La revendication du droit de mourir dans la dignité au nom du droit à la vie : approche innovatrice et conciliatrice de la Cour EDH
L’être humain est appelé à mourir un jour. Mais une question fondamentale demeure : de quelle façon aimerions-nous mourir ? La peur de la mort est un sentiment naturel et universel dont toutes les civilisations portent témoignage. Mais une mort accompagnée de souffrances fait encore plus peur. C’est sans doute une telle situation qui pousse les personnes à revendiquer le droit de mourir dans la dignité afin de bénéficier de meilleures conditions de mort. Bien qu’il soit établi en droit interne, le droit de mourir dans la dignité ne fait pas l’unanimité en droit international européen, faute de consensus. Face à une telle situation, la présente analyse vise à établir que, malgré les hésitations de la Cour européenne des droits de l’homme sur la question, elle a fini par admettre l’existence d’un droit de mourir dignement sur le fondement du droit au respect de la vie privée et des évolutions du droit positif des États membres. Dans son interprétation évolutive de la Convention, la Cour s’est appuyée sur une conception subjective et individuelle de la dignité pour reconnaître un droit de mourir.
Par Henri Bandolo Kenfack, Docteur en droit de l’Université de Montréal et Enseignant-Chercheur en droit public à l’Université de Douala
Il ne se passe une seule année sans qu’une affaire concernant la question de mourir dans la dignité ne soit portée devant la Cour européenne des droits de l’homme. Ainsi, les noms tels que Pretty, Haas, Koch, Gross, Vincent Humbert, Vincent Lambert, Charlie Gard et bien d’autres ont une résonance particulière pour quiconque suit l’actualité juridique et médicale ces dernières années[1]. Il s’agit là des affaires ayant pour dénominateur commun le droit à une mort dans la dignité.
En règle générale, lorsqu’on se place dans une perspective positiviste, le titulaire des droits fondamentaux est l’individu. Ces droits fondamentaux désignent un ensemble des principes et des normes fondés sur la reconnaissance de la dignité inhérente à tous les êtres humains[2]. Placée au sommet de la hiérarchie du droit, la dignité humaine exprime donc la primauté de l’homme dans la société. Elle constitue le principe d’où découlent tous les droits fondamentaux[3]. Elle est invoquée surtout pour forger, renforcer ou enrichir un droit, et pas du tout pour le limiter ou se retourner contre le titulaire de la dignité[4]. Le fait que les droits fondamentaux soient désormais centrés sur la dignité humaine justifie la nature du lien qui existe entre les notions de dignité humaine et de droit à la vie. C’est pourquoi beaucoup d’auteurs s’accordent pour inscrire le droit à la vie dans le principe, plus large, de dignité humaine[5].
Il faut dire que la dignité humaine est un concept nouveau en droit[6]. Jusqu’à la fin de la seconde guerre mondiale, le principe de respect de la dignité humaine s’est tenu à l’écart de la matière juridique[7]. Seuls les théologiens, les philosophes et les psychanalystes s’intéressaient à la question[8]. Il a fallu attendre la deuxième moitié du vingtième siècle pour voir la notion intégrée la sphère juridique, mobilisant au sein de la communauté des juristes, aussi bien les internistes que les internationalistes[9]. L’intégration de la notion de dignité humaine dans le droit positif va alors susciter « un engouement doctrinal et jurisprudentiel »[10], et pose aujourd’hui la question des rapports qu’elle entretient avec les droits fondamentaux[11], notamment le droit à la vie.
Dans son acception juridique, la dignité humaine a été employée sous plusieurs formes : tantôt comme un principe[12], tantôt comme une valeur[13] ou un axiome[14], tantôt comme un droit[15]. En tant que principe, la dignité humaine est habituellement employée pour faire référence à des normes juridiques fondamentales et de portée générale, qu’elles soient ou non consacrées par des dispositions de droit écrit[16]. En tant que valeur, la dignité humaine se comprend comme la synthèse de la valeur de l’humanité et la qualité essentielle reconnue à toute personne[17]. En tant que droit, elle détient le statut de droit fondamental[18], et à ce titre, elle constituerait une des exigences normatives[19] qui renforcent la protection du droit à la vie, bien que l’auteure Béatrice MAURER pense qu’« il ne paraît pas possible de reconnaître un droit à la dignité dans la mesure où il n’existe pas de droit subjectif à la dignité, auquel son titulaire pourrait, par définition, renoncer »[20].
Il faut dire que la notion de dignité humaine a, par la suite, été utilisée pour interpréter les situations de fin de vie et a donné naissance à un nouveau droit, celui de mourir dans la dignité. Ainsi, le principe de dignité humaine qui, jusque-là était attaché à la qualité de la vie, sera élargi à la qualité de la mort, d’où le nouveau concept de « mort digne »[21]. Le principe du caractère sacré de la vie pose ainsi la question de la qualité de vie « à une époque où l’on assiste à une sophistication médicale croissante et à une augmentation de l’espérance de vie »[22], et où « de nombreuses personnes redoutent qu’on ne les force à se maintenir en vie jusqu’à un âge très avancé ou dans un état de grave délabrement physique ou mental aux antipodes de la perception aiguë qu’elles ont d’elles-mêmes et de leur identité personnelle »[23], l’objectif étant d’éviter une fin de vie indigne. C’est ici que la question de mourir dans la dignité prend toute sa signification. Dans ce sens, la dignité est appréhendée suivant deux approches : objective et subjective.
L’approche objective ou ontologique de la dignité renvoie à la qualité intrinsèque de la personne humaine. Pour paraphraser l’auteure Laurie MARGUET, « L’humanité elle-même est dignité, de sorte que celle-ci ne saurait dépendre de la condition physique ou psychologique d’un sujet. La dignité est entendue ici comme ce qui exprime l’appartenance de chaque personne à l’humanité, comme la marque profonde de l’égalité des individus, une réalité morale qui qualifie l’être humain dans son existence et implique des devoirs à son égard »[24]. Quant à l’approche subjective de la dignité, mise en avant par les défenseurs de la « mort choisie », elle lie la notion de dignité avec celle de liberté et d’autonomie. De ce point de vue, « [l]a dignité est ici entendue comme un regard que l’individu porte sur lui-même en fonction de ses valeurs, de ses désirs, des relations qu’il entretient avec ses proches, regard qui peut donc varier du tout au tout, d’un individu à l’autre »[25]. S’inscrivant dans la même perspective, la revendication d’un droit de mourir dans la dignité pose ainsi la question de la légitimité d’un droit à donner la mort à une autre personne ou d’un droit à déterminer soi-même le moment de sa mort[26]. En ce sens, « le droit à mourir dans la dignité correspond à la prérogative qui serait celle de chacun de déterminer jusqu’où il juge acceptable que soient entamées son autonomie et sa qualité de vie (…) [ce droit] correspond (…) à l’affirmation de l’autonomie de la personne ; elle est en fait une expression de sa liberté individuelle et de la possibilité d’opposer celle-ci à des tiers »[27]. Cette approche « subjective » de la dignité, pensée comme impliquant un « droit à l’autodétermination », a pu trouver des concrétisations en droit positif. Ainsi, au nom d’une conception subjective de la dignité, certains ont tendance à revendiquer le droit de mourir dans la dignité comme un droit fondamental déduit du droit à la vie. Une telle revendication renvoie ici à la dimension juridique de la question de la fin de vie et se pose en termes de droit, de droit subjectif ou de droit de l’homme. Elle renvoie également à la consécration d’un droit individuel en fin de vie. Dans cette appréhension subjective, la revendication du droit de mourir dans la dignité est donc l’expression de la volonté d’un individu d’en finir avec une vie qu’il estime contraire à la dignité. Ainsi, il souhaite mourir en pleine conscience et laisser à sa famille une meilleure image de lui[28].
La question de « droit de mourir dans la dignité » telle qu’elle se pose aujourd’hui se présente comme la liberté de prendre en main sa mort et la vivre dans le respect de la dignité proprement humaine. En raison de l’absence d’une définition juridique spécifique, il faut dire que le débat sur le droit de mourir dans la dignité ne se limite pas seulement à un débat sur l’euthanasie. Chaque pays ayant sa propre histoire et ses spécificités culturelles, la question se pose différemment. C’est pourquoi nous avons préféré utiliser dans cet article une expression englobante, celle de « mourir dans la dignité » qui intègre à la fois les concepts d’euthanasie, d’assistance au suicide ou suicide assisté, de soins palliatifs, d’aide médicale à mourir, de soins de fin de vie, etc. De telles pratiques, longtemps revendiquées au nom du droit à la vie et à la dignité, continuent à diviser la jurisprudence internationale et à déchirer la doctrine, faute de consensus international sur la reconnaissance et la définition juridique du droit de mourir dans la dignité. Mais l’interrogation demeure : faut-il revendiquer le droit de mourir dans la dignité au nom du droit à la vie ? À cette question principale, viennent se greffer d’autres interrogations non moins importantes. Le concept de droit à la vie englobe-t-il en son sein celui de droit à la mort ? Un individu peut-il solliciter l’aide de l’État pour mourir ? La dignité qui est une valeur constitutionnelle peut-elle fonder un droit à l’euthanasie et à l’assistance au suicide ? Voilà les questions qui continuent de faire l’objet de vives controverses entre les partisans de la primauté du respect de la dignité humaine et les pourfendeurs d’un prétendu retour à l’ordre moral, présenté comme la négation de la conception individualiste et libérale des droits de l’homme[29]. La réponse n’est pas aisée, mais nécessaire si on veut avoir une vue exacte du droit positif en la matière. Si pour certains, le respect de la vie humaine est une réalité transcendante insusceptible d’être laissée à la libre disposition de l’homme, pour d’autres, mourir dans la dignité implique plutôt un droit qui doit être revendiqué et reconnu dans la mesure où l’individu est le seul juge de la qualité de sa vie et de sa dignité[30].
Fort de cette controverse, il devient donc difficile pour la Cour européenne des droits de l’homme, organe judiciaire du Conseil de l’Europe, de déduire de l’article 2 de la Convention européenne des droits de l’homme (ci-après Convention européenne) un droit à mourir. Après avoir pendant longtemps hésité à reconnaître un tel droit (I), la Cour européenne a finalement, au moyen des évolutions jurisprudentielles, développé une approche innovatrice et conciliatrice des concepts de droit de mourir dans la dignité et de droit à la vie (II). L’effectivité d’une telle approche trouve son véritable fondement à la fois dans l’article 8 de la Convention européenne relatif au droit au respect de la vie privée et dans l’évolution du droit positif des États membres sur la question de mourir dans la dignité.
I. Les hésitations de la Cour EDH à la reconnaissance du droit de mourir dans la dignité
La fin d’une vie se prépare. « C’est un moment où il importe d’harmoniser le respect de l’autonomie du patient, le soulagement de la douleur, le souci de préserver la qualité de vie, le respect de la dignité humaine et la valeur intrinsèque de cette vie qui se termine »[31]. Mais le droit de mourir dans la dignité suscite des conflits profonds, d’ordre spirituel, culturel ou idéologique et divise les États sur la question de la vie. En effet, en raison de l’absence d’une définition juridique spécifique, le droit de mourir dans la dignité ne fait pas l’unanimité au sein du Conseil de l’Europe et cela se traduit par une certaine hésitation de la Cour européenne à reconnaître l’existence d’un tel droit en droit de la Convention européenne des droits de l’homme. Pourtant, ce droit est bien établi en droit interne[32]. On comprend ainsi que les hésitations de la Cour découlent de l’absence de consensus européen (A) et se justifient à travers les débats que la question de mourir dans la dignité alimente au sein de la société. Elles découlent aussi de la confusion qu’il y a autour des concepts de droit de mourir dans la dignité et de droit à la mort (B).
A. Les hésitations découlant de l’absence de consensus européen sur la question de mourir dans la dignité
Si le consentement d’un individu au traitement médical et son refus à un traitement médical non désiré sont des droits fondamentaux reconnus en droit positif européen, le droit de mourir dans la dignité, quant à lui, ne fait pas l’unanimité et divise la doctrine et la jurisprudence. Le débat juridique sur la scène internationale autour de la question de mourir dignement concerne trois droits protégés par le droit international et européen des droits de l’homme : il s’agit du droit à la liberté, du droit à la vie et du « droit au respect de la dignité inhérente à la personne humaine »[33]. Ces droits sont utilisés par les uns comme fondement pour soutenir la mort dans la dignité, et par les autres comme fondement pour soutenir la prohibition de la mort dans la dignité. La question centrale est de savoir s’il suffit, pour assurer au malade en fin de vie une mort digne, de laisser celle-ci venir naturellement en l’accompagnant le cas échéant d’un apaisement des souffrances physique et morale, ou si, de manière plus radicale, il est juridiquement admissible, dans des cas extrêmes, de mettre un terme à la vie du patient par injection d’une substance mortifère[34]. Voilà la question qui divise la société européenne : d’un côté, les partisans de la primauté du respect du droit de mourir dans la dignité pour lesquels il n’y a aucune raison d’établir une rupture radicale entre les différentes méthodes qui visent, dans un souci d’humanité, à garantir la qualité d’une existence qui s’achève[35] (1); et de l’autre côté, les opposants des actes médicaux en fin de vie qui admettent la mort naturelle et prétendent un retour à l’ordre moral, présenté comme la négation de la conception individualiste et libérale du droit de mourir dans la dignité (2).
