Le voile islamique : regards (juridiques) croisés
Alors que la protection accordée aux femmes voilées en France apparaît insuffisante, les obstacles auxquels se heurtent les différents contrôles juridictionnels exercés sur les réglementations conduisant à restreindre le port de ce signe religieux doivent être mis en évidence avant d’envisager les pistes d’amélioration du droit positif. Situé à la croisée du droit des discriminations et du droit des libertés, le voile islamique pourrait être appréhendé par ses défenseurs comme un vecteur d’identité et au prisme d’une analyse intersectionnelle.
Par Julie Arroyo, Maître de conférences à l’Université Grenoble Alpes (CRJ EA 1965)
Si « [q]uelles que soient les époques, les régions ou les cultures, les femmes ont constamment porté sur la tête, et quelquefois sur d’autres parties du corps, un morceau d’étoffe »[1], le voile des femmes musulmanes en Europe suscite des réactions passionnées[2]. Les polémiques autour de cette pièce de tissu ont commencé en France il y a une vingtaine d’années, lorsque des élèves ont été exclues d’un collège public au motif que leur foulard apparaissait incompatible avec le bon fonctionnement de l’établissement. Depuis lors, la controverse s’est poursuivie à travers de nombreux épisodes : l’affaire dite « Baby-Loup », relative au licenciement d’une salariée voilée travaillant dans une crèche, celles des mères voilées désireuses d’accompagner les activités et sorties scolaires de leurs enfants ou encore les arrêtés dits « anti-burkini » ayant été adoptés par certains maires à l’été 2016 afin d’interdire l’accès à la baignade aux personnes revêtues de ce maillot de bain couvrant.
En écho à ces évènements médiatisés, des législations ont progressivement interdit le port des signes et tenues religieux dans certains espaces. La loi du 15 mars 2004 est la première à intervenir : elle encadre, en application du principe de laïcité, le port de signes ou de tenues manifestant une appartenance religieuse dans les écoles, collèges et lycées publics[3]. La loi du 11 octobre 2010 interdisant la dissimulation du visage dans l’espace public a suivi[4], ainsi que la loi dite « El Khomri » du 8 août 2016 encadrant la clause de neutralité dans le règlement intérieur des entreprises[5]. Par ailleurs, de nombreux règlements intérieurs – dans les piscines[6], les salles de sport[7], les associations[8] – conduisent à restreindre les possibilités de revêtir ce vêtement. Néanmoins, l’ensemble de ces dispositions ne vise pas exclusivement le voile et tous les types de voile ne sont pas atteint de façon uniforme. La loi du 11 octobre 2010 a été adoptée afin d’interdire la burqa – couvrant intégralement la personne – et le niqab – recouvrant le visage en laissant les yeux à découvert[9]. La plupart des restrictions concernent également le tchador – enveloppant uniquement le corps et la tête –, et le hijab – limité à la tête et au cou[10]. D’autres textes visent encore le burkini, maillot de bain couvrant destiné à la baignade[11].
Ces nombreuses réglementations – tant publiques que privées – pèsent lourdement sur la vie de ces femmes désireuses se couvrir en application de préceptes religieux. Interdites d’accès aux établissements publics scolaires, exclues de la plupart des activités bénévoles et de loisirs, elles rencontrent également des difficultés considérables sur le marché du travail[12]. Les emplois du secteur public leur sont inaccessibles, dans la mesure où l’obligation de neutralité imposée aux fonctionnaires et agents publics en application du principe de laïcité interdit le port de tous les signes ou tenues religieux[13], en particulier le foulard[14]. Quant aux entreprises privées, si elles apparaissaient initialement plus ouvertes, elles se dotent depuis quelques années de règlements intérieurs imposant une neutralité – notamment religieuse – à leurs salariés[15].
Cette exclusion – de grande ampleur – interroge au regard des valeurs de liberté, d’égalité, de tolérance et de pluralisme fondatrices des démocraties européennes[16]. Le traitement juridique de ce signe religieux – et des personnes l’arborant – a précisément pour enjeu la protection de la minorité religieuse constituée par les musulmans en France[17]. Dans certains États, comme la Grande-Bretagne ou les États-Unis, la prise en compte des minorités passe par la reconnaissance de droits spécifiques à leur profit afin de préserver leur identité[18]. En France, le modèle républicain – adossé à la théorie politique libérale – s’oppose à la reconnaissance juridique des minorités et à l’octroi de droits aux groupes[19]. Il fait reposer la protection de la différence – religieuse, linguistique, culturelle, etc. – sur l’idée de la neutralité de l’État vis-à-vis des conceptions du bien[20]. Les appartenances identitaires, et en particulier la religion, sont cantonnées à la sphère privée, alors que, dans la sphère publique, « sont fixés les droits et les devoirs civiques des individus, ces citoyens abstraits obéissant aux mêmes règles, en vertu du principe d’égalité »[21].
