Enfin ! Le règlement Aarhus est révisé : un nouveau pas vers l’accès à la justice en matière environnementale ?
Le règlement (UE) 2021/1767 du Parlement européen et du Conseil du 6 octobre 2021 est venu modifier le règlement d’Aarhus. La révision semble à première vue circonscrite car le nouveau règlement ne comporte que deux articles qui viennent modifier trois articles du règlement initial. Toutefois, en réalité, elle est d’ampleur car les conditions d’une procédure propre au domaine de l’environnement (la procédure de réexamen interne des actes administratifs) ont été fortement modifiées ce qui devrait faire nettement évoluer le format de la démocratie environnementale au niveau de l’Union, même si la révision ne résout pas la question -encore problématique- de l’accès au juge de l’Union en tant que tel.
Par Estelle Brosset, Professeure en droit public, Chaire Jean Monnet
Aix Marseille Univ, CNRS, DICE, CERIC, Aix-en-Provence, France
Institut Universitaire de France
La Convention d’Aarhus sur l’accès à l’information, la participation du public au processus décisionnel et l’accès à la justice en matière d’environnement. Adoptée sous l’égide de la Commission économique pour l’Europe des Nations Unies le 25 juin 1998, en vigueur depuis le 30 octobre 2001, la Convention d’Aarhus est, en droit de l’environnement, un texte phare. Et pour cause, « organisant le droit à l’information, la participation du public au processus décisionnel et l’accès à la justice en matière d’environnement, elle rattache ces droits procéduraux au droit fondamental à l’environnement »[1] et constitue dès lors « le premier traité européen »[2] et encore le seul à le faire. Texte phare[3], la Convention l’est notamment en droit de l’Union européenne de l’environnement. Elle a en effet été approuvée au nom de la Communauté européenne par la décision 2005/370/CE du Conseil, du 17 février 2005[4]. Depuis lors, la Communauté puis l’Union est, aux côtés de ses États membres, Partie à la Convention : celle-ci fait donc partie intégrante de l’ordre juridique de l’Union et la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) a logiquement compétence pour statuer (à titre préjudiciel en interprétation[5]) à son égard. Parmi les dispositions de la Convention, certaines concernent l’accès à la justice. Elles ne sont pas des moindres. Il faut dire qu’accéder à la justice au nom de la protection de l’environnement n’est pas chose aisée. D’abord, la nature, pas plus que ses éléments, ne peut défendre elle-même ses intérêts en justice[6]. Cette prérogative doit donc être attribuée à des sujets de droit, des individus, seuls ou regroupés en association, agissant au nom de la défense de l’environnement. Ensuite, même si des intérêts individuels peuvent également être en jeu, la protection de l’environnement constitue, par nature, un intérêt collectif ce qui impose un aménagement des règles procédurales applicables car, dans de très nombreux systèmes juridiques, un intérêt personnel est requis pour agir en justice. Or, c’est sur ce point que l’aménagement prévu par la Convention est ambitieux[7] même si son organisation suivant trois hypothèses distinctes (une hypothèse reliée à l’accès à l’information[8], une autre à la participation au processus décisionnel[9] et la troisième plus générale) ne le rend pas très lisible. C’est clairement la troisième hypothèse prévue au troisième paragraphe de l’article 9 du texte qui en donne la mesure : elle impose aux Parties à la Convention – dont l’Union- de veiller à ce que « les membres du public qui répondent aux critères éventuels prévus par son droit interne puissent engager des procédures administratives ou judiciaires pour contester les actes ou omissions de particuliers ou d’autorités publiques allant à l’encontre des dispositions du droit national de l’environnement ».
Le règlement n° 1367/2006 concernant l’application aux institutions et organes de la Communauté européenne des dispositions de la convention d’Aarhus. Afin de contribuer à l’exécution de ces obligations de la Convention d’Aarhus par les institutions et organes de l’Union, a été adopté, juste après la conclusion de la Convention, le 6 septembre 2006, un règlement n° 1367/2006[10] dit règlement d’Aarhus. Un tel règlement prévoit, pour mettre en œuvre l’article 9 § 3 de la Convention, l’instauration d’une nouvelle procédure, propre au domaine de l’environnement, à l’article 10 du texte, la procédure dite de « réexamen interne ». Cette procédure administrative[11] permet à toute organisation non-gouvernementale (ONG) s’occupant de la protection de l’environnement – et répondant à des critères fixés par l’article suivant[12]– de formuler une demande écrite visant à un réexamen interne auprès de l’institution ou organe de l’Union[13] qui a adopté un acte administratif (ou qui a omis d’adopter un acte qu’il était censé adopter) au titre du droit de l’environnement. La demande, faite dans un délai de 6 semaines après l’adoption de l’acte de notification ou de publication, doit être étudiée par l’institution ou l’organe en cause qui doit faire une réponse au demandeur dans un délai de 12 à 18 semaines suivant réception de la demande. Par ailleurs, selon l’article 12 du règlement, en cas de réponse défavorable à une demande de réexamen, l’association demanderesse peut saisir la Cour -conformément aux dispositions pertinentes du traité- et notamment former un recours en annulation de la décision de rejet de la demande de réexamen adressée par l’institution ou l’organe saisi.
Le règlement (UE) 2021/1767 du Parlement européen et du Conseil du 6 octobre 2021 modifiant le règlement d’Aarhus. C’est ce règlement Aarhus et, en particulier cette procédure, qui vient d’être tout juste révisé[14]. La révision semble à première vue circonscrite car le nouveau règlement ne comporte que deux articles qui viennent modifier uniquement trois articles du règlement initial . Toutefois, en réalité, la révision est en profondeur car les conditions de cette procédure ont été fortement modifiées ce qui devrait faire nettement évoluer le format de la démocratie environnementale au niveau de l’Union. Des modifications d’ampleur sont en effet enregistrées, au plan administratif, à propos de la procédure de réexamen elle-même (1). Toutefois, elles ne s’étendent pas au-delà, plus exactement au plan juridictionnel : s’il peut être demandé, le réexamen peut être refusé et alors s’ouvre la phase juridictionnelle à propos de laquelle le surplace est en effet flagrant (2).
I -Les modifications d’ampleur de la procédure administrative de réexamen interne
L’absence de conformité de la procédure de réexamen avec la Convention d’Aarhus. Pour comprendre l’avancée, il faut naturellement faire un pas en arrière. La procédure de réexamen interne mise en place par le règlement n°1367/2006, jusqu’à sa révision, était assez sévèrement conditionnée tant s’agissant de ses bénéficiaires que de son champ d’application. Dans les deux cas, ces conditions étaient d’autant plus strictes que la Convention que le règlement annonçait appliquer ne prévoyait pas de telles limites. C’est pour y remédier que le nouveau règlement apporte, sur ces deux points[15], des modifications substantielles. Le considérant 5 du nouveau règlement est clair sur les raisons de la révision. Il s’agit, ce faisant, de « mettre le droit de l’Union en conformité avec les dispositions de la convention d’Aarhus sur l’accès à la justice en matière d’environnement ». Il s’agit d’ailleurs de tenir compte non seulement de la Convention mais également « des conclusions et conseils du comité d’examen du respect des dispositions de la convention d’Aarhus dans l’affaire ACCC/C/2008/32 ». Dans cette affaire, en réponse à la communication de l’ONG ClientEarth[16], le Comité avait, par une décision rendue le 17 mars 2017[17], considéré que le droit de l’Union et notamment[18] le règlement d’Aarhus ne respectait pas la Convention d’Aarhus et avait recommandé que l’Union européenne modifie son règlement Aarhus ou adopte une nouvelle législation[19]. Ce n’est donc pas à la suite d’un arrêt de la CJUE[20], mais d’une décision d’un organe externe à l’Union[21], après quelques tentatives de temporisation[22], que le règlement a fait peau neuve[23].
