Droit et littérature de haine : exercice de conjugaison
Par Nicolas Bareït, Maître de conférences HDR en droit privé et sciences criminelles, Université de Pau et des Pays de l’Adour, Institut Fédératif de recherches sur les Transitions Juridiques
Je suis venu vous parler de sentiments.
De la joie, tout d’abord : ma joie de prendre part à ce colloque, à l’invitation du professeur Valérie Malabat ; ma joie de revenir à Bordeaux et de retrouver des amis qui me sont chers.
De la peur, ensuite. Ma peur de traiter un sujet dont tous les termes sont redoutables. Qu’est-ce que le droit ? Qu’est-ce que la littérature ? Ce sont des questions vertigineuses.
Mais je vais essayer de les affronter. Je voudrais éviter une attitude courante dans le mouvement « Droit et Littérature » qui consiste à postuler que tout le monde sait ce qu’est le Droit et que personne n’ignore ce qu’est la Littérature.
Je préfère vous proposer des définitions, discutables bien sûr, mais qui permettront d’avancer vers le sujet à traiter aujourd’hui.
Concernant le droit, il pourrait s’entendre, avec Paul Amselek, comme la « technique de direction publique des conduites humaines »[1]. Ou, pour le dire de façon plus imagée avec le doyen Cornu : « « le précepte juridique n’est ni une règle de salut, ni une loi d’amour : c’est un facteur d’ordre, un régulateur de la vie sociale, un modérateur, un dénominateur commun »[2].
Concernant la littérature, la définition proposée par Ivan Jablonka est intéressante : « est littéraire un texte considéré comme tel et qui, au moyen d’une forme, produit une émotion »[3]. L’historien parvient à cette proposition synthétique après avoir retenu comme critères de la littérature la « qualité esthétique », « l’imagination », la « polysémie », la « singularité » et la reconnaissance culturelle[4]. La conception de Tzvetan Todorov peut également retenir notre attention : « la littérature est un moyen de prendre position par rapport aux valeurs de la société ; disons d’un mot qu’elle est idéologique »[5] ; elle est « comme l’intersection du discours public (et donc idéologique) et de l’art »[6].
Si la littérature est un texte, une forme, un art, qu’elle est productrice d’émotions et qu’elle porte une idéologie, il parait normal qu’elle croise le droit, qui lui aussi prend la forme de textes, qui lui aussi est idéologique, qui lui encore peut viser des émotions – ou des sentiments. Par exemple : la haine.
Je ne sais pas si le droit a quelque chose à dire de l’amour, mais en tout cas il se préoccupe de la haine.
Pour la doctrine juridique, la haine est « un sentiment d’hostilité, de dénigrement systématique »[7] ; c’est « un sentiment de violente animosité, une hostilité violente, un ressentiment »[8]. Or la haine peut s’extérioriser, elle peut prendre la forme d’un discours : le droit, dès lors, est apte à s’en saisir. Selon une recommandation du Conseil des ministres du Conseil de l’Europe, les discours de haine désignent « toutes formes d’expression qui propagent, incitent à, promeuvent ou justifient la haine raciale, la xénophobie, l’antisémitisme ou d’autres formes de haine fondées sur l’intolérance, y compris l’intolérance qui s’exprime sous forme de nationalisme agressif et d’ethnocentrisme, de discrimination et d’hostilité à l’encontre des minorités, des immigrés et des personnes issues de l’immigration »[9].
« Toutes formes d’expression » : la littérature n’est pas exclue, comme en attestent les définitions que nous en avons retenues. Ainsi, la haine véhiculée par la littérature pourrait être saisie par le droit – saisie, c’est-à-dire interdite, réprimée[10]. La situation semble aller de soi et tout le programme du colloque invite à suivre ce courant qui coule de source.