Dans ce cadre, les femmes voilées bénéficient-elles réellement d’« un droit à l’indifférence » entendu comme un droit « à vivre selon ses propres choix […], à être soi sans attirer l’opprobre social »[22] ? La liberté religieuse, d’une part, et le droit de ne pas être discriminé en raison de sa religion, d’autre part, participent en théorie à leur protection en leur permettant de se couvrir « sans avoir à subir la vindicte populaire pour la seule raison que les choix opérés et options retenues ne s[ont] pas conformes à une morale publique, une bienséance dirigeante, une convenance sociale »[23]. À l’instar du port de tous signes ou tenues religieux, le fait de se voiler constitue une expression de la liberté de manifester sa conviction religieuse protégée à l’échelon aussi bien interne[24] qu’international[25]. La discrimination religieuse est quant à elle prohibée à l’article 1er de la Constitution française et dans de nombreux textes internationaux, à l’instar de l’article 14 de la Convention européenne des droits de l’Homme, l’article 21 de la Charte des droits fondamentaux ou encore aux articles 2 et 26 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques.
Ces différents textes révèlent le lien noué dès l’origine entre le droit de ne pas être discriminé en raison de sa religion et la liberté religieuse[26]. L’existence de ces deux angles d’analyse apparaît, dans une certaine mesure, originale. Toutes les violations d’une liberté fondamentales ne sont pas constitutives d’une discrimination, celle-ci nécessitant l’existence d’un critère prohibé par la loi dans un domaine défini et l’absence de justification objective et raisonnable[27]. De même, les discriminations selon le sexe ou la « race » ne renvoient pas toujours à la violation d’une liberté fondamentale[28]. Les deux approches apparaissent envisageables chaque fois que le critère discriminatoire prohibé correspond à l’exercice d’un droit ou d’une liberté[29]. Selon Gwénaële Calvès, il reste qu’« [a]ucune autre caractéristique individuelle protégée par le droit de la non-discrimination n’est aussi systématiquement appréhendée sous une forme à la fois négative (protection contre les traitements défavorables) et positive (garantie apportée à l’exercice d’une liberté) »[30].
Qu’ils s’excluent l’un et l’autre[31], apparaissent subsidiaire l’un par rapport à l’autre[32] ou se complètent[33], les deux contrôles – sous l’angle des libertés et sous l’angle des discriminations – n’ont jamais abouti à la censure de dispositions restreignant le port du voile[34]. L’obligation de neutralité religieuse imposée aux agents publics a été jugée, dans le cadre de la marge d’appréciation reconnue aux États membres, conventionnelle par la Cour européenne des droits de l’Homme[35], tout comme l’interdiction du port des signes religieux ostensibles dans les établissements scolaires[36]. Quant à la loi de 2010 conduisant à interdire la burqa et le niqab dans l’espace public, elle a été validée par le Conseil constitutionnel[37] et la Cour de Strasbourg[38]. La Cour de justice de l’Union européenne a pour sa part admis la validité sous condition des clauses imposant la neutralité dans l’entreprise[39].
Si la protection insuffisante de la liberté de religion a déjà été dénoncée[40] ainsi que, parfois, le traitement juridictionnel défavorable réservé à la religion musulmane[41], il s’agit d’analyser les obstacles auxquels se sont heurtés les différents contrôles juridictionnels avant d’étudier les pistes d’amélioration du droit positif. Le voile islamique se trouve, aujourd’hui, à la croisée du droit des discriminations et du droit des libertés et pourrait être appréhendé par ses défenseurs comme un vecteur d’identité et au prisme d’une analyse intersectionnelle.
I – Le voile islamique à la croisée du droit des libertés et du droit des discriminations
Les nombreuses réglementations relatives au port du voile en France ont été contrôlées sous l’angle du droit des libertés et/ou du droit des discriminations. Si la qualification de la discrimination religieuse se heurte principalement à l’écueil de la comparaison, le contrôle de l’intérêt légitime et de la proportionnalité présente des insuffisances dans l’une et l’autre approche[42].