1. La thèse de la primauté du respect du droit de mourir dans la dignité
Les tendances actuelles du débat juridique en faveur de la reconnaissance du droit de mourir dans la dignité sont fondées sur les instruments juridiques de protection des droits fondamentaux qui protègent la dignité humaine, le droit à la vie et le droit à la liberté. En effet, la Convention européenne[36] protège le droit à la vie, mais ne contient aucune disposition spécifique sur la dignité humaine. Si la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne[37] se fonde sur les valeurs indivisibles et universelles de dignité humaine, de liberté, d’égalité et de solidarité (2e paragraphe du préambule de la Charte), tout son titre premier porte sur la question de dignité humaine. Ainsi, l’article 1 précise que la dignité humaine est inviolable et doit être respectée et protégée. L’article 2 précise que toute personne a droit à la vie. Si la Charte ne fait aucune mention expresse à la mort dans la dignité, son article 3, alinéa 2 reconnaît tout de même que le consentement libre et éclairé d’une personne doit être respecté dans le cadre de la médecine et de la biologie. Cela peut renvoyer à des demandes d’aide médicale à mourir ou à l’euthanasie.
Le seul instrument juridique qui porte expressément sur la question de la dignité humaine dans le domaine de la médecine est la Convention sur les droits de l’homme et la biomédecine[38]. Cette convention vise à protéger l’être humain dans sa dignité, son identité et garantit à toute personne, sans discrimination, le respect de son intégrité et de ses autres droits et libertés fondamentales à l’égard des applications de la biologie et de la médecine (article 1er). Ainsi, toute intervention dans le domaine de la santé ne peut être effectuée qu’après que la personne concernée y a donné son consentement libre et éclairé (article 5). De plus, les souhaits précédemment exprimés au sujet d’une intervention médicale par un patient qui, au moment de l’intervention, n’est pas en état d’exprimer sa volonté seront pris en compte (article 9). On peut dégager de cette Convention une nette tendance à reconnaître à tout individu un droit général et inconditionnel à refuser un traitement. Ce droit de refuser un traitement peut s’interpréter comme étant la reconnaissance implicite du droit de mourir dans la dignité.
Pendant deux décennies (1970-1990), le combat sur la question de la mort dans la dignité s’est déroulé essentiellement sur le terrain de l’euthanasie passive. Aujourd’hui, il se situe également sur celui de l’euthanasie active et la mort médicalement assistée ou l’aide médicale au suicide[39]. C’est à partir de ce moment que plusieurs associations de défense des droits des patients en fin de vie ont commencé à voir le jour[40]. Les valeurs sur lesquelles se fondent les défenseurs de la thèse de la mort dans la dignité s’appréhendent en termes de liberté individuelle, de principe d’autonomie nécessitant l’incontournable consentement du patient, de qualité de vie, c’est-à-dire le refus de la douleur. Elles s’appréhendent également en termes de dignité humaine, c’est-à-dire le refus de la déchéance, de la perte de la maîtrise de soi avec le désir de partir le plus lucidement possible[41]. Les défenseurs d’une telle thèse assimilent le droit à la vie au droit à la dignité humaine ou au droit à la mort dans la dignité. Suivant leur philosophie, l’être humain dispose pleinement du droit de décider de sa vie et de sa mort. Ainsi, le droit à la mort dans la dignité devient une composante du droit à la vie. Il faut rappeler que le droit à la liberté, le droit à la vie et le droit au respect de la dignité inhérente à la personne humaine sont protégés par le droit international des droits de l’homme, notamment la Déclaration universelle des droits de l’homme[42] et le Pacte international relatif aux droits civils et politiques[43], instruments juridiques universels auxquels le droit européen renvoie. C’est sur le fondement de ces textes que certains ont tendance à saisir la Cour européenne pour demander la reconnaissance du droit à une vie digne ou à une mort dans la dignité et l’obligation pour les autorités de respecter le droit de mourir d’un individu dans le but de mettre fin à ses souffrances[44].
Au-delà des enjeux juridiques, d’autres arguments invoqués par les partisans de la thèse de mourir dans la dignité concernent le risque de dérapage et d’abus en matière d’euthanasie. Selon ces derniers, la mise en place des mesures légales relatives à la pratique de l’euthanasie aurait pour but d’éviter que les organisations fournissant une assistance au suicide n’interviennent dans l’illégalité et dans la clandestinité, avec un risque considérable d’abus[45]. Comme mentionné plus haut, le droit à la vie sert également d’argument pour demander la légalisation de l’euthanasie afin d’éviter les abus ou la clandestinité de cet acte. C’est pourquoi des revendications telles que le droit à une vie décente ou le droit à la vie dans la dignité ont rencontré un écho favorable dans l’opinion publique[46] sur la question. Cela revient à dire que la dignité est un principe de la liberté quant à la détermination de la manière dont une fin de vie peut se dérouler.
Ces arguments juridiques et éthiques longtemps défendus par les partisans du droit de mourir dans la dignité demeurent largement contestés par les partisans de la mort naturelle.
2. La thèse de la négation de la conception individualiste et libérale du droit de mourir dans la dignité
Si pour certains, mourir dans la dignité implique un droit qui doit être revendiqué et reconnu dans la mesure où l’individu est le seul juge de la qualité de sa vie et de sa dignité, pour d’autres, le respect de la vie humaine est plutôt une réalité transcendante insusceptible d’être laissée à la libre disposition de l’homme[47]. Ainsi, plusieurs arguments à la fois juridiques et non juridiques ont été avancés au soutien du rejet du droit de mourir dans la dignité. Ils sont pour la plupart appuyés sur une observation scientifique des discours. Au premier rang de ces arguments, figurent en bonne place la dignité humaine, le caractère sacré de la vie, la mort naturelle. C’est ainsi que certains justifient leur position à travers les instruments juridiques internationaux qui proclament « la dignité inhérente à tous les membres de la famille ». Dans la mesure où la situation juridique en la matière varie considérablement d’un pays à l’autre, le droit de mourir dans la dignité renvoie de plus à la dimension éthique de la question de savoir si et dans quelle mesure l’État doit faciliter ou soutenir le suicide. Par exemple, selon la Cour européenne, l’importance fondamentale attachée par l’ordre juridique allemand à la protection de la vie contre la mise en œuvre de l’euthanasie se fonderait sur de profondes raisons historiques, qui auraient conduit à une notion juridique de la dignité humaine particulièrement forte[48].
D’autres instruments juridiques rappellent la raison d’être de la médecine en précisant que les médecins n’ont pas le droit de vie et de mort sur les patients. C’est notamment le cas de la Recommandation 779 (1976)[49] de l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe qui rappelle que « le médecin doit s’efforcer d’apaiser les souffrances et qu’il n’a pas le droit, même dans les cas qui lui semblent désespérés, de hâter intentionnellement le processus naturel de la mort ». Le Code international d’éthique médicale prévoit en son paragraphe 9 que « [l]e médecin devra toujours avoir à l’esprit le souci de conserver la vie humaine »[50]. La Charte européenne d’éthique médicale précise que « [l]a médecine implique en toutes circonstances le respect constant de la vie »[51] et le Rapport du Comité d’experts de l’OMS indique clairement que « [l]’euthanasie (hâter la mort de façon active par des médicaments) ne doit pas être légalisée »[52]. D’autres instruments juridiques ont repris ces principes, notamment la Déclaration de Venise sur la phase terminale de la maladie de 1983[53] ou encore la Déclaration de Madrid de 1987[54]. De même, la Recommandation 1418 (1999)[55] sur la protection des droits de l’homme et de la dignité des malades incurables et des mourants, adoptée le 25 juin 1999 maintient très clairement « l’interdiction absolue de mettre intentionnellement fin à la vie des malades incurables et des mourants ». Ainsi, dans la mesure où le droit à la vie est garanti par les États membres, conformément à l’article 2 de la Convention européenne qui dispose que « la mort ne peut être infligée à quiconque intentionnellement », le désir de mourir exprimé par un malade incurable ou un mourant ne peut jamais constituer un fondement juridique à sa mort de la main d’un tiers et ne peut en soi servir de justification légale à l’exécution d’actions destinées à entraîner la mort[56]. La conception individualiste et libérale de la mort est ainsi remise en cause.
En 2012, dans sa Résolution 1859[57] et Recommandation 1993[58] intitulée « Protéger les droits humains et la dignité de la personne en tenant compte des souhaits précédemment exprimés par les patients », l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe a rappelé le principe suivant lequel « [l]’euthanasie, dans le sens de l’usage des procédés par action ou par omission permettant de provoquer intentionnellement la mort d’une personne dépendante dans l’intérêt allégué de celle-ci, doit (…) être interdite » (paragraphe 5). Les tenants de ces arguments juridiques fondent leur opinion sur le fait que des pratiques telles que l’euthanasie auraient pour effet d’octroyer au médecin une sorte de souveraineté ou de liberté sur la vie et la mort.
Lorsque la question, « faut-il légiférer et dépénaliser l’euthanasie ? » s’était posée en France en 1999, la doctrine n’a pas tardé à réagir négativement en ces termes : « Non, une loi autorisant l’euthanasie dans certaines conditions ne peut pas être la voie dans laquelle s’engager, si la société veut maintenir la solidarité et améliorer la fin de vie de ses membres. Alors que notre pays se flatte d’avoir retiré de son code pénal la peine de mort, il ne doit pas introduire une loi qui autorise la mort »[59]. Ces défenseurs de la thèse contre l’euthanasie comparaient ainsi l’acte à la peine de mort ou à une forme d’assassinat, surtout à une époque où l’opinion publique française était très divisée sur la question de mourir dans la dignité.
Une autre raison vient de l’Église qui pense que la vie est un don de Dieu et que nul ne peut l’enlever. Par exemple, lorsque les pays du BENELUX (Belgique, Pays-Bas, Luxembourg) avaient dépénalisé l’euthanasie, c’est-à-dire l’acte d’assistance au suicide[60], le Vatican avait considéré cet acte comme étant un viol de la dignité humaine[61]. Cette thèse participe de la théorie de la mort naturelle chère aux quatre religions majoritaires, notamment le catholicisme, le protestantisme, le judaïsme et la religion musulmane qui ont affirmé l’unité de leur conception sur le respect sacré de la vie et l’obligation de n’y point déroger[62]. À cet effet, le caractère absolu de l’interdiction de l’homicide reçoit un large consensus.
Si l’on remonte dans l’histoire, on comprend que le suicide assisté et l’euthanasie avaient été condamnés avec constance par la déontologie médicale depuis le Serment d’Hippocrate (460-370 av. J.-C) et par toutes les principales religions. L’euthanasie a même été qualifiée de crime contre l’humanité commis par la conspiration nazie[63]. La Conférence des évêques catholiques d’Angleterre et du pays de Galles a largement influencé la jurisprudence Pretty de la Cour européenne. En tant que partie intervenante devant la Cour, les pères de l’Église ont souligné que « l’un des préceptes fondamentaux de la foi catholique consiste à croire que la vie humaine est un don de Dieu reçu en dépôt. Les actes visant à se donner la mort à soi-même ou à la donner à un tiers, même si ce dernier y a consenti, témoigneraient d’une incompréhension dommageable de la valeur humaine. Le suicide et l’euthanasie se situeraient dès lors en dehors de la sphère des options moralement acceptables pour traiter la souffrance et la mort des êtres humains (…) »[64]. S’appuyant sur un rapport établi en 1994 par le Groupe de travail sur la vie et le droit par l’État de New York, la Conférence des évêques a conclu que la légalisation de quelque forme de suicide assisté ou d’euthanasie que ce soit constituerait une erreur aux proportions historiques qui aurait des conséquences catastrophiques pour les personnes vulnérables et engendrerait une corruption intolérable de la profession médicale[65]. L’histoire du droit à la vie révèle que seuls les principes religieux sont à même d’expliquer l’origine du caractère sacré de la vie à partir du moment où l’homme a été créé à l’image de Dieu et où la vie humaine est considérée comme un don de Dieu[66]. Le droit occidental ayant été façonné dans une large mesure par le judaïsme et le christianisme, on peut affirmer que la position centrale qu’occupe ce principe dans le droit, a des origines et une orientation essentiellement religieuse[67]. Puisque l’être humain a été créé à l’image et à la ressemblance de Dieu, il est donc doté d’une dignité inaliénable. Cette dignité inaliénable de l’être humain est liée à l’image divine qui le structure radicalement[68] et que les Pères de l’Église ont souvent évoquée lors des débats sur la question de mourir dans la dignité.
On est ainsi face à un dilemme juridique provoqué par le débat bioéthique. Mais la dignité humaine place la question de mourir dans la dignité au cœur du droit à la vie alimentant les débats. Elle est utilisée pour défendre deux points de vue contradictoires. Cette contradiction est à l’origine de la confusion entre deux concepts, le droit de mourir dans la dignité et le droit à la mort.
