Vivre ensemble en sécurité : comment améliorer la confiance entre les forces de sécurité intérieure et la population ?
Dans une société démocratique, la confiance entre la population et les forces de sécurité intérieure est à la fois un fondement du vivre-ensemble et un indicateur de la légitimité de l’État. Or, cette confiance semble aujourd’hui vaciller, fragilisée par des tensions récurrentes, des pratiques contestées et un modèle policier historiquement centré sur la préservation de l’ordre plutôt que sur le service aux citoyens. À partir d’une analyse croisée juridique, sociologique et politique, cet article interroge les ressorts de cette défiance et les leviers d’un renouveau.
I. Les facteurs d’une confiance éclipsée
A. Une notion de confiance au croisement de regards sociologiques, juridiques et politiques
B. Une production de confiance entre complexité juridique et relativisation théorique
II. Les vecteurs d’une confiance renouvelée
A. La coproduction du service public de la sécurité : vers une gouvernance partagée
B. La revalorisation du lien police/population par les logiques de proximité et de légitimité
Par Marc Guerrini, Professeur à l’Université Côte d’Azur, CERDACFF
Comme le rappelle Fabien Jobard, c’est au cours d’une manifestation place Beauvau contre des violences commises par la police sur le journaliste Alain Jaubert en 1972 que Jean-Paul Sartre qualifiait les rapports de la police et de l’État de la manière suivante : « L’État n’est pas fasciste, mais sa police l’est déjà »[1]. Ce slogan constitue une interpellation radicale sur la nature de la police au sein des démocraties. Elle suggère que l’État peut demeurer démocratique dans son architecture institutionnelle, tout en tolérant des comportements policiers qui en violent les principes. La critique est donc d’autant plus virulente qu’elle vise à révéler un hiatus entre l’État de droit proclamé et une réalité policière vécue, marquée par l’arbitraire. Une telle dissonance heurte l’esprit du juriste dans la mesure la force publique s’inscrit au cœur même de l’État de droit qui établit un lien indissociable entre la garantie des droits et l’aménagement d’une telle force à l’article 12 de la Déclaration des droits de 1789. Ce dernier dispose en ce sens que « la garantie des droits de l’Homme et du Citoyen nécessite une force publique : cette force est donc instituée pour l’avantage de tous, et non pour l’utilité particulière de ceux auxquels elle est confiée »[2]. La portée symbolique et juridique d’une telle disposition a régulièrement conduit à s’interroger sur l’existence d’un droit fondamental à la sécurité[3] en s’entendant toujours, quelle que soit la réponse apportée à cette question, sur le fait qu’il s’agit d’une « exigence sociale toujours plus importante »[4].
En effet, la question de la confiance entre les forces de sécurité intérieure (comprenant la police nationale, la gendarmerie et la police municipale) et la population constitue aujourd’hui un enjeu central pour nos sociétés. Dans l’ensemble des ordres juridiques démocratiques, cette confiance est à la fois une condition et un reflet du vivre-ensemble : elle témoigne de la capacité des institutions à incarner l’autorité légitime tout en garantissant le respect des droits fondamentaux. Pourtant, cette confiance semble fragilisée. Un tel phénomène questionne la légitimité même de l’État car, comme le relève le sociologue Alexis Spire, « la caractéristique des États modernes est d’asseoir leur autorité autrement que par la force, en puisant leur légitimité sur une domination rationnelle légale. Dans cette perspective, la relation de confiance est ce qui permet de faire accepter des décisions qui sont prises au nom de l’intérêt général »[5]. Or, de nombreuses recherches convergent aujourd’hui pour diagnostiquer une crise profonde de légitimité et d’efficacité traversée par la police française[6]. Cette crise se manifeste à travers une série d’indicateurs symptomatiques, parmi lesquels figurent la hausse significative des plaintes déposées contre les forces de l’ordre, l’augmentation des infractions telles que les outrages et rébellions, ainsi que la fréquence accrue des incidents opposant la police à des jeunes issus des quartiers défavorisés. Ces interactions conflictuelles dégénèrent parfois en épisodes d’émeutes urbaines, révélant une perte d’autorité perçue comme légitime et une détérioration manifeste du lien police/population. Cette défiance structurelle est également nourrie par une contestation croissante des pratiques policières émanant des mouvements sociaux, qui dénoncent les abus, les violences illégitimes ou encore les discriminations systémiques. Dans son avis de février 2021 sur les rapports entre police et population, la Commission nationale consultative des droits de l’homme relève dans le prolongement que la relation entre la police et la population constitue aujourd’hui un enjeu politique et social majeur, tant en raison de la fragilisation du lien de confiance que des tensions croissantes qui la traversent[7]. Les enquêtes d’opinion, malgré certaines controverses méthodologiques, mettent également en évidence une confiance fluctuante des Français envers leur police, avec des résultats nettement moins favorables en comparaison européenne. Elles relèvent aussi que sur le plan juridique, la situation française est préoccupante : la Cour européenne des droits de l’homme a condamné à plusieurs reprises l’État pour des violations du droit à la vie ou à l’intégrité physique liées à l’usage excessif de la force, ou pour des enquêtes jugées insuffisantes[8]. Cette situation est d’autant plus critique que les policiers, dépositaires du monopole de la violence légitime, incarnent directement l’autorité publique aux yeux des citoyens. Leurs agissements peuvent affecter non seulement la responsabilité de l’État, mais surtout entamer plus profondément la légitimité des institutions républicaines. Si d’autres démocraties sont également confrontées à une crise de confiance entre la police et la population, la situation française semble se singulariser par son intensité et par la persistance d’un modèle institutionnel historiquement centré sur la protection de l’État, plus que sur l’écoute des citoyens. Ce décalage semble nourrir une défiance durable, qui appelle une transformation en profondeur des relations entre forces de sécurité intérieure et société civile.
Toute question portant sur la confiance doit nécessairement s’appuyer sur une forme de modélisation afin de déterminer si la réalisation d’un modèle particulier s’avère propre ou impropre à générer une telle confiance. Olivier Renaudie a expliqué notamment dans les colonnes de la Revue générale du droit que le modèle français de police s’est longtemps distingué par une structuration historique, institutionnelle et juridique fondamentalement tournée vers la protection de l’État, plus que vers celle des citoyens[9]. Cette spécificité s’oppose notamment aux modèles anglo-saxons, davantage fondés sur l’idée d’un service rendu à la population. La police n’est pas conçue comme un service à destination directe des citoyens. Les citoyens ne sont donc pas « usagers » de la police au sens classique, mais bénéficiaires indirects de son action. Ce n’est que depuis les années 1980-1990 que des réformes successives tentent de modifier cette logique conduisant à des efforts de transformation faisant du modèle français un modèle en transition. Par ailleurs, la doctrine du maintien de l’ordre à la française, longtemps perçue comme un modèle équilibré reposant sur la spécialisation des forces, la mise à distance physique des manifestants et la stricte gradation de l’usage de la force, a connu ces dernières années une inflexion substantielle qui aurait profondément altéré la relation de confiance entre la population et les forces de sécurité. Ce modèle s’est historiquement construit sur une approche libérale du droit de manifester, où les rassemblements déclarés bénéficient d’une présomption de légitimité, et sont encadrés par des unités spécialisées, formées à l’usage proportionné de la force et à la gestion des foules. La doctrine privilégiait ainsi la prévention du contact direct avec les manifestants et une logique de désescalade, visant à préserver à la fois l’ordre public et la liberté de manifester. Or, à partir des années 2010, et plus encore avec les mobilisations des Gilets jaunes, cette doctrine a été progressivement infléchie, dans un contexte marqué par la montée de la conflictualité sociale, l’affaiblissement des corps intermédiaires et la radicalisation d’une partie des manifestants. Parallèlement, la surmédiatisation des événements, amplifiée par les réseaux sociaux et les chaînes d’information continue, a accentué la visibilité des violences, qu’elles soient policières ou manifestantes. Ainsi, l’inflexion de la doctrine du maintien de l’ordre à la française, bien qu’opérée en réponse à des contextes sociaux inédits, semble avoir eu pour effet paradoxal d’exacerber la défiance citoyenne, plutôt que de rétablir la paix sociale[10]. Le droit comparé illustre toute l’importance du modèle et de la conception d’une doctrine en la matière. Par exemple, la moindre crise de légitimité de la police allemande ne tient pas à une absence de difficultés, mais à une configuration d’ensemble plus favorable à la construction d’une confiance durable entre les forces de sécurité et la population. Cela est notamment lié au fait que la doctrine d’action policière en Allemagne repose sur une approche préventive et collaborative[11].
Il ne s’agit pas ici d’examiner les responsabilités individuelles, mais bien de questionner les mécanismes structurels qui président à la production de la sécurité dans un État de droit. La défiance à l’égard des forces de sécurité n’est pas un phénomène nouveau, mais elle interroge dans un contexte où le lien social se fragilise et où les normes de la démocratie libérale sont, à certains égards, remises en cause. Le rétablissement de cette confiance ne peut dès lors se penser qu’à l’aune d’une analyse croisée, à la fois juridique, sociologique et politique, de ce que signifie garantir la sécurité tout en consolidant le contrat social. De ce point de vue, la confiance est déterminante dans le concept de vivre-ensemble. Il s’agit, en science sociale, d’une « variable molle » qui, selon les termes du politiste Sebastian Roché « intéresse par ses propriétés fonctionnelles pour ‘‘faire société’’ : elle forme dans les individus des anticipations favorables vis-à-vis des actions ou intentions prêtées à autrui, et ainsi favorise la prise de risque (inhérente au fait de confier son sort à autrui), la coopération et l’ordre social »[12]. En ce sens, interroger la manière dont la sécurité intérieure peut être exercée dans un cadre respectueux du vivre-ensemble revient à dépasser les oppositions simplistes entre sécurité et libertés, pour envisager des modèles de gouvernance coparticipatifs, orientés vers la proximité, la responsabilité et la légitimité démocratique. Il est alors nécessaire de comprendre les ressorts de l’érosion de cette confiance afin d’en identifier les leviers de reconstruction. Dans un premier temps, il s’agira d’établir un diagnostic des facteurs ayant contribué à l’éclipse progressive de la confiance avant, dans un second temps, d’identifier les vecteurs d’un renouveau possible de cette confiance (II).
I. Les facteurs d’une confiance éclipsée
Les dernières décennies ont vu s’accentuer un malaise dans les relations entre la police et une partie de la population, nourri par des pratiques perçues comme discriminatoires, des violences dénoncées comme illégitimes, et un sentiment croissant d’injustice. Cette défiance s’inscrit dans des dynamiques sociétales et juridiques complexes, que seule une analyse croisée permet d’éclairer. À ce titre, la notion même de confiance, dans son rapport à la puissance publique, doit être revisitée à la lumière des approches sociologique, juridique et politique qui en révèlent les ressorts pluriels et parfois contradictoires (A). Mais au-delà du constat, il faut aussi interroger les conditions de production institutionnelle de cette confiance. Or, celle-ci se heurte aujourd’hui à une double difficulté : d’une part, la complexité normative qui encadre l’action policière rend souvent peu lisibles les garanties et les responsabilités ; d’autre part, le droit, censé assurer la régulation et la protection, se voit parfois relativisé dans sa portée concrète, accentuant ainsi le fossé entre l’idéal de légalité et la réalité de certaines pratiques (B). En réalité, il semble que cinq difficultés majeures affectent la problématique de la confiance dans les forces de sécurité intérieures et elles se traduisent en termes d’appréciation, d’appréhension, de juridicisation et, enfin, de relativisation.
A. Une notion de confiance au croisement de regards sociologiques, juridiques et politiques
Nous aborderons ici les deux premières difficultés qui affectent la problématique de la confiance dans les forces de sécurité intérieures, à savoir celles tenant à son appréciation et à son appréhension. S’agissant, premièrement, de son appréhension, l’expression « confiance dans la police » peut être mobilisée comme un raccourci englobant divers concepts connexes tels que la légitimité, le consentement, la coopération ou encore le respect des règles. Cette assimilation masque des distinctions pourtant essentielles, tant sur le plan empirique que conceptuel. Il apparait donc difficile de distinguer clairement la confiance proprement dite et les autres notions connexes. Deux principales approches permettent de conceptualiser la notion de confiance. La première consiste à la penser comme une relation interpersonnelle, fondée sur les attentes d’un individu quant au traitement qu’il recevra d’un agent de police donné. Elle repose sur des interactions concrètes, immédiates et subjectives. À l’inverse, une seconde conception envisage la confiance comme une attitude plus globale et abstraite à l’égard de l’institution policière dans son ensemble. Elle se traduit par une évaluation plus distanciée de l’efficacité, de l’équité et des valeurs portées par la police. Dans cette perspective, la confiance comporte plusieurs dimensions : la croyance dans l’efficacité opérationnelle, dans l’équité des pratiques et dans l’adhésion de la police à des valeurs perçues comme légitimes par la communauté[13]. Une distinction majeure est donc à opérer entre la confiance interpersonnelle, qui se construit dans l’expérience directe et ponctuelle de la rencontre avec un agent, et la confiance institutionnelle, qui reflète des attitudes plus stables et durables à l’égard de la police en tant qu’acteur du système démocratique. Tandis que la première mobilise une logique subjective à un moment donné, la seconde repose sur une perception plus diffuse du rôle et des finalités de l’institution policière. Dans le même sens, Anne Wuilleumier et Virginie Malochet relèvent que la littérature anglophone spécialisée décompose la confiance institutionnelle en deux dimensions distinctes : confidence et trust. La première renvoie à une forme de confiance abstraite ou généralisée, fondée sur la perception des compétences, de l’expertise ou du professionnalisme d’un acteur ou d’une institution. En revanche, trust désigne une confiance davantage contextualisée, façonnée par l’expérience et l’accumulation d’interactions concrètes dans un espace donné[14].
Par ailleurs, on constate des divergences dans les enquêtes d’opinion relatives à la confiance envers la police. Selon Sébastien Roché, de telles divergences s’expliquent par plusieurs facteurs d’ordre méthodologique, contextuel et sociologique[15]. Tout d’abord, la notion même de confiance est multidimensionnelle et sujette à des interprétations variables selon les instruments de mesure. Il convient ainsi de distinguer les jugements généraux, souvent positifs, qui expriment une opinion globale sur l’institution policière, des jugements spécifiques, plus critiques, qui évaluent concrètement l’efficacité des forces de l’ordre face à des problématiques précises (lutte contre la délinquance, prévention des violences, etc.). Ainsi, une large majorité peut déclarer faire confiance à la police dans l’absolu, tout en doutant de sa capacité à résoudre des problèmes concrets de sécurité. Ensuite, ces appréciations varient fortement selon le profil des personnes interrogées. Les individus peu confrontés à la police, vivant dans des zones calmes, ont tendance à exprimer une opinion favorable. À l’inverse, les jeunes issus de quartiers populaires, et plus encore ceux appartenant aux minorités visibles, manifestent une défiance marquée, souvent alimentée par des expériences directes de contrôles perçus comme abusifs ou discriminatoires. Par ailleurs, le contexte sociopolitique joue un rôle déterminant. Les périodes de crise, comme les attentats terroristes, renforcent généralement la légitimité perçue de la police. En revanche, des épisodes de gestion contestée de mouvements sociaux (comme lors de la mobilisation des Gilets jaunes) provoquent une érosion rapide et visible de la confiance. Enfin, les modalités mêmes de construction des sondages influencent les résultats. Certaines enquêtes privilégient des formulations vagues ou des indicateurs peu nuancés, qui occultent les tensions vécues sur le terrain. Ainsi, loin d’être un indicateur univoque, la « confiance » dans les forces de sécurité intérieure renvoie à une construction sociale instable, fragmentée et inégalement répartie, dont la mesure suppose une approche fine et différenciée, attentive à la diversité des expériences et des contextes. Ainsi, sans être exhaustif, ces quelques développements tirés des apports de la sociologie suffisent à souligner la très grande difficulté qu’il y a à évoquer de manière générale et non différenciée la question de la confiance dans les forces de sécurité intérieure.
Deuxièmement, à cette problématique d’appréhension, s’ajoute une problématique d’appréciation en la matière. En effet, une partie des sociologues s’est montrée particulièrement sévère à l’égard de la police française. En 2021, analysant cinq ouvrages sociologiques récents sur l’action policière en France, le sociologue du droit Thierry Delpeuch note que l’ensemble des travaux mobilisés convergent pour constater que les forces de l’ordre françaises ne satisfont pas aux exigences que l’on est en droit d’attendre d’une « bonne police » dans un régime démocratique. La spécificité du cas français réside, à cet égard et selon ces travaux, dans un triple déficit démocratique particulièrement préoccupant. Premièrement, la finalité institutionnelle de la police reste largement centrée sur la défense de l’État, plutôt que sur la protection des citoyens ou le service de la société. Cette orientation structurelle confère à l’institution une posture verticale, davantage tournée vers la préservation de l’ordre public que vers la prise en compte des besoins concrets de la population. Deuxièmement, la distance sociale et territoriale entre les forces de l’ordre et la population constitue un obstacle majeur à l’élaboration de réponses efficaces aux problématiques locales de sécurité. Ce manque de proximité nuit à l’ancrage territorial de l’action policière et alimente une défiance croissante à l’égard de l’institution. Enfin, la police française demeurerait marquée par un héritage néocolonial persistant, qui se traduit par des pratiques différenciées, voire discriminatoires, à l’encontre des minorités visibles. Cette dimension historique continuerait de peser sur les représentations, les modalités d’intervention, et les rapports entre police et population, en entretenant des logiques d’iniquité incompatibles avec les principes d’égalité et de justice[16]. Par ailleurs, certaines logiques professionnelles, notamment une vision répressive des missions, sont également critiquées en ce qu’elles nuiraient aux relations entre la police et la population[17]. Enfin, parallèlement, comme l’ont relevé Pascale Dufour, Francis Dupuis-Déri et Anaïk Purenne, on assiste « à la consolidation des études critiques sur la police, aussi connues sous le nom de ‘‘democratic policin’’, qui ont pour objectif d’évaluer la manière dont l’action de la police contribue à (re)produire des rapports de domination, à exacerber les inégalités et à limiter la participation citoyenne »[18].
Or, il est possible de critiquer en partie l’approche sociologique ici décrite. C’est notamment ce qu’ont mis en lumière, sans pour autant nier leur intérêt, Thierry Delpeuch, Jacqueline E. Ross et François Bonnet en relativisant d’un point de vue méthodologique certains travaux en sciences sociales sur la police, en soulignant leur focalisation excessive sur les agents de terrain, en particulier les patrouilleurs urbains impliqués dans des missions de répression visibles, telles que la lutte contre la revente de stupéfiants dans les grandes métropoles. Cette catégorie spécifique de policiers est souvent érigée en modèle représentatif de la culture policière dans son ensemble, au détriment d’une vision plus diversifiée et nuancée de l’institution. Cette réduction conduit à négliger la diversité interne du champ policier, en passant sous silence les spécificités d’autres segments professionnels, comme les cadres hiérarchiques ou les agents d’investigation, dont les pratiques et les missions peuvent pourtant différer significativement. En occultant cette pluralité, la recherche tend à homogénéiser à outrance le paysage policier et à reconduire une vision monolithique de sa culture organisationnelle. Les auteurs relèvent également que ces approches critiques minorisent l’existence de valeurs positives présentes dans certains espaces de la profession, telles que le professionnalisme, le respect du cadre légal, ou encore le sens du service public. Ces dimensions, bien qu’inégalement partagées, sont souvent ignorées ou marginalisées par des analyses qui privilégient les logiques de domination, de discrimination ou de violence[19]. Ainsi, on constate que la mesure de la confiance représente un défi méthodologique majeur qui n’est pas aisé à relever dès lors que l’on entend poser un diagnostic de son état dans les relations entre les forces de sécurité intérieure et la population.
B. Une production de confiance entre complexité juridique et relativisation théorique
À partir des constats précédemment dressés et conscient de la difficulté méthodologique qu’il y a à mesurer la confiance, il demeure possible de s’interroger sur la manière de produire ce que l’on considère habituellement comme relevant de la confiance ou entrant dans le champ de l’amélioration des rapports entre les forces de sécurité intérieure et la population. Or, ici encore, deux difficultés se présente et affectent de manière significative la problématique qui nous occupe. Elles tiennent d’une part à la juridicisation de la confiance et, d’autre part, à sa relativisation.
S’agissant de la juridicisation de la confiance, pour le juriste légaliste, la légitimité de l’action policière tendrait à se confondre avec la légalité de son action. La confiance serait ainsi liée au respect scrupuleux des procédures et de la règle de droit. La légitimité et la confiance qui l’accompagnent ne peuvent donc être acquises ou conservées sans une conduite conforme elle-même à la légalité. Toute atteinte aux principes fondamentaux, qu’il s’agisse de violences policières, de contrôles d’identité discriminatoires ou de manquements déontologiques, entame durablement la confiance du public et, partant, affaiblit l’autorité de la norme juridique elle-même. Mark E. Warren estime en ce sens que « faire confiance à une institution, ou avoir confiance en elle, signifie que celui qui fait confiance connaît l’idée normative de l’institution, et compte en partie sur les sanctions qui peuvent en outre inciter ses agents à se conduire conformément à cette idée normative »[20]. Mais cette idée n’est pas non plus totalement partagée. Pour Alex S. Vitale par exemple, Professeur de sociologie au Brooklyn College, il est possible de critiquer la manière dont les États démocratiques libéraux sont généralement perçus et définis, en soulignant la part de fiction qui entoure leur distinction avec les régimes autoritaires. Il estime par exemple que la frontière entre démocratie et autoritarisme n’est pas aussi nette qu’on le croit généralement. Selon lui, la spécificité de l’action policière dans les régimes démocratiques ne réside pas dans une absence de violence ou dans une plus grande modération, mais dans un effort constant de légitimation. Ici, l’acceptation sociale reposerait sur l’idée que les institutions, dont la police, agissent dans un cadre légal, transparent et équitable. Dans les démocraties libérales, le pouvoir politique cherche donc à justifier le travail policier en l’arrimant à la règle de droit, notamment par le respect de certaines régularités procédurales mais ce cadre ne suffit pas nécessairement à rassurer l’opinion publique sur le caractère impartial et encadré de l’action policière[21]. De tels débats mettent en lumière la difficulté à générer de la confiance par le droit et souligne la complexité juridique de la quête de légitimité en matière de sécurité intérieure.
Il convient néanmoins de noter que la complexité de ce débat n’a pas empêché certaines juridictions, notamment constitutionnelles, d’objectiver expressément la confiance sur le terrain juridictionnel. Ce fut le cas, par exemple, de la Cour constitutionnelle sud-africaine dans une décision du 17 mars 2011, Hugh Glenister v. President of the Republic of South Africa[22]. La question posée à la Cour dans cette affaire était de savoir si la législation nationale qui a créé la Direction des enquêtes sur les crimes prioritaires, connue sous le nom de Hawks (DPCI) était conforme aux prescriptions constitutionnelles. La majorité de la Cour a estimé que la législation critiquée était incompatible avec la Constitution dans la mesure où elle ne garantissait pas un degré d’indépendance suffisant à la DPCI. La motivation de la Cour constitutionnelle est particulièrement significative. Elle souligne qu’il « est important de savoir si un membre du public raisonnablement informé et raisonnable aura confiance dans les caractéristiques de protection de l’autonomie d’une entité pour déterminer si celle-ci possède le degré d’indépendance requis. Par conséquent, si le Parlement ne parvient pas à créer une institution qui semble, du point de vue raisonnable du public, être indépendante, il n’a pas satisfait à l’un des critères objectifs de l’indépendance. En effet, la confiance du public dans l’indépendance d’une institution est une composante ou un élément constitutif de cette indépendance »[23]. En France, le Conseil d’État dans son arrêt d’Assemblée du 11 octobre 2023 Amnesty international France et autres a également fait référence de manière explicite à une telle confiance[24]. Dans cette affaire, un groupe d’associations et d’organisations non gouvernementales demandait notamment au Conseil d’État de faire cesser la pratique généralisée sur l’ensemble du territoire national de contrôles d’identité discriminatoires fondés sur les caractéristiques physiques associées à une origine réelle ou supposée des personnes contrôlées. Rappelant qu’aux termes de l’article 12 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen « La garantie des droits de l’homme et du citoyen nécessite une force publique. Cette force est donc instituée pour l’avantage de tous (…) », le juge administratif a précisé que « la force publique est chargée, dans le cadre des lois et règlements, des missions essentielles de protection des personnes et des biens contre les atteintes dont ils peuvent être l’objet, de lutte contre toutes les formes de criminalité et de délinquance et de maintien de l’ordre. Elle joue ainsi un rôle indispensable pour assurer la paix publique. Ses agents doivent exercer leurs missions dans le respect des règles en vigueur et dans une relation de confiance avec la population »[25].
Enfin, la dernière difficulté affectant la problématique de la confiance dans les forces de sécurité intérieure concerne sa relativisation. Celle-ci se résume dans l’interrogation suivante : la méfiance est-elle si grave ? En effet, comme l’a notamment souligné Louis Quéré[26], dans les régimes démocratiques, la méfiance ne doit pas être perçue comme l’antithèse de la confiance, mais comme sa condition de possibilité. Loin de s’opposer, ces deux attitudes participent ensemble au fonctionnement des institutions démocratiques. La méfiance, lorsqu’elle est encadrée et institutionnalisée, prend la forme de procédures de contrôle, de dispositifs de vérification, de mécanismes destinés à s’assurer de la crédibilité des engagements pris par les détenteurs du pouvoir. Elle se manifeste par la vigilance des citoyens, l’exercice du jugement critique et la capacité à interroger les conditions d’exercice de l’autorité publique. Dans cette perspective, la démocratie repose autant sur la défiance que sur la confiance. Le pouvoir y est limité, encadré, et constamment soumis au regard et à l’évaluation des citoyens. L’idéal démocratique suppose donc que les institutions soient jugées à l’aune de leur conformité à leur vocation normative. La confiance, à l’inverse, implique toujours une forme de renoncement au contrôle personnel, une suspension du doute fondée sur la reconnaissance d’un jugement supérieur ou d’une autorité légitime. Elle suppose une certaine allégeance, une reconnaissance implicite du bien-fondé d’un ordre. Or, c’est précisément cette suspension du jugement qui peut apparaître contraire à l’exercice de la critique démocratique qui exige au contraire une volonté d’interroger les fondements du pouvoir. Ainsi, si la confiance ne peut se penser sans sa contrepartie critique qui est la méfiance institutionnalisée propre aux régimes démocratiques, il n’en demeure pas moins que le diagnostic d’un déficit de confiance s’est progressivement imposé dans les débats publics et académiques. Dès lors, il devient nécessaire de s’interroger sur les leviers de restauration de cette confiance, en évitant les simplifications hâtives et en assumant pleinement la densité des enjeux qu’elle recouvre, tant pour les forces de l’ordre que pour la société démocratique dans son ensemble.
II. Les vecteurs d’une confiance renouvelée
Face à un constat largement partagé de déficit de confiance et nonobstant les réserves précédemment évoquées, la tentation serait grande d’en appeler à des solutions immédiates et techniques. Or, une telle approche risquerait d’ignorer la complexité intrinsèque du lien social et politique que suppose la sécurité dans une société démocratique. Il convient plutôt d’esquisser des pistes, d’ouvrir des perspectives susceptibles de nourrir un renouveau de la relation entre institutions sécuritaires et citoyens, sans prétendre résoudre définitivement une problématique aussi dense. La doctrine française du maintien de l’ordre fait notamment l’objet d’une remise en cause croissante. Il est proposé, par exemple, d’opérer un réalignement sur les principes de désescalade, à l’image de certains modèles européens (notamment le modèle allemand), privilégiant la négociation avec les organisateurs de manifestations, l’anticipation par le renseignement, et une posture de canalisation plutôt que de confrontation. Ce changement suppose également une révision des moyens déployés, notamment la suppression de certaines armes de force intermédiaire (comme les LBD) dont l’usage, jugé disproportionné, alimente les blessures et le ressentiment à l’égard de la police[27]. La question des contrôles d’identité, fortement corrélée à l’expérience de discrimination dans certaines franges de la population, fait aussi l’objet de propositions concrètes. La mise en place d’un récépissé de contrôle est préconisée par de nombreux acteurs pour garantir une traçabilité, réduire l’arbitraire et permettre un éventuel recours. Ce dispositif, expérimenté dans plusieurs pays européens, contribuerait à restaurer une forme de légitimité en ancrant le contrôle dans un cadre transparent[28]. Au-delà des pratiques de terrain, la confiance appelle un renforcement du contrôle des forces de sécurité. Ces propositions visent notamment à réformer en profondeur l’IGPN et l’IGGN, en les dotant d’une indépendance statutaire réelle[29]. Plusieurs propositions insistent aussi sur la nécessité de changer de paradigme en matière de pilotage de la sécurité. Il s’agirait de sortir d’une logique de performance fondée sur les chiffres (nombre d’interpellations, de contraventions, de saisies), pour valoriser des indicateurs qualitatifs : sentiment de sécurité, qualité de la relation entre agents et citoyens, respect des droits fondamentaux[30]. Ainsi, la restauration de la confiance entre la population et les forces de sécurité intérieure supposerait une transformation structurelle de l’organisation policière, de ses doctrines, de ses outils et de ses formes de légitimation. Parmi ces orientations, certaines retiennent particulièrement l’attention dans les débats doctrinaux et les expérimentations de terrain : la coproduction du service public (A), la relance des logiques de proximité, et une réflexion renouvelée sur la légitimité de l’action policière (B).
A. La coproduction du service public de la sécurité : vers une gouvernance partagée
La notion de coproduction du service public désigne une modalité de gouvernance dans laquelle les citoyens et les acteurs institutionnels s’associent activement à la conception, à la mise en œuvre ou à l’évaluation des services publics. Nous laisserons ici volontairement de côté la question de la sécurité coproduite entre les forces de sécurité étatiques et municipales[31]. Loin de se limiter à une simple consultation ou à une participation symbolique, cette approche suppose une véritable coopération entre les producteurs traditionnels du service (agents publics, fonctionnaires, collectivités territoriales) et les usagers, qu’ils soient des citoyens isolés, des groupes organisés ou des associations locales[32]. Appliquée au champ sécuritaire, la coproduction invite à repenser les rapports entre les forces de l’ordre et la population. Dans cette perspective, cet effort de coproduction constitue une tentative pour redonner sens, efficacité et légitimité à l’action publique en matière de sécurité. Elle repose sur la reconnaissance de la capacité des citoyens à contribuer de manière pertinente à l’identification des problèmes, à la formulation des réponses, voire à la co-exécution de certaines missions (prévention, vigilance, médiation, remontée d’informations, etc.). Certains vont même plus loin en appelant de leurs vœux une convention citoyenne en la matière. C’est ce que défendent notamment les chercheurs Anaïk Purenne, Hélène Balazard, Julien Talpin, Marie-Hélène Bacqué et Marion Carrel[33]. Inspirée du modèle de la Convention citoyenne pour le climat ou la fin de vie, cette initiative reposerait sur la participation de citoyens tirés au sort, appelés à délibérer sur les orientations à donner aux politiques de sécurité. La proposition d’une convention citoyenne nationale sur la sécurité se veut plus ambitieuse que les consultations ponctuelles. Elle impliquerait une véritable délibération, structurée sur plusieurs mois, sous la supervision d’experts diversifiés et avec des garanties de suivi institutionnel : commission parlementaire, mesures réglementaires, voire référendum. Un tel processus permettrait selon ses promoteurs non seulement de redéfinir les pratiques policières (contrôles d’identité, usage de la force), mais aussi d’instaurer des normes de transparence sur les interventions, les armes utilisées, ou les sanctions disciplinaires internes.
Plusieurs arguments militent en faveur d’un modèle de coproduction de la sécurité. D’abord, un tel modèle permettrait d’améliorer la qualité des services rendus, en les adaptant davantage aux besoins et aux attentes des usagers, tout en valorisant leur expertise. Ensuite, elle serait porteuse de gains d’efficacité, notamment dans un contexte budgétaire contraint, en mobilisant des ressources jusqu’ici peu intégrées. Enfin, elle est régulièrement présentée comme un levier de reconstruction de la confiance entre l’État et les citoyens, en réintroduisant de la proximité, du dialogue et du sens dans la relation entre administration et administrés. Pour autant, cette logique n’est pas exempte de tensions. Le champ de la sécurité publique reste structuré par des impératifs de commandement, de réactivité et de contrôle, peu compatibles, a priori, avec l’ouverture à des logiques participatives. La coproduction peut ainsi apparaître comme une source d’incertitude, voire de déstabilisation, pour des institutions qui poursuivent, en parallèle, des objectifs élevés de fiabilité opérationnelle. En cela, l’articulation entre coproduction et organisation à haute fiabilité constitue l’un des enjeux théoriques et pratiques majeurs soulevés par cette évolution[34]. Par ailleurs, d’aucuns s’interrogent également sur la question de savoir comment mobiliser l’ensemble de la population sans renforcer les inégalités de représentation. Comment éviter que seules les voix les plus audibles ou les plus conformes aux attentes institutionnelles soient entendues ? Ces limites soulignent les risques de reproduction des rapports de domination sociale au sein même des dispositifs participatifs[35].
La France a vu émerger, depuis une vingtaine d’années, plusieurs dispositifs qui, bien que limités dans leur portée, s’inscrivent dans une dynamique de coproduction du service public de sécurité. Ces dispositifs ne traduisent pas nécessairement une rupture doctrinale, mais témoignent d’une volonté, au moins partielle, d’associer les citoyens à la réflexion, à la prévention et parfois à l’évaluation des politiques de sécurité. C’est le cas, par exemple, du dispositif de participation citoyenne instauré par la circulaire du 22 juin 2011[36] « qui donne la possibilité au maire et à la gendarmerie de mettre en place, d’encadrer et d’évaluer un dispositif de prévention de la délinquance sous la forme d’un réseau de solidarité de voisinage structuré autour de citoyens référents, permettant d’alerter la gendarmerie nationale de tout événement suspect ou de tout fait de nature à troubler la sécurité publique »[37]. Un tel dispositif demeure évidemment très encadré, et ses finalités préventives sont strictement bornées par le refus de toute forme de dévolution d’autorité ou de délégation de mission régalienne. Un second exemple peut être trouvé dans la réserve citoyenne de la police nationale et de la gendarmerie qui « permet de mobiliser des citoyens français, issus de la société civile, avec ou sans expérience militaire, qui apportent un renfort temporaire aux forces de sécurité intérieure, police nationale ou gendarmerie nationale »[38].Dans une optique plus territorialisée, les Conseils locaux de sécurité et de prévention de la délinquance[39] participent également à cette dynamique. Présidés par les maires, ces instances réunissent l’ensemble des acteurs institutionnels concernés et l’article L132-4 du code de la sécurité intérieure précise que peuvent être désignés membres du Conseil « des représentants d’associations, d’établissements ou d’organismes œuvrant notamment dans les domaines de la prévention, de la sécurité, de l’aide aux victimes, du logement, des transports collectifs, de l’action sociale ou des activités économiques désignés par le président du conseil local de sécurité et de prévention de la délinquance, après accord des responsables des associations, des établissements ou des organismes dont ils relèvent ». En parallèle, plusieurs expérimentations s’efforcent d’impliquer plus directement les habitants dans la réflexion et la mise en œuvre de dispositifs de sécurité ou de tranquillité publique. On peut citer, à titre d’exemples, les marches exploratoires de sécurité : « le concept des ‘‘marches exploratoires’’ se définit comme l’action de groupes de personnes volontaires, en particulier de femmes, qui parcourent un secteur donné afin d’identifier les espaces générateurs d’insécurité. Un rapport d’enquête rassemblant des recommandations en termes d’éclairage, de propreté, de signalétique ou encore d’aménagement est transmis aux autorités qui établissent ensuite un programme d’actions »[40].
On constate donc que la coproduction de la sécurité est peu développée en France mais ces dispositifs traduisent une inflexion progressive vers une gouvernance plus ouverte, fondée sur la reconnaissance de la légitimité des citoyens à prendre part, d’une manière encadrée, à la définition et à la régulation de leur propre environnement sécuritaire. La question est donc de savoir s’il faut poursuivre cette logique de coproduction qui demeure limitée en France. En 2021, la sociologue Eleonora Elguezabal a, dans les colonnes de la Revue Participations, analysé l’expérience de gendarmerie participative dans une commune périurbaine française de 4 500 personnes[41]. Il s’agissait d’introduire dans le fonctionnement de la gendarmerie des éléments caractéristiques d’une démarche de coproduction : dialogue avec les usagers, co-construction des priorités d’action, transparence dans la conduite des missions, reconnaissance de l’expertise citoyenne dans la compréhension des enjeux de sécurité[42]. Or, sa mise en œuvre a rapidement buté sur des résistances internes, tant culturelles qu’organisationnelles. La hiérarchie intermédiaire s’est montrée réticente, craignant une dilution des missions, une remise en cause des chaînes de commandement, voire une forme de dénaturation du métier de gendarme. De même, le projet a souffert d’un défaut d’institutionnalisation réelle : conçu comme une initiative expérimentale, il n’a pas été véritablement intégré aux plans d’action ou aux doctrines opérationnelles de la gendarmerie. L’intérêt de ce retour d’expérience ne réside donc pas tant dans ses résultats que dans ce qu’il révèle des conditions nécessaires à une coproduction effective de la sécurité : la clarté des objectifs, l’engagement de la hiérarchie, la formation des agents, la reconnaissance des citoyens comme interlocuteurs légitimes, mais aussi l’adaptation structurelle de l’organisation aux exigences du dialogue. Il met en lumière le fait que la coproduction ne peut être réduite à un instrument de communication mais exige au contraire une transformation en profondeur des cultures professionnelles. Elle ne peut donc être pensée que comme une voie de recomposition de la relation police-population, à expérimenter dans des domaines bien ciblés, notamment la prévention, la médiation sociale ou le renseignement de proximité, et dans des contextes favorables à l’instauration d’un climat de confiance réciproque. Elle ne vise pas à effacer les missions régaliennes de l’État, mais à en approfondir la légitimité.
B. La revalorisation du lien police/population par les logiques de proximité et de légitimité
Dans le prolongement des dynamiques précédemment décrites, des voix appellent à repenser les conditions concrètes du rapport entre police et citoyens à l’aune d’un double impératif : celui de la proximité et celui de la légitimité. Ces propositions envisagent des modalités renouvelées de présence policière plus soucieuses des effets sociaux de l’action des forces de sécurité intérieure. Il s’agit de réinscrire l’action sécuritaire dans le sillage du service public. En la matière, la recherche de légitimité renvoie à un mouvement de pensée se rattachant la théorie de la justice procédurale.
La théorie de la justice procédurale, encore relativement peu diffusée en France bien qu’ayant connu un développement important dans le monde anglo-saxon, renouvelle en profondeur l’analyse des relations entre les institutions publiques et les citoyens, en particulier dans le champ pénal et policier. Inspirée principalement des travaux du psychologue social Tom R. Tyler[43], cette approche propose de dépasser les conceptions classiques de la légitimité institutionnelle fondées sur l’efficacité ou sur la conformité juridique, pour mettre l’accent sur un registre subjectif : celui de la perception de la justice dans les interactions concrètes avec les autorités. Au cœur de cette théorie se trouve l’idée que la légitimité des institutions, loin d’être une donnée abstraite ou formelle, se construit et se consolide au fil des contacts entre les individus et les agents de l’autorité. Chaque interaction, aussi banale soit-elle, constitue une expérience socialisatrice qui peut renforcer ou, au contraire, affaiblir la confiance dans l’institution. Dès lors, ce ne sont pas tant les résultats tangibles de l’action publique qui fondent la légitimité, mais bien la manière dont cette action est conduite. C’est donc moins le fond qui compte que la forme, la procédure mise en œuvre. Ainsi, selon cette conception, la confiance que les citoyens accordent à une institution et en particulier à la police repose largement sur la conviction que cette institution agit de manière équitable, respectueuse, impartiale et transparente. De ce point de vue, les expériences perçues comme injustes, discriminatoires ou irrespectueuses ont un effet particulièrement délétère sur la confiance des citoyens. Ces effets sont d’autant plus marqués qu’ils ne se limitent pas aux seules personnes directement concernées : les récits circulent, se diffusent dans les groupes sociaux, et contribuent à entretenir une défiance collective à l’égard de l’institution. Ainsi, « en régime démocratique, la confiance dans la police est fondée sur la conviction que la police et les citoyens partagent un ensemble de valeurs communes et que la police comprend, partage et agit en fonction des préoccupations des gens et que les policiers agissent pour de bonnes raisons (qu’ils interviennent au nom des gens ou soient amenés à limiter voire supprimer leur liberté. Dans cette perspective, la clé de la confiance consiste à agir d’une façon que les citoyens percevront comme juste »[44]. Cette théorie s’oppose ainsi frontalement aux modèles de gestion publique fondés sur la performance chiffrée et les indicateurs quantitatifs. La police, en tant que figure visible et incarnée de l’État dans l’espace public, ne saurait se borner à l’application mécanique de la loi : elle est investie d’une fonction relationnelle qui implique un souci constant de justice dans ses modalités d’intervention.
Le rapport 2017 du Comité interministériel de la prévention de la délinquance et de la radicalisation intègre plusieurs réflexions, fondées sur des initiatives locales, qui s’inscrivent clairement dans le cadre de la justice procédurale[45]. Le rapport valorise toute initiative qui conduit à repenser la relation entre les forces de sécurité intérieure et la population en mettant l’accent sur le respect dans les échanges, la clarté des motifs des interventions et la capacité des agents à dialoguer. Il met en lumière le renforcement des compétences relationnelles des policiers, notamment à travers des formations à la communication et à la gestion des conflits, afin de prévenir les tensions et d’éviter les comportements perçus comme arbitraires ou discriminatoires. Dans cette même logique, le texte incite à revoir les indicateurs de performance des services de police, en intégrant des critères qualitatifs relatifs à la relation avec la population, à la confiance exprimée et au sentiment de sécurité ressenti. Le rapport identifie plusieurs initiatives locales qui s’inscrivent dans une démarche de justice procédurale en renforçant la qualité du lien entre la population et les forces de sécurité intérieure, par exemple les actions de formation croisée entre jeunes et policiers visant à déconstruire les représentations mutuelles et à favoriser une meilleure compréhension des rôles et contraintes de chacun. Ces formations peuvent se dérouler dans des cadres scolaires ou associatifs. Par ailleurs, certaines publications soutenues par le Défenseur des droits soulignent avec insistance que la formation des forces de sécurité constitue un levier décisif pour améliorer la qualité des relations entre la police et la population. Or, les dispositifs actuellement en place présentent encore des limites notables. La formation initiale des agents, bien qu’indispensable, demeure trop peu centrée sur les enjeux déontologiques, sur la prévention des discriminations ou sur la compréhension des mécanismes de défiance à l’égard de l’autorité[46]. Dans ce cadre, la transparence est également importante en ce qu’elle témoigne de la capacité de l’institution à rendre intelligibles ses actions, à justifier ses décisions, et à permettre leur évaluation critique. En 2021, le fait que les deux corps d’inspection interne de la police et de la gendarmerie nationales ont rendu publics leurs rapports d’activité participe de cette pédagogie de la confiance[47].
C’est aussi dans ce cadre que s’inscrivent les débats récurrents sur la police de proximité. Thilo Firchow, Professeur associé au Conservatoire National des Arts et Métiers, identifie quatre modèles de police qui incarnent des conceptions différentes du rôle des forces de l’ordre dans nos sociétés[48]. Le premier modèle, celui de la police d’ordre, correspond à une conception traditionnelle de la fonction policière. Elle est conçue comme un instrument de préservation de l’ordre public, au service des autorités étatiques et des groupes dominants. Le second modèle correspond à la police de proximité, fondée sur la présence régulière et visible des agents dans les espaces du quotidien. Son objectif premier est de « rassurer et protéger » en renforçant le sentiment de sécurité. Cette approche valorise le contact humain, l’écoute des doléances locales et l’ancrage territorial. Le troisième modèle, celui de la police communautaire, s’est principalement développé dans les sociétés anglo-saxonnes multiculturelles. Il vise à apaiser les tensions interethniques et à améliorer la qualité du dialogue entre la police et les différentes composantes culturelles de la société. Dans ce cadre, la police ne se contente pas d’être proche de la population, elle cherche aussi à lui ressembler. Il s’agit donc de promouvoir une institution représentative de la diversité ethnoculturelle, dont la légitimité repose sur l’identification et la reconnaissance mutuelle. Certains auteurs soulignent dans cette perspective l’importance de la question de la diversification des recrutements dans la police nationale française[49]. Enfin, le quatrième modèle est celui de la police de médiation et de cohésion sociale. Cette approche privilégie la résolution non conflictuelle des situations de tension. À travers cette typologie, l’auteur met en lumière les différentes façons d’exercer la mission policière, depuis le modèle le plus vertical et autoritaire jusqu’aux formes les plus partenariales et sociales de la régulation publique. Cette classification, sans en épouser tous les contours, permet ainsi de penser les évolutions possibles de la fonction policière et de nous permettre une réflexion approfondie sur les mutations futures de notre modèle.
[1] Jobard F., « Police et État : quel rapport ? », Séminaire Étapes. Repenser l’État au XXIe siècle. Libertaires et pensées critiques, Atelier de création libertaire, 2023, 978-2-35104-186-4.
[2] V. sur cette question : Cahn O., « Ambiguïtés de la force publique », RSC, 2022, p.155.
[3] Granger M-A, « Existe-t-il un ‘‘droit fondamental’’ à la sécurité ? », RSC, 2009/2, p. 273.
[4] Dupré de Boulois X., « Existe-t-il un droit fondamental à la sécurité ? », RDLF, 2018, chron. n°13.
[5] Spire A., « La confiance dans l’État : une relation pratique et symbolique » in Senik C., Crises de confiance ?, La Découverte, 2020, p. 37.
[6] V. sur ces points : Delpeuch T., « Contributions sociologiques récentes aux débats sur la crise de la police en France », Droit et société, 2021/2, n° 108, p. 513.
[7] Avis de la Commission nationale consultative des droits de l’homme sur les rapports entre police et population : rétablir la confiance entre la police et la population, JORF n°0045 du 21 février 2021.
[8] V. notamment : CEDH, 30 avril 2020, Castellani c/ France, req. n° 43207/16. « La Cour rappelle ainsi que l’article 3 ne prohibe pas le recours à la force par les agents de police lors d’une interpellation. Néanmoins, il doit être proportionné et absolument nécessaire au vu des circonstances de l’espèce (voir, parmi beaucoup d’autres, Rehbock c. Slovénie, no 29462/95, § 76, CEDH 2000‑XII, et Gutsanovi, précité, § 126). À cet égard, il importe notamment de savoir s’il y a lieu de penser que l’intéressé opposera une résistance à l’arrestation, ou tentera de fuir, de provoquer des blessures ou des dommages, ou de supprimer des preuves (Raninen c. Finlande, 16 décembre 1997, § 56, Recueil 1997‑VIII). La Cour tient à rappeler, en particulier, que tout recours à la force physique par les agents de l’État à l’encontre d’une personne, qui n’est pas rendu strictement nécessaire par son comportement, porte atteinte à sa dignité humaine et, de ce fait, constitue une violation des droits garantis par l’article 3 de la Convention (Bouyid c. Belgique [GC], no 23380/09, §§ 88, 100 et 101, CEDH 2015) ».
[9] Renaudie O., « Les rapports entre police et population au prisme du modèle français de police », Revue générale du droit. Chronique de droit administratif français et comparé, 2021.
[10] V sur ces points : Farde G., « Maintien de l’ordre ‘‘à la française’’ : le lien de confiance Police/population en question », Revue Politique et Parlementaire, n°1100, 2021, https://www.revuepolitique.fr/maintien-de-lordre-a-la-francaise-le-lien-de-confiance-police-population-en-question/
[11] Gauthier J., Jobard F., « Légitimités policières, approches comparées », Police. Questions sensibles, 2018. halshs-01965233. On peut ajouter à ces facteurs le fait que la structure fédérale de l’Allemagne confère aux polices des Länder une autonomie organisationnelle et fonctionnelle qui permet une plus grande capacité d’adaptation aux spécificités locales. De même l’Allemagne ne porte pas la même charge historique postcoloniale que la France. Bien que le passé colonial allemand ait été violent, il a pris fin précocement après la Première Guerre mondiale. Dès lors, les populations issues de l’immigration (notamment turques, palestiniennes ou est-européennes) ne sont pas historiquement liées à un passé impérial ou à des logiques de domination coloniale reproduites dans l’espace métropolitain.
[12] Roché S., « Trois concepts clés pour analyser la relation police-population : confiance, légitimité et justice procédurale » », Cahiers de la sécurité et de la justice, n°40, p. 104.
[13] Sur ces questions V. Bradford B., Jackson J., « Trust and confidence in the police : a conceptual review », SRN Electronic Journal, sept. 2010.
[14] Wuilleumier A., Malochet V., « Des politiques de sécurité au défi de l’inclusion citoyenne », Servir, 2022/5, n° 515, p. 33.
[15] V. sur les points suivants : Roché S., « La confiance dans la police : les apports des enquêtes sociologiques », Après-demain, 2020/2, n° 54, p. 10.
[16] Delpeuch T., « Contributions sociologiques récentes aux débats sur la crise de la police en France », op.cit., p. 513. V. également sur la question des discriminations endémiques : Roché S., « La légitimité de la police et l’égalité devant la police. Constats et pistes pour changer les relations entre la police et la population », Alternatives Non-Violentes, 2021/1, n° 198, p. 15. L’auteur estime que « Les enquêtes menées en France sur la discrimination (le ‘‘contrôle au faciès’’, le racisme) sont maintenant nombreuses et techniquement sophistiquées. C’est pourquoi il est possible d’affirmer que la discrimination sur une base ethnique est aujourd’hui endémique dans les forces de police ».
[17] Delpeuch T., Ross J-E, Bonnet F., « Les analyses sociologiques des relations police-population : vers une reconnaissance de la variété des pratiques policières », Droit et Société, 97/2017, p. 457. Dans ce dossier, les auteurs analysent de manière critique les logiques professionnelles qui structurent l’action policière en France et expliquent, en grande partie, les tensions récurrentes entre les forces de l’ordre et la population. Ils identifient certaines dynamiques principales qui, au sein de la culture policière, nourrissent la défiance. La première de ces logiques est celle de la défense de l’autorité de l’État, perçue comme mission première et non négociable du travail policier. Les policiers sont investis du rôle de garants de l’ordre public et incarnent, dans l’espace quotidien, la loi et l’autorité politique. Dans cette perspective, toute mise en cause ou résistance à leur autorité est interprétée comme un affront non seulement personnel, mais aussi institutionnel. La seconde logique repose sur une vision répressive de la mission policière, largement intériorisée par les agents. Un troisième facteur réside dans l’usage extensif et souvent arbitraire du pouvoir discrétionnaire dont disposent les policiers sur le terrain. En l’absence de prescriptions normatives précises, ils sont souvent appelés à décider, selon leurs propres critères, de ce qui constitue un trouble à l’ordre public. Enfin, les auteurs mettent en évidence les effets délétères des modes de gestion managériale de l’institution policière. Bien que bénéficiant d’une autonomie opérationnelle significative, les agents sont soumis à un système de contrôle fondé sur des indicateurs quantitatifs. Ces logiques professionnelles conjuguées façonnent une culture policière orientée vers la préservation de l’ordre plus que vers le service du public.
[18] Dufour P., Dupuis-Déri F., Purenne A., « La police à l’épreuve de la démocratie », Lien social et Politiques, n°84, 2020, p. 4.
[19] Delpeuch T., Ross J-E, Bonnet F., « Les analyses sociologiques des relations police-population : vers une reconnaissance de la variété des pratiques policières », op.cit, p. 461.
[20] Warren M., Democracy and Trust, Cambridge, Cambridge University Press, 1999, p. 349
[21] Guay E., Plowright C.E, « Police, démocratie et mobilisations sociales : entrevue avec Alex S. Vitale », Lien social et Politiques, n°84, 2020
[22] Cour constitutionnelle d’Afrique du Sud, 17 mars 2011, Hugh Glenister v President of the Republic of South Africa & Others, n° CCT 48/10
[23] Ibid : « We say merely that public confidence in mechanisms that are designed to secure independence is indispensable. Whether a reasonably informed and reasonable member of the public will have confidence in an entity’s autonomy-protecting features is important to determining whether it has the requisite degree of independence. Hence, if Parliament fails to create an institution that appears from the reasonable standpoint of the public to be independent, it has failed to meet one of the objective benchmarks for independence. This is because public confidence that an institution is independent is a component of, or is constitutive of, its independence ».
[24] CE, Ass., 11 octobre 2023, Amnesty international France et autres, n° 454836. Sur cette décision V. « La pratique des contrôles d’identité au faciès devant le Conseil d’État ». Note sous CE, Ass., 11 octobre 2023, Amnesty international France et autres, n° 454836, Veille juridique du CREOGN, novembre 2023, n° 118, pp. 5-15 ; « Le port du matricule par les policiers et gendarmes nationaux devant le Conseil d’État ». Note sous CE, Ass., 11 octobre 2023, LDH et autres, nos 467771 et 4667781, Veille juridique du CREOGN, janvier 2024, n° 119, pp. 7-15.
[25] Ibid. Dans cette affaire, le Conseil d’État a considéré que l’action en manquement dont il a été saisi « porte ainsi sur l’abstention des pouvoirs publics, soit, principalement, d’adopter des mesures dont il n’appartient pas au juge administratif de connaître, parce qu’elles touchent aux rapports entre les pouvoirs exécutif et législatif ou à la conduite des relations internationales, soit de refondre les dispositifs existants. Ces mesures visent en réalité à une redéfinition générale des choix de politique publique en matière de recours aux contrôles d’identité à des fins de répression de la délinquance et de prévention des troubles à l’ordre public, impliquant notamment des modifications des relations entre les forces de police et l’autorité judiciaire, le cas échéant par l’intervention du législateur, ainsi que l’évolution des relations entre la police et la population. Elles relèvent donc de la détermination d’une politique publique et excèdent par suite, ainsi qu’il a été dit aux points 8 et 9, l’office du juge de l’action de groupe ».
[26] Quéré L., « Les ‘‘dispositifs de confiance’’ dans l’espace public », Réseaux, 2005/4 n°132, p. 185.
[27] V. notamment : Avis de la Commission nationale consultative des droits de l’homme sur les rapports entre police et population : rétablir la confiance entre la police et la population, JORF n°0045 du 21 février 2021.
[28] Conseil national des barreaux, 16 octobre 2023, 42 recommandations pour améliorer les relations les relations police / population.
[29] Avis de la Commission nationale consultative des droits de l’homme sur les rapports entre police et population : rétablir la confiance entre la police et la population, op.cit.
[30] Ibid. : « Depuis le début des années 2000, l’institution policière n’a pas échappé au virage managérial issu de la loi organique relative aux lois de finance (LOLF) de 2001. Elle s’est ainsi retrouvée soumise à des critères de performance et à une culture du résultat qui ont irrigué l’ensemble des services. Parallèlement à cette ‘‘politique du chiffre’’, une réorientation des politiques publiques de sécurité a été amorcée dans les années 1990, axée sur la lutte contre la petite et la moyenne délinquance. Dans son avis de 2016, la CNCDH relevait également la valorisation de l’anticriminalité en France, conduisant mécaniquement à valoriser le répertoire d’actions qui lui est traditionnellement associé (contrôles d’identité, interpellations, recherche du flagrant délit, etc.) ».
[31] V. sur ce point : Dufour J., Kabssi A., « La sécurité coproduite, Réflexions sur une coordination renouvelée entre forces de sécurité étatiques et municipales en France », AJ Collectivités Territoriales, 2013, p.447.
[32] V. sur ce concept : Tiberghien B., Bout Vallot L., « La résilience des forces de l’ordre en contexte post-état d’urgence : entre logiques de fiabilité organisationnelle et de coproduction de service », Politiques & management public, 2019/2, n ° 36, p. 223.
[33] Purenne A., Balazard H., Talpin J., Bacqué M-H, Carrel M., « Refonder la police : et si on osait la convention citoyenne sur la sécurité ? », The Conversation, 15 juin 2020.
[34] V. Tiberghien B., Bout Vallot L., « La résilience des forces de l’ordre en contexte post-état d’urgence : entre logiques de fiabilité organisationnelle et de coproduction de service », op.cit.
[35] Anne Wuilleumier A., Malochet V., « Des politiques de sécurité au défi de l’inclusion citoyenne », Servir, 2022/5, n°515, p. 33.
[36] Circulaire IOCJ1117146J du 22 juin 2011 relative au dispositif de participation citoyenne.
[37] https://www.gers.gouv.fr/Actions-de-l-Etat/Securite-et-Protection-de-la-Population2/Securite-interieure/Dispositif-de-participation-citoyenne
[38] https://www.deux-sevres.gouv.fr/Actions-de-l-Etat/Protection-des-personnes-et-des-biens/Prevention-des-risques-alertes-et-gestion-des-crises/Aider-et-agir-pour-la-securite-reserve-police-et-gendarmerie#:~:text=En%20quoi%20consiste%20la%20réserve,police%20nationale%20ou%20gendarmerie%20nationale.
[39] Décret n°2007-1126 du 23 juillet 2007 relatif au conseil local et au conseil intercommunal de sécurité et de prévention de la délinquance et au plan de prévention de la délinquance dans le département.
[40] Les marches exploratoires dans les transports collectifs terrestres. Guide méthodologique élaboré par le Ministère des transports : https://www.ecologie.gouv.fr/sites/default/files/documents/Guide_Marches_Exploratoires_251120.pdf
[41] Elguezabal E., « Quand la gendarmerie devient participative : l’engagement des voisin·es dans les réseaux officiels de vigilance en France », Participations 2021/1, n° 29, p. 73.
[42] Par exemple : rencontres informelles organisées dans les cafés ou les maisons de quartier visant à créer un espace de dialogue direct entre les gendarmes et la population locale, marches exploratoires afin parcourir un quartier avec ses habitants pour relever ensemble les dysfonctionnements de l’espace public, co-construction de messages de sensibilisation sur les conduites à risque, le harcèlement, les addictions ou encore diagnostics locaux de sécurité élaborés avec la participation d’associations de quartier, d’élus et d’usagers.
[43] Tyler T. R., « Enhancing Police Legitimacy », Annals of the American Academy of Political and Social Science, 2004, vol. 593, 84-99.
[44] V. sur ce point : Lévy R., « La police française à la lumière de la théorie de la justice procédurale », Déviance et Société, 2016/2, Vol. 40, p. 139.
[45] Rapport du Comité interministériel de prévention de la délinquance et de la radicalisation – Commissariat général à l’égalité des territoires pour l’amélioration des relations entre la population et les forces de sécurité de l’État, La Documentation française, Paris, 2017, disponible en édition numérique : https://www.cipdr.gouv.fr/wp-content/uploads/2018/01/guide-amélioration-des-relations-entre-la-population-et-les-forces-de-sécurité-de-létat-1.pdf
[46] Demaillard J., Noble J., Roché, M., Jardin A., Zagrodzki M., « Déontologie et relations police-population : les attitudes des gendarmes et des policiers », février 2024. Cette publication constitue une synthèse de la recherche intitulée « Déontologie et relations police-population » (DPOP) soutenue par le Défenseur des droits (pour l’enquête quantitative) et le Centre de recherche de l’École des officiers de la gendarmerie nationale (pour les observations et entretiens en zone Gendarmerie).
[47] Sur cette question V.: Debove F., « La déontologie policière au temps de la confesse ! », AJ Pénal, 2021, p.438.
[48] Firchow T., « Police et société. Modèles de relations avec la communauté dans l’espace urbain », Eguzkilore, n°14, décembre 2000, p. 87.
[49] V. notamment : Gautier F., « Une police ‘‘à l’image de la population’’ ? La question de la ‘‘diversité’’ et le recrutement dans la police nationale », Migrations Société, 2017/3, n° 169, p.39.