Cependant, l’intérêt d’une approche sous l’angle des relations entre Droit et Littérature est de résister au courant dominant. D’autres voies peuvent être ouvertes, d’autres lignes de fuite tracées. Des questions inattendues peuvent être posées – même si les réponses n’existent pas encore.
Remontons dès lors à la source. Soit le couple « droit » et « littérature de haine ». D’une manière générale, trois modes de conjugaison sont envisageables :
– la première conjugaison, la plus attendue, la plus connue, la plus traitée est le droit de la littérature de haine. Je dirai quelques mots de la réglementation qui s’exprime sur un mode impératif ;
– la deuxième conjugaison, plus originale en apparence, mais en réalité déjà bien appréhendée, est le droit comme littérature de haine. Sur le mode indicatif, j’évoquerai le droit nazi qui est un exemple paradigmatique ;
– la troisième conjugaison est sans doute la plus neuve ; c’est aussi la plus délicate à manier. Il s’agit du droit dans la littérature de haine. Je ne ferai qu’avancer des hypothèses, je parlerai au subjonctif.
I. Le mode impératif : le droit de la littérature de haine
Commençons par le plus évident : la réglementation juridique du discours littéraire, thème déjà traité longuement et brillamment en France. Je pense en particulier aux recherches menées par Anna Arzoumanov. Celle-ci prévient : « Le point de rencontre du droit et de la littérature est pensé sur le modèle d’un affrontement déséquilibré qui aurait tendance à restreindre le champ de la seconde »[11]. En d’autres termes, l’espace de la littérature (dominée) serait réduit par le droit (dominant).
C’est le discours qui est généralement tenu. Mais ce n’est qu’un discours, l’expression d’idées, disons même d’idéologies. Qu’en est-il effectivement, sur le terrain contentieux ? Quelle est la force de l’impératif du droit ?
De manière synthétique, un double mouvement contradictoire peut être observé dans le traitement judiciaire des œuvres littéraires.
D’un côté, il n’existe pas d’immunité juridique de l’écrivain[12]. Ce dernier est responsable de ce qu’il écrit, la justice pourra lui demander des comptes pour ses mots.
En particulier, la « censure » au nom de la protection de certaines valeurs sociales est possible. Il en va ainsi de la lutte contre la haine depuis l’entrée en vigueur de la loi du 1er juillet 1972 qui a inscrit l’incrimination de provocation à la haine dans la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse (article 24)[13]. Dans les faits, une « judiciarisation croissante de la création artistique et littéraire » est effectivement perceptible en France[14] et des procès ont déjà été intentés contre des écrivains pour provocation à la haine.
D’un autre côté, l’œuvre littéraire fait l’objet d’un traitement juridique spécifique[15].
D’abord parce que « l’autonomie de l’art et de la littérature » est une revendication ancienne du monde artistique et littéraire[16], revendication relayée par le monde du droit : « Les juristes considèrent généralement qu’elle [la littérature] doit bénéficier d’une liberté accrue dans une démocratie. L’absence de censure des arts apparaît en effet comme l’une des marques les plus puissantes du bon fonctionnement de ce régime politique »[17]. En ce sens, la Cour d’appel de Versailles, dans un arrêt prononcé le 18 février 2016[18], a considéré que « le domaine de la liberté de la création artistique, parce qu’il est le fruit de l’imaginaire du créateur, est soumis à un régime de liberté renforcé afin de ne pas investir le juge d’un pouvoir de censure qui s’exercerait au nom d’une morale nécessairement subjective de nature à interdire des modes d’expression, souvent minoritaires, mais qui sont aussi le reflet d’une société vivante et qui ont leur place dans une démocratie ».
D’ailleurs, la liberté de création a été consacrée en tant que telle en droit français par la loi du 7 juillet 2016 : « La création artistique est libre », proclame l’article 1er[19]. Auparavant, dans l’arrêt « Müller contre Suisse » prononcé le 24 mai 1988, la Cour européenne des droits de l’homme avait déjà affirmé que « ceux qui créent, interprètent, diffusent ou exposent une œuvre d’art contribuent à l’échange d’idées et d’opinions indispensable à une société démocratique. D’où l’obligation, pour l’État, de ne pas empiéter indûment sur leur liberté d’expression »[20].