A – L’obstacle de la comparaison
La démonstration d’une discrimination repose sur le constat d’un traitement défavorable d’une personne par rapport à une autre personne placée dans une situation semblable, sur la base d’un motif prohibé[43]. Le problème du comparateur – c’est-à-dire l’individu ou le groupe d’individus de référence à l’aune duquel l’existence d’une différence de traitement est discutée – constitue « la pierre d’achoppement du raisonnement en termes de discrimination »[44]. Gwénaële Calvès a démontré l’importance de cette difficulté dans le champ des discriminations religieuses[45]. En la matière, le choix d’un comparateur a-religieux apparaît contestable : « comparer au port du bermuda sur le lieu de travail le port par un salarié d’une tenue salafiste [ou d’un voile], c’est frôler le paralogisme puisque ce n’est pas dans l’exercice du même droit qu’intervient la discrimination alléguée »[46]. Quant au choix en faveur d’un comparateur religieux, l’auteure met en garde contre la difficulté de procéder à des comparaisons d’une religion à l’autre[47]. La question des signes religieux est à cet égard topique : certaines religions ne prescrivent pas le port de signes, d’autres imposeraient des signes ostensibles, d’autres encore des signes discrets, etc.
Dans la mesure où la plupart des réglementations conduisant à limiter le port du voile ne visent pas spécifiquement celui-ci, mais un ensemble de signes et tenues religieux, l’approche comparative est rendue aléatoire, voire impossible. Selon que le comparateur choisi relève d’une religion majoritaire ou minoritaire, la discrimination pourra être constatée ou ne pas l’être[48]. Au regard de la loi du 15 mars 2004, l’élève empêchée de porter son voile n’apparaît pas moins bien traitée que l’élève sikh, privé de la possibilité de porter son turban ou que l’élève juif empêché d’arborer sa kippa[49]. En revanche, le traitement défavorable ne peut qu’être constaté lorsque la situation de ces deux personnes est comparée à celle de l’élève de religion catholique ayant une croix dissimulée sous son T-shirt. L’affirmation du Conseil d’État, appelé à statuer sur l’exclusion d’une élève voilée de son lycée, suivant laquelle « une telle sanction qui est prise, sans discrimination entre les confessions des élèves, ne méconnaît pas le principe de non-discrimination »[50] s’avère dès lors contestable. De même, la Cour européenne des droits de l’Homme, saisie de réglementations interdisant le voile et la barbe dans l’enseignement supérieur en Turquie et les signes et tenues manifestant ostensiblement la religion dans les établissements scolaires publics français[51], a écarté une violation de l’article 14 de la Convention combiné à l’article 9 au motif que « la réglementation concernant le port du foulard islamique ne vise pas l’appartenance de la requérante à une religion »[52]. Cette motivation – relativement étrange – semble signifier que, dans la mesure où l’interdiction ne vise pas uniquement le voile, un homme musulman et une personne d’une autre religion se trouvent dans une situation semblable vis-à-vis de la règle qui ne crée pas de différence de traitement. L’impossibilité de trouver le « bon » comparateur empêche ici l’analyse : en réalité, la situation des femmes voilées ne peut pas être comparée à celle des hommes musulmans – qui ne portent pas toujours ou nécessairement des signes religieux – ni à celle des femmes pratiquant d’autres religions – qui ne revêtent pas nécessairement des signes religieux visibles[53].
L’obstacle de la comparaison est également tangible lorsque le critère sur lequel se fonde la différence de traitement apparaît neutre, dépourvu de tout lien avec la religion[54]. La règle de la neutralité en entreprise – interdisant la manifestation de toutes les convictions – en constitue l’illustration. La comparaison du sort réservé aux femmes voilées, d’une part, et de celui réservé aux personnes souhaitant exprimer leurs opinions politiques ou philosophiques, d’autre part, a conduit la Cour de justice à constater l’absence de différence de traitement découlant de la clause[55]. Pourtant, les juges avaient accepté par le passé de considérer que des critères neutres puissent constituer des motifs de discrimination interdits[56]. Ainsi, en matière de discrimination liée à l’orientation sexuelle, la Cour avait jugé « qu’une différence de traitement fondée sur l’état de mariage des travailleurs et non expressément sur leur orientation sexuelle reste une discrimination directe, dès lors que, le mariage étant réservé aux personnes de sexe différent, les travailleurs homosexuels sont dans l’impossibilité de remplir la condition nécessaire pour obtenir l’avantage revendiqué »[57]. La transposition de ce raisonnement à la clause de neutralité aurait pu être envisagée, dans la mesure où la liberté religieuse est indissociable de l’expression des convictions religieuses[58]. Ainsi, « [p]arce qu’elles désavantagent en elles-mêmes certaines religions, dont les pratiques imposent le port de vêtements visibles, les clauses de neutralité vestimentaires devraient être considérées comme constitutives de discriminations directes fondées sur la religion »[59].
