novembre 1945 relative aux conditions d’entrée et de séjour des étrangers en France[155], une infraction terroriste en l’ajoutant à la liste de l’article 421-1 du Code pénal, dès lors qu’elle était intentionnellement en relation avec une entreprise individuelle ou collective ayant pour but de troubler gravement l’ordre public par l’intimidation ou la terreur. Saisi à l’initiative de parlementaires considérant qu’une telle incrimination méconnaissait plusieurs principes à valeur constitutionnelle dont le principe de nécessité des peines, le Conseil a rappelé dans une décision du 16 juillet 1996[156] qui lui appartenait, au regard de l’article 8 DDHC, de « vérifier, qu’eu égard à la qualification des faits en cause, la détermination des sanctions dont sont assorties les infractions correspondantes n’est pas entachée d’erreur manifeste d’appréciation »[157]. Les juges retiennent qu’en proposant une telle qualification terroriste le législateur a entaché son appréciation d’une disproportion manifeste et s’en expliquent moins en considération des peines attachées à l’infraction qu’en considération de la nature-même du comportement incriminé et du régime procédural applicable. Avant d’opposer un ultime argument tenant dans le fait que « la qualification d’acte de terrorisme a pour conséquence non seulement une aggravation des peines mais aussi l’application de règles procédurales dérogatoires au droit commun », le Conseil indique en effet, dans un huitième considérant de sa décision, qu’ « à la différence des infractions énumérées à l’article 421-1 du code pénal, l’article 21 incrimine non pas des actes matériels directement attentatoires à la sécurité des biens ou des personnes mais un simple comportement d’aide directe ou indirecte à des personnes en situation irrégulière » et ajoute que « ce comportement n’est pas en relation immédiate avec la commission de l’acte terroriste ». Sous le prétexte d’un examen de la conformité des dispositions litigieuses au principe de nécessité des peines, le Conseil opère en réalité « un contrôle multiforme au point qu’en l’espèce il donne lieu à un véritable contrôle de l’unité conceptuelle de l’infraction »[158]. Il convient de noter à ce stade que le Conseil fournit ici une définition qui n’est autre que celle de l’infraction de prévention. En 1996, l’article 421-1 du Code pénal contenait déjà comme infractions de prévention celles relatives au trafic d’armes et de substances explosives et la loi examinée créa la participation à l’association de terroristes. Cette censure du Conseil n’a pas incité le législateur à plus de modération concernant le recours aux incriminations de prévention. Ont par la suite et jusque récemment été incriminés, par des dispositions insérées dans le chapitre du Code pénal intitulé « Des actes de terrorisme », des comportements correspondant à une telle définition sans qu’intervienne une censure fondée sur de pareilles considérations lorsque le Conseil était interrogé sur la violation par le texte incriminateur du principe de nécessité. Dans sa décision de 1996, le Conseil précise enfin qu’ « au demeurant, lorsque cette relation apparaît, ce comportement peut entrer dans le champ de la répression de la complicité des actes de terrorisme, du recel de criminel et de la participation à une association de malfaiteurs prévue par ailleurs » : il s’appuie ici non sur le caractère disproportionné des peines mais sur l’absence de nécessité de l’incrimination-même du comportement considéré. Il s’agit d’un des arguments qui, formulé en des termes différents, a été réutilisé dans la décision du 10 février 2017.
Saisi par la Cour de cassation d’une question prioritaire de constitutionnalité, le Conseil devait se prononcer sur le point de savoir si l’article 421-2-5-2 du Code pénal issu de la loi du 3 juin 2016 et incriminant la consultation habituelle de sites djihadistes était conforme aux droits et libertés constitutionnellement garantis. Ainsi, il a soumis les dispositions litigieuses portant atteinte à la liberté de communication au triple test de proportionnalité, à l’évaluation de leur caractère nécessaire, adapté et proportionné. Les juges consacrent de longs développements à l’examen du premier de ces caractères. Pour le Conseil, une telle atteinte et, par suite, une telle incrimination n’apparaissent pas nécessaires, sans se placer sur le terrain de la méconnaissance du principe de nécessité des délits. Afin de justifier la censure opérée, il prend soin de souligner les multiples dispositifs de droit pénal et de droit administratif permettant d’éviter le comportement incriminé. Le Conseil rappelle, d’une part, le nombre déjà très important d’incriminations autres que l’infraction discutée et de dispositions procédurales spécifiques « ayant pour objet de prévenir la commission d’actes de terrorisme » (§7), pour ensuite énumérer dans le détail les incriminations et les pouvoirs d’enquête judiciaire permettant d’éviter une telle consultation (§8 et 9). Il mentionne, d’autre part, les très nombreux pouvoirs donnés à l’autorité administrative dans le cadre de l’activité de renseignement (accéder à des données de connexion, procéder à des interceptions de sécurité, sonoriser des lieux et véhicules et capter des images et données informatiques) et pour les réquisitions faites auprès des éditeurs ou hébergeurs de service de communication au public en ligne afin que soient supprimés les contenus faisant l’apologie ou incitant à la commission d’infractions terroristes (§11 et 12). Après cette énumération détaillée, le Conseil conclut à l’absence de nécessité d’une telle atteinte[159] et poursuit en justifiant en quoi l’atteinte n’est ni adoptée, ni proportionnée. Le texte portant incrimination de la consultation habituelle de sites djihadistes est déclaré inconstitutionnel et abrogé. Ce délit aurait dû figurer dans la loi n°2012-1432 du 21 décembre 2012 relative à la sécurité et à la lutte contre le terrorisme[160], avant que le législateur craignant sans doute une censure du Conseil ne se ravise finalement, sagesse saluée à l’époque par une doctrine favorable à la recherche d’un équilibre entre le respect des libertés fondamentales et les impératifs de protection de la société[161]. Cette censure prévisible intervient donc quelques années plus tard principalement mais implicitement fondée sur le défaut de nécessité d’une telle incrimination, pour la raison qu’elle ne répond pas à « l’exigence de l’ultima ratio »[162]. Cependant, force est de constater que le législateur est resté indifférent à ce message pourtant très clair : le texte relatif à la sécurité publique est modifié lors de son examen en Commission mixte paritaire pour faire renaître de ses cendres le texte incriminateur fraîchement abrogé[163], attestant ainsi l’impuissance du Conseil à contenir le recours aux incriminations de prévention tant prisées pour lutter contre le terrorisme.