Ensuite, parce que les juges déploient des techniques d’appréciation des œuvres attaquées plutôt favorables aux écrivains[21]. Tel est le cas de la catégorie de la « distanciation » qui permet aux juridictions saisies de distinguer le point de vue de l’auteur du point de vue des personnages qu’il a créés[22]. Ainsi, dans l’affaire Pogrom, du nom du roman écrit par Éric Bénier-Bürckel, le tribunal correctionnel de Paris explique : « la notion même d’œuvre de fiction implique l’existence d’une distanciation, qui peut être irréductible, entre l’auteur lui-même et les propos ou actions de ses personnages ; […] une telle distance, appréciée sous le prisme déformant de la fiction, est susceptible d’entraîner la disparition de l’élément matériel des délits »[23]. Qui signe les propos antisémites tenus de la page 138 à la page 143 de Pogrom ? Les personnages d’encre et de papier ? L’auteur de chair et de sang ? Aux yeux du tribunal, ce sont des mots de fiction, qui n’appartiennent pas en propre à Éric Bénier-Bürckel[24] ; ce dernier est relaxé.
Cette affaire est révélatrice : oui, des procès peuvent être intentés contre des œuvres littéraires pour provocation à la haine, mais pour l’heure, ces procès n’aboutissent pas à des condamnations pénales. Pour l’instant, la littérature n’est pas étouffée par un droit trop impératif.
II. Le mode indicatif : le droit comme littérature de haine
Changeons de position. Le couple droit/littérature peut être observé sous un autre angle. Non plus le droit contre la littérature, mais le droit comme littérature. Et posons une question qu’il serait peut-être tentant d’esquiver : existe-t-il une écriture juridique de la haine ?
La réponse est positive : il suffit d’examiner le droit nazi qui constitue, dans cette perspective, un paradigme. C’est ce fait qu’il convient maintenant d’envisager dans sa réalité.
Dès 1947, le philologue Victor Klemperer a attiré l’attention sur les particularités linguistiques de ce qu’il a nommé la LTI, la Lingua Tertii Imperii, la langue du IIIe Reich. « Le nazisme », relève-t-il, « s’insinua dans la chair et le sang du grand nombre à travers des expressions isolées, des tournures, des formes syntaxiques qui s’imposaient à des millions d’exemplaires et qui furent adoptées de façon mécanique et inconsciente »[25]. Telle est la force, invisible et invincible, du langage.
Concernant plus précisément le langage juridique, il faut être attentif, avec l’historien Johann Chapoutot, à la volonté du régime nazi et de ses juristes de lutter contre le formalisme, de combattre les « paragraphes » de la loi qui symbolisent une « pensée du droit étrangère à la vie et à la réalité »[26], de se départir de « l’abstraction néfaste et mortifère »[27]. En effet, le nazisme abhorre le « droit des articles du Code », ce « droit formel et abstrait, donc juif et talmudique »[28]. La « forme » doit par conséquent être sacrifiée à la « matière »[29] – le « droit matériel » étant « celui qui sert et protège la substance matérielle, biologique, du peuple allemand, qui protège la race comme communauté organique substantielle »[30].
Cela vaut aussi bien pour le droit civil[31] que pour le droit pénal[32]. L’essentiel, pour les juristes nationaux-socialistes, c’est que le droit soit comme la vie, c’est-à-dire qu’il soit libre, souple, créatif, inventif[33].
Le discours juridique nazi est ainsi fondé sur un jeu d’oppositions manichéennes : contre la forme, la matière ; contre l’abstraction, la concrétude ; contre l’écriture, la vie. Comme le souligne le professeur Jouanjan, le droit nazi est un « droit déformalisé » qui « s’abandonne à la pure idéologie »[34]. Et il s’agit en l’espèce d’une idéologie haineuse.