B. Les hésitations découlant de la confusion autour des concepts de droit à la mort et de droit de mourir dans la dignité
Si le droit à la vie a longtemps été reconnu en droit international, il faut dire que c’est récemment que le concept de droit de mourir dans la dignité a fait son entrée dans le vocabulaire juridique. Plus tard un autre concept, celui de droit à la mort va faire son apparition, créant ainsi une confusion au sein de la communauté juridique. Les auteurs Jean-Louis BAUDOUIN et Danielle BLONDEAU[69] tentent de lever cette confusion en donnant une distinction intéressante entre le droit de mourir et le droit à la mort. Selon ces deux auteurs, le droit de mourir consiste dans la possibilité de mourir alors que le droit à la mort consiste dans la revendication de mourir au moment choisi. Mais le droit à la mort n’existe ni dans la Déclaration universelle ni dans les Pactes sur les droits civils ni dans les Conventions régionales européennes. L’analyse juridique de la relation entre les deux concepts permet de mieux comprendre pourquoi la Cour européenne, en plus de son silence à l’égard des questions aussi sensibles, n’a pas voulu ériger le droit à la mort en un droit fondamental et l’a exclu du champ de protection du droit à la vie (1). Malgré l’évolution de la société européenne, les positions de la Cour restent toujours ambiguës sur la question de mourir dans la dignité (2).
1. L’exclusion totale du droit à la mort de l’article 2 de la Convention européenne
L’article 2 de la Convention européenne dispose en ces termes : « le droit de toute personne à la vie est protégé par la loi ». On note une exclusion totale voire une impossibilité de déduire de cette disposition un droit à la mort. Mais la question fondamentale demeure : peut-on réellement revendiquer le droit à la mort ? Une telle revendication n’apparaît-elle pas incongrue dans une société qui fait du respect de la vie humaine un de ses fondements ? En effet, il peut sembler paradoxal de reconnaître l’existence d’un droit à la mort alors que l’exercice des droits de la personne ne peut s’accomplir que dans le cadre d’une vie humaine[70]. Et la raison est simple : la revendication du droit à la mort génère des risques importants pour les droits fondamentaux de la personne et peut même avoir des incidences négatives sur le droit à la vie, en ce sens qu’elle lui attribue désormais un aspect négatif, c’est-à-dire la mort.
Il ne semble pas exister, à l’heure actuelle, une définition juridique de la mort. Mais dans le jargon médical, certaines notions permettent de définir la mort et entrainent des effets juridiques : on parle tantôt de la cessation de la circulation sanguine entraînant la mort cérébrale, tantôt de l’arrêt cardiaque et respiratoire, tantôt de l’absence totale de conscience et d’activité motrice spontanée, tantôt de l’abolition de tous les réflexes du tronc cérébral ou encore de l’absence totale de ventilation spontanée. La question se pose désormais sur la légitimité d’un droit à donner la mort à une autre personne ou d’un droit à déterminer soi-même le moment de sa mort[71]. Mais il semble qu’un tel droit n’existe pas encore en droit international des droits de l’homme. La Cour européenne a fait ce constat dans l’arrêt Pretty où elle a précisé qu’il n’était pas possible de déduire du droit à la vie un droit à mourir, que ce soit de la main d’un tiers ou avec l’assistance d’une autorité publique[72]. Mme Pretty ne pouvait donc se placer directement sur le terrain de la dignité, dans la mesure où aucune disposition spécifique de la Convention n’en fait mention. La Cour a alors refusé de s’aligner sur son argumentation selon laquelle les juridictions britanniques s’engagent à ne pas poursuivre son mari s’il l’aidait à mettre fin à ses jours. Une telle argumentation, selon la Cour, résulterait manifestement d’une distorsion de langage[73]. À cet égard, elle rappelle que « l’article 2 de la Convention consacre d’abord et avant tout une prohibition du recours à la force ou de tout autre comportement susceptible de provoquer le décès d’un être humain, et il ne confère nullement à l’individu un droit à exiger de l’État qu’il permette ou facilite son décès »[74]. Ainsi, dans l’affaire Sanles Sanles, la requérante faisait valoir au nom de son beau-frère, tétraplégique souhaitant mettre fin à ses jours avec l’assistance de tiers et décédé avant l’introduction de la requête, le droit à la mort, en invoquant, entre autres, l’article 2 de la Convention[75]. Le raisonnement de la Cour s’est fondé sur l’obligation négative de respecter la vie suivant laquelle « la mort ne peut être infligée à quiconque intentionnellement ». Ainsi, l’État ne peut pas infliger ou permettre que soit infligée la mort à quiconque arbitrairement. Il s’agit d’une obligation par nature[76]. Dans plusieurs autres affaires de revendication du droit à la mort, la Cour est arrivée à la même conclusion[77].
La Cour européenne n’a donc pas voulu créer un malheureux précédent. Car, lorsque le droit ouvre la porte à l’euthanasie en faisant la promotion du droit à la mort, on risque d’arriver à une situation où les individus font l’amalgame entre la mort demandée au terme d’une maladie incurable ou pénible et la mort pour toute autre raison, notamment les problèmes économiques, la vieillesse ou même la dépression. On risque d’instaurer ainsi une culture de la mort à la société et toute personne pourrait revendiquer la mort à tout moment lorsqu’elle constate que sa vie n’est plus possible à vivre. En même temps, cela risquerait d’engendrer des conséquences susceptibles de porter atteinte à la conception même de l’humain.
Tout comme l’interdiction de la torture et des traitements cruels, inhumains ou dégradants, l’interdiction de tuer a un caractère absolu et intangible. Elle exprime toute la valeur que l’on attache à la vie, valeur sans laquelle les autres droits de l’homme n’ont pas de sens. Ainsi, le principe de l’intangibilité signifie que le droit à la vie est un droit primordial et aucune dérogation n’y est autorisée en temps de paix[78]. Si certaines personnes peuvent, au nom de la liberté individuelle, décider de ce qu’elles peuvent faire de leur vie, alors on en déduit que le droit à la vie n’est plus absolu. Il faut comprendre que le fait de laisser l’individu être l’acteur des choix de vie le concernant participe en général de l’essence même de la philosophie des droits de l’homme[79]. Mais la situation devient problématique lorsque ces choix concernent la mort. La remarque a été faite par la Cour européenne dans l’arrêt Pretty à la lumière d’une comparaison avec certaines dispositions de la Convention européenne. Si dans le contexte de l’article 11 de la Convention, la liberté d’association a été jugée comme impliquant non seulement un droit d’adhérer à une association, mais également le droit corrélatif de ne pas être contraint de s’affilier à une association, la Cour observe qu’une certaine liberté de choix quant à l’exercice d’une liberté est inhérente à la notion de celle-ci. Mais elle a, aussi tôt, rappelé que l’article 2 de la Convention n’est pas libellé de la même manière et n’a aucun rapport avec les questions concernant la qualité de la vie ou ce qu’une personne choisit de faire de sa vie[80].
Dans ce cas, « le principe du caractère sacré de la vie signifie au moins que la vie est précieuse, qu’elle doit être respectée, protégée et traitée avec considération et qu’il s’agit d’un principe fondamental de notre société »[81]. Il peut prendre trois formes selon certains auteurs : la première approche est celle qui est fondée sur le vitalisme qui exige que toute vie soit maintenue à tout prix, peu importe les conséquences pour la personne et les coûts de la poursuite du traitement. Dans ce contexte de préservation de la vie, on entend par « vitalisme médical » une théorie voulant que, partout où il y a vie humaine (même s’il ne s’agit que de simples métabolismes ou simples processus vitaux) et quel que soit l’état du patient (ou du nouveau-né) ou ses désirs, il serait contraire au principe sacré de la vie de cesser de la préserver ou d’intervenir dans son processus normal. Une deuxième approche repose sur le concept de qualité de vie qui met l’accent sur le sens que l’on puisse donner à une vie. Une troisième approche qui se rapproche du vitalisme est décrite sous le vocable spécifique du caractère sacré de la vie ou de l’inviolabilité de la vie[82]. Mais, la question de la revendication du droit à la mort vient aujourd’hui bouleverser la stabilité juridique pour tenter d’instaurer un droit pluriel fondé sur la liberté individuelle et l’autodétermination.
Même si la Cour, à la lumière de la jurisprudence Haas, a confirmé que le droit d’un individu de décider de quelle manière et à quel moment sa vie doit prendre fin, à condition qu’il soit en mesure de former librement sa volonté à ce propos et d’agir en conséquence, est l’un des aspects du droit au respect de la vie privée au sens de l’article 8 de la Convention impliquant ainsi la reconnaissance pour l’individu d’un droit à l’autodétermination relativement aux questions de vie et de mort, elle n’a eu de cesse de rappeler que l’expression « mourir dans la dignité » ne confère pas automatiquement un droit à la mort, ni celui de choisir entre la vie et la mort. Elle permet plutôt à une personne d’assurer une mort dans la dignité ou d’avoir un contrôle sur le temps et la manière de mourir. La position de la Cour européenne s’annonce ainsi ambigüe.
2. Les ambiguïtés de la Cour et son refus de consacrer un droit de mourir dans la dignité
La peur de la mort est un sentiment naturel et universel dont toutes les civilisations portent témoignage[83]. Mais une mort accompagnée de souffrances fait encore plus peur. C’est sans doute une telle situation qui pousse les personnes à revendiquer le droit de mourir dans la dignité. Mais, la Cour européenne ne s’est jamais prononcée de façon tranchée sur la question de mourir dans la dignité bien que ses récents arrêts semblent donner un aperçu de sa position. Consciente du fait que l’article 2 de la Convention n’implique aucune dimension de choix dans le chef des individus[84] comme l’article 9 ou encore l’article 11, la Cour européenne a eu l’occasion de s’aventurer sur ce terrain délicat où elle a nié expressément l’autodétermination de la personne en matière de choix de vie dans la célèbre affaire Pretty. Elle a ainsi affirmé que « [l]’article 2 ne saurait, sans distorsion de langage, créer un droit à l’autodétermination en ce sens qu’il donnerait à tout individu le droit de choisir la mort plutôt que la vie »[85]. On comprend ainsi que l’article 2 de la Convention n’est pas susceptible de dérogation. Il faut dire que l’article 15 de la Convention fait une distinction entre les droits à protection relative et les droits à protection absolue. Si les premiers consacrent des droits dont la personne a le choix d’user ou non et que l’État peut restreindre, à certaines conditions, en usant de sa marge d’appréciation, les seconds, quant à eux, ne sont à la disposition, ni des États, ni des individus[86]. L’article 2 fait donc partie de cette deuxième catégorie de droits et n’admet aucune exception que celles énumérées dans son paragraphe 2. Dans sa jurisprudence Giuliani et Gaggio c. Italie, la Cour mentionne que « les circonstances dans lesquelles la privation de la vie peut se justifier doivent être interprétées de façon étroite »[87]. En raisonnant ainsi, le juge de Strasbourg refuse de créer un nouveau précédent qui poserait un principe a priori contraire au droit à la vie[88].
Il faut rappeler que les ambiguïtés de la Cour sur la question ont fait émerger la notion de marge nationale d’appréciation. Ainsi, la Cour laisse entendre aux États qu’ils disposent d’une totale liberté dans la mise en œuvre du droit de mourir dans la dignité. Cette mise en œuvre s’est manifestée à travers la dépénalisation de l’euthanasie dans plusieurs pays membres et la tentative de légaliser l’aide au suicide. Si une telle démarche permet de respecter la diversité des droits nationaux sur une question éminemment sensible puisqu’elle relève des enjeux moraux et éthiques[89], il y a lieu de s’interroger avec Olivier BACHELET : « comment la Cour peut-elle affirmer que le droit à la vie garanti par l’article 2 de la Convention oblige les Etats à mettre en place une procédure propre à assurer qu’une décision de mettre fin à sa vie corresponde bien à la libre volonté de l’intéressé, sans remettre en cause l’affirmation contenue dans le paragraphe 39 de l’arrêt Pretty selon laquelle l’article 2 ne saurait créer un droit à l’autodétermination en ce sens qu’il donnerait à tout individu le droit de choisir la mort plutôt que la vie »[90] ? C’est ici que la position de la Cour nous semble ambigüe sur la question de mourir dans la dignité.
À partir du moment où chaque pays façonne, de par son histoire et sa culture, les cadres normatifs et les contextes institutionnels au sein desquels se développent et évoluent les pratiques et les usages[91], il devient difficile à la Cour européenne de se positionner sur la question de mourir dans la dignité. Il lui a paru plus pertinent de renvoyer la question à la marge nationale d’appréciation des États. Même si, à certains égards, on assiste à un certain rapprochement entre pays européens concernant l’éthos démocratique, les valeurs communes, on constate aussi les différences sensibles quant à l’approche de certains problèmes de société tels que l’euthanasie, l’aide aux mourants ou les soins palliatifs. Sur ces sujets comme dans d’autres domaines, l’Europe institutionnelle est une chose, celle des pratiques culturelles, des choix des valeurs en est une autre. Et d’un pays à l’autre, l’écart entre le discours et la réalité peut s’avérer considérable[92]. La Cour a réaffirmé dans l’affaire Charlie Gard[93] de juin 2017 cette théorie de la marge nationale d’appréciation. Elle a ainsi conforté sa jurisprudence selon laquelle les Etats parties disposent d’une marge de manœuvre concernant les soins de fin de vie.