Les modifications à propos des bénéficiaires de la procédure. S’agissant des bénéficiaires de la procédure, l’article 10-1 du règlement initial prévoyait en effet que celle-ci pouvait être uniquement enclenchée par une ONG alors même que l’article 9-3 de la Convention prévoit que les « membres du public »[24] doivent avoir accès à des procédures administratives ou judiciaires pour contester les actes ou omissions de particuliers ou d’autorités publiques. Le nouveau règlement enregistre une avancée conséquente puisque la procédure est désormais ouverte non plus seulement aux ONG mais également, en se conformant à la Convention, aux membres du public. L’avancée est telle qu’il a été admis qu’elle n’ait pas lieu dès l’entrée en vigueur du règlement mais qu’elle ne soit applicable qu’à partir du 29 avril 2023[25]. En outre, et cela était attendu, pour les membres du public (comme pour les ONG), des conditions[26] pour introduire la demande de réexamen sont libellées. D’abord, ils doivent être « représentés soit par une organisation non gouvernementale de défense de l’environnement satisfaisant aux critères énoncés dans le règlement (…) soit par un avocat habilité à exercer devant la juridiction d’un État membre »[27]. En outre et surtout, ils doivent soit démontrer une « atteinte à leurs droits »[28], soit prouver qu’il existe « un intérêt public suffisant à préserver, protéger et améliorer la qualité de l’environnement, à protéger la santé humaine, à utiliser prudemment et rationnellement les ressources naturelles ou à lutter contre le changement climatique »[29]. On comprend que ces conditions ont été âprement négociées. On pressent également qu’elles ne seront pas simples à manier. Si, pour le second cas, le règlement, dans un nouvel article 11-1 bis b), prévoit des seuils -au moins 4 000 membres du public qui résident ou sont établis dans au moins 5 États membres et avec au moins 250 membres du public provenant de chacun de ces États membres, pour le premier cas, aucune précision supplémentaire n’est donnée, seulement celle de ne pas exiger des membres du public qu’ils démontrent qu’ils sont directement et individuellement concernés comme dans le cadre de l’article 263, quatrième alinéa, du TFUE, tel qu’il est interprété par la CJUE[30]. Toutefois, il faudra néanmoins démontrer une affection directe « contrairement au reste du public », par exemple « dans le cas d’une menace imminente pour leur santé et leur sécurité, ou d’une atteinte portée à un droit dont ils peuvent se prévaloir en vertu de la législation de l’Union »[31] ce qui n’est pas négligeable et pourrait se révéler complexe.
Les modifications à propos des actes (ou omissions) soumis à la procédure. S’agissant du champ d’application, il faut ici expliquer que la procédure de réexamen ne s’appliquait pas à l’ensemble des actes adoptés par les institutions et organes de l’Union mais seulement aux « actes administratifs » définis par l’article 2-1, sous g) du règlement comme « toute mesure de portée individuelle (…) ayant un effet juridiquement contraignant et extérieur » adoptés, en outre, « au titre du droit de l’environnement ». Or sur ces deux points, les modifications ont été majeures.
Ce qu’est un acte « environnement ». S’agissant de cette seconde exigence (un acte administratif pris « au titre du droit de l’environnement »), elle aurait pu ne pas paraître très rigoureuse car la définition donnée par l’article 2-1, sous f), dudit règlement de ce qu’est le « droit de l’environnement » est plutôt compréhensive : il s’agit de « toute disposition législative de l’Union qui, indépendamment de sa base juridique, contribue à la poursuite des objectifs de la politique de l’Union dans le domaine de l’environnement tels que prévus par le traité : la préservation, la protection et l’amélioration de la qualité de l’environnement, la protection de la santé des personnes, l’utilisation prudente et rationnelle des ressources naturelles et la promotion, sur le plan international, de mesures destinées à faire face aux problèmes régionaux ou planétaires de l’environnement ». Sur cette base, le juge de l’Union a ainsi pu estimer qu’une décision d’autorisation de mise sur le marché (à l’exception de la culture) de produits contenant du soja modifié, consistant en ce soja ou produits à partir de celui-ci[32] qui, pourtant engageaient exclusivement des enjeux de santé humaine (liée à la consommation de denrées alimentaires), pouvait être qualifiée d’acte adopté au titre du droit de l’environnement[33]. Toutefois, si l’on se souvient que l’article 9 § 3 de la Convention exige la mise en place de procédures administratives et judiciaires pour contester les actes « allant à l’encontre des dispositions du droit national de l’environnement » et que le règlement lui réserve la procédure de réexamen aux actes adoptés « au titre du droit de l’environnement » c’est-à-dire en vue de réaliser les objectifs de l’Union en matière d’environnement, on doit admettre que le champ d’application était tout de même plus réduit. Confirmant ce que le juge de l’Union avait anticipé[34], le nouveau règlement règle ce hiatus : il prévoit que la procédure s’applique à tout acte « contenant des dispositions qui peuvent aller à l’encontre du droit de l’environnement »[35] ce qui permet d’évaluer des actes « qui ont été adoptés dans le cadre de la mise en œuvre de politiques autres que la politique de l’Union en matière d’environnement » mais dont les dispositions « pourraient avoir un effet négatif sur la réalisation des objectifs de la politique de l’Union en matière d’environnement »[36].
Ce qu’est un acte administratif. C’est sur ce point que l’incompatibilité du règlement initial avec la Convention apparaissait le plus nettement. Ce règlement en ne visant, sous ce terme (et donc en n’incluant sous la procédure de réexamen), que les actes de portée individuelle, excluait donc ceux de portée générale (qu’ils soient législatifs ou règlementaires) ce qui était clairement plus restrictif que ce que prévoit la Convention d’Aarhus qui ne fait aucunement référence à la portée individuelle des actes et se limite à exclure de son champ d’application les actes législatifs[37]. D’ailleurs, le Comité d’examen du respect de la Convention avait, parmi d’autres constats d’incompatibilité[38], insisté sur cette limitation du champ d’application de la procédure de réexamen[39] qui, au vu des objectifs et de l’objet de la Convention d’Aarhus, était, selon lui, « une limitation non justifiée ». Elle l’était d’ailleurs d’autant plus que, dans les faits, une telle limitation avait réservé la procédure à un très petit nombre d’actes[40], constituant, ce qu’admet le nouveau règlement, « le principal motif d’irrecevabilité des demandes de réexamen interne »[41]. Dans le nouveau règlement, l’élargissement du champ d’application de la procédure de réexamen interne est net. Le nouvel article 2-1 g) définit en effet désormais l’acte administratif comme « tout acte non législatif adopté par une institution ou un organe de l’Union, ayant un effet juridique et extérieur[42] ». Le changement est intense car entreront désormais sous cette procédure tous les actes pris au niveau de l’Union, dès lors qu’ils produisent des effets juridiques à l’égard des tiers, quelle que soit leur portée individuelle ou générale, à l’exception des actes législatifs, suivant ce que prévoit la Convention. Il faut ici remarquer que la proposition de la Commission[43] n’était pas aussi large puisqu’elle suggérait de limiter aux actes non législatifs qui ne comportaient pas de mesure d’exécution au niveau de l’Union ou au niveau national. Le débat (parlementaire) a permis d’aller au-delà puisque ne figure pas finalement une telle limite, simplement un rappel, au considérant 16, du fait que « les actes adoptés par les autorités publiques des États membres, dont les mesures nationales d’exécution adoptées au niveau des États membres et requises par un acte non législatif adopté au titre du droit de l’Union, ne relèvent pas du champ d’application du règlement ».