Finalement, ce que révèle cet exemple paradigmatique, c’est que la haine s’épanouit dans l’effacement de la littérature juridique.
La réflexion pourrait être poursuivie sur le terrain du droit français, à propos de l’emploi du mot « race » dans les lois, dans les règlements ou encore dans la Constitution[35].
Ce mot est-il un mot de haine ? Faut-il le supprimer pour vider de sa substance le discours raciste, pour lui ôter le support du droit positif ? Ou bien faut-il le maintenir, précisément pour lutter contre ce discours avec ses propres mots[36] ? Des voix s’expriment dans un sens comme dans l’autre – des voix qui nous rappellent que le droit est une littérature et qu’il participe aussi bien à la propagation qu’à l’élimination de la haine.
III. Le mode subjonctif : le droit dans la littérature de haine
Le droit est une littérature. En raison de leur forme textuelle commune[37], les deux membres de notre couple se confondent. C’est d’autant plus vrai que des phénomènes juridiques peuvent figurer dans des textes littéraires. Il est désormais temps de s’intéresser aux représentations du droit dans la littérature de haine.
Toutefois, pour mener à bien ce projet, encore faut-il savoir ce qu’est la « littérature de haine ». Au-delà de la facilité de langage, s’agit-il d’une catégorie littéraire ? Forme-t-elle un genre ? Dans l’affirmative, comment l’identifier ?
Selon la critique littéraire, « les genres ne sont pas des êtres en soi : ils constituent, à chaque époque, une sorte de code implicite à travers lequel, et grâce auquel, les œuvres du passé et les œuvres nouvelles peuvent être reçues et classées par les lecteurs »[38]. En d’autres termes, « un genre n’est jamais que le sentiment historiquement justifié de l’unité formelle et sémantique qu’offre un ensemble de pratiques littéraires, une sorte de consensus s’étendant sur une assez longue durée, consensus sujet lui-même à révision et à mobilité »[39].
En ce sens, existe-t-il un consensus autour de l’idée que certaines œuvres peuvent être rassemblées dans la catégorie « littérature de haine » ? Est-il admis, même de façon implicite, qu’une telle catégorie « existe », qui rassemblerait des romans ou des nouvelles en raison des sentiments haineux qu’ils transcrivent ?
De toute évidence, dans les rayonnages des bibliothèques et des librairies, la « littérature de haine » n’est pas une section de classement. Il s’agit plutôt d’une expression juridique : seraient ainsi désignées les œuvres littéraires condamnées par une décision de justice pour provocation à la haine. La « littérature de haine » ne serait donc pas un genre littéraire, mais une catégorie contentieuse.
Or, à l’heure actuelle, cette catégorie contentieuse reste hypothétique. Les œuvres et les écrivains qui ont été attaqués en justice en France n’ont pas fait l’objet de reconnaissances de culpabilité[40].
Ainsi, sur les quarante-six affaires analysées par Anna Arzoumanov[41], six étaient fondées – notamment – sur la provocation à la haine. Une affaire concernait un livre de photographies et des chansons (« affaire Zep »), deux concernaient des chansons (« affaires Orelsan »), une visait une interview dans la presse donnée par un écrivain (« affaire Plateforme »), une autre visait une pièce de théâtre (« affaire Golgota picnic »[42]). Finalement, seule l’« affaire Pogrom » précédemment évoquée concernait un roman. Et à l’issue de la procédure, l’écrivain Éric Bénier-Bürckel a bénéficié d’une relaxe.
Par parenthèses, cette rareté du contentieux s’explique peut-être par le travail préventif des « maîtres de la retouche », ces « avocats spécialisés en droit de la presse qui sont chargés de pointer les éléments à risques des manuscrits sensibles et de proposer des réécritures, voire des suppressions »[43]. Une telle pratique – qui s’apparente à une mesure de compliance – diminue certainement les risques pour une œuvre littéraire d’être condamnée par le juge répressif.