Dès lors, se trouve confirmée l’idée qu’« intrinsèquement comparatif […] le raisonnement du juge de l’égalité ne débusque que les situations de discrimination les plus frustes ou les plus criantes »[60]. Ces difficultés, lorsqu’elles n’empêchent pas la qualification de la discrimination, peuvent conduire le juge à se placer sur le terrain de la discrimination indirecte. Celle-ci repose également sur la comparaison, mais suppose de démontrer non plus l’existence d’un traitement défavorable d’une personne par rapport à une autre, mais un désavantage particulier pesant sur l’individu victime[61]. Ainsi, la Cour de justice de l’Union européenne, constatant que la différence de traitement entre les salariés souhaitant manifester une conviction et les autres ne renvoyait pas à un critère interdit, a envisagé le fait que la règle de la neutralité soit « susceptible d’entraîner un désavantage particulier pour des personnes d’une religion […] donné[e], par rapport à d’autres personnes »[62]. La Cour européenne des droits de l’Homme s’est placée sur le même terrain lors du contrôle de la loi du 11 octobre 2010, en estimant que l’interdiction de dissimulation du visage dans l’espace public produisait des « effets négatifs spécifiques sur la situation des femmes musulmanes »[63]. Le « glissement » d’une catégorie de discrimination à l’autre, s’il n’a guère d’influence sur le régime juridique applicable en droit de la Convention européenne[64], apparaît crucial en droit de l’Union, dans la mesure où la discrimination indirecte est beaucoup plus facile à justifier que la discrimination directe[65].
B – L’obstacle de la conciliation des intérêts en présence et de la proportionnalité
Le cadre classique de la protection des droits et libertés fondamentaux repose sur le contrôle de l’intérêt légitime poursuivi par la restriction du droit et de sa proportionnalité[66]. En droit de la non-discrimination, la reconnaissance d’une violation de l’article 14 de la Convention européenne des droits de l’Homme, combiné à une autre stipulation, implique de constater une différence de traitement entre des situations semblables sans « justification objective et raisonnable »[67]. La légitimité de la finalité de la différence de traitement, d’une part, et sa proportionnalité, d’autre part, sont vérifiés par la Cour européenne, « même si la frontière entre les deux n’est pas toujours facile à appréhender » et qu’elle ne cumule pas systématiquement les deux exigences[68]. Un contrôle similaire s’applique aux discriminations indirectes en droit de l’Union européenne et en droit interne depuis l’adoption de la loi du 27 mai 2008[69]. La justification de la discrimination directe diffère sensiblement : elle apparaît beaucoup plus stricte[70].
Les juges appelés à statuer sur les différentes réglementations relatives au voile ont admis comme justification des objectifs contrariants les préceptes libéraux et se sont livrés à un contrôle de proportionnalité présentant certaines faiblesses.
Des objectifs légitimes contrariant les préceptes libéraux
La variété des intérêts susceptibles d’être avancés à l’appui d’une réglementation sur le voile se retrouve dans les deux champs d’analyses, liberté et discrimination. En droit de la Convention européenne des droits de l’Homme, il aurait pu en aller différemment. En effet, les buts que la Cour juge acceptables pour justifier une discrimination sont nombreux – recouvrant l’ensemble du champ d’action des États[71] – alors que les motifs pour légitimer une ingérence dans la liberté religieuse sont limitativement énumérés au paragraphe 2 de l’article 9 de la Convention. Néanmoins, la Cour européenne a choisi d’étendre considérablement ces motifs, rapprochant les deux types de contrôles[72].