Une question non réglée : les exceptions pour certains actes particuliers. Outre l’exception pour les actes législatifs, s’ajoute une autre exception prévue par le règlement initial et maintenue, celle visant, à l’article 2 §2 du règlement, « les mesures prises ou les omissions, par une institution ou un organe communautaire en sa qualité d’organisme de contrôle administratif » notamment au titre des règles de concurrence (a), de la procédure en manquement (b), de la procédure relative au médiateur (c) ou de la procédure relative à l’OLAF (d). Or, l’interprétation de telles exceptions a pu et peut, sans conteste, susciter des discussions. Pour preuve, dans un arrêt récent du Tribunal du 15 décembre 2021, Stichting Comité N65 c/ Commission[44], il était question d’une décision de la Commission venant clore une procédure de plainte portée par une ONG et de sa qualification comme « mesure prise par la Commission en tant qu’organisme de contrôle administratif au titre de la procédure en manquement » et donc, en ce cas, de son exclusion de la procédure de réexamen interne. Parce que la procédure de plainte est la première étape pouvant conduire à l’ouverture d’une telle procédure au titre de l’article 258 TFUE à laquelle elle est « indissociablement liée »[45], le Tribunal a confirmé la qualification et, partant, la décision de rejet par la Commission du réexamen interne. Au-delà de leur interprétation, c’est l’existence même de ces exceptions qui suscite la discussion. Dans ses conclusions du 17 mars 2017, le Comité d’examen du respect avait déjà exprimé des réserves[46] sur la conformité de la notion d’organisme de contrôle administratif figurant à l’article 2, paragraphe 2, du règlement Aarhus. Ledit comité avait souligné que la convention d’Aarhus excluait de la notion d’autorité publique les « organes ou institutions agissant dans l’exercice de pouvoirs judiciaires ou législatifs »[47], mais non les organes agissant en qualité d’« organisme de contrôle administratif ». Il en avait conclu qu’il avait des doutes sur la conformité d’une telle exclusion générale de tous les actes administratifs et les omissions d’institutions agissant en qualité d’organes de contrôle administratif, mais, parce qu’il ne disposait pas d’exemples concrets de violations, il n’avait pas constaté un non-respect de la convention à cet égard. Toutefois, ce fut fait quelques années plus tard, par la voie de ses conclusions et recommandations relatives à la communication ACCC/C/2015/128 adoptées le 17 mars 2021 à propos d’une décision d’autorisation de la Commission d’approuver des aides d’État en faveur d’un projet de construction de deux réacteurs nucléaires en Angleterre (appelées « Hinkley Point C ») en application de l’article 108 du TFUE. Le Comité estime qu’en n’offrant pas aux membres du public l’accès à la procédure de réexamen interne pour contester de telles décisions relatives aux aides d’État prises par la Commission allant à l’encontre du droit de l’environnement, faute d’autres procédures accessibles[48], l’Union ne se conforme pas aux dispositions de l’article 9 § 3 de la convention. La révision du règlement -en cours au moment même de l’examen par le Comité – n’a pas permis, on s’en doute, de résoudre la situation, mais, la Commission « s’est engagée à évaluer ces conclusions et recommandations d’ici la fin 2022 et a indiqué qu’elle présenterait d’ici à la fin de 2023 s’il y a lieu des mesures pour résoudre ce problème au regard des obligations de l’Union européenne et de ses États membres en vertu de la convention d’Aarhus et compte tenu des règles du droit de l’Union relative aux aides d’État »[49].
II- Le surplace flagrant en cas de recours juridictionnel contre un refus de réexamen
La possibilité inchangée de contester la décision de rejet du réexamen. Au plan juridictionnel, le règlement n° 1367/2006 n’était pas muet : dans son article 12-1, il prévoyait que « l’ONG ayant introduit la demande de réexamen interne en vertu de l’article 10 peut saisir la Cour de justice conformément aux dispositions pertinentes du traité », plus précisément, en cas de rejet d’une demande de réexamen, pour demander l’annulation de ladite décision de rejet. Une telle possibilité est maintenue et d’une façon inchangée. Certes, et plusieurs avocats généraux ainsi que le Tribunal l’ont rappelé, ce faisant, la procédure « vise à faciliter aux « entités qualifiées » un accès à la justice auquel elles n’auraient pas droit au titre de l’article 263, quatrième alinéa, TFUE tel qu’interprété par la Cour »[50]. Certes, la révision des bénéficiaires de la procédure (y compris les membres du public) comme de son champ d’application (tout acte non législatif) modifiera mécaniquement le recours à l’article 12. Rappelons que, pour l’heure, à l’exception des affaires concernant l’(in)applicabilité d’une telle procédure[51], l’article n’a été utilisé à propos de la procédure de réexamen (mené à son terme) qu’à deux reprises[52] pour une durée de quinze années d’application du règlement ce qui est peu. Cela devrait changer. Cependant, il n’en reste pas moins que ce que prévoit l’article 12 n’est rien d’autre que la stricte déduction des règles du traité sans ajout. Il a toujours été en effet possible, au titre de l’article 263 du TFUE, pour un destinataire d’une décision individuelle le concernant de contester une telle décision (plus exactement d’en demander l’annulation à la CJUE) sans avoir à démontrer un quelconque intérêt à agir (consubstantiel au fait d’être destinataire de l’acte). C’est ce qui est ici prévu et d’ailleurs, le renvoi explicite dans l’article 12 aux dispositions pertinentes du Traité le confirme.
Les questions encore en suspens à propos de l’article 12. On regrettera que le nouveau règlement ne fasse pas plus de clarté sur certaines questions sur les modalités du recours dans le cadre de l’article 12 et ce alors même qu’elles ont, pour certaines et sans toujours de résultat, été portées devant le juge. L’une d’entre elle porte sur l’acte susceptible de faire l’objet d’un tel recours. Le règlement ancien comme nouveau ne dit rien à ce sujet. Pourtant la question s’est posée et le juge y a répondu fermement : selon lui, il ne fait aucun doute que l’objet du recours ne peut en aucun cas être de rechercher l’illégalité de l’acte « de base », celui dont le réexamen a été demandé, mais uniquement celle de la décision de rejet de la demande de réexamen, sauf à porter atteinte à l’article 263 TFUE et aux conditions prévues pour le recours en annulation. Le juge l’a confirmé tout récemment[53] dans un arrêt rendu à la même date que le règlement[54]. Cependant, il n’en demeure pas moins que cette réponse ferme n’a pas été reprise dans le règlement et qu’elle ne lève pas toutes les questions, notamment parce que les arguments avancés pour démontrer l’illégalité de la décision de rejet du réexamen peuvent être les mêmes que ceux qui pourraient servir à démontrer, indirectement, l’illégalité de l’acte de base. Le juge de l’Union l’avait, d’une certaine manière, admis dans l’affaire TestBioTech[55] en acceptant que le recours en annulation puisse être considéré comme recevable, y compris si, par ce biais, de façon « inhérente », est « contesté la légalité ou le bien-fondé de l’acte visé par la demande de réexamen, à savoir en l’espèce la décision d’autorisation »[56]. Il semble l’avoir récemment répété[57]. Il eut été intéressant d’avoir, dans le règlement, une précision (une confirmation ?) sur ce point. Un autre débat, proche, concerne d’ailleurs les moyens qu’il est possible d’avancer dans le cadre du recours en annulation de la décision de réexamen et la nécessité d’une stricte similarité entre ces moyens et les motifs avancés au soutien de la demande de réexamen interne. Certes, suivant la position du juge en la matière[58], le nouveau règlement précise que le recours prévu par l’article 12 ne saurait être fondé « sur des motifs nouveaux ou des éléments de preuve qui n’apparaissaient pas dans la demande de réexamen (…) sous peine de priver l’exigence relative à la motivation d’une telle demande de son effet utile et de modifier l’objet de la procédure engagée par cette demande »[59]. Toutefois, cela ne règle pas totalement la question car, à propos de moyens déjà avancés, les arguments peuvent être nouveaux et, à ce sujet, la réponse n’est pas encore assurée, la Cour ne s’étant pas exprimée[60] ni, en l’occurrence le règlement.