Faute d’objet, l’étude des représentations du droit dans la littérature de haine n’est pas possible. Pas encore, en tout cas.
Si, un jour, une œuvre de cette sorte était repérée, il serait sans doute pertinent de vérifier si des phénomènes juridiques y sont représentés, de quelles façons et à quelles fins. Il serait intéressant d’évaluer si le droit y fait figure de complice ou de censeur de la haine. Toutes les conjugaisons sont, en effet, imaginables. En fait de haine, le rôle du droit n’a pas fini d’être interrogé.
[1] P. Amselek, « Le droit, technique de direction publique des conduites humaines », Droits, n° 10, 1989, p. 7. Comp. R. Libchaber, L’ordre juridique et le discours du droit. Essai sur les limites de la connaissance du droit, LGDJ, 2013, p. 142 : « Le droit n’est rien d’autre que le mode d’expression par lequel une collectivité énonce l’organisation dont elle s’est dotée ».
[2] G. Cornu, Droit civil. Introduction au Droit, Montchrestien, Précis Domat Droit privé, 13e éd., 2007, n° 23, p. 23.
[3] I. Jablonka, L’histoire est une littérature contemporaine. Manifeste pour les sciences sociales, Seuil, coll. La Librairie du XXIe siècle, 2014, p. 247. L’auteur souligne.
[4] Ibid., p. 245-246.
[5] T. Todorov, Critique de la critique. Un roman d’apprentissage, Seuil, coll. Poétique, 1984, p. 145.
[6] Ibid., p. 146.
[7] B. de Lamy, La liberté d’opinion et le droit pénal, LGDJ, coll. Bibliothèque des sciences criminelles, t. 34, 2000, p. 323.
[8] A. Cammillieri-Subrenat, « L’incitation à la haine et la Constitution », Revue internationale de droit comparé, vol. 54-2, 2002, p. 513. V. également J.-P. Marguénaud, « Conclusions générales », in Les discours de haine, Mare & Martin, 2023, p. 238 : « la haine est un sentiment violent qui pousse à vouloir du mal à quelqu’un et à se réjouir du mal qui lui arrive ».
[9] Recommandation du 30 octobre 1997, citée par N. Droin, « L’appréhension des discours de haine par les juridictions françaises : ente travail d’orfèvre et numéro d’équilibriste », Revue des droits de l’homme, n° 14, 2008, https://doi.org/10.4000/revdh.4302. V. aussi D. Roets, « Préface », in Les discours de haine, op. cit., p. 12.
[10] V. les remarques de Ph. Braud, Petit traité des émotions, sentiments et passions politiques, Armand Colin, 2007, p. 166 : « Après Auschwitz, Treblinka et la Kolyma, la haine est aujourd’hui largement déconsidérée, officiellement du moins. Elle est redevenue un sentiment honteux, proscrit culturellement ».
[11] A. Arzoumanov, « Les catégories de l’identification et de la distanciation dans les procès de fictions », in Le démon de la catégorie. Retour sur la qualification en droit et en littérature, Mare & Martin, 2017, p. 197.
[12] V. B. Nicaud, « La responsabilité pénale de l’écrivain », Revue Droit & Littérature, n° 1, 2017, p. 46. V. aussi G. Sapiro, « La responsabilité pénale de l’écrivain au prisme des procès littéraires (France, XIXe-XXe siècles) », Histoire de la justice, n° 23, 2013, p. 268 ; P. Auvret, « Le roman-réalité devant la Cour européenne des droits de l’homme », Gazette du Palais, n° 192, 2008, p. 7 et s.