Dans sa décision du 10 février 2017, pour considérer ensuite comme inadaptée l’incrimination litigieuse, le Conseil constitutionnel s’appuie sur le fait que « les dispositions contestées n’imposent pas que l’auteur de la consultation habituelle des services de communication au public en ligne concernés ait la volonté de commettre des actes terroristes ni même la preuve que cette consultation s’accompagne d’une manifestation de l’adhésion à l’idéologie exprimée sur ces services » (§14). Analysant la décision, une auteure a pu remarquer que les conseillers n’avaient pas insisté sur l’absence de matérialité de l’acte terroriste, sur la circonstance que l’incrimination « était susceptible de s’appliquer alors qu’elle ne s’accompagnait d’aucun acte terroriste extériorisé, entièrement ou partiellement exécuté, ou simplement préparé »[164], tout comme l’avait relevé avant elle un autre auteur commentant la loi du 3 juin 2016 : pareille incrimination, en dehors de la seule consultation de sites, ne s’appuie sur « aucun autre acte matériel, fût-il vaguement dangereux (l’auteur ne prépare pas d’autres infractions) » de sorte que « l’incrimination est (…) extrêmement préventive et la réalisation d’un résultat terroriste très incertaine, in fine »[165].
Dans une décision postérieure, celle du 7 avril 2017, le Conseil se place ouvertement sur le terrain du principe de nécessité des délits et des peines et semble changer de stratégie par son choix d’émettre une réserve d’interprétation. Saisi une nouvelle fois par la voie de la QPC, le Conseil se prononce sur la conformité de la définition du délit de participation à une entreprise individuelle terroriste à ce principe notamment. Au fil de sa jurisprudence, le Conseil constitutionnel a enrichi la portée du principe de nécessité en créant de nouvelles exigences ou en « découvrant » de nouveaux principes tels que non bis in idem, l’individualisation des peines, la rétroactivité in mitius, l’atténuation pénale au profit des mineurs[166]. En affirmant dans cette décision que « le législateur ne saurait, sans méconnaitre le principe de nécessité des délits et des peines, réprimer la seule intention délictueuse ou criminelle » (§13) après avoir rappelé, selon sa formule habituelle, les limites de son pouvoir d’appréciation, le Conseil nous semble consacrer le principe de matérialité par son impression en négatif dans le champ des principes à valeur constitutionnelle qui gouvernent le droit répressif. Bien qu’il s’agisse d’un principe fondamental, majeur de notre droit pénal[167], il n’est étonnamment inscrit nulle part. Il est l’expression de la règle Cogitationis poenam nemo patitur[168], de la règle selon laquelle « le droit pénal ne s’occupe pas du for intérieur qui est le domaine réservé de la morale et de la religion »[169]. Le principe de matérialité renvoie à la notion d’élément matériel de l’infraction pénale qui en est une composante indispensable. De longue date, sous la plume d’éminents auteurs, est évoquée cette absolue nécessité, rappelée aujourd’hui par le Conseil constitutionnel : « un changement dans le monde extérieur est nécessaire pour légitimer l’intervention pénale »[170], « l’acte incriminé résulte de la projection de la volonté au dehors, par un mouvement ou l’absence de mouvement du corps, en vue d’un changement dans le monde extérieur »[171]. Pour autant, un tel principe ne semble pas s’opposer à l’incrimination de comportements potentiellement lésionnaires. Le Conseil indique, sans les censurer pour cette raison, qu’en l’espèce « les dispositions contestées ne répriment ni l’exécution, ni le commencement d’exécution d’un acte délictueux ou criminel » (§14), illustration de la technique de l’incrimination de prévention précédemment décrite. Cependant, il parait formuler deux séries d’exigences. D’une part, le premier impératif concerne la nature-même du comportement incriminé : par la précision que « le législateur a limité le champ du délit contesté aux actes préparatoires à la commission d’une infraction portant atteinte à la personne humaine et s’inscrivant dans une volonté terroriste », le Conseil semble considérer que le recours à ce mode d’incrimination précoce doit être réservé aux comportements ayant pour conséquence certaine et immédiate la réalisation des dommages les plus graves et révélant une intention terroriste. D’autre part, il pose une exigence probatoire par la formulation d’une réserve d’interprétation qui a pu être qualifiée d’obscure[172]: le Conseil affirme que « la preuve de l’intention de l’auteur des faits de préparer une infraction en relation avec une entreprise individuelle terroriste ne saurait, sans méconnaître le principe de nécessité des délits et des peines, résulter des seuls faits matériels retenus comme actes préparatoires, au titre des 1° et 2° du paragraphe I de l’article 421-2-6 du code pénal », avant d’ajouter que « ces faits matériels doivent corroborer l’intention ». Par là-même, les juges ne conviennent-ils pas du caractère trop équivoque des actes incriminés – à défaut de les considérer imprécis dans leur définition – pour pouvoir révéler l’intention terroriste ? Les actes matériels dont le cumul est imposé par le texte incriminateur doivent confirmer cette volonté mais ne sont pas déterminants pour l’exprimer. C’est donc une exigence probatoire renforcée qui est posée car, en général, pour la qualification pénale de faits, l’intention se déduit de la matérialité de l’infraction qui en est le support. Il semble que d’autres actes devront être relevés pour caractériser l’intention terroriste, ce qui rendra vraisemblablement plus difficile la constitution de l’infraction. En faisant le choix d’une réserve d’interprétation portant sur la preuve de l’intention, le Conseil opère de manière moins frontale et change d’interlocuteur : il s’adresse non plus au législateur, manifestement sourd, mais au juge dont il espère une audition meilleure.
◊◊◊
Qu’elle soit « quotidienne »[173], « intérieure »[174] ou « publique »[175], la sécurité est devenue le violon d’Ingres du législateur pour ne pas dire son obsession au point de l’ériger en « droit fondamental »[176]. La lutte contre le terrorisme, ce mal qui pousse périodiquement des pointes aiguës et suraiguës[177], est le terrain privilégié pour le développement de politiques sécuritaires[178], qui se conjuguent mal avec la protection des libertés publiques et individuelles. Parmi les nombreux dispositifs et outils imaginés par le législateur pour combattre ce phénomène criminel, le recours à la technique de l’incrimination de prévention n’est qu’une manifestation parmi d’autres de cette logique sécuritaire appliquée au champ du droit pénal. La pénalisation dans un contexte terroriste de comportements gravitant autour d’actes lésionnaires n’est pas une spécificité de la législation française et le droit européen contraint à la multiplication en droit interne de ce type d’incriminations comme en témoigne la toute récente directive européenne 2017/541 du 15 mars 2017 relative à la lutte contre le terrorisme qui présente une liste exhaustive d’infractions terroristes parmi lesquelles figurent en grand nombre des infractions de prévention.
Mais plus encore et surtout, la technique de l’incrimination préventive en matière de terrorisme se mêle à d’autres dispositifs qui façonnent, comme le répète et le dénonce depuis plusieurs années une part importante de la doctrine, un « droit pénal de l’ennemi »[179], source de négation des droits fondamentaux[180], lui-même ennemi d’un droit pénal démocratique[181]. La progression de ce droit pénal désorienté est sans nul doute accélérée par une situation d’état d’urgence qui se pérennise et qui permet parallèlement le recours à des mesures administratives particulièrement attentatoires aux libertés et dont l’efficacité a été vivement contestée[182]. Cette progression sera davantage encore favorisée si l’intégration envisagée par le gouvernement de mesures de la loi sur l’état d’urgence dans le droit commun aboutit. Ce dessein révélé par la presse le 9 juin dernier[183], constitue une véritable entreprise de normalisation et de banalisation de l’état d’urgence, servie par un avant-projet de loi renforçant la lutte contre le terrorisme et la sécurité intérieure (encore !) présentée récemment en Conseil de Ministres. Hasard (heureux ?) du calendrier, ce même jour, le Conseil constitutionnel déclarait inconstitutionnelle l’interdiction de séjour administrative prévue à l’article 5 de la loi du 3 avril 1955 relative à l’état d’urgence[184] …
[1] Pour exemple, cf. la loi n°2016-987 du 21 juillet 2016 prorogeant l’application de la loi n° 55-385 du 3 avril 1955 relative à l’état d’urgence et portant mesures de renforcement de la lutte antiterroriste, JO du 22 juillet 2016, texte n°2 : par son intitulé-même, elle illustre parfaitement une véritable pénalisation de l’état d’urgence en établissant de manière incontestable, ostentatoire un lien entre état d’urgence et terrorisme.
[2] Y. Mayaud, « La politique d’incrimination du terrorisme à la lumière de la jurisprudence récente », AJ Pén. 2013, p.442 et s.
[3] JO du 10 septembre 1986, p.10956 et s.
[4] Cf. sur ce point spéc. J.-P. Marguenaud, « La qualification pénale des actes de terrorisme », RSC 1990, p.1 et s. ; J. Pradel, « Les infractions de terrorisme, un nouvel exemple d’éclatement du droit pénal », D. 1987, Chron., p.39 et s.
[5] R. Ottenhof, « Le Droit pénal français à l’épreuve du terrorisme », RSC 1987, p.611
[6] Art.1er de la loi précitée
[7] J.-P. Marguénaud, précit. ; M.-E. Cartier, « Le terrorisme dans le nouveau code pénal français », RSC 1995, p.229 ; C. Grewe et R. Koering-Joulin, « De la légalité de l’infraction terroriste à la proportionnalité des mesures antiterroristes », p.892 et s. in Libertés, Justice, Tolérance, Mélanges en hommage au Doyen G. Cohen-Jonathan, Bruylant, 2004, 1504 p.
[8] CC n° 86-213 DC du 3 sept. 1986, spéc. cons.6, RDP 1989, n° 2, p. 399, obs. L. Favoreu
[9] CC n°2017-625 QPC du 7 avril 2017, JO du 9 avril 2017, texte n° 38
[10] JO du 23 juillet 1996, p.11104 et s.
[11] Y. Mayaud, op.cit., p.442 et s.
[12] Au sein d’un titre 2ème dénommé « Du terrorisme » du livre 4ème de la partie législative et spéciale du Code pénal
[13] Par exemple, et sans exhaustivité dans la présentation, ont été créées les infractions de terrorisme alimentaire par la loi n°2004-204 du 9 mars 2004, de recrutement de terroristes par la loi n°2012-1432 du 21 décembre 2012, de consultation habituelle de sites djihadistes et d’entrave aux procédures de blocage des sites internet par la loi n°2016-731 du 3 juin 2016 ….
[14] H. Houidi, « La loi n° 2014-1353 du 13 novembre 2014 renforçant les dispositions relatives à la lutte contre le terrorisme : quelles évolutions ? », AJ Pén. 2014 p.555
[15] J.-F. Seuvic, « Terrorisme, extension des incriminations », RSC 2004, Chron. législ., p.393 et s.
[16] M. Lacaze, Réflexions sur le concept de bien juridique protégé par le droit pénal général, Institut Université de Varenne, Coll. Thèse, 2011, 562 p.
[17] Notre thèse, L’infraction de prévention en Droit pénal français, Th. Montpellier, 2001, 669 p. ; P. Philippot, Les infractions de prévention, Th. Nancy II, 1977, 334 p. ; J.-P. Doucet, « Les infractions de prévention », Gaz.Pal. 1973, Doct., p.764 et s.
[18] Notre thèse, L’infraction de prévention en Droit pénal français, op.cit., spéc. p.66 et s. et p.213 et s. ; S. Grunvald, « A propos de l’élément matériel de l’infraction », p.138 in Le champ pénal, Mélanges en l’honneur du Professeur Reynald Ottenhof, Paris : Dalloz, 2006, 469 p.
[19] Pour une étude complète sur ce sujet, cf. la thèse de J. Alix, Terrorisme et Droit pénal. Pour une étude critique des incriminations terroristes, Paris : Dalloz, Coll. Nouvelle bibliothèque de thèses, vol.91, 2010, 662 p.
[20] P. Poncela, « Les naufragés du droit pénal », in Terrorismes, APC, Pédone, 2016, n°38, spéc. p.15 et s.
[21] Art.421-2-2 du Code pénal pour l’incrimination du financement du terrorisme
[22] Art.421-2-4 du Code pénal pour l’incrimination de fait de provocation à des actes de terrorisme
[23] Art.421-1-3° du Code pénal
[24] Art.421-1-4° du Code pénal
[25] Art.421-2-6 du Code pénal
[26] J. Alix, « Réprimer la participation au terrorisme », RSC 2014, p849 et s.
[27] Notre thèse, précit.
[28] B. E.Harcourt, « Preventing injustice », p.633 et s. in Mélanges en l’honneur de Ch. Lazerges, Paris : Dalloz, 2014, 831 p.
[29] G. Giudicelli-Delage, Ch. Lazerges (dir.), La dangerosité saisie par le droit pénal, Paris : PUF, 2011, 214 p.
[30] P. Poncela, « Les naufragés du droit pénal », op.cit., spéc. p.15 et s.
[31] Cf.infra.
[32] Sur cette notion qui ne reçoit pas de définition légale, cf. notamment J. Devèze, « Le commencement d’exécution de l’infraction en jurisprudence », RSC 1981, p.777 et s.
[33] Art.121-5 du Code pénal : « La tentative est constituée dès lors que, manifestée par un commencement d’exécution, elle n’a été suspendue ou n’a manqué son effet qu’en raison de circonstances indépendantes de la volonté de son auteur ».
[34] M.-E. Cartier, « Le terrorisme dans le nouveau code pénal français, RSC 1995, p.225 et s. ; spéc. sur cette infraction, cf. J. Borricand, « La répression du terrorisme écologique dans le nouveau code pénal », p.29 et s. in Problèmes actuels de science criminelle, 1995, vol.VIII, ISPEC, PUAM
[35] Sur la notion d’infraction formelle, cf. P. Spiréti, « L’infraction formelle », RSC 1966, p.497 et s. ; M. Freij, L’infraction formelle, Th. Paris, 1975, 334 p.
[36] Sur cette notion cf. notamment B. Corboz, « Les actes préparatoires », RI crim. et pol.techn. 1982, 5 et s.
[37] JO du du 23 juillet 1996, p.11104 et s.
[38] Loi relative à la lutte contre le terrorisme et portant dispositions diverses relatives à la sécurité et aux contrôles frontaliers, JO du 24 janvier 2006, p.1129 et s. ; Ph. Chrestia, « Loi du 23 janvier 2006 relative à la lutte contre le terrorisme. Premières observations », RSC 2006, p.1409 et s. ; M.H. Galmard, « Vers une nouvelle approche du phénomène terroriste ? Apports de la loi n°2006-64 du 23 janvier 2006 », RPDP 2007, p.8 et s.
[39] R. Daniault, « L’association de malfaiteurs », JCP Ed.G, 1952, I, 1062
[40] Ch. Dupeyron, « L’infraction collective », RSC 1973, p.357 et s
[41] S. Destraz, « Le délit de préparation d’infractions en lien avec une entreprise individuelle terroriste », Gaz.Pal. 2015, n°55, p.4 et s.
[42] JO du 14 novembre 2014, p.19162 et s.
[43] Ph. Ségur, « Le terroriste et les libertés sur l’internet », AJDA 2015, p.160 ; Nicolas CATELAN, « Lutte contre le terrorisme », RSC 2015, p.425 et s.
[44] O. Cahn, « Le dispositif antiterroriste français, une manifestation du droit pénal de l’ennemi », p.109 in Terrorismes, APC, 2016, vol.38, 278 p.
[45] R. Combaldieu, « Le problème de la tentative de complicité ou le hasard peut-il être arbitre de la répression ? », RSC, 1959, p.454 et s.
[46] JO du 16 novembre 2001, p.18215 et s.
[47] Art.421-1-4° par renvoi à l’article 322-11-1° du Code pénal
[48] Art.421-5 al.2nd du Code pénal : « Le fait de diriger ou d’organiser le groupement ou l’entente défini à l’article 421-2-1 est puni de trente ans de réclusion criminelle et de 500 000 euros d’amende ».
[49] JO du 14 novembre 2014, p.19162 et s.
[50] Cf.infra pour les conséquences juridiques associées à ce déplacement. A cependant été rajoutée la circonstance aggravante d’utilisation d’un service de communication en ligne
[51] Art.421-2-4 du Code pénal
[52] Cf. notre article, « L’incrimination du mandat criminel ou l’article 221-5-1 du code pénal issu de la loi n°2004-204 du 9 mars 2004 », Dr.pén., septembre 2004, chron.n°10
[53] O. Cahn, « Le dispositif antiterroriste français, une manifestation du droit pénal de l’ennemi », op. cit., spéc. p.99
[54] JO du 22 décembre 2012 p.20281 et s. ; M.-H. Gozzi, « Sécurité et lutte contre le terrorisme : l’arsenal juridique encore renforcé », Recueil Dalloz, 2013, p.194 et s. ; N. Catelan, « Renforcement de la lutte contre le terrorisme », RSC 2013, p.417 et s.
[55] « Le fait d’adresser à une personne des offres ou des promesses, de lui proposer des dons, présents ou avantages quelconques, de la menacer ou d’exercer sur elle des pressions afin qu’elle participe à un groupement ou une entente prévu à l’article 421-2-1 ou qu’elle commette un des actes de terrorisme mentionnés aux articles 421-1 et 421-2 est puni, même lorsqu’il n’a pas été suivi d’effet, de dix ans d’emprisonnement et de 150 000 € d’amende ».
[56] Loi renforçant la lutte contre le crime organisé, le terrorisme et leur financement, et améliorant l’efficacité et les garanties de la procédure pénale, JO du 4 juin 2016, texte n°1 ; pour une présentation de cette loi, cf. notamment C. Ribeyre, « Loi n°2016-731 du 3 juin 2016 renforçant la lutte contre le crime organisé, le terrorisme et leur financement, et améliorant l’efficacité et les garanties de la procédure pénale – Et maintenant ? », Dr.pén. 2016, Etude 17
[57] Art.421-1-4° par renvoi à l’article 322-6-1 du Code pénal
[58] Cf. à propos de la participation à une association de terroristes qui devient criminelle lorsque l’infraction projetée consiste en une infraction d’atteintes aux personnes en application de l’article 421-6-1° du Code pénal : R. Parizot, La responsabilité pénale à l’épreuve de la criminalité organisée. Le cas symptomatique de l’association de malfaiteurs et du blanchiment en France et en Italie, Paris : LGDJ, 2010, n° 395
[59] « Est auteur de l’infraction la personne qui :
1° celui qui commet les faits incriminés ;
2° celui qui tente de commettre un crime, ou dans les cas prévus par la loi, un délit ».
[60] Art.421-2-2 du Code pénal
[61] L’expression est empruntée à P. Poncela, « Les naufragés du droit pénal », op.cit., p.22
[62] A. Capello, « L’interdiction de sortie du territoire dans la loi renforçant les dispositions relatives à la lutte contre le terrorisme », AJ Pén. 2014, p. 562 et s. ; C. Mauro, « La nouvelle loi contre le terrorisme. Quelles innovations ? A propos de la loi n°2014-1353 du 13 mars 2014 », JCP EdG, 2014, 1203, p.2126 et s.
[63] Art.L.224-1 du Code de la sécurité intérieure
[64] Art.L.225-1 du Code de la sécurité intérieure
[65] Art.L.225-2 du Code de la sécurité intérieure
[66] Art.L.225-3 du Code de la sécurité intérieure
[67] Pour une critique des éléments fondant la décision de telles mesures, cf .CNCDH, Avis du 14 septembre 2009 sur le projet de loi renforçant les dispositions relatives à la lutte contre le terrorisme, p.5, §9
[68] L. Blisson, « La loi du 13 novembre 2014 – Analyse juridique », in Non à la société de surveillance, Non aux lois d’exception, Colloque organisé par le Syndicat des Avocats de France, Bayonne, 12 juin 2015
[69] R. Ollard, O. Desaulnay, “La réforme de la législation anti-terroriste ou le règne de l’exception pérenne”, Dr.pén. 2015, Etude 1, n°7
[70] R. Parizot, La responsabilité pénale à l’épreuve de la criminalité organisée. Le cas symptomatique de l’association de malfaiteurs et du blanchiment en France et en Italie, Paris, LGDJ, 2010, p.155 et s.
[71] C. Beccaria, Des délits et des peines, 1765, §XXXVII
[72] Par exemple, l’article 221-1 du Code pénal incrimine « le fait de donner volontairement la mort à autrui… », l’article 223-1 réprime « Le fait d’exposer directement autrui à un risque immédiat de mort ou de blessures… », l’article 434-27 « le fait, par un détenu, de se soustraire à la garde à laquelle il est soumis… »
[73] A.-Ch. Dana, Essai sur la notion d’infraction pénale, Paris : LGDJ, 1982, p.31
[74] Cf.supra.
[75] Cass. crim., 25 octobre 1962, Bull. crim. n°292 et 293 ; D. 1963, II, p.221 et s., note P. Bouzat ; JCP Ed.G, II, 12985, note R. Vouin ; RSC 1963, Chron. de jurisprudence, p.553 et s., obs. A. Légal
[76] Notre thèse, L’infraction de prévention en Droit pénal français, op.cit., p.542 et s
[77] Ch. Lazerges, « La participation criminelle », p.11-30 in Réflexions sur le nouveau Code pénal, sous la direction de Ch. Lazerges, Paris : Pédone, 1995
[78] M. Massé, « La criminalité terroriste », RSC 2012, p.89 et s., § 5
[79] Selon une expression empruntée à Ch. Lazerges, H. Henrion, « Le déclin du droit pénal : l’émergence d’une politique criminelle de l’ennemi », RSC 2016, p.649 et s.
[80] Il en est ainsi des infractions énumérées aux articles 421-1, 421-2, 421-2-1, 421-2-2, 421-6-2 du Code pénal
[81] Il s’agit des comportements incriminés sous les cinq qualifications pénales définies par les articles 421-2-3 à 421-2-5-2 du Code pénal
[82] Par exemple, les infractions visées aux 1° et 2° de l’article 421-1 du Code pénal
[83] Pour un exemple d’infraction de lésion, cf. art.421-1-1° du Code pénal ; pour un exemple d’infraction de prévention, cf. art.421-2-1 du Code pénal
[84] Titre XV : De la poursuite, de l’instruction et du jugement des actes de terrorisme
[85] Articles 706-73 et s. du Code de procédure pénale
[86] Article 706-24-1 du Code de procédure pénale : « Les articles 706-88 à 706-94 du présent code ne sont pas applicables aux délits prévus aux articles 421-2-5 à 421-2-5-2 du code pénal »
[87] Art.706-95 et s. du Code de procédure pénale
[88] Y. Mayaud, « Terrorisme », Rép.pén. Dalloz, 2017, n°86 : l’auteur explique que cette évolution s’explique par le fait que les comportements incriminés ne caractérise pas à un abus de la liberté d’expression mais un « vecteur principal de propagande, de recrutement et d’incitation » à la commission d’actes terroriste.
[89] Pour une présentation détaillée cf. notamment, V. Brengarth, « L’apologie et la provocation au terrorisme dans le code pénal. Etude critique et premier bilan », JCP Ed.G, 2015, doct., 1003
[90] E. Bonis-Garçon, “A propos de l’article 8 de la loi n° 2016-987 du 21 juillet 2016 : vers la création d’un droit spécial des aménagements de peine pour les condamnés pour terrorisme”, Dr.pén. 2016, étude 26 ; Pour une critique de ce régime dérogatoire, cf. P. Poncela, « Peines et prisons : la régression. A propos des lis du 3 juin et 21 juillet 2016 », RSC 2016, p.565 et s.
[91] Art.730-2-1 du Code de procédure pénale
[92] Art.720-1 al.4ème du Code de procédure pénale
[93] Art.723-1 al.3ème du Code de procédure pénale
[94] Art.721-1-1 du Code de procédure pénale
[95] C’est le cas du délit d’entreprise individuelle terroriste de l’article 421-2-6 du Code pénal
[96] C’est le cas de la participation à une association de terroristes pour la préparation d’une des infractions citées à l’article 421-6 du Code pénal
[97] Art.421-8 du Code pénal
[98] Cf. notamment R. Ollard, O. Desaulnay, « Le renseignement français n’est plus hors la loi. Commentaire de la loi n°2015-912 du 24 juillet 2015 sur le renseignement », Dr.pén. 2015, Etude 17 ; R. Parizot, « Surveiller et prévenir…à quel prix ? Loi n°2015-912 du 24 juillet 2015 sur le renseignement », JCP Ed.G, 2015, p.1816 et s.
[99] Pour une présentation détaillée de ces différentes mesures, cf. Y. Mayaud, « Terrorisme », op.cit., n°132 et s.
[100] O. Cahn, op.cit., p.109
[101] A. Ponseille, L’infraction de prévention en droit pénal français, op.cit., n°481 et s.
[102] Pour des illustrations de l’émergence d’une nouvelle figure du droit pénal, cf. Un droit pénal postmoderne ?, sous la dir. de M. Massé, J.-P. Jean, A. Giudicelli, Paris : PUF, Coll. Droit et Justice, 2009, 400 p.
[103] Sur les sanctions administratives encourues (déchéance de nationalité, expulsion, blocage des sites internet), cf Y. Mayaud, « Terrorisme », op.cit., n°460 et s.
[104] Cass. crim., 21 février 2006, Bull. crim. n°50
[105] Cass. crim., 20 sept 2000, n°00-83437
[106] Cass. crim., 13 décembre 2016, n°16-82176, 16-84166, 16-84162 ; Cass. crim., 24 janvier 2017, 16-85577 ; Cass. crim., 28 mars 2017, n°16-85072 et 76-85073 publiés au Bulletin criminel
[107] Cass. crim., 3 mai 2017, n°16-86155
[108] Pourvois n°16-85072 et 16-85073
[109] P. Cassia, « Précision (bienvenue ?) sur les modalités selon lesquelles le juge pénal peut apprécier la légalité d’un acte individuel de police administrative », Recueil Dalloz, 2017, p.1169 et s. ; cf également note sous ces décisions de J.-B. Perrier, JCP Ed.G, 2017, 473
[110] P. Poncela, « Les naufragés du droit pénal », op. cit., p.22
[111] O. Cahn, op.cit., p.109
[112] Ch. Lazerges, H. Henrion, « Le déclin du droit pénal : l’émergence d’une politique criminelle de l’ennemi », op.cit., p.649 et s.
[113] O. Cahn, « Le dispositif antiterroriste français, une manifestation du droit pénal de l’ennemi », op.cit., p.114
[114] J. Alix note sous Cass. crim., 10 janvier 2017, AJ Pén. 2017, p.79 et s. : « L’incrimination du terrorisme a une fonction instrumentale assumée »
[115] G. Guidicelli-Delage, « Droit pénal de la dangerosité – Droit pénal de l’ennemi », RSC 2010, p.69 et s.
[116] Ch. Lazerges, « Le Conseil constitutionnel acteur de la politique criminelle. A propos de la décision n°2004-492 DC du 2 mars 2004, RSC 2004, p.725 et s.
[117] CC n°80-127 DC du 20 janvier 1981, JO du 22 janvier 1981, p.308 et s., cons.7 : « Considérant qu’aux termes de l’article 8 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789 nul ne peut être puni qu’en vertu d’une loi établie et promulguée antérieurement au délit et légalement appliquée ; qu’il en résulte la nécessité pour le législateur de définir les infractions en termes suffisamment clairs et précis pour exclure l’arbitraire »
[118] Cf. supra pour exemples
[119] Ch. Lazerges, H. Henrion, op.cit., p.649 et s.
[120] P. Poncela, op.cit., p.17 et 18
[121] J. Alix, Terrorisme et droit pénal. Etude critique des incriminations terroristes, Paris : Dalloz, la nouvelle bibliothèque des thèses, 2010, p.183
[122] C. Godeberge et E. Daoud, « La loi du 13 novembre 2014 constitue-t-elle une atteinte à la liberté d’expression ? », AJPén., 2014, p. 563
[123] CC n°96-377 DC du 16 juillet 1996, JO du 23 juillet 1996, p.11108 et s.
[124] CC n°2004-492 DC du 2 mars 2004, JO du 10 mars 2004, p.4637 et s.
[125] CC n°210-604 DC du 25 février 2010, JO du 3 mars 2010, page 4312
[126] Cass. crim., 7 octobre 2016, n° 16-84.597, AJ Pén. 2016, p.526, note Y. Mayaud et Dr.pén. 2016, comm. n°170, obs. C. de Jacobet de Nombel ; Confirmation de Cass. crim., 12 juillet 2016, n°16-82692, AJ Pén. 2016, p.492, obs. J.-B Thierry
[127] CC n°2015-490 QPC du 14 octobre 2015, JO du 16 octobre 2015, p.19327 et s. ; Recueil Dalloz 2015, p.2075
[128] A. Cappello note sous CC n°2016-611 QPC du 10 février 2017, Constitutions 2017, n°1, p.91 et s. ; B. de Lamy, A. Gogorza, note sous la même décision, JCP Ed.G, 2017, 343
[129] JO du 12 février 2017 texte n° 46
[130] Dans sa rédaction avant censure : « Le présent article n’est pas applicable lorsque la consultation est effectuée de bonne foi, résulte de l’exercice normal d’une profession ayant pour objet d’informer le public, intervient dans le cadre de recherches scientifiques ou est réalisée afin de servir de preuve en justice ».
[131] JO du 1er mars 2017, texte n°3
[132] Selon la CNCDH, Avis sur la loi relative à la sécurité publique du 23 février 2017, § VII p.21 : « la condition tenant dans la manifestation de l’adhésion à l’idéologie terroriste n’apparait pas suffisamment déterminée pour éviter le risque d’arbitraire »
[133] Art.421-2-1 du Code pénal
[134] NOR :JUSD1429083C, p.9
[135] n°16-90030
[136] CC n°2006-540 DC du 27 juillet 2006, cons.10, JO du 3 août 2006, p.11541 et s.
[137] (§10
[138] CC n°86-213 DC du 3 septembre 1986, JO du 5 septembre 1986, p.10786, cons.6
[139] Il convient de remarqué que la notion a encore été discutée récemment devant la Cour de cassation : Cass. crim., 10 janvier 2017, AJPén. 2017, p.79, obs. J. Alix
[140] 1° de l’art.421-2-6 du Code pénal
[141] 2° a) à d) de l’art.421-2-6 du Code pénal
[142] Avis du 25 septembre 2014 sur le projet de loi renforçant les dispositions relatives à la lutte contre le terrorisme, §17
[143] Ibid., §15
[144] Y. Mayaud, « Terrorisme », Rép.Pén., Dalloz, 2017, n°91
[145] Ch. Lazerges, H. Henrion, « Le déclin du droit pénal : l’émergence d’une politique criminelle de l’ennemi », op.cit., p.649 et s.
[146] Art.421-2 du Code pénal
[147] Art.421-4 du Code pénal
[148] Art.421-6 al.2nd du Code pénal
[149] Pour une remarque similaire, cf. O. Cahn, « Le dispositif antiterroriste français, une manifestation du droit pénal de l’ennemi », op.cit.,, p.99 : « l’ensemble de ces infractions se caractérisent par le contraste entre le caractère imprécis de leur élément matériel et la sévérité des peines encourues par leurs auteurs ».
[150] D. Rousseau, P.-Y. Gahdoun, J. Bonnet, Droit du contentieux constitutionnel, Paris : LGDJ, coll. Précis Domat-Droit public, 2016, n°714
[151] Cf. supra pour le cas des infractions de prévention qualifiées par la doctrine d’administrativo-pénales.
[152] Cf. notamment la loi n°2016-987 du 21 juillet 2016 qui a aggravé le quantum des peines encourues pour le crime de direction ou organisation d’un groupement ou entente terroriste (art.421-5 al.2ème du Code pénal) et celui des peines prévues pour la participation criminelle à un groupement ou une entente terroriste (art.421-6 al.1er du Code pénal)
[153] Cf. compte rendu des débats au Sénat de la séance du 30 mars 2016
[154] C. Ribeyre, « Loi n° 2016-731 du 3 juin 2016 renforçant la lutte contre le crime organisé, le terrorisme et leur financement, et améliorant l’efficacité et les garanties de la procédure pénale – Et maintenant ? », Dr.pén. 2016, étude 17, n°16
[155] Les dispositions de cette ordonnance à l’exception d’un article ont été abrogées et le texte a été remplacé par le code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile par l’Ordonnance n° 2004-1248 du 24 novembre 2004 relative à la partie législative du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile, JO du 25 novembre 2004, p.19924 et s.
[156] CC n°96-377-DC du 16 juillet 1996, Recueil Dalloz 1997 p.69 et s. ; P.-E. Spitz, « A propos de la décision du Conseil constitutionnel n°96-377 DC du 16 juillet 1996 sur la loi tendant à renforcer la loi de répression du terrorisme », RFDA 1997, p.538 et s.
[157] Cons.7
[158] B. Mercuzot, « Lutte contre le terrorisme et Constitution », Recueil Dalloz 1997, p.79 et s. pour un commentaire de cette décision
[159] « Dès lors, au regard de l’exigence de nécessité de l’atteinte portée à la liberté de communication, les autorités administrative et judiciaire disposent, indépendamment de l’article contesté, de nombreuses prérogatives, non seulement pour contrôler les services de communication au public en ligne provoquant au terrorisme ou en faisant l’apologie et réprimer leurs auteurs, mais aussi pour surveiller une personne consultant ces services et pour l’interpeller et la sanctionner lorsque cette consultation s’accompagne d’un comportement révélant une intention terroriste, avant même que ce projet soit entré dans sa phase d’exécution »
[160] JO du 22 décembre 2012, p.20281 et s.
[161] M.-H. Gozzi, « Sécurité et lutte contre le terrorisme : l’arsenal juridique encore renforcé », Recueil Dalloz, 2013, p.194 et s. ; J.-L. Gillet, Ph. Chaudon, W. Mastor, « Terrorisme et Liberté », Constitutions, 2012, p.403 et s.
[162] A. Gogorza et B. de Lamy note sous CC, 10 févier 2017, JCP Ed.G, 2013, n°13, 343
[163] V. Sizaire, « Mort et résurrection du principe de nécessité pénale : à propos de la décision du Conseil constitutionnel du 10 février 2017 », Rev.DH, 2017, Act. Droits et libertés, p.1 et s.
[164] A. Capello note sous cette décision, Constitutions, 2017, n°1, spéc.p.94
[165] O. Décima, « Terreur et métamorphose. A propos de la loi n° 2016-731 du 3 juin 2016 sur la lutte contre le terrorisme », D. 2016, p.1826 et s.
[166] Cf. sur ce point, cf. D. Rousseau, P.-Y. Gahdoun, J. Bonnet, Droit du contentieux constitutionnel, Paris : LGDJ, 2016, 11ème éd., n°715 et s.
[167] J.-P. Doucet La protection pénale de la personne humaine, Liège : Gazette du Palais, Litec, vol.1, 1994, n°4
[168] Digeste Livre 48, Titre 19, Fragment 18
[169] Cesare Beccaria, Des délits et des peines, 1765, §XXXVII
[170] F. von Liszt, Traité de Droit pénal allemand, Paris : Giard & Brière, 1911, t.1, p.181
[171] P. Garraud, Précis de Droit criminel, Paris : Sirey, 1934, 15ème éd., p.190
[172] N. Catelan, J.-B. Perrier, « L’entreprise individuelle et les axiomes du Conseil constitutionnel », Recueil Dalloz, 2017, p.1180 et s.
[173] Loi n° 2001-1062 du 15 novembre 2001 relative à la sécurité quotidienne, JO du u 16 novembre 2001, p.18215 et s.
[174] Loi n°2003-263 du 18 mars 2003 pour la sécurité intérieure, JO du 19 mars 2003, p.4761 s.
[175] Loi n° 2017-258 du 28 février 2017 relative à la sécurité publique, précit.
[176] Cf. art.1er al.1er loi n°95-73 du 21 janvier 1995, loi d’orientation et de programmation relative à la sécurité, JO du 24 janvier 1995, p.1249 et s. ; art.1er loi n°2003-263 du 18 mars 2003 pour la sécurité intérieure, précit.
[177] J. Foyer, « Droit et politique dans la répression du terrorisme en France », p.409 et s. in Mélanges offerts à G. Levasseur, Paris : Litec, 1992, 533 p.
[178] M. Garricos-Kerja, « La tendance sécuritaire de la lutte contre le terrorisme », p.187 et s. in Varia, APC, 2006, n°28, 286 p.
[179] Notion développée par G. Jakobs, « Aux limites de l’orientation par le droit : le droit pénal de l’ennemi », RSC, 2009. p.7 et s.
[180] L. Reverso, « Notes sur le droit pénal de l’ennemi, la négation des droits fondamentaux et le droit naturel », p.997 et s. in Etudes offertes à J.-L. Harouel, Ed. Panthéon-Assas, 2015, 1092 p.
[181] Sur ce thème cf. notamment G. Giudicelli-Delage, « Droit pénal de la dangerosité – Droit pénal de l’ennemi », op.cit., p.69 et s. ; Ch. Lazerges, H. Henrion, « Le déclin du droit pénal : l’émergence d’une politique criminelle de l’ennemi », op.cit., p.649 et s. ; J.-F. Dreuille, « Le droit pénal de l’ennemi : éléments pour une discussion », Jurisprudence-Revue critique, 2012, n°3, p. 149 et s.
[182] CNCDH, Avis sur le suivi de l’état d’urgence et sur les mesures anti-terroristes de la loi du 21 juillet 2016, 26 janvier 2017, spéc. p.23 et s.
[183] J.-B. Jacquin, « Projet de loi antiterroriste : vers un état d’urgence permanent », Le Monde du 9 juin 2017, p.9 ; P. Alonso, A. Guiton « Etat d’urgence. L’exception confirmée par la règle », Libération du 9 juin 2017, p.2 et s.
[184] CC n°2017-635 QPC du 9 juin 2017, JO du 11 juin 2017, texte n°28 : le Conseil a considéré que les dispositions litigieuses ne permettaient pas une conciliation équilibrée entre, d’une part, l’objectif constitutionnel de sauvegarde de l’ordre public et, d’autre part, la liberté d’aller et de venir et le droit de mener une vie familiale normale.
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