Conclusion. Certes, le règlement Aarhus -nouveau format- transforme substantiellement la procédure administrative de réexamen interne, procédure spécifique à la matière environnementale. Et les conséquences – s’agissant de la contestation par les ONG et le public des actes pris dans le domaine de l’environnement- devraient être réelles. Pour donner un exemple, du fait de ce changement, contrairement à ce que le Tribunal a considéré au printemps dernier[61], une association aurait eu la possibilité de demander le réexamen de l’approbation par la Commission de la substance active qu’est le glyphosate. Parce que le champ d’application est déverrouillé, le juge de l’Union aura, en plus, sans aucun doute à connaître de davantage de recours contre des décisions de rejet du réexamen interne. Toutefois, des questions à propos de ce contentieux à venir demeurent non réglées et par ailleurs et surtout, un tel contentieux reste tout à fait délimité car seules les réponses aux demandes de réexamen sont susceptibles d’un recours.
Et au-delà du règlement ? … Le statu quo. Au-delà du règlement, la situation est en effet, du point de vue de l’accès à la Cour, inchangée. La possibilité[62] pour les personnes physiques et morales de demander l’annulation des actes des institutions, organes et organismes dans l’Union n’a pas connu d’évolutions substantielles du côté de l’interprétation par la Cour elle-même, y compris dans le domaine de l’environnement[63], alors même que sans doute, ici, cela ferait sens[64]. Dans sa décision du 17 mars 2017[65], le comité d’examen du respect de la Convention d’Aarhus avait estimé que l’interprétation de l’article 263, quatrième alinéa, du TFUE[66] était excessivement restrictive[67]. Le constat pourrait sans aucun doute être réitéré aujourd’hui. Depuis presque 60 ans, soit depuis l’arrêt Plaumann[68], il faut ainsi, pour demander l’annulation d’un acte législatif, apporter la preuve que le ou les requérants touchés sont affectés individuellement, c’est-à-dire qu’ils le sont à l’exception de tous les autres requérants potentiels ce qui est, en matière environnementale, quasiment toujours impossible. Pour exemple, récemment, dans une affaire très attendue en matière de changement climatique, l’irrecevabilité d’un recours en annulation formé par plusieurs particuliers[69] à l’encontre de trois actes législatifs de l’Union en matière climatique[70] a été prononcée par le Tribunal[71] et confirmée par la Cour[72]. En l’espèce, la Cour a considéré que son Tribunal n’avait pas commis d’erreur de droit en constatant l’absence d’affectation individuelle dans le chef des requérants. Certes, les incidences liées au changement climatique sont différentes d’une personne à l’autre (certaines familles sont touchées par la sécheresse, d’autres par des inondations, d’autres encore par la fonte des neiges, ou des vagues de chaleur causées ou intensifiées par le changement climatique ; certaines de celles-ci sont des agriculteurs ou des propriétaires forestiers, d’autres possèdent une entreprise dans le secteur du tourisme, tandis que d’autres encore se consacrent à l’élevage) et le Tribunal a d’ailleurs bien fait état « de la multitude et de la spécificité de leur affectation du point de vue factuel »[73]. Cependant, selon la Cour, confirmant en cela ce qu’avait dit le Tribunal, ces différences ne suffisent pas à constater que ces requérants sont affectés « individuellement »[74] c’est-à-dire d’une manière analogue à celle du destinataire de ces dispositions. Par ailleurs, ainsi qu’il avait été rappelé par le Tribunal, « l’allégation selon laquelle les actes litigieux violent les droits fondamentaux ne suffit pas à elle seule à déclarer recevable le recours d’un particulier, sous peine de vider les exigences de l’article 263, quatrième alinéa, TFUE, de leur substance »[75]. Le statu quo peut également être relevé à propos de l’interprétation des conditions des recours contre les actes réglementaires dont il faut démontrer qu’ils concernent directement le requérant et qu’ils ne comportent pas de mesures d’exécution. Ainsi que la Cour l’avait déjà jugé[76], le juge de l’Union a, encore récemment, confirmé qu’il est tout à fait dépourvu de pertinence, à cet égard, de savoir si lesdites mesures d’exécution ont ou non un caractère mécanique[77] ce qui rend difficile la reconnaissance de la recevabilité. Et ce d’autant plus que, même dans le cas où aucune mesure d’exécution n’est identifiée « du point de vue »[78] du requérant, il faut tout de même démontrer que l’acte réglementaire concerne « directement » le requérant c’est-à-dire qu’il produit directement des effets sur la situation juridique du requérant et ne laisse aucun pouvoir d’appréciation aux destinataires chargés de sa mise en œuvre ce qui accroît encore les chances d’un constat d’irrecevabilité[79]. L’arrêt rendu tout récemment par la Cour dans l’affaire Ville de Paris, Bruxelles et Madrid[80] – en annulation de l’arrêt favorable du tribunal[81]– atteste de cette autre difficulté. Une telle interprétation rend la révision du règlement Aarhus d’autant plus cruciale et importante à suivre dans son application.
[1] Son préambule prévoit que « Chacun a le droit de vivre dans un environnement propre à assurer sa santé et son bien-être ». L’article 1er de la Convention impose aux États de : « protéger le droit de chacun, dans les générations présentes et futures, de vivre dans un environnement propre à assurer sa santé et son bien-être ».
[2] M. Prieur, Droit à l’environnement, Jurisclasseurs Environnement, Fasc. 1360, 2007.
[3] 46 États sont Parties à la Convention outre l’Union : voir la liste : https://treaties.un.org/Pages/ViewDetails.aspx?src=IND&mtdsg_no=XXVII-13&chapter=27&clang=_fr#1
[4] JO 2005, L 124, p. 1.
[5] CJUE, 8 mars 2011, Lesoochranárske zoskupenie VLK, Affaire C-240/09, Rec. p. 1255, pt. 30.
[6] Certains auteurs ont développé des théories inverses, attribuant aux éléments de l’environnement le droit d’ester en justice : C. D. Stone, Should trees have standing ? Toward legal rights for natural objects, South California Law review, 1972, p. 450 et Should tree have standing ? And other essays on law, morals and environment, Oceana Publications, New York, 1996, 181 p.
[7] C. Larssen, B. Jadot, La convention d’Aarhus, dans L’accès à la justice en matière d’environnement, Bruylant, 2005, p. 219
[8] Article 9-1 : « Chaque Partie veille, dans le cadre de sa législation nationale, à ce que toute personne qui estime que la demande d’informations qu’elle a présentée en application de l’article 4 a été ignorée, rejetée abusivement, en totalité ou en partie, ou insuffisamment prise en compte ou qu’elle n’a pas été traitée conformément aux dispositions de cet article, ait la possibilité de former un recours devant une instance judiciaire ou un autre organe indépendant et impartial établi par la loi ».
[9] Article 9-2 : « Chaque Partie veille, dans le cadre de sa législation nationale, à ce que les membres du public concerné a) ayant un intérêt suffisant pour agir ou, sinon, b) faisant valoir une atteinte à un droit, lorsque le code de procédure administrative d’une Partie pose une telle condition, puissent former un recours devant une instance judiciaire et/ou un autre organe indépendant et impartial établi par loi pour contester la légalité, quant au fond et à la procédure, de toute décision, tout acte ou toute omission tombant sous le coup des dispositions de l’article 6 et, si le droit interne le prévoit et sans préjudice du paragraphe 3 ci-après, des autres dispositions pertinentes de la présente Convention ».
[10] Règlement n°1367/2006 du 6 septembre 2006 concernant l’application aux institutions et organes de la Communauté européenne des dispositions de la convention d’Aarhus sur l’accès à l’information, la participation du public au processus décisionnel et l’accès à la justice en matière d’environnement, JOCE du 25/9/2006 n° L 264, p. 13.
[11] En effet, l’article 9, paragraphe 3, de la convention d’Aarhus prévoit que chaque partie veille à prévoir des procédures administratives ou judiciaires pour contester les actes ou omissions de particuliers ou d’autorités publiques allant à l’encontre des dispositions du droit national de l’environnement. Il ressort du libellé de cette stipulation que les parties contractantes disposent d’une large marge d’appréciation quant à la définition des modalités de mise en œuvre desdites procédures ce que la Cour a déjà rappelé : arrêt du 3 septembre 2020, Mellifera/Commission, C‑784/18 P, EU:C:2020:630, point 88. Dans l’Union, le choix s’est porté en faveur de la création d’une procédure administrative.
[12] Article 11 §1 : « Une organisation non gouvernementale est habilitée à introduire une demande de réexamen interne conformément à l’article 10, à condition que: cette organisation soit une personne morale indépendante et sans but lucratif en vertu du droit ou de la pratique nationaux d’un État membre ; que cette organisation ait pour objectif premier déclaré de promouvoir la protection de l’environnement dans le cadre du droit de l’environnement ; que cette organisation existe depuis plus de deux ans et l’objet de la demande de réexamen interne introduite par cette organisation s’inscrive dans son objectif et ses activités ».
[13] Le règlement ne limite pas la possibilité du réexamen aux seules institutions européennes, une telle demande peut être faite auprès de tout organe ou organisme de l’Union.
[14] Règlement (UE) 2021/1767 du Parlement européen et du Conseil du 6 octobre 2021 modifiant le règlement (CE) no 1367/2006 concernant l’application aux institutions et organes de la Communauté européenne des dispositions de la convention d’Aarhus sur l’accès à l’information, la participation du public au processus décisionnel et l’accès à la justice en matière d’environnement, JO L 356, 8.10.2021, p. 1–7.
[15] Une autre modification est enregistrée à propos des délais (étendus) de la procédure : Les demandes peuvent être introduites dans un délai n’excédant pas 8 (au lieu de 6) semaines à compter de la date à laquelle l’acte administratif a été adopté, notifié ou publié, la plus récente de ces dates étant retenue, ou, en cas d’allégation d’omission administrative, huit semaines à compter de la date à laquelle l’acte administratif était censé avoir été adopté. L’institution ou organe de l’Union motive puis agit en tout état de cause dans un délai de 16 à 22 semaines (au lieu de 12 à 18 semaines) à compter de l’expiration du délai de huit semaines.
[16] Pt. VI de la Décision I/7 : « un ou plusieurs membres peuvent adresser au Comité des communications concernant le respect par cette Partie des dispositions de la Convention ».
[17] Projet de décision du Comité d’examen du respect des dispositions de la Convention d’Aarhus concernant l’Union européenne n° ACCC/C/2008/32 adoptée le 17 mars 2017.
[18] Le Comité a également examiné le nouvel (issu du traité de Lisbonne) article 263, quatrième alinéa, du TFUE relatif au recours en annulation et à la possibilité pour toute personne physique et morale de faire un recours à l’encontre aux actes réglementaires qui concernent directement la personne et qui ne comportent pas de mesures d’exécution. Le Comité a estimé que l’interprétation par la CJUE était excessivement restrictive (pt 79).
[19] Voir les points 124 à 126 des conclusions.
[20] Il faut dire que l’absence de conformité n’a pas pu se déployer devant la Cour car celle-ci a refusé d’admettre l’invocabilité directe de la Convention d’Aarhus ce qui a anesthésié son effet en droit de l’Union : CJUE, 13 janvier 2015, Conseil de l’Union européenne e.a. / Vereniging Milieudefensie et Stichting Stop Luchtverontreiniging Utrecht, C‑401/12 P à C‑403/12 P, EU:C:2015:4, pt. 61. Pour un rappel récent : Trib., 15 décembre 2021, Stichting Comité N 65 Ondergronds Helvoirt contre Commission européenne, Aff. T-569/20, ECLI: ECLI:EU:T:2021:892.
[21] On rappellera que les Parties à la Convention ont, dès leur première réunion, décidé de créer le Comité d’examen du respect de la Convention : Décision I/7 « Examen du respect des dispositions » adoptée à la première réunion des Parties les 21 au 23 octobre 2002. Les parties contractantes à la Convention se réunissent tous les 4 ans et l’un des points permanents à l’ordre du jour concerne le respect de la convention par les parties qui doit être, selon l’article 15 de la Convention, évalué par la réunion des Parties. Les conclusions du Comité sont soumises à l’approbation de la réunion des parties (art. 27 de la décision I/7) et si elles sont approuvées (par consensus ou, à défaut à la majorité des ¾), elles obtiennent le statut d’interprétation officielle de la Convention et, partant, deviennent contraignantes pour les Parties et organes de la Convention. Pour plus d’informations sur ce comité, voir V. Koester, « Review of Compliance under the Aarhus Convention : a rather Unique Compliance Mechanism », Journal for European Environmental and Planning Law, vol. 2, n° 1 (JEEPL 1/2005). Voir aussi V. Koester, « Le comité d’examen du respect des dispositions de la Convention d’Aarhus : un panorama des procédures et de la jurisprudence », REDE, 2007, p. 251. 36.
[22] À la suite de cette décision, à l’occasion de l’adoption de la décision du comité d’examen par les Etats parties à la Convention (lors de la sixième session de la réunion des Parties du 11 au 13 septembre 2017), l’opposition de l’Union a été forte (Voir par exemple, la proposition de décision du Conseil relative à la proposition à prendre, au nom de l’Union européenne, lors de la 6ième session de la réunion des parties à la convention d’Aarhus sur une affaire ayant trait au respect des dispositions (ACCC/C/2008/32), COM (2017) 366 final.). La conséquence d’une telle mobilisation est que la proposition d’approbation de la décision du comité d’examen n’a pas réussi à réunir le consensus lors de la dernière réunion des Parties à la Convention. Il a été convenu de créer un groupe informel pour continuer la discussion et de reporter la discussion à une prochaine réunion des Parties. La septième réunion des Parties qui a eu lieu du 18 au 20 octobre 2021 a permis de clore le dossier : voir la Décision VII/8f sur le respect par l’Union européenne des obligations que lui impose la Convention « (…) l’accord relatif à la révision du règlement Aarhus conclu le 12 juillet 202111 par les colégislateurs, s’il est adopté (…), remplirait les conditions énoncées au paragraphe 123 des conclusions du Comité sur la communication ACCC/C/2008/32 ».
[23] Le Parlement européen a, à l’occasion de l’adoption de sa résolution sur l’examen de la mise en œuvre de la politique environnementale, invité la Commission à soumettre « une nouvelle proposition législative de révision du règlement Aarhus relatif à l’application de la convention en ce qui concerne l’action de l’Union afin de tenir compte de la récente recommandation du comité d’examen du respect des dispositions de la convention d’Aarhus » (Résolution du Parlement européen du 16 novembre 2017 sur l’examen de la mise en œuvre de la politique environnementale de l’Union européenne (2017/2705(RSP)), pt 26). Il a été suivi par le Conseil qui a demandé à la Commission de produire, d’ici le 30 septembre 2019, une étude sur les moyens dont dispose l’Union pour répondre aux conclusions du comité d’examen d’une manière qui soit compatible avec les principes fondamentaux de l’ordre juridique de l’Union et avec son système de contrôle juridictionnel « en particulier en élargissant la catégorie des actes de l’Union pouvant faire l’objet d’une demande d’examen interne » et, « s’il s’avère opportun » de préparer une proposition modifiant le règlement d’ici le 30 septembre 2020 (Décision (UE) 2018/881 DU CONSEIL du 18 juin 2018 invitant la Commission à soumettre une étude sur les moyens dont dispose l’Union pour répondre aux conclusions du comité d’examen du respect des dispositions de la convention d’Aarhus dans l’affaire ACCC/C/2008/32 et, le cas échéant pour tenir compte des résultats de l’étude, une proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil modifiant le règlement (CE) no 1367/2006, JOUE L 155 du 19.6.2018, p. 6–7).
[24] Selon l’article 2 § 4 de la Convention, « le terme « public » désigne une ou plusieurs personnes physiques ou morales et, conformément à la législation ou à la coutume du pays, les associations, organisations ou groupes constitués par ces personnes».
[25] Article 2 du règlement.
[26] Ces conditions sont greffées à celles prévues pour les ONG puisqu’il est ajouté un article 11-1 bis qui les listent.
[27] Considérant 21 du règlement.
[28] Article 11 -1 bis a). Selon le considérant 18, pour démontrer une atteinte à leurs droits, les membres du public doivent prouver la violation de ces droits qui peut « prendre la forme d’une restriction ou d’un obstacle injustifié à l’exercice desdits droits ».
[29] Considérant 20. L’article 11-1 bis b) prévoit des seuils : au moins 4 000 membres du public qui résident ou sont établis dans au moins 5 États membres et avec au moins 250 membres du public proviennent de chacun de ces États membres.
[30] Considérant 19 du règlement.
[31] Considérant 18 du règlement.
[32] Décision d’exécution 2012/347/UE, du 28 juin 2012 autorisant la mise sur le marché de produits contenant du soja modifié (MON 87701 x MON 89788), consistant en ce soja ou produits à partir de celui-ci, à l’exception de la culture, JOCE 2012, L 171, p. 13.
[33] Trib. UE, 15 décembre 2016, TestBioTech et a. / Commission, Aff. T-177/13.
[34] Trib., 27 janvier 2021, ClientEarth contre Banque européenne d’investissement, Aff. T-9/19, ECLI: ECLI:EU:T:2021:42, pt 125 : « il résulte du libellé et de l’économie de l’article 9, paragraphes 3 et 4, de la convention d’Aarhus, au regard duquel le règlement Aarhus doit, dans la mesure du possible, être interprété (…) que tous les actes d’autorités publiques allant à l’encontre des dispositions du droit de l’environnement devraient pouvoir être contestés. Ainsi, il n’y a pas lieu de limiter l’accès à la justice en matière d’environnement aux seuls actes d’autorités publiques qui auraient formellement pour base juridique une disposition du droit de l’environnement ».
[35] Article 1 du règlement.
[36] Considérant 10 du règlement.
[37] Voir l’article 2, paragraphe 2, de la Convention.
[38] Les points d’incompatibilité relevés concernent aussi (Voir les pts. 85-121 des conclusions) le champ d’application rationae personae de la procédure de réexamen (qui devrait être accessible, au-delà des ONG, aux membres du public) et le champ d’application rationae materiae (puisque la procédure devrait valoir pour tout acte administratif dès qu’il est « relatif » à l’environnement (par ex. qui y porte atteinte) et pas seulement les actes « au titre du droit de l’environnement » ainsi que pour tout acte y compris s’il ne produit pas d’effet juridiquement contraignant et extérieur).
[39] Pt. 51 : « En particulier, le Comité souscrit à l’analyse du Tribunal selon laquelle «il n’y a aucune raison d’interpréter la notion d’actes” au paragraphe 3 de l’article 9 de la Convention comme couvrant seulement les actes de portée individuelle » et «il n’existe pas de corrélation entre les actes de portée générale et ceux pris par une autorité publique dans l’exercice de son pouvoir judiciaire ou législatif ».
[40] Pour des exemples de rejet confirmé par le juge. Voir Trib. UE, 17 juillet 2015, European Environmental Bureau (EEB) contre Commission européenne, Aff. T-685/14, Rec. II p. 560 : une décision de la Commission d’approbation concernant la notification par la Bulgarie d’un plan national pour les installations de combustions dans le cadre la directive 2010/75/UE relative aux émissions industrielles n’est pas une mesure individuelle. La directive 2010/75 étant un acte de portée générale dans la mesure où elle établit un régime général en matière de limitation de la pollution due aux activités industrielles, la décision qui n’émet aucune objection à l’égard d’un tel régime, participe au caractère général de cette directive. Voir également Tribunal, 27 septembre 2018, Mellifera eV contre Commission européenne, Affaire T-12/17, ECLI: ECLI:EU:T:2018:616. Puis CJUE, 3 septembre 2020, Mellifera eV contre Commission européenne, Affaire C-784/18 P, ECLI: ECLI:EU:C:2020:630.
Selon le Tribunal, confirmé par la Cour, à la différence des autorisations de mise sur le marché de produits phytopharmaceutiques, l’approbation d’une substance active « ne produit pas seulement des effets juridiques à l’égard de la personne qui a demandé cette approbation, mais également à l’égard de tout opérateur dont les activités requièrent cette approbation, en particulier des producteurs de produits phytopharmaceutiques qui contiennent cette substance et de toute autorité publique compétente, notamment les autorités publiques des États membres qui ont la charge de l’autorisation de ces produits » (pt 60 de l’arrêt du Tribunal et pt 68 de l’arrêt de la Cour). Il s’agit donc de mesure de portée générale qui, par conséquent, est de ce fait insusceptible de réexamen interne.
[41] Considérant 8 du règlement.
[42] On notera que la formulation a, sur ce point, changé car l’acte ne doit plus avoir « un effet juridiquement contraignant et extérieur » mais « un effet juridique et extérieur ». Toutefois, si la formulation se modifie ce qui est exigé demeure identique ainsi qu’en atteste le considérant 11 qui souligne qu’ « un acte est considéré comme ayant des effets extérieurs, et donc susceptible de faire l’objet d’une demande de réexamen, s’il est destiné à produire des effets juridiques à l’égard des tiers » ce qui est déjà ce qui était exigé sous l’empire du règlement dans sa version initiale : voir Trib., 27 janvier 2021, ClientEarth contre Banque européenne d’investissement, Aff. T-9/19, ECLI: ECLI:EU:T:2021:42, pts 152 et 153. C’est en l’espèce le cas d’une délibération du conseil d’administration de la BEI, du 12 avril 2018, approuvant le financement d’un projet de centrale électrique biomasse en Galice (Espagne).
[43] Proposition de règlement modifiant le règlement (CE) nº 1367/2006 du Parlement européen et du Conseil du 6 septembre 2006 concernant l’application aux institutions et organes de la Communauté européenne des dispositions de la convention d’Aarhus sur l’accès à l’information, la participation du public au processus décisionnel et l’accès à la justice en matière d’environnement, COM/2020/642 final.
[44] Tribunal, 15 décembre 2021, Stichting Comité N 65 Ondergronds Helvoirt contre Commission européenne, Affaire T-569/20, ECLI: ECLI:EU:T:2021:892.
[45] Pt 47.
[46] Voir les points 106 à 112 de ses conclusions.
[47] Article 2-2 de la Convention : « l’expression « autorité publique » désigne (…) La présente définition n’englobe pas les organes ou institutions agissant dans l’exercice de pouvoirs judiciaires ou législatifs ».
[48] Le droit pour les ONG de demander l’ouverture d’une procédure formelle d’examen par la Commission d’une aide présumée illégale conformément au règlement n° 659/1999 n’est pas une procédure suffisante car elle est loin d’attribuer un droit de contester. Par ailleurs, l’article 263 §4 TFUE n’est disponible que dans des conditions strictes qu’il semble difficile de remplir (voir la conclusion).
[49] Proposition du 3.9.2021 de décision du Conseil relative à la proposition à prendre, au nom de l’Union européenne, lors de la septième session de la réunion des parties à la Convention d’Aarhus sur les affaires ayant trait au respect des dispositions ACCC/C/2008/32 et ACCC/C/2015/128, COM (2021)532 final.
[50] Tribunal, 15 décembre 2021, Stichting Comité N 65 Ondergronds Helvoirt contre Commission européenne, Affaire T-569/20, ECLI: ECLI:EU:T:2021:892, pt 59. Voir aussi l’avocat général Szpunar dans l’affaire TestBioTech e.a./Commission, C‑82/17 P, EU:C:2018:837, point 36.
[51] Le dernier en date : CJUE, 3 septembre 2020, Mellifera eV contre Commission européenne, Affaire C-784/18 P, ECLI: ECLI:EU:C:2020:630.
[52] CJUE, 12 septembre 2019, TestBioTech/Commission européenne, C-82/17 P, ECLI:EU:C:2019:719 et CJUE, 6 octobre 2021, ClientEarth contre Commission européenne, Affaire C-458/19 P, ECLI: ECLI:EU:C:2021:802.
[53] Voir précédemment : Trib. UE, 15 décembre 2016, TestBioTech et a. / Commission, Aff. T-177/13. « Le fait qu’une institution ou un organe de l’Union procède à la modification, à la suspension, au retrait ou à la révocation d’un de ses actes antérieurement adoptés ne peut pas être considéré comme élargissant la portée des conditions de recevabilité d’un recours en annulation introduit en vertu de l’article 263, quatrième alinéa, TFUE à l’encontre dudit acte » (pt 46).
[54] Par son pourvoi, ClientEarth demande à la Cour l’annulation de l’arrêt du Tribunal de l’Union européenne, du 4 avril 2019, ClientEarth/Commission, (T‑108/17, EU:T:2019:215), par lequel le Tribunal avait rejeté le recours formé par ClientEarth tendant à l’annulation d’une décision de la Commission rejetant une demande de réexamen interne introduite contre la décision de la Commission, du 16 juin 2016, octroyant une autorisation pour des utilisations du phtalate de bis (2-éthylhexyle) (DEHP) au titre du règlement (CE) no 1907/2006 du Parlement européen et du Conseil, du 18 décembre 2006, concernant l’enregistrement, l’évaluation et l’autorisation des substances chimiques, ainsi que les restrictions applicables à ces substances (REACH) (JO 2006, L 396, p. 1). Trib., 4 avril 2019, ClientEarth contre Commission européenne, Aff.T-108/17, ECLI: ECLI:EU:T:2019:215 ; CJUE, 6 octobre 2021, ClientEarth contre Commission européenne, Aff.C-458/19 P, ECLI: ECLI:EU:C:2021:802, pt 49 : « seuls les moyens tendant à démontrer des erreurs de droit ou d’appréciation entachant d’illégalité la décision de réexamen et non ceux visant l’acte de base (ici une décision d’autorisation) peuvent être considérés comme recevables ».
[55] Trib. UE, 15 décembre 2016, TestBioTech et a. / Commission, Aff. T-177/13.
[56] Pt. 56 de l’arrêt.
[57] Voir le pt 50 de l’arrêt du 6 octobre 2021, ClientEarth contre Commission européenne, Aff.C-458/19 P, ECLI: ECLI:EU:C:2021:802. Seuls les moyens tendant à démontrer des erreurs de droit ou d’appréciation entachant d’illégalité la décision de la Commission de rejet du réexamen et non ceux visant la demande d’autorisation étaient recevables. Mais peuvent être contestés « non pas que seuls les éléments repris expressément » dans la décision de la Commission sur la demande de réexamen interne » mais toutes « les erreurs entachant cette décision ».
[58] CJUE, 12 septembre 2019, TestBioTech/Commission, C-82/17 P, ECLI:EU:C:2019:719, Les motifs avancés dans le cadre de la demande de réexamen doivent, en fait ou en droit, permettre « de fonder des doutes plausibles, à savoir substantiels, quant à l’appréciation portée par l’institution ou l’organe de l’Union » (pt 69). Et « un tel recours ne saurait être fondé sur des motifs nouveaux ou des éléments de preuve qui n’apparaissaient pas dans la demande de réexamen, sous peine de priver l’exigence relative à la motivation d’une telle demande, figurant à l’article 10, paragraphe 1, du règlement no 1367/2006, de son effet utile et de modifier l’objet de la procédure engagée par cette demande » (pt 39).
[59] Considérant 15 du nouveau règlement.
[60] C’est ce qu’avançait ClientEarth dans l’affaire C-458/19. L’Avocate générale avait proposé d’admettre de tels nouveaux arguments. La Cour ne répond pas de manière définitive en soulignant qu’ en l’espèce le Tribunal avait, en tout état de cause, constaté, à titre subsidiaire, le caractère infondé des arguments de la requérante, sans que cette appréciation au fond ait été contestée dans le présent pourvoi (pt 51).
[61] Tribunal, 8 avril 2021, Comité de recherche et d’information indépendantes sur le génie génétique (CRII-GEN) e.a. contre Commission européenne, Aff. T-496/20, ECLI:EU:T:2021:179.
[62] Les conditions d’ouverture du recours en annulation sont prévues à l’article 263 du TFUE (et applicables à l’article 265 du TFUE sur le recours en carence). En effet, en vertu de cette disposition, lorsque l’acte visé n’est pas un acte dont le requérant privé est le destinataire, alors, il doit démontrer qu’il est affecté de manière directe et individuelle (lorsqu’il s’agit d’un acte législatif) et de manière directe (sans qu’il n’y ait de mesure d’exécution) (lorsqu’il s’agit d’un acte réglementaire).
[63] Un point d’étape avait été fait dans cette même revue il y a peu : E. Brosset et E. Truilhé, L’accès au juge dans le domaine de l’environnement : le hiatus du droit de l’Union, RDLF, 2018, chronique n°7.
[64] Editorial Comment : Access to Justice in the EU legal order : Fit for purpose ? 20 décember 2021, https://eulawlive.com/tag/editorial-comments/ : “It is certainly time to move in certain areas. Giving voice in court to both collective and individual interests in cases of unquestionable common and inter-generational concern, might be a good starting point”.
[65] Projet de décision du Comité d’examen du respect des dispositions de la Convention d’Aarhus concernant l’Union européenne n° ACCC/C/2008/32 adoptée le 17 mars 2017.
[66] Voir les pts. 60 à 84 des conclusions du Comité.
[67] Pt. 79 des conclusions du Comité.
[68] CJCE 15 juill. 1963, Plaumann & Co. c/ Commission, aff. 25-62, Rec. CJCE 199.
[69] Ces particuliers appartenaient à des familles de divers pays de l’Union européenne (Allemagne, France, Italie, Portugal, Roumanie) et du reste du monde (Kenya, Fidji) (ainsi qu’une association de droit suédois représentant de jeunes autochtones Samis) et opéraient tous dans les secteurs de l’agriculture ou du tourisme et étaient tous affectés, dans leurs activités, mais également parfois, dans leur santé, par les conséquences du changement climatique.
[70] Directive 2018/410 du 14 mars 2018, modifiant la directive EU-ETS, JOUE 2018, L. 76, p. 3 ; règlement 2018/842 du 30 mai 2018, relatif aux réductions annuelles contraignantes des émissions de gaz à effet de serre (GES) par les États membres de 2021 à 2030 (hors secteur EU-ETS) JOUE 2018, L. 156, p. 26 et règlement 2018/841 du 30 mai 2018, relatif à la prise en compte des émissions et des absorptions résultant de l’utilisation des terres, du changement d’affectation des terres et de la foresterie, JOUE 2018, L. 156, p. 1. Les requérants arguaient que les objectifs de l’Union de réduction des émissions d’au moins 40 % d’ici à 2030 par rapport aux niveaux de 1990 étaient insuffisants non seulement pour respecter l’Accord de Paris mais aussi garantir leurs droits fondamentaux à la vie, à la santé et à la propriété.
[71] Ordonnance du Tribunal du 8 mai 2019, Armando Carvalho c/ Parlement européen et Conseil de l’Union européenne, aff. T-330/18, EU:T:2019:324.
[72] CJUE, 25 mars 2021, Armando Carvalho contre Parlement européen et Conseil de l’Union européenne, Affaire C-565/19 P, ECLI: ECLI:EU:C:2021:252.
[73] Ibidem, pt 39.
[74] Ibidem, pt 40.
[75] Ibidem, pt 48.
[76] CJUE, 28 avril 2015, T & L Sugars et Sidul Açúcares contre Commission, C‑456/13 P, EU:C:2015:284, pts 41 et 42.
[77] Pour un exemple voir : CJUE, 16 mai 2019, Asociación de la pesca y acuicultura del entorno de Doñana y del Bajo Guadalquívir (Pebagua) contre Commission, Affaire C-204/18 P, ECLI: ECLI:EU:C:2019:425 : il s’agissait recours tendant à l’annulation du règlement d’exécution (UE) 2016/1141 de la Commission, du 13 juillet 2016, adoptant une liste des espèces exotiques envahissantes préoccupantes pour l’Union conformément au règlement (UE) nº 1143/2014 du Parlement européen et du Conseil (JO 2016, L 189, p. 4).Pt 61 : « Il s’ensuit que le Tribunal n’a pas commis d’erreur de droit en constatant, en substance, aux points 43 à 45 de l’ordonnance attaquée, que les conséquences spécifiques et concrètes de l’inscription, par le règlement d’exécution, de l’espèce Procambarus clarkii sur la liste de l’Union ne se matérialiseraient à l’égard des membres de Pebagua qu’en vertu des mesures d’exécution nationales, dont l’existence est par ailleurs confirmée par l’adoption de l’arrêté du 3 août 2016 ».
[78] De jurisprudence constante, la Cour considère qu’il y a lieu, aux fins d’apprécier le point de savoir si un acte réglementaire comporte des mesures d’exécution, de s’attacher à la position de la personne invoquant le droit de recours et qu’il est donc sans pertinence de savoir si l’acte en question comporte des mesures d’exécution à l’égard d’autres justiciables (arrêt du 28 avril 2015, T & L Sugars et Sidul Açúcares/Commission, C‑456/13 P, EU:C:2015:284, pt 32)
[79] CJUE, 28 octobre 2020, Associazione GranoSalus contre Commission européenne, Affaire C-313/19 P, ECLI: ECLI:EU:C:2020:869. En l’espèce la Cour considère que les renouvellements des autorisations de mise sur le marché de produits phytopharmaceutiques ne constituent pas, à l’égard des membres de l’association GranoSalus, des mesures d’exécution du règlement litigieux (pt 43). Toutefois, elle considère que les membres de GranoSalus ne sont pas directement concernés par le règlement litigieux et que, pour cette raison, le recours introduit doit être considéré comme irrecevable (pt 52).
[80] CJUE, 13 janvier 2022, République fédérale d’Allemagne e.a. contre Commission européenne, Affaires jointes C-177/19 P à C-179/19 P, ECLI: ECLI:EU:C:2022:10. Le Tribunal a commis une erreur de droit en considérant que l’article 4 § 3 (« les États membres ne peuvent interdire, restreindre ou entraver l’immatriculation, la vente, la mise en service ou la circulation sur route de véhicules (…) pour des motifs liés à des aspects de leur construction et de leur fonctionnement couverts par la présente directive, s’ils répondent aux exigences de celle-ci ») de la directive 2007/46 (directive du 5 septembre 2007 établissant un cadre pour la réception des véhicules à moteur, JO 2007, L 263, p. 1) empêche les villes défenderesses d’exercer leurs compétences de réglementer la circulation des véhicules particuliers comme elles l’entendent afin de réduire la pollution et en admettant, sur ce fondement, qu’elles étaient directement concernées au sens de l’article 263 § 4 TFUE. Ce faisant, pour reprendre les mots de l’Avocat général Bobek, elle retient une approche « extrêmement formaliste, pour ne pas dire cynique », des incidences sur la situation des défenderesses entendues uniquement comme intégrant les incidences juridiques (et non pas de fait) et ce alors même « qu’il est loin d’être simple de savoir où s’arrête ce qui est juridique et où commence ce qui est factuel notamment dans des cas de figure tels que celui en cause en l’espèce » (pts 99 et 100 des conclusions de l’Avocat général M. Bobek présentées le 10 juin 2021, aff. jtes C-177/19 P, C-178/19 P et C-179/19 P.)
[81] Tribunal, 13 décembre 2018, Ville de Paris, Ville de Bruxelles et Ayuntamiento de Madrid contre Commission européenne, Affaires jointes T-339/16, T-352/16 et T-391/16, ECLI: ECLI:EU:T:2018:927. Le tribunal admettait d’ailleurs que « si toutes les décisions de mise en œuvre, notamment celles qui sont « répressives » ou « négatives » visant à sanctionner le non-respect d’un acte réglementaire, devaient aussi être considérées comme des mesures d’exécution, l’introduction dans le traité FUE de la troisième hypothèse de l’article 263, quatrième alinéa, serait souvent privée de portée » (pt 40).