[13] Loi n° 72-546 du 1er juillet 1972 relative à la lutte contre le racisme, JO 2 juillet 1972, art. 1er. V. Th. Besse, « Les discours de haine dans la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse », in Les discours de haine, op. cit., p. 47.
[14] A. Arzoumanov, La Création artistique et littéraire en procès. 1999-2019, Classiques Garnier, coll. Littérature et censure, t. 7, 2022, p. 264.
[15] V. B. Nicaud, « La responsabilité pénale de l’écrivain », art. préc., p. 53 et s. V. aussi A. Latil, « Exprimer, provoquer ou exhorter. L’affaire Golgotha picnic à la lumière de la mutation du délit de provocation à la haine », Contextes, n° 26, 2020, https://doi.org/10.4000/contextes.8748. V. encore E. Treppoz, « Pour une attention particulière du droit à la création : l’exemple des fictions littéraires », D. 2011, n° 36, p. 2487 et s.
[16] A. Arzoumanov, La Création artistique et littéraire en procès. 1999-2019, op. cit., p. 33 et s.
[17] A. Arzoumanov, « Les catégories de l’identification et de la distanciation dans les procès de fictions », op. cit., p. 199.
[18] CA Versailles, 8e chambre, 18 février 2016, n° 15/02687.
[19] Loi n° 2016-925 du 7 juillet 2016 relative à la liberté de création, à l’architecture et au patrimoine, JO 8 juillet 2016. V. à cet égard A. Montas, « Le juge et la liberté de création artistique », Les cahiers de la justice 2018, p. 737 et s.
[20] CEDH, 24 mai 1988, « Müller et autres c. Suisse », req. n° 10737/84, § 33.
[21] A. Arzoumanov, La Création artistique et littéraire en procès. 1999-2019, op. cit., p. 229 et s. ; v. aussi du même auteur, « Le discours indirect libre au tribunal. Aperçu de la jurisprudence contemporaine en droit de la presse », in Marges et contraintes du discours indirect libre, 2016, https://www.fabula.org/colloques/document5412.php. V. également A. Damerdji, « L’écrivain peut-il inciter à la haine ? La littéralisation comme stratégie politique : le procès de La Rage et l’orgueil d’Oriana Fallaci (2002) », in Pour une critique matérialiste des œuvres littéraires, 2021, https://www.fabula.org/colloques/document7096.php.
[22] V. A. Arzoumanov, « Les catégories de l’identification et de la distanciation dans les procès de fictions », op. cit., p. 207. V. aussi les remarques de X. Daverat, « Immunité de l’art ? (Rap et droit) », in Mélanges en l’honneur du Professeur Philippe Conte, LexisNexis, 2023, p. 316-317.
[23] TGI Paris, 17e ch. corr., 16 novembre 2006, n° 9999. V. A. Tricoire, Petit traité de la liberté de création, La Découverte, coll. Cahiers libres, 2011, p. 204 et s.
[24] Mais la dédicace du roman – « Aux Noirs et aux Arabes » – à qui l’attribuer, sinon au romancier ? Le tribunal n’en dit rien cependant. V. à cet égard A. Tricoire, Petit traité de la liberté de création, op. cit., p. 217-218.
[25] V. Klemperer, LTI, la langue du IIIe Reich. Carnets d’un philologue, Albin Michel, Pocket, coll. Agora, 2002, p. 40.
[26] J. Chapoutot, La loi du sang. Penser et agir en nazi, Gallimard, coll. Bibliothèque des histoires, 2014, p. 163.
[27] Ibid., p. 128.
[28] J. Chapoutot, « Droit pénal et éradication de l’ennemi : le cas du IIIe Reich », Jurisprudence. Revue critique, 2015, p. 58.
[29] V. J. Chapoutot, La loi du sang. Penser et agir en nazi, op. cit., p. 255.
[30] Ibid.
[31] V. V. Lasserre-Kiesow, La technique législative. Étude sur les Codes civils français et allemand, LGDJ, coll. Bibliothèque de droit privé, t. 371, 2002, p. 101 et s.