Mais l’intensité des débats au sein de la Cour européenne nous montre à quel point la question de la fin de vie, et de manière générale celle de mourir dans la dignité, sont prises en tension entre les deux conceptions du droit à la vie et à la dignité.
II. La conciliation conceptuelle entre le droit de mourir dans la dignité et le droit à la vie
À quoi peut bien servir la reconnaissance d’un droit si l’on ne peut pas en bénéficier pleinement jusqu’au terme de sa vie ? À l’évidence, le droit de mourir dans la dignité ne devrait faire aucun bras de fer avec le droit à la vie. Mais les débats juridique, éthique, philosophique ou religieux ayant animé la question ces dernières années ont fini par mettre les deux droits en conflit. La résolution de ce conflit est fondée sur la liberté personnelle en matière des choix de vie et de mort. Selon la Cour européenne, le droit de mourir ne peut trouver de refuge dans le droit à la vie. C’est d’ailleurs dans cette perspective qu’elle a longtemps refusé de déduire de l’article 2 de la Convention un droit à mourir. C’est finalement sur les fondements du droit au respect de la vie privée (A) et de la liberté de choix (B) qu’elle a pu admettre l’existence d’un tel droit à travers une approche évolutive et conciliatrice des concepts de droit à la vie et de droit de mourir dans la dignité.
A. L’interprétation du droit de mourir dans la dignité comme droit au respect de la vie privée
C’est finalement au travers de l’article 8 de la Convention issu du droit au respect de la vie privée que la Cour s’est appuyée pour reconnaître différentes libertés en matière de vie et de mort. Pour la première fois dans son histoire jurisprudentielle, elle a trouvé que « la notion d’autodétermination personnelle reflète un principe important qui sous-tend l’interprétation des garanties de l’article 8 ». Et c’est dans cette même perspective qu’elle a indiqué que l’imposition d’un traitement médical sans le consentement du patient s’il est adulte et sain d’esprit s’analyse en une atteinte à l’intégrité physique de l’intéressé pouvant mettre en cause les droits protégés par l’article 8, paragraphe 1 de la Convention. On assiste ainsi à une lecture de la notion de vie privée, au travers du principe de la dignité et de liberté, permettant de dégager la notion d’autodétermination personnelle (1) comme composante du droit à la vie privée. Sans nier en aucune manière le principe du caractère sacré de la vie protégé par la Convention[94], la Cour montre comment cette notion de droit au respect de la vie privée peut s’interpréter dans les situations de fin de vie (2).
1. La consécration du droit à l’autodétermination personnelle en matière des choix de vie et de mort
À l’origine, la notion d’autodétermination renvoie à une logique bien connue du droit international d’expression de choix politiques dans un contexte démocratique[95]. Elle évoque le droit des peuples à disposer d’eux-mêmes tel qu’on peut le lire dans les deux Pactes des Nations Unies : « Tous les peuples ont le droit de disposer d’eux-mêmes. En vertu de ce droit, ils déterminent librement leur statut politique et assurent librement leur développement économique, social et culturel ». Il est important de rappeler que nous ne sommes pas ici dans le contexte de l’autodétermination des peuples, mais plutôt dans celui de l’autodétermination ou de l’autonomie personnelle en matière de choix de vie et de mort. Et le problème fondamental est de se demander comment concilier la liberté individuelle sur laquelle repose les principes d’autodétermination et la protection du droit à la vie de la personne humaine. A l’évidence, « [i]l est établi que le principe d’autodétermination exige que l’on respecte les souhaits du patient. Dès lors, si un patient adulte saint d’esprit refuse, quelque déraisonnable que puisse être son refus, de consentir à un traitement ou à des soins par lesquels sa vie serait ou pourrait être prolongée, les médecins responsables de ce patient doivent donner effet à ses souhaits, quand bien même ils estimeraient que cela ne correspond pas à son intérêt (…) Dans cette mesure, le principe du caractère sacré de la vie humaine doit céder devant le principe de l’autonomie (…) »[96]. À ce sujet, il est certain que les interprétations évolutives de la Cour sont en faveur d’une meilleure prise en compte du droit à l’autodétermination de l’individu quant au choix de vie et de mort.
La question de la consécration d’un droit de mourir dans la dignité a en effet soulevé celle de la possibilité, pour les individus, de disposer pleinement de leur vie en déterminant les conditions de leur mort[97]. Toutes les fois qu’elle a été saisie sur la question, la Cour a fondé son raisonnement expressément sur le droit à la dignité humaine dont découlerait un droit à l’autodétermination. Il faut dire que la notion d’autodétermination est en lien étroit avec celle d’autonomie personnelle et tend ainsi à reconnaître à l’individu la faculté de disposer de soi et de son corps. Elle repose sur une conception de l’individu libre, autonome et responsable[98] au sens du raisonnement de la Cour selon lequel « [l]a dignité et la liberté de l’homme sont l’essence même de la Convention »[99]. L’interprétation de cette affirmation laisse entendre que la dignité exprime l’autodétermination d’un individu conscient et responsable de sa propre vie. Le droit à l’autodétermination a donc la même valeur que le droit à la vie.
Ainsi, face aux questions de soins de fin de vie, la notion de dignité a beaucoup évolué et englobe les principes d’autonomie et de liberté de l’individu quant au choix du moment et des modalités de sa mort. En ce sens, liberté et autodétermination seraient synonymiques et supposeraient la reconnaissance au profit de l’individu d’une sphère d’action qui échappe à la contrainte sociale[100]. Dans ce contexte, la notion d’autonomie se définit par la capacité que nous avons, en tant que sujets moraux et politiques, à choisir par nous-mêmes notre style de vie, notre comportement et nos valeurs[101]. Elle se trouve être à l’origine de l’affirmation du principe de dignité de l’être humain. Elle est invoquée dans plusieurs lois contemporaines pour consacrer le droit du mourant de recourir à l’euthanasie sous la forme de l’aide médicale à mourir[102]. La notion a, par ailleurs, amené le droit à porter une attention particulière à l’aptitude du sujet de droit, c’est-à-dire à ses facultés physiques ou intellectuelles lui permettant d’exprimer un consentement, de fonder ses décisions, d’être imputable de ses faits et de manifester sa volonté[103]. La notion exige que les choix des individus soient reconnus et respectés en droit.
Par exemple, dans l’affaire Vincent Lambert[104], la Cour européenne a jugé conventionnel l’encadrement de la fin de vie en France. Elle a, par ailleurs, accepté le compromis français, entre la protection objective de la vie et la reconnaissance de la dignité subjective de l’individu par le respect de son autodétermination. Cette décision s’inscrit dans la jurisprudence habituelle de la Cour sur la question de fin de vie, qui se situe au croisement du refus de laisser mourir au nom de la valeur de la vie (conception objective) et d’une reconnaissance progressive de l’autonomie décisionnelle du patient (conception subjective)[105] à travers le droit à l’autonomie personnelle.
La primauté du droit de la personne à l’autonomie individuelle ou décisionnelle signifie que c’est à l’individu même de déterminer ce qui, à ses yeux, est digne. On pourrait croire que cette conception de dignité remet en cause la formulation des instruments internationaux selon laquelle « la dignité est inhérente à la personne humaine ». Mais la décision relative à l’affaire Commune de Morsang-sur-Orge[106] démontre qu’une personne n’est pas autorisée à déterminer la dignité pour elle-même[107]. L’usage de la dignité dans ce contexte « se révèle pour le moins éclectique et dévoile, un concept évolutif, selon les conceptions changeantes de l’opinion et selon une valeur dont la sauvegarde dépend de la tolérance ou de la complaisance »[108]. La Cour a d’ailleurs étendu l’interprétation de la notion de droit au respect de la vie privée aux situations de fin de vie.
2. L’interprétation de l’article 8 de la Convention dans les situations de fin de vie
Si le droit de mourir ne peut trouver de refuge dans le droit à la vie, il faut noter qu’il peut légitimement, au nom de la dignité humaine, trouver de refuge dans le droit au respect de la vie privée. En effet, la notion de vie privée est une notion large, non susceptible d’une définition exhaustive. Elle recouvre l’intégrité physique et morale de la personne[109]. Elle peut parfois englober des aspects de l’identité physique et sociale d’un individu[110]. Des éléments tels que le nom, l’identité sexuelle, l’orientation sexuelle et la vie sexuelle relèvent de la sphère personnelle protégée par le droit au respect de la vie privée[111]. Ce droit protège également le droit au développement personnel, le droit d’établir et d’entretenir des rapports avec d’autres êtres humains et le monde extérieur et le droit à l’autodétermination personnelle en matière de choix de vie et de mort[112]. De plus, le principe d’autonomie de la personne qui caractérise l’autodétermination est un principe directement dérivé de celui de la dignité humaine, selon Mme Véronique GIMENO-CABRERA[113]. Mais la question centrale reste la suivante : Est-ce que le principe de l’autodétermination personnelle qui donne à l’être humain la liberté de choisir lui-même son comportement personnel peut s’étendre au droit à la vie ? Puisque l’autodétermination tend à reconnaître à l’individu la faculté de disposer de soi et de son corps, peut-il, sur le fondement du droit à la vie privée, choisir de vivre ou de mourir ? L’arrêt Pretty de la Cour européenne semble apporter une réponse à la question.
En effet, l’arrêt Pretty du 29 avril 2002 est un arrêt de principe ayant contribué de façon significative à la construction de la jurisprudence européenne en situation de fin de vie. Dans cet arrêt, la question était de savoir si l’interdiction du suicide assisté tel que prévu par le droit anglais devait être considéré comme constituant une ingérence non autorisée dans le droit au respect de la vie privée de madame Pretty. Pour répondre à la question, la Cour a innové en créant un nouveau droit à l’autodétermination[114] déduit des dispositions de l’article 8 qu’elle qualifie « d’autonomie personnelle ». Elle a considéré ici que « la notion d’autonomie personnelle reflète un principe important qui sous-tend l’interprétation des garanties de l’article 8 »[115] et peut s’entendre « au sens du droit d’opérer des choix concernant son propre corps »[116]. La Cour a affirmé que, sur ce fondement, « la façon dont (madame Pretty) choisit de passer les derniers instants de son existence fait partie de l’acte de vivre et elle a le droit de demander que cela soit aussi respecté ». Pour conclure suivant une approche comparatiste, la Cour s’inspire d’une jurisprudence de la Cour suprême du Canada[117] et confirme que « la requérante en l’espèce est empêchée par la loi d’exercer son choix d’éviter ce qui, à ses yeux, constituera une fin de vie indigne et pénible. La Cour ne peut exclure que cela représente une atteinte au droit de l’intéressé au respect de sa vie privée, au sens de l’article 8-1 de la Convention »[118]. La Cour construit ainsi l’essentiel de son raisonnement autour de l’idée d’autonomie personnelle. Au regard de ce raisonnement, il est important de conclure que le droit de choisir le moment de sa mort et ses conditions afin d’éviter une fin de vie indigne est inclus dans le droit au respect de la vie privée[119].
Dans plusieurs autres arrêts rendus, la Cour a réaffirmé sa position[120]. À la suite de cette position de la Cour, se dégage le constat suivant : ce que refuse de reconnaître la Cour sur le fondement de l’article 2 de la Convention, elle finit par l’admettre au nom du droit à l’autonomie personnelle et en vient même à affirmer, selon l’auteur Olivier BACHELET, qu’il existe une obligation faite à l’État de favoriser le suicide de celui qui souhaite mettre fin à ses jours[121]. Un patient pourrait ainsi revendiquer le droit d’exercer son choix de mourir en refusant de consentir à un traitement qui pourrait avoir pour effet de prolonger sa vie[122]. Le droit à la vie devient alors la traduction juridique du principe d’autonomie de la personne, donnant droit aux individus de revendiquer le droit de mourir dans la dignité comme un droit fondamental. Dans le prolongement de la jurisprudence Pretty, et reprenant les termes du tribunal fédéral suisse, la Cour européenne a admis que « le droit d’un individu de décider de quelle manière et à quel moment sa vie doit prendre fin, à condition qu’il soit en mesure de forger librement sa propre volonté à ce propos et d’agir en conséquence, est l’un des aspects du droit au respect de sa vie privée au sens de l’article 8 de la Convention »[123].
La Cour reconnaît ainsi de façon conditionnée, une forme de droit à l’autodétermination quant à sa propre mort. Dans ce contexte où l’objectivité du droit à la vie est absorbée et disparaît dans la subjectivité du droit au respect de la vie privée[124], il devient difficile de dire encore que le droit à la vie est le premier des droits de l’homme, qu’il constitue un attribut inaliénable de la personne humaine ou qu’il forme la valeur suprême dans l’échelle des droits de l’homme. De ce point de vue, l’obligation de l’État de garantir et de respecter le droit à la vie n’est plus fondée sur le respect de la vie, mais plutôt sur le respect de l’autonomie de la personne. Ce renversement dans la hiérarchie des valeurs entre la vie et la liberté est certainement représentatif d’une tendance au sein de la société occidentale faisant prévaloir l’autonomie individuelle sur toute autre considération objective[125]. Mais il ne faut pas perdre de vue que cette conception de l’autonomie individuelle, qui se conçoit comme une forme de libération individuelle à l’égard des normes sociales n’est pas sans danger pour la cohésion sociale, mais aussi pour la cohérence et l’effectivité des droits de l’homme[126], et plus particulièrement du droit à la vie.
On en déduit que sur le fondement des principes d’autodétermination et de respect du droit à la vie privée, une personne peut revendiquer le droit d’exercer son choix de mourir à tout moment. Le droit au respect de la vie privée sert désormais de fondement pour l’individu de choisir la mort et donc de disposer de son droit à la vie. C’est ici que le droit de mourir dans la dignité se confond avec le droit à une vie dans la dignité. Cela découle des transformations de la société qui ont un impact considérable sur le droit de la Convention européenne qui doit évoluer pour s’adapter au contexte social et au droit positif des États membres.
B. L’interprétation du droit de mourir dans la dignité comme liberté personnelle en matière des choix de vie et de mort : regard sur l’évolution du droit positif des États membres
Les droits de l’homme incluent le droit à la vie et à la dignité. Or, la dignité signifie le choix. Et dans les États occidentaux, « les individus sont de plus en plus tentés par la mort artificielle, rejetant ainsi la mort naturelle ». En effet, la peur d’une fin de vie indigne et sans qualité a suscité au sein de la communauté juridique des débats autour de l’encadrement de la fin de vie. Ceci a donné lieu, depuis quelques années, à un large consensus social se dessinant en faveur de l’euthanasie et de l’assistance au suicide. Si certains États les condamnent, d’autres se distinguent de cette position. Cela peut sembler compréhensible, au regard de la complexité et de la délicatesse du débat. Car, l’évolution et la densité du débat sur ces pratiques prouvent bien qu’il s’agit d’une question de politique nationale dont le soin est laissé à chaque État d’adopter une législation conséquente au gré de l’évolution de la société et de la maturité des mœurs[127]. Cette évolution représente un changement de paradigme en ce qu’elle admettrait un droit individuel de mourir au nom de la primauté de la volonté du patient sur le pouvoir décisionnel du médecin[128]. Un tel changement dans l’encadrement juridique de la fin de vie s’explique par l’influence des droits fondamentaux et la primauté de la conception subjective de la dignité, et se manifeste, au sein des États membres, tantôt par une dépénalisation croissante de l’euthanasie (1), tantôt par l’émergence d’un droit conventionnel au suicide assisté (2).
1. La dépénalisation croissante de l’euthanasie au nom du droit à la vie et de la dignité
Étymologiquement, l’euthanasie provient du mot grec Eu Thanatos qui signifie « bonne mort, mort douce et sans souffrance ». Les dictionnaires français proposent des définitions différentes. Par exemple, Larousse qualifie d’euthanasie l’acte selon lequel il est licite d’abréger la vie d’un malade incurable pour mettre fin à ses souffrances[129]. Le Petit Robert, quant à lui, la définit comme « l’usage de procédés qui permettent d’anticiper et de provoquer la mort pour abréger l’agonie d’un malade incurable ou lui épargner des souffrances extrêmes »[130]. Il faut dire qu’à l’origine, le terme euthanasie a une signification philosophique qui s’apparente davantage à une façon de mourir. Il désigne dans l’Antiquité gréco-latine un vécu, une qualité des derniers instants de la vie[131]. Bien qu’elle ait conservé sa signification originelle, la notion d’euthanasie a beaucoup évolué selon différentes lois et intègre en son sein des notions voisines telles que le suicide assisté, l’euthanasie passive, l’euthanasie active. En fait, l’expression varie d’un pays à un autre[132]. Suivant une approche de droit positif comparé, on note une avancée significative de certaines formes d’euthanasie dans certains États membres du Conseil de l’Europe. Le Dictionnaire Permanent Bioéthique et Biotechnologie fait une distinction classique entre l’euthanasie active et l’euthanasie passive. La première suppose une intervention spécifique d’un tiers dans le but de mettre fin aux jours d’une personne par administration délibérée de substances létales dans l’intention de provoquer la mort[133]. Elle peut être demandée par le malade[134] mais elle peut aussi être administrée sans son consentement ou une manifestation explicite de volonté. Quant à l’euthanasie passive, « elle peut être définie comme l’arrêt des traitements de réanimation ou du traitement de la maladie, si ces traitements sont douloureux, pénibles ou simplement inconfortables, à partir du moment où l’on est convaincu que le cas est désespéré »[135]. L’auteur Gilles ARMAND relève une grande variété des actes interruptifs de vie : euthanasie indirecte, euthanasie passive, aide au suicide, euthanasie volontaire, euthanasie active. Il les classe ensuite en trois grandes catégories : d’abord, l’euthanasie indirecte consiste en l’administration d’antalgiques à des doses élevées, ayant pour effet premier de soulager la douleur du patient et pour effet secondaire d’accélérer son décès ; ensuite, l’euthanasie dite passive consiste à laisser mourir naturellement le malade, soit en s’abstenant de lui prodiguer les traitements actifs ou de réanimation, soit en arrêtant les mécanismes qui le maintiennent artificiellement en vie ; enfin, l’euthanasie dite active, est celle conduisant à provoquer la mort de la personne par administration d’une substance toxique (aide au suicide) ou sans son intervention (euthanasie volontaire)[136]. Cette dernière catégorie laisse entendre que l’euthanasie active peut comporter une variante qui est l’aide au suicide.
Comme on a pu le constater, le droit de mourir dans la dignité intègre le concept d’euthanasie. Paradoxalement, c’est bien derrière la dignité humaine que se réfugient les adeptes de l’euthanasie. Il s’agit d’une question d’actualité brûlante en raison de l’ultime atteinte à la vie qu’elle symbolise[137]. Mais de nombreuses interrogations persistent : le droit à la vie tel que protégé par le droit international et européen des droits de l’homme permet-il ou non l’euthanasie ? Peut-on demander l’euthanasie au nom du droit à la vie et de la dignité humaine ? La réponse à ces questions n’est pas évidente. Toutefois, l’évolution du droit positif de certains États membres du Conseil de l’Europe laisse entendre qu’un « vent occidental souffle très violemment en faveur de l’euthanasie »[138]. Selon la philosophie de ces États, la relation entre la dignité humaine et l’euthanasie ne serait pas une relation conflictuelle, mais une relation de complémentarité basée sur la recherche d’une mort digne. Pour preuve, le droit à la mort est revendiqué au nom de la protection de la dignité fondamentale des malades en fin de vie.
Le ton semble avoir été donné par les Pays du BENELUX qui ont en effet légalisé l’euthanasie. C’est d’abord le Pays-Bas qui a adopté une loi sur l’euthanasie et l’aide au suicide en avril 2001[139] et elle est entrée en vigueur le 1er avril 2002. Par la suite, la Belgique a adopté sa loi en mai 2002[140] et elle est entrée en vigueur le 20 septembre 2002. Le Luxembourg a emboîté le pas en adoptant le 16 mars 2009 une loi qui dépénalise l’euthanasie[141] et qui a pris effet le même jour de son adoption. Malgré ce mouvement de légalisation, les autres pays européens ont choisi de rejeter l’euthanasie en encadrant les arrêts de traitements parallèlement à la dispense de soins palliatifs et en développant les directives anticipées (la France en 2005, l’Allemagne et l’Italie en 2009 et 2011, la Suède en 2010 et 2011, l’Espagne en 2011). L’Allemagne, l’Espagne, la France, l’Italie, la Suède ont choisi la voie de l’arrêt des traitements et des soins palliatifs[142]. Mais d’autres pays tardent à rejoindre le mouvement[143].
La question de l’euthanasie se présente aujourd’hui comme une conséquence de la liberté individuelle et soulève le problème de savoir si la vie humaine a une valeur absolue qu’il faut protéger à tout prix, ou si cette valeur peut être diminuée par la perte des capacités physiques et cognitives. Dans ce dernier scénario, il se trouve qu’un individu peut décider que sa vie ne vaut plus la peine d’être vécue en prenant des dispositions pour y mettre un terme. Même si l’on peut justifier sur un plan moral et purement théorique le principe de la liberté qui considère qu’un individu est complètement libre dans ses actes s’il ne nuit pas à la liberté de l’autre, il faut comprendre qu’en pratique, les choses sont beaucoup plus complexes. Et la raison est simple : la dignité humaine se résume à la capacité de choisir et au désir formulé par certains patients de mettre fin à leurs jours. À cet effet, la dignité se détache alors de son fondement naturel et n’est plus le signe de la richesse d’une nature intouchable, mais l’expression la plus achevée du pouvoir de l’homme et de sa liberté à disposer de sa propre vie. Ainsi, chaque fois que l’on évoque la question de l’euthanasie ou celle de la fin de vie, chacun fait appel au principe de dignité humaine pour tenter de défendre son point de vue : en effet, les défenseurs de l’euthanasie en appellent au respect de la dignité humaine pour arrêter la vie, alors que les autres militent plutôt pour le respect de la dignité humaine jusqu’au bout de la vie[144].
L’affaire Lambert et autres de la Cour européenne du 5 juin 2015[145] a relancé le débat sur les questions d’euthanasie et de consentement à mourir dignement. La situation de Vincent Lambert a donc conduit à une série de procédures judiciaires nationales et internationales depuis 2013. Dans la mesure où Vincent n’avait laissé aucune directive écrite, sa situation s’est retrouvée au cœur d’une bataille familiale et judiciaire. Plongé dans un état végétatif chronique dit syndrome d’éveil non-répondant, Vincent Lambert meurt le 11 juillet 2019 au CHU de Reins, huit jours et demi après l’arrêt de ses traitements le maintenant en vie. Il faut dire que cette affaire a largement contribué au débat sur l’euthanasie et a posé également la question du suicide assisté en droit européen.
2. L’émergence d’un droit conventionnel au suicide assisté au nom du droit la vie et de la dignité
De nombreuses interrogations sur le moment de la mort sont apparues avec les progrès de la science « capable de maintenir artificiellement en vie des personnes privées de l’essence vitale naturelle ». Toute la question est donc de savoir si ces personnes en phase terminale de leur vie, peuvent être précipitées dans l’au-delà dans le but de soulager leurs souffrances. Le suicide étant reconnu depuis deux siècles comme une manifestation de la liberté de conscience de l’individu[146], certains États membres ont donc adopté une approche libérale de l’assistance au suicide[147]. Ainsi, au regard des évolutions législatives dans la majorité des États membres (comme en France ou en Allemagne), le suicide n’est pas pénalisé et l’assistance au suicide n’est pas interdite[148]. En l’absence d’infraction, l’aide d’un tiers ne peut être sanctionné.
En matière de suicide assisté, on distingue deux types d’action : premièrement, l’administration d’un traitement ayant pour effet d’accélérer la survenance de la mort ; deuxièmement, l’action ayant pour objectif de provoquer ou d’aider à provoquer la mort. Dans le premier cas, il peut s’agir de l’aide à la mort passive, c’est-à-dire l’administration d’un traitement antidouleur susceptible d’accélérer la survenance de la mort dès lors qu’un tel médicament n’est pas administré avec l’intention d’ôter la vie[149]. Il s’agit donc d’une volonté de soulager la souffrance du patient afin de le laisser mourir dignement. Dans le deuxième cas, toute la difficulté réside dans la distinction entre un acte qui vise à apporter de l’aide à une personne souhaitant se suicider (qui n’est pas pénalisé) et un acte répréhensible au titre de l’homicide (qui est pénalisé). Il faut dire que la provocation au suicide est interdite dans plusieurs pays membres[150].
Au regard de tout ce qui précède, « le suicide n’est plus pénalement ni civilement sanctionné dans les Etats membres du Conseil de l’Europe. Les individus peuvent donc attenter à leurs jours sans risquer la prison en cas d’échec ni des conséquences civiles sur leur sépulture ou leur patrimoine en cas de décès »[151]. Face à une telle situation, la Cour européenne est donc confrontée à la difficulté d’une conciliation entre, d’un côté, la non-pénalisation du suicide et, de l’autre, l’obligation de respecter le droit à la vie de toute personne au sens de l’article 2 de la Convention. Même si on peut admettre que le droit à la vie peut, dans une certaine mesure, être concilié avec le droit de mourir dans de dignes circonstances, il faut néanmoins reconnaître que le premier ne perd pas pour autant son caractère de norme absolue.
Or, dans un arrêt vieux de 1983, l’ancienne Commission européenne des droits de l’homme dans l’affaire R. contre Royaume-Uni, estimait « que les actes d’assistance, de conseil ou d’aide au suicide sont exclus de la notion de vie privée car ils portent atteinte à l’intérêt général de la protection de la vie »[152]. Cette décision de la Commission connaîtra plus tard un revirement de jurisprudence et sera renversée par la Cour européenne des droits de l’homme à travers plusieurs affaires similaires. Ainsi, afin de procéder à une conciliation entre le droit à la vie et le droit de mourir dans la dignité, la Cour européenne est donc revenue sur la question du suicide assisté et a développé progressivement sa jurisprudence à travers quatre grands arrêts de principe.
La première pierre dans l’édification d’un droit au suicide assisté a été posée par l’arrêt Pretty contre le Royaume-Uni du 9 avril 2002[153]. La requérante était une dame âgée de quarante-trois ans. Elle souffrait d’une sclérose latérale amyotrophique, maladie neurodégénérative progressive qui affecte les neurones moteurs à l’intérieur du système nerveux central et provoque une altération graduelle des cellules qui commandent les muscles volontaires du corps. Son évolution a conduit à un grave affaiblissement des bras et des jambes ainsi que des muscles impliqués dans le contrôle de la respiration. Puisque la maladie empêchait Mme Pretty de se suicider sans aide, elle souhaitait pouvoir obtenir l’assistance de son mari sans que celui-ci ne soit poursuivi[154]. Or aider quelqu’un à se suicider tombe sous le coup de la loi pénale (article 2, paragraphe 1 de la Loi de 1961 sur le suicide). Mme Pretty se plaignait alors du refus des autorités de prendre l’engagement que son mari ne serait pas poursuivi. Face à cette demande de suicide assisté, la Cour européenne a basé son argumentation sur l’article 8 de la Convention européenne. Elle a, par ailleurs constaté que « la requérante en l’espèce est empêchée par la loi d’exercer son choix d’éviter ce qui, à ses yeux, constituera une fin de vie indigne et pénible » (paragraphe 67). De ce point de vue, « la Cour ne peut exclure que cela représente une atteinte au droit de l’intéressée au respect de sa vie privée, au sens de l’article 8, paragraphe 1 de la Convention » (paragraphe 67). Ayant exclu l’existence d’un droit à l’autodétermination au titre de l’article 2, la Cour admet ici que le suicide assisté relève du champ du droit au respect de l’autonomie personnelle laquelle peut se prévaloir de la Convention au titre de l’article 8.
La deuxième étape de la reconnaissance du droit au suicide assisté a été franchie avec l’arrêt Haas contre la Suisse[155] adopté le 20 janvier 2011. En effet, dans cette affaire, le requérant, souffrant d’un trouble psychique, souhaitait se suicider en utilisant une substance létale, soumise à prescription médicale conformément à la loi suisse. Ne rentrant pas dans le cadre prévu par cette législation, il tenta en vain d’obtenir une dérogation afin de se procurer cette substance sans ordonnance médicale. Il se plaint alors de ce que cette impossibilité porte atteinte à son droit à la vie privée, tel que protégé par l’article 8 de la Convention. Par cet arrêt, la Cour a fait passer le suicide assisté de la qualité de liberté individuelle à celle de droit conventionnel[156]. D’après certains auteurs, cet arrêt a été reconnu comme proclamant « un véritable droit conventionnel au suicide »[157], consacrant « bel et bien un droit de décider de sa propre mort, et esquisse même, à la charge des Etats, une obligation positive de fournir à toute personne douée de discernement les moyens de se donner la mort »[158]. Si dans l’arrêt Pretty, la Cour a émis l’hypothèse qu’être empêché par la loi d’exercer son choix de mettre fin à ses jours pouvait constituer une atteinte au respect de sa vie privée, dans l’arrêt Haas, il faut reconnaître qu’elle est allée beaucoup plus loin en glissant du « choix » reconnu par l’arrêt Pretty au « droit » de se suicider[159]. La Cour a ainsi formulé le principe suivant lequel « le droit d’un individu de décider de quelle manière et à quel moment sa vie doit prendre fin, à condition qu’il soit à mesure de forger librement sa propre volonté à ce propos et d’agir en conséquence, est l’un des aspects du droit au respect de sa vie privée au sens de l’article 8 de la Convention »[160]. On peut dire avec l’auteur Jean-Pierre MARGUÉNAUD que la Cour reconnaît là explicitement le droit de se suicider de manière sûre, digne et indolore[161]. On peut ainsi conclure qu’avec l’arrêt Haas, « s’agissant d’un droit, et non plus, comme dans l’arrêt Pretty, d’une liberté de mourir, la Cour (a examiné) logiquement la demande du requérant sous l’angle de l’obligation positive de l’Etat de prendre les mesures nécessaires pour permettre un suicide digne »[162]. S’inscrivant dans la même perspective, l’auteur Grégor PUPPINCK pense que le suicide assisté n’est plus seulement une liberté, mais plutôt un droit[163].
Une troisième étape de la reconnaissance du droit au suicide assisté a été franchie par l’arrêt Koch contre l’Allemagne[164] en 2012 où l’épouse du requérant, qui souffrait d’une tétraplégie complète sur le plan moteur après s’être tombée dans les escaliers de son domicile, demandait vainement l’autorisation à l’Institut fédéral des produits pharmaceutiques et médicaux d’obtenir une dose létale d’un médicament qui lui aurait permis de se suicider à son domicile en Allemagne. M. Koch saisit alors la Cour européenne des droits de l’homme, alléguant que le refus d’autoriser son épouse à se procurer une substance létale avait porté atteinte au droit de celle-ci, ainsi qu’à son propre droit, au respect de leur vie privée et familiale (article 8). La Cour, après avoir imposé à l’Etat la justiciabilité du droit au suicide, conclut donc à l’ingérence dans le droit de Mme Koch au respect de sa vie privée.
Une quatrième étape a été franchie par l’arrêt Gross contre la Suisse du 14 mai 2013[165]. Cette affaire concernait une octogénaire qui, lassée de vivre et ne voulant pas assister au déclin de ses facultés physiques et mentales, s’était adressée en vain à plusieurs médecins afin que lui soit prescrite une dose mortelle de pentobarbital sodique. Ceux-ci ayant refusé au motif pris de ce que son bon état de santé ne justifiait pas cette prescription, elle saisit alors la Cour européenne pour se plaindre d’une violation de son droit à la vie privée. Après avoir rappelé sa jurisprudence antérieure, la Cour a affirmé que le souhait de la requérante de recevoir une substance létale pour mettre fin à ses jours entrait dans le champ du droit au respect de la vie privée selon l’article 8 de la Convention[166].
La conséquence principale qui découle de ces quatre arrêts est d’avoir transféré l’encadrement de la pratique du suicide assisté du domaine médical à celui des libertés publiques à travers le droit à la vie privée. Ce changement redéfinit le suicide assisté comme un droit fondamental et non plus seulement comme une forme de soin extraordinaire pour patients en fin de vie. De ce point de vue, même une personne en bonne santé peut se prévaloir de la Convention pour faire valoir son droit auprès des autorités nationales[167].
Conclusion
Voilà présentées les étapes de l’émergence d’un droit de mourir dans la dignité à partir de la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme. L’acte fondateur de cette dynamique a été de confirmer avec la Cour européenne que le droit de mourir dans la dignité entre dans le champ de l’article 8 de la Convention européenne.
Au terme de cette analyse, il est intéressant de noter que la consécration juridique des pratiques de fin de vie témoigne de la reconnaissance universelle de la dignité humaine. S’appuyer sur le principe d’autodétermination personnelle pour reconnaître le droit de mourir dans la dignité, c’est mettre dans un même champ de protection le droit à la vie et le droit de mourir dans la dignité ; c’est aussi confirmer que le droit de mourir dans la dignité fait partie du droit à la vie d’un individu et devrait être protégé. Si la plupart des personnes désirent vivre, certaines souhaitent mourir, et l’article 2 de la Convention européenne protégerait chacun des deux droits. Dans ce cas, le droit de mourir dans la dignité ne serait pas l’antithèse du droit à la vie, mais son corollaire, et l’État aurait l’obligation positive de protéger les deux[168].
Quoi qu’on dise, le droit de mourir dans la dignité permet au mourant de se rétablir dans l’histoire de sa vie, d’exprimer ses désirs, ses regrets, ses dernières volontés. Il lui permet également de retrouver au-delà de la souffrance, de la séparation, l’estime de soi et de son être, l’homme intérieur avec les valeurs qui fondent sa dignité[169]. C’est cette dignité inhérente à la personne humaine qui permet de confirmer que le droit de mourir dignement est une extension du droit à la vie. Dans cette hypothèse, le droit de mourir dans la dignité apparaît comme une valeur à revendiquer[170] et à protéger, sans toutefois nier en aucune manière le principe du caractère sacré[171] et intangible[172] de la vie protégé par le droit international des droits de l’homme. Bien qu’elle se soit toujours opposée à la reconnaissance d’un droit diamétralement opposé au droit à la vie, à savoir le droit à mourir, la Cour européenne a finalement admis qu’un tel droit peut exister sur le fondement de l’article 8 de la Convention à travers une approche évolutive et conciliatrice des concepts de droit à la vie et de droit à mourir. Cette approche de la Cour participe de la construction du droit européen des droits de l’homme en matière des choix de vie et de mort.
[1]Vincent TESSIER, « Fin de vie : une nouvelle décision de la Cour européenne des droits de l’homme », (2017) La Revue des droits de l’homme, p. 1.
[2]André-Jean ARNAUD (dir.), Dictionnaire encyclopédique de théorie et de sociologie du droit, Paris, L.G.D.J., 1993, p. 208.
[3]Daniel PROULX, « Le concept de dignité et son usage en contexte de discrimination : deux Chartes, deux modèles », (2003) Numéro spécial R. du B. 487, p 492.
[4]Constance GREWE, « La dignité de la personne humaine dans la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme » (2014) 18323 Revue générale du droit, p 2.
[5]Bertrand MATHIEU, « La vie en droit constitutionnel comparé. Éléments de réflexion sur un droit incertain », (1998) 50 R.I.D.C., p 1031. Voir entre autres, Catherine PUIGELIER, « Qu’est-ce qu’un droit à la vie ? », (2003) Recueil Dalloz, Chroniques, p 2781 et Anne TRIMARCO MARCIALI, « Droits fondamentaux et protection de la vie humaine prénatale dans la jurisprudence administrative », (2009) 3 Revue du droit public et de la science politique en France et à l’Étranger, p 1031.
[6]Marie-Luce PAVIA et Thierry REVET (dir.), La dignité de la personne humaine, Paris, Economica, 1999 à la p 25.
[7]Véronique GIMENO-CABRERA, Le traitement jurisprudentiel du principe de dignité de la personne humaine dans la jurisprudence du conseil constitutionnel français et du tribunal constitutionnel espagnol, Paris, L.G.D.J., 2004, p 2.
[8]Ibid.
[9]Ibid.
[10]Isabelle MARTIN, « Reconnaissance, respect et solitude : vers une analyse intégrée des exigences de la dignité humaine, Lex Electronica, vol. 15.2, automne 2010, p 3.
[11]Véronique GIMENO-CABRERA, Le traitement jurisprudentiel…, op.cit.
[12]Jean ANTCHANDIE, « Béatrice MAURER, le principe de respect de la dignité humaine et la Convention européenne des droits de l’homme », (2000) 12.1 Pouvoirs dans la Caraïbe, pp. 194-198.
[13] Emine Eylem AKSOY, « La notion de dignité humaine dans la sauvegarde des droits fondamentaux des détenus », (2008), p. 45-61, en ligne : www.internationalpenalandpenitentiaryfoundation.org/site/documents/stavern/06-Stavern-Contribution%20Aksoy.pdf, (consulté le 21 avril 2020).
[14] Muriel FABRE-MAGNAN, « La dignité en droit : un axiome », (2007) 1/58 Revue interdisciplinaire d’études juridiques, pp. 1 à 30.
[15] Xavier BIOY, Le concept de personne humaine en droit public. Recherche sur le sujet des droits fondamentaux, Thèse de doctorat en droit, Paris, Dalloz, 2003, p. 9. Xavier BIOY considère la dignité humaine comme un droit affectant en profondeur l’ordonnancement des droits fondamentaux. Certains auteurs, à l’instar de Christophe MAUBERNARD, évoquent même « « Le droit fondamental à la dignité humaine » (voir infra, notes 19).
[16] En France, le Conseil constitutionnel a reconnu dans sa décision du 27 juillet 1994 relative aux lois sur la bioéthique que « la sauvegarde de la dignité de la personne humaine contre toute forme d’asservissement et dégradation est un principe à valeur constitutionnelle », même si ce principe n’est pas explicitement inscrit dans la Constitution : voir Décision n° 94-343/344 DC du 27 juillet 1994, Journal officiel du 29 juillet 1994, p. 11024.
[17] Marie-Lucie PAVIA, « La dignité de la personne humaine », dans Libertés et Droits fondamentaux, 12e éd., Paris, Dalloz, 2006, pp. 143-162.
[18]Christophe MAUBERNARD, « « Le droit fondamental à la dignité humaine en droit communautaire : la brevetabilité du vivant à l’épreuve de la jurisprudence de la Cour de justice des communautés européennes », (2003) 54 Rev. trim. dr. h., 485 et s.
[19]Isabelle MARTIN, « Reconnaissance, respect et sollicitude : vers une analyse intégrée des exigences de la dignité humaine », (automne 2010) 15/2 Lex Electronica, p. 30.
[20] Béatrice MAURER, Le principe de respect de la dignité humaine et la CEDH, Aix-en-Provence, Paris, CERIC, La documentation française, 1999, pp. 50 et 55.
[21]Jeanne Claire BEBU NCHIMI, « Article 4 », dans Maurice KAMTO (dir.), La Charte africaine des droits de l’homme et des peuples et le Protocole y relatif portant création de la Cour africaine des droits de l’homme. Commentaire article par article, Bruxelles, Bruylant, 2011 à la p 150.
[22]Cour EDH, Pretty c. Royaume-Uni, n° 2346/02, 29 avril 2002, § 65.
[23]Ibid.
[24]Laurie MARGUET, « Entre protection objective et conception subjective du droit à la vie et à la dignité humaine : l’encadrement juridique de la fin de vie en France et en Allemagne », (2017) 11 La Revue des droits de l’homme, 1-2.
[25] Laurie MARGUET, op. cit., p. 2.
[26]Ruth HORN, Le droit de mourir. Choisir sa fin de vie en France et en Allemagne, Rennes, Presses universitaires de Rennes, 2013, p. 156.
[27] Laurie MARGUET, op. cit., p. 2.
[28]Christian BYK, « Euthanasie et dignité : entre compassion et droit » (2010) 4-2 Revista Bioethikos, Centro Universitario Sao Camilo, p. 168.
[29]Olivier BACHELET, « Droit au suicide : un nouveau jalon posé par la Cour européenne », (2011) Dalloz actualité, p. 109.
[30]Ibid., p. 110.
[31]Dominique MANAI, « La reconnaissance légale des droits des proches en Suisse », dans Brigitte FEUILLET-LIGER (dir.), Les proches et la fin de vie médicalisée. Panorama international, Bruxelles, Bruylant, p. 109.
[32]La jurisprudence nationale tente de reconnaître le droit de mourir dans la dignité comme une extension du droit à la vie. C’est le cas de la Cour suprême américaine qui a soutenu dans l’affaire Nancy Cruzan que « le droit de vivre inclut le droit de mourir ». Cruzan v. Director Missouri Department of Health4 97 U.S. 261. Dans cette affaire, les parents de la patiente s’étaient adressés à la Cour pour obtenir le retrait de l’alimentation et de l’hydratation artificielle de leur fille en état végétatif persistant.
[33]Déclaration universelle des droits de l’homme, 10 décembre 1948, A.G. Rés. 217 (III), Doc. N.U. A/810 (1948), premier paragraphe du Préambule et art. 3.
[34]Gilles ARMAND, « La dignité des malades en fin de vie (réflexion à partir de l’arrêt Pretty du 29 avril 2002) », dans Catherine-Amélie CHASSIN (dir.), La portée de l’article 3 de la Convention européenne des droits de l’homme, Bruxelles, Bruylant, 2006, p 198.
[35]Ibid.
[36]Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, 4 novembre 1950, S.T.C.E. n° 5, (entrée en vigueur : 3 septembre 1953) [Convention européenne des droits de l’homme], art. 2.
[37]Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, 7 décembre 2000/13 décembre 2007, J.O.C.E., 18 décembre 2000, C 364/1/J.O.U.E., 30 mars 2010, C 83/389, (entrée en vigueur : 7 décembre 2000 et 1er décembre 2009).
[38]Convention pour la protection des droits de l’homme et de la dignité de l’être humain à l’égard des applications de la biologie et de la médecine : Convention sur les droits de l’homme et la biomédecine, ouverte à la signature à Oviedo, le 4 avril 1997, Série des traités européens – n° 164, (entrée en vigueur : 1er décembre 1999).
[39]Aline MARCELLI, « Dignité en fin de vie et euthanasie », (2001) 7 Revue juridique de l’USEK, p 37.
[40]Par exemple, L’association québécoise pour le droit de mourir avec dignité (AQDMD) a été fondée en 2007 et milite pour le droit de chaque personne d’avoir une fin de vie conforme aux valeurs de dignité et de liberté qui l’ont toujours animée et pour que soit respectée sa volonté personnelle. En ligne : www.aqdmd.qc.ca, (Consulté le 21 avril 2020).
[41]Aline MARCELLI, op. cit., p 38.
[42]Déclaration universelle des droits de l’homme, 10 décembre 1948, A.G. Rés. 217, Doc. N.U. A/810, p. 71, préambule et art. 1. Ainsi, la Déclaration universelle affirme dès son préambule que « [l]a dignité (…) constitue le fondement de la liberté ».
[43]Pacte international relatif aux droits civils et politiques, 16 décembre 1966, (1976) 999 R.T.N.U. 171, Préambule, (entré en vigueur : 23 mars 1976), (Ci-après le Pacte sur les droits civils).
[44]Entre autres, Cour EDH, SanlesSanles c. Espagne, n° 48335/99, 26 octobre 2000.
[45]Cour EDH, Haas c. Suisse, n° 31322/07, 20 juin 2011, § 57.
[46]Farid EL BACHA et Helmut REIFELD (dir.), Droit à la vie et peine de mort, Rabat, Konrad Adenauer Stiftung, 2012, p 22.
[47]Olivier BACHELET, « Droit au suicide : un nouveau jalon pose par la Cour européenne », op. cit., p. 110.
[48]Cour EDH, Koch c. Allemagne, n° 497/09, 17 décembre 2012, § 57.
[49]Recommandation 779 (1976) de l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe relative aux droits des malades et des mourants, Strasbourg, 24ème séance, Doc. 3699, Rapport de la Commission des questions sociales et de la santé, 29 janvier 1976, § 7.
[50]Code international d’éthique médicale, 35ème Assemblée générale de l’Association internationale mondiale, octobre 1983, § 9. En ligne : www.Frqsc.gouv.qc.ca/documents/10191/186011/Déclaration-Helsinki.pdf, (consulté le 30 mars 2020).
[51]Charte européenne d’éthique médicale, Conseil européen des ordres des Médecins, 10 juin 2011, principe 1. En ligne : www.ceom.eu/sites/default/files/documents/fr-charte-européenne-dethique-medicale-adoptée-a-kos-0.pdf , (consulté le 30 mars 2020).
[52]Rapport du Comité d’experts de l’OMS, Traitement de la douleur cancéreuse et soins palliatifs, n° 804, Genève, 1990. En ligne : www.cubiq.ribg.gouv.qc.ca/in/faces/browse.xhtml, (consulté le 30 mars 2020).
[53]Déclaration de Venise sur la phase terminale de la maladie, Association médicale mondiale, 24-26 octobre 1983, en ligne : www.wma.net/fr/30publications/10policiesi10, (consulté le 30 mars 2020).
[54]Déclaration de Madrid de 1987, Association médicale mondiale, octobre 1987, en ligne : www.wma.net/fr/30publications/10policies/20archives/a21, (consulté le 30 mars 2020).
[55]Recommandation 1418 (1999) sur la protection des droits de l’homme et de la dignité des malades incurables et des mourants, 25 juin 1999.
[56]Recommandation 1418 (1999) sur la protection des droits de l’homme et de la dignité des malades incurables et des mourants, 25 juin 1999, paragraphe 9 (c).
[57]Résolution 1859 (2012), Protéger les droits humains et la dignité de la personne en tenant compte des souhaits précédemment exprimés par les patients, 25 janvier 2012 (6ème séance de l’Assemblée parlementaire), Doc. 12804, Rapport de la Commission des questions sociales, de la santé et du développement durable.
[58]Recommandation 1993 (2012), Protéger les droits humains et la dignité de la personne en tenant compte des souhaits précédemment exprimés par les patients, 25 janvier 2012 (6ème séance de l’Assemblée parlementaire), Doc. 12804, Rapport de la Commission des questions sociales, de la santé et du développement durable.
[59] Aline MARCELLI, op. cit., p 39.
[60]Cour EDH, arrêt Haas, op. cit., § 55.
[61]On peut lire cette déclaration dans Le Monde, édition du 30 novembre 2000 intitulée « Les Pays-Bas sont le seul pays au monde à légaliser l’euthanasie », p 2.
[62]Aline MARCELLI, op. cit., p 37.
[63]Observations de European Centre for Law and Justice (ECLJ) soumises à la deuxième Section de la Cour européenne des droits de l’homme dans l’affaire Gross c. Suisse, commenté par Grégor PUPPINCK le 25 avril 2012, n° 67810/10 du 10 novembre 2010, § 25 et 26.
[64]Cour EDH, arrêt Pretty, op. cit., § 29.
[65]Cour EDH, arrêt Pretty, § 30.
[66]Jean-Frédéric POISSON, La dignité humaine, Bordeaux, Les Études Hospitalières, 2004, p 52.
[67]Jean-Pierre MENARD, Michelle GIROUX et Jean-Claude HEBERT, Mettre en œuvre les recommandations de la Commission spéciale de l’Assemblé nationale sur la question de mourir dans la dignité, Rapport du Comité de juristes experts, janvier 2013, p 179.
[68]Mario-Jo THIEL, « La dignité humaine. Perspectives éthiques et théologiques », dans Gilbert VINCENT (dir.), Le corps, le sensible et le sens, PUS, 2004, p 19.
[69]Jean-Louis BAUDOUIN et Danielle BLONDEAU, Éthique de la mort et droit à la mort, Paris, PUF, 1993, repris par Hélène RIVEST, Dignité et euthanasie. Peut-on justifier l’euthanasie et le suicide assisté au nom de la dignité humaine ? Mémoire de maîtrise, Université Laval, Québec, 2012 75, p 76.
[70]Christian BYK, « La revendication individuelle face à la mort : approche comparatiste des questions posées par l’interruption de traitement, l’euthanasie et l’aide au suicide » (1998) 29-2 Revue générale de droit, p. 212.
[71]Ruth HORN, Le droit de mourir. Choisir sa fin de vie en France et en Allemagne, Rennes, Presses Universitaires de Rennes, 2013, p 156.
[72]Cour EDH, arrêt Pretty, op. cit., § 40.
[73]Cour EDH, arrêt Pretty, § 39.
[74]Cour EDH, arrêt Pretty, § 54
[75]Cour EDH, Sanles Sanles c. Espagne, n° 48335/99, 26 mai 1999, p. 6. Dans cette affaire, il a été mentionné d’après la jurisprudence du tribunal constitutionnel que « le droit à la vie a un contenu positif de protection qui ne permet pas de le considérer comme un droit de liberté incluant le droit à sa propre mort », p. 5.
[76]Cour EDH, Alda Gross c. Suisse, n° 67810/10, 25 avril 2012.
[77]Cour EDH, Lambert et autres c. France, n° 46043/14, 5 juin 2015 ; Nicklinson et Lamb c. Royaume-Uni, n° 2478/15 et 1787/15, 23 juin 2015 ; Gross c. Suisse, n° 67810/10, 30 septembre 2014 ; Koch c. Allemagne, n° 497/09, 17 décembre 2012 ; Haas c. Suisse, n° 31322/07, 20 juin 2011 ; Ada Rossi et autres c. Italie, n° 55185/08, 16 décembre 2008.
[78]Cour EDH, Giuliani et Gaggio c. Italie (GC), n° 23458/02, 2011, § 174-177.
[79]Lire à ce sujet, Philippe GÉRARD, L’esprit des droits. Philosophie des droits de l’homme, Bruxelles, Publications des Facultés universitaires Saint-Louis, 256 p.
[80]Cour EDH, arrêt Pretty, op. cit., § 39 et s.
[81]Jean-Pierre MENARD, Michelle GIROUX et Jean-Claude HEBERT, op. cit., p 180.
[82]Ibid.
[83]Pierre LE COZ, « Quelle place pour les proches lors des décisions de fin de vie médicalisée ? Arguments déontologistes et utilitaristes en éthique », dans Brigitte FEUILLET-LIGER (dir.), Les proches et la fin de vie médicalisée. Panorama international, Bruxelles, Bruylant, 2013, p 17.
[84]Olivier DE SCHUTTER, « L’aide au suicide devant la Cour européenne des droits de l’homme », (2003) 53 Revue trimestrielle des droits de l’homme, p. 79.
[85]Cour EDH, arrêt Pretty, op. cit., § 61-63.
[86]Olivier BACHELET, « Le droit de choisir sa mort : les ambiguïtés de la cour de Strasbourg » (2011) 1-82 Revue internationale de droit pénal, pp.111-112.
[87]Cour EDH, Giuliani et Gaggio c. Italie (Grande chambre), 24 mars 2011, numéro 23458/02, § 177.
[88]Olivier BACHELET, « Le droit de choisir sa mort : les ambiguïtés de la cour de Strasbourg », op. cit., p.113.
[89]Ibid., p. 124.
[90] Olivier BACHELET, « Droit au suicide : un nouveau jalon posé par la Cour européenne », op. cit.
[91]Ruth Horn, Le droit de mourir, op. cit., p. 10.
[92]Philippe PEDROT, « Existe-t-il un droit de mourir dans la dignité ? », (2002) RDSS, p. 477.
[93] Cour EDH, Charlie Gard et a. c. Royaume-Uni, req. 39793/17, 27 juin 2017.
[94]Cour EDH, arrêt Pretty, op. cit., § 66.
[95]Diane ROMAN, « Autodétermination personnelle et choix de vie et de mort dans la jurisprudence de la Cour européenne », dans Michel LEVINET, Le droit au respect de la vie au sens de la Convention européenne des droits de l’homme, Bruxelles, Bruylant, 2010, p 256.
[96]Cour EDH, arrêt Pretty, op. cit., § 17.
[97]Laurie MARGUET, « Entre protection objective et conception subjective du droit à la vie», op. cit., p. 12.
[98]Diane ROMAN, « Autodétermination personnelle et choix de vie et de mort dans la jurisprudence de la Cour européenne », dans Michel LEVINET, op. cit., p 254.
[99]Cour EDH, arrêt Pretty, op. cit., § 65.
[100]Diane ROMAN, op. cit, p 254.
[101]Christelle LANDHEER-CIESLAK et Louise LANGEVIN (dir.), La personne humaine entre autonomie et vulnérabilité, Mélanges en l’honneur d’Édith Deleury, Québec, Éditions Yvon Blais, 2015 à la p XXXVIII-XXXIX.
[102]Ibid., p XXXIX.
[103]Ibid., p XLI.
[104] Cour EDH, Vincent Lambert et autres c. France, n° 21675/19, 20 mai 2019.
[105]Laurie MARGUET, « Entre protection objective et conception subjective du droit à la vie», op. cit., p. 9.
[106]CDH, Wackenheim c. France, Comm. n° 854/1999, CCPR/C/75/D/854/1999.
[107]En l’espèce, le requérant affirmait que l’interdiction d’exercer son travail a eu des conséquences négatives sur sa vie et représente une atteinte à sa dignité et une violation de son droit à la liberté. Reprenant l’argument du Conseil d’État français, le Comité des droits de l’homme des Nations Unies a considéré en effet que le lancer de nains, quand bien même ces derniers y auraient consenti, constitue une atteinte à la dignité de la personne humaine (Voir CE, Commune de Morsang-sur-Orge, n° 136727, 27 octobre 1995, Recueil Lebon, p. 372 ).
[108]Michel LEVINET, « Dignité contre dignité. L’épilogue de l’affaire du « lancer de nains » devant le Comité des droits de l’homme des Nations Unies », (2003) 55 Rev. trim. dr. h., p 1036.
[109]Cour EDH, X et Y c. Pays-Bas, Série A n° 91, 26 mars 1985, § 22.
[110]Cour EDH, Mikulic c. Croatie, n° 53176/99, 2002-I., § 53.
[111]Cour EDH, B. c. France, Série A n° 232-C, § 63, 25 mars 1992 ; Burghartz c. Suisse, Série A n° 280-B, § 24, 22 février 1994 ; Dudgeon c. Royaume-Uni, Série A n° 45, § 41, 22 octobre 1981 ; Laskey, Jaggard et Brown c. Royaume-Uni, Recueil des arrêts et décisions 1997-I, § 36, 19 février 1997.
[112]Cour EDH, arrêt Haas, op. cit., § 50.
[113]Véronique GIMENO-CABRERA, Le traitement jurisprudentiel…, op. cit., p 203.
[114]Estelle BROSSET, « La fin de vie et le droit européen », (2011) Martinus Nijhofp Publishers, pp. 87-106.
[115]Cour EDH, arrêt Pretty, op. cit., § 61.
[116]Cour EDH, arrêt Pretty, §66.
[117]Cour suprême du Canada, Rodriguez c. Colombie Britannique (Procureur général), (1993) 3 RCS 519, 30 septembre 1993.
[118]Cour EDH, arrêt Pretty, op. cit., § 61, 62 et 67.
[119]Estelle BROSSET, op. cit., p. 10.
[120] Notamment dans les arrêts précités suivants : Cour EDH, arrêt Haas, § 53. Cour EDH, arrêt Koch, § 27 et 68. Cour EDH, arrêt Gross, § 10 et 29.
[121]Olivier BACHELET, op. cit., p. 116.
[122]Cour EDH, arrêt Pretty, op. cit., § 61-63.
[123]Cour EDH, arrêt Haas, op. cit., § 51.
[124]Observations en tierce intervention dans l’affaire Gross, op. cit., § 7.
[125]Ibid., § 8.
[126]Ibid.
[127]Jean-Louis BAUDOUIN et Danielle BLONDEAU, Éthique de la mort et droit à la mort, Paris, PUF, 1993, repris par Hélène RIVEST, op. cit., p 151.
[128]Voir Loi de 2016 en France.
[129]Le petit Larousse Illustré, Paris, 2008, p 394.
[130]Josette REY-DEBOVE et Alain REY (dir.), Le nouveau Petit Robert. Dictionnaire alphabétique et analogique de la langue française, Paris, Le Robert, 2008, p 958.
[131]Michel MARET, L’euthanasie : alternative sociale et enjeux pour l’éthique chrétienne, éd. St Augustin, 2000, p. 16.
[132]Au Canada, le rapport du Comité sénatorial définit l’euthanasie comme un acte qui consiste à provoquer intentionnellement la mort d’autrui pour mettre fin à ses souffrances (Rapport final du Comité sénatorial, De la vie et de la mort, 1995. En ligne : www.parl.gc.ca/content/sen/committee/351/euth/rep/lad-tc-f.htm, (consulté le 30 mars 2020). Rapport révisé en 2000 : Des soins de fin de vie de qualité : Chaque Canadien et Canadienne y a droit ; puis révisé en 2005). Mais, l’article 14 du Code criminel interdit le suicide assisté appelé euthanasie active. Ainsi, « [n]ul n’a le droit de consentir à ce que la mort lui soit infligée, et un tel consentement n’atteint pas la responsabilité pénale d’une personne par qui la mort peut être infligée à celui qui a donné ce consentement. » (Code Criminel, L.R.C. (1985), ch. C-46, art. 14.). Au Québec, le Collège des médecins fait la distinction entre l’euthanasie et le suicide assisté. Ainsi, l’euthanasie est un acte positif causant la mort d’une personne pour des raisons humanitaires. Le suicide assisté est défini de la même manière, sauf que c’est le patient lui-même qui s’administre un médicament préparé à cette fin par un professionnel de la santé (Collège des médecins du Québec (CMQ), en ligne : http://aldo.cmq.org/fr-CA/GrandsThemes/EnjeuxFinVie/EuthanSuici.aspx, (consulté le 30 mars 2020). Dans les deux cas, on ne parle pas de cessation de traitement, mais d’un acte volontaire et délibéré qui provoque la mort dans un contexte de soulagement d’une personne atteinte d’une maladie incurable et en phase terminale. On parle également d’une dose létale de médicament dans un contexte de soin de santé. Cette évolution conceptuelle a amené le gouvernement du Québec à adopter en 2014 une nouvelle loi (Projet de loi 52, S-32.0001 – Loi québécoise concernant les soins de fin de vie, 5 juin 2014.) relative aux soins de fin de vie qui place l’aide médicale à mourir parmi les soins de santé.
[133]Dictionnaire Permanent Bioéthique et Biotechnologies, éd. Législatives, Feuillet 13 du 1er mars 1997, n° 2, p 867.
[134]Cour EDH, arrêt Pretty, op. cit.
[135]Dictionnaire Permanent Bioéthique et Biotechnologies, op. cit., p 867.
[136]Gilles ARMAND, « La dignité des malades en fin de vie (réflexion à partir de l’arrêt Pretty du 29 avril 2002) », dans Catherine-Amélie CHASSIN (dir.), op. cit., p 183.
[137]Jeanne Claire BEBU NCHIMI, « Article 4 », dans Maurice KAMTO (dir.), La Charte africaine des droits de l’homme et des peuples et le Protocole y relatif portant création de la Cour africaine des droits de l’homme. Commentaire article par article, Bruxelles, Bruylant, 2011, p 150.
[138]Jean-Louis BAUDOUIN et Danielle BLONDEAU, Éthique de la mort et droit à la mort, Paris, PUF, 1993, repris par Hélène RIVEST, op. cit., p 76.
[139]Loi hollandaise sur l’euthanasie et l’aide au suicide, avril 2001, (entrée en vigueur le 1er avril 2002), en ligne : www.lemonde.fr/societe/article/2002/04/01/l-eutnanasie-legalise-aux-pays-bas-269159.html, (consulté le 30 mars 2020)
[140]Loi belge relative à l’euthanasie, 28 mai 2002, Moniteur Belge (M.B). 22/06/2002.
[141]Loi luxembourgeoise sur l’euthanasie et l’assistance au suicide, 16 mars 2009, Journal officiel du Grand-Duché de Luxembourg, A – n° 46.
[142] Observations en tierce intervention dans l’affaire Gross, op. cit., p. 30.
[143]Par exemple, en Suisse, l’euthanasie est en principe illégale en vertu de l’article 114 du Code pénal suisse qui se lit comme suit : « Meurtre sur la demande de la victime. Celui qui, cédant à un mobile honorable, notamment à la pitié, aura donné la mort à une personne sur la demande sérieuse et instante de celle-ci sera puni d’une peine privative de liberté de trois ans ou plus ou d’une peine pécuniaire. » (RS 311.0 Code pénal suisse, Assemblée fédérale de la Confédération suisse, 21 décembre 1937, art. 114).
[144]Marie-Jeanne DIEN, « La dignité dans la réflexion éthique : une expérience au Comité consultatif national d’éthique », dans Charlotte GIRARD et Stéphanie HENNETTE-VAUCHEZ (dir.), La dignité de la personne humaine. Recherche sur un processus de juridicisation, Paris, PUF, 2005 288, p 289.
[145]Cour EDH, Lambert et autres c. France, n° 46043/14, 5 juin 2015.
[146]Christian BYK, Euthanasie et dignité, op. cit., p. 165.
[147]C’est notamment le cas de la Suisse, voir affaire Alda GROSS c. Suisse, requête numéro 67810/10, 25 avril 2012, § 56 à 58.
[148]Laurie MARGUET, op. cit., p. 12.
[149]Ibid., p. 13.
[150]Ibid., p. 14.
[151]Grégor PUPPINCK, « Le droit au suicide assisté dans la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme », (2014) 49 Revue Générale de Droit Médical, p. 3.
[152] Com Eur DH, R. c. Royaume-Uni, req. 10083/82, déc., 4 juillet 1983, § 13.
[153]Cour EDH, arrêt Pretty, op. cit.
[154]Id., § 7, 8 et 9.
[155] Cour EDH, Haas c. Suisse, op. cit.
[156] Grégor PUPPINCK, op. cit., p.5
[157] Jean-Pierre MARGUENAUD, « Le droit de se suicider de manière sûre, digne et indolore », (2011) RTD Civ., p. 311.
[158] Olivier BACHELET, « Droit au suicide… », op. cit.
[159] Grégor PUPPINCK, op. cit, p. 6.
[160] Cour EDH, arrêt Haas, op. cit., § 51.
[161] Jean-Pierre MARGUENAUD, op. cit., p. 311.
[162] Ibid.
[163] Grégor PUPPINCK, op. cit., p.7.
[164]Cour EDH, arrêt Koch, op. cit., § 8, 9 et 10.
[165] Cour EDH, Gross contre Suisse, req. 67810/10, 14 mai 2013.
[166] Cour EDH, arrêt Gross, op. cit., § 60.
[167] Grégor PUPPINCK, op. cit., p.11.
[168]Cour EDH, arrêt Pretty, op. cit., § 14.
[169]Aline MARCELLI, « Dignité en fin de vie et euthanasie », (2001) 7 Revue juridique de l’USEK, p 40.
[170]Christian BYK, « La revendication individuelle face à la mort : approche comparatiste des questions posées par l’interruption de traitement, l’euthanasie et l’aide au suicide », (1998) 29-2 Revue générale de droit 209, p 232.
[171]Cour EDH, arrêt Lambert et autres, op. cit., § 142 ; voir dans le même sens, arrêt Pretty c. Royaume-Uni, op. cit., § 65.
[172]Cour EDH, arrêt Haas, op. cit., § 16.
bonjour, on ne choisi pas notre naissance, mais si on peut penser que cette naissance est bienveillante et heureusement …
on ne choisit pas plus ce que la vie va nous réserver … et oui encore des …
alors il me semble JUSTE et LÉGITIME de pouvoir enfin choisir sa fin de vie.
de pouvoir l’envisager et enfin d’avoir ce choix précieux