En premier lieu, la protection de l’égalité homme/femme a été retenue pour légitimer les limitations du port de la burka et du niqab – sous l’angle de la liberté religieuse et de la discrimination –[73], et du foulard en général[74]. Dans le premier arrêt rendu par la Cour européenne en la matière, Dalahb contre Suisse en 2001, mais également dans l’arrêt Leila Sahin contre Turquie en 2005, les juges ont évoqué « un signe extérieur fort » qui « semble être imposé aux femmes par une prescription coranique » et qui, de ce fait, est « difficilement conciliable avec le principe d’égalité des sexes »[75]. Le Conseil constitutionnel a, dans son contrôle de la loi du 11 octobre 2010, assimilé les hypothèses de dissimulation du visage volontaires et contraintes pour juger que les femmes concernées se trouvent dans une « situation d’exclusion et d’infériorité manifestement incompatible avec les principes constitutionnels de liberté et d’égalité »[76]. Cette justification réfute l’idée qu’une femme puisse volontairement choisir de se voiler en postulant qu’une telle décision desservirait son intérêt. Critiquée pour son paternalisme[77] et sa contradiction au regard des préceptes libéraux[78], elle semble en perte de vitesse. Selon la Cour de Strasbourg désormais, on « ne saurait invoquer l’égalité des sexes pour interdire une pratique que des femmes […] revendiquent dans le cadre de l’exercice des droits […], sauf à admettre que l’on puisse à ce titre prétendre protéger des individus contre l’exercice de leurs propres droits et libertés fondamentaux »[79]. L’égalité homme/femme – loin de pouvoir légitimer une restriction au port du voile – apparaît, au contraire, susceptible de s’opposer à une réglementation des vêtements portés par les femmes en public[80].
En deuxième lieu, la laïcité constitue un motif largement admis à l’appui des réglementations sur le voile[81]. À l’origine cantonnée à l’État dans une perspective libérale, elle tend à s’imposer comme un « moyen de neutralisation politico-religieuse de la société » en assujettissant désormais les personnes privées[82]. Elle légitime ainsi l’interdiction du port du voile appliquée aux usagères du service public de l’enseignement scolaire[83], aux salariées des entreprises privées chargées d’une mission de service public[84] et – même si la question n’est pas tout à fait tranchée – aux mères accompagnant les sorties ou activités scolaires[85]. Les personnes désireuses de se baigner à la mer sont épargnées[86] ainsi que les salariées des entreprises non chargées d’une mission de service public, même si une des composantes du principe – à savoir l’obligation de neutralité religieuse – peut leur être appliquée[87]. Cette « Nouvelle Laïcité »[88], en débordant la sphère publique, se détourne de sa finalité libérale pour se mettre au service de la défense de valeurs[89]. L’ordre public immatériel – incarné dans la notion de « vivre ensemble » – a également surgi à l’appui de la loi interdisant la dissimulation du visage dans l’espace public, alors que les considérations d’ordre public matériel ont été jugées inaptes par la Cour européenne des droits de l’Homme à justifier l’interdiction de nature générale et absolue[90].
En dernier lieu, les nombreuses sollicitations des droits et libertés d’autrui pour appuyer les réglementations sur le port du voile peuvent surprendre, dans la mesure où celui-ci ne constitue pas un acte de prosélytisme[91]. La pertinence de l’objectif de protection des enfants en bas âge contre « la vue d’une femme revêtue d’un foulard couvrant ses cheveux » – admis par l’assemblée plénière de la Cour de cassation pour légitimer le licenciement d’une salariée voilée dans une crèche – a par exemple été contestée[92], en raison de l’incapacité des enfants à relever la nature religieuse du foulard[93]. La protection de l’image de marque de l’entreprise – rattachée à la liberté d’entreprendre afin de justifier une restriction de la liberté religieuse[94] et une discrimination indirecte de la femme voilée[95] – a également été pointée du doigt. Elle implique de considérer que la tenue vestimentaire du salarié engage l’entreprise[96]. Pourtant, « [n]ul ne songerait qu’une entreprise de dépannage automobile professe une foi religieuse particulière parce que le mécanicien en charge du véhicule en panne porte un tee-shirt « Jesus saves » ! »[97].
Dès lors, si l’ordre public matériel n’est pas absent des justifications admises à l’appui d’une restriction du port du voile[98], celles-ci relèvent essentiellement de l’ordre public de protection individuelle, de l’ordre public immatériel et d’une vision extensive des droits et libertés d’autrui. En contradiction avec les préceptes libéraux, « l’interdiction du voile […] [fait donc le plus souvent] de son port un « crime sans victime » »[99]. Le contrôle de proportionnalité effectué est également critiquable.
Les faiblesses du contrôle de proportionnalité
La comparaison des différents contrôles de proportionnalité nécessite de prendre en compte la position du juge appelé à statuer sur la mesure et la marge d’appréciation que celui-ci reconnaît à l’autorité à l’origine de la restriction du droit ou de la différence de traitement. Le raisonnement tenu par le Comité des droits de l’Homme des Nations-Unies – peu marqué par la marge nationale d’appréciation[100] – révèle un contrôle de proportionnalité incisif, conduisant – à propos de la loi du 11 octobre 2010 – à reconnaître une violation de la liberté religieuse et une discrimination au regard du Pacte international relatif aux droits civils et politiques au motif, notamment, du caractère « vague et abstrait » de la notion du « vivre ensemble » et de la gravité des sanctions encourues[101]. Ces mêmes violations ont été reconnues dans l’affaire Baby-Loup à l’issue d’un contrôle ayant pris en compte la gravité de la sanction appliquée à la salariée, licenciée pour faute grave en raison de son refus d’ôter le voile[102].
Alors que l’avocate générale Kokott invitait la Cour de justice à accorder une marge d’appréciation aux États justifiée par l’identité nationale[103], le contrôle de proportionnalité effectué par les juges sur l’obligation de neutralité dans l’entreprise – relativement rigoureux – ne semble pas aller dans ce sens[104]. En érigeant le contact avec la clientèle en élément de justification de la clause, la Cour a vraisemblablement imposé une modulation de l’obligation selon le poste de travail, la mission exercée ou encore le moment de la journée[105]. Elle a également fait preuve d’une certaine audace dans le contrôle de l’absence de solution alternative inhérent au contrôle de nécessité, en incitant les juges internes à s’assurer que l’employeur, avant de procéder au licenciement d’un salarié en application de la clause de neutralité, ne puisse pas lui proposer un autre poste de travail sans contact avec les clients[106]. Son raisonnement a néanmoins été critiqué pour ne pas avoir pris en compte la nature de l’activité de l’employeur, « un magasin de prêt-à-porter ne pouvant certainement pas être traité, par exemple, de la même manière qu’une entreprise de nettoyage »[107].
Au contraire, la Cour européenne des droits de l’Homme, arguant de l’existence de profondes divergences sur la question des rapports entre l’État et les religions, s’est réfugiée derrière la marge nationale d’appréciation pour effectuer un contrôle limité de proportionnalité du point de vue des libertés[108]. Le contrôle de nécessité dans l’arrêt Ebrahimian contre France – ayant conduit à juger conforme à l’article 9 de la Convention l’obligation de neutralité religieuse imposée aux agents publics – est à cet égard révélateur[109]. Alors que l’objectif poursuivi – en substance la protection des droits et liberté d’autrui inhérents au principe de laïcité et au principe d’égalité des usagers devant le service public[110] – aurait pu se satisfaire d’une obligation de neutralité limitée aux signes religieux visibles et aux agents en contact avec les usagers du service public[111], la Cour a jugé l’obligation proportionnée[112]. Son contrôle, ne portant pas sur le contenu de l’obligation – et son éventuelle modulation –, mais sur les sanctions de sa violation[113], révèle une faible « intensité de l’exigence globale de proportionnalité »[114]. De même, dans les arrêts Drogu et Kervanci contre France relatifs à l’exclusion d’élèves voilées des établissements scolaires, la gravité de la sanction encourue – l’exclusion définitive de l’établissement[115] – et la circonstance que les élèves aient proposé de remplacer leur voile par le port d’un bonnet ou d’une cagoule[116] sont apparus sans effet sur le contrôle de proportionnalité[117]. Sous l’angle des discriminations religieuses, la Cour européenne reconnaît généralement aux États une marge d’appréciation réduite[118] : « on ne saurait tolérer une distinction dictée pour l’essentiel par des considérations de religion »[119]. Cette sévérité n’apparaît toutefois pas dans les contentieux intéressant le voile. Lorsque la Cour ne refuse pas d’identifier une différence de traitement fondée sur la religion ou qu’elle ne valide pas celle-ci au regard du but légitime poursuivi[120], elle renvoie, comme dans l’arrêt S.A.S. contre France, au contrôle de proportionnalité limité effectué sous l’angle de la liberté religieuse[121].
Les contrôles de proportionnalité des juges internes présentent eux aussi des insuffisances. L’Assemblée