[32] V. J. Chapoutot, La loi du sang. Penser et agir en nazi, op. cit., p. 256 et s.
[33] J. Chapoutot, « Droit pénal et éradication de l’ennemi : le cas du IIIe Reich », art. préc. ; v. aussi G. Richard, « Défendre la forme du droit. Regards contemporains sur le droit nazi », Droit et société, n° 99, 2018, p. 511-512.
[34] O. Jouanjan, Justifier l’injustifiable. L’ordre du discours juridique nazi, PUF, coll. Léviathan, 2017, p. 65. V. également M. Troper, « Y a-t-il eu un État nazi ? », in Pour une théorie juridique de l’État, PUF, coll. Léviathan, 1994, p. 181 : « un régime qui n’est pas un État, un pouvoir qui ne s’exerce pas en forme juridique, produit, en raison même de sa forme, des décisions de caractère oppressif ».
[35] V. P. Mbongo, « Un antiracisme scripturaire : la suppression du mot “race” de la législation », D. 2013, n° 19, p. 1288 ; A. Denizot, « Race ou prétendue race : la méthode des petits pas », RTD civ. 2017, n° 4, p. 922 ; F. Hamon, « Quelques réflexions sur la diabolisation du terme “race” », Constitutions, 2019, n° 4, p. 459. V. également Ch. Baron, La littérature à la barre (XXe-XXIe siècle), CNRS Éditions, 2021, p. 259-260.
[36] V. M. Bessone, « Analyser la suppression du mot “race” de la Constitution française avec la Critical Race Theory : un exercice de traduction ? », Droit et société, n° 108, 2021, p. 367 et s.
[37] L’assertion pourrait être discutée en droit français en raison de la place accordée aux coutumes et aux usages. Mais ces sources du droit objectif ont quand même tendance à prendre in fine la forme de textes, souvent pour des considérations probatoires. V. P. Deumier, Introduction générale au droit, LGDJ, 6e éd., 2021, p. 353 et s.
[38] Ph. Lejeune, Le pacte autobiographique, Seuil, coll. Poétique, 1975, p. 311.
[39] R. Debray Genette, Métamorphoses du récit. Autour de Flaubert, Seuil, coll. Poétique, 1988, p. 131.
[40] V. en Belgique la décision relative à l’album Tintin au Congo d’Hergé : Th. Massis, « Faut-il interdire Tintin au Congo ? Cour d’appel de Bruxelles, 28 novembre 2012, n° 2012/AR/470 », Légipresse, 2014, p. 241. Se plaçant sur le terrain de l’élément intentionnel de l’infraction, la Cour d’appel de Bruxelles souligne : « Il ne ressort pas des dessins et des dialogues de l’album ni d’aucune autre circonstance extérieure qu’Hergé avait la volonté de concevoir une bande dessinée destinée à véhiculer des idées à caractère raciste, vexantes, humiliantes ou dégradantes à l’égard des Congolais ni encore d’inciter ses lecteurs à la discrimination et à la haine envers eux. Rien dans l’album ne laisse penser qu’Hergé considérait que les africains constituaient une “race” et qu’il entendait la comparer à une autre qui lui serait supérieure. Hergé s’est borné à réaliser une œuvre de fiction dans le seul but de divertir ses lecteurs. Il y pratique un humour candide et gentil » (§ 9).
[41] A. Arzoumanov, La Création artistique et littéraire en procès. 1999-2019, op. cit., p. 105.
[42] V. E. Saulnier-Cassia, Le Théâtre en procès. Épilogues contentieux de trois querelles dramaturgiques contemporaines, Classiques Garnier, coll. Littérature et censure, t. 8, 2022, p. 63 et s., ainsi que p. 131 et s.
[43] A. Arzoumanov, La Création artistique et littéraire en procès. 1999-2019, op. cit., p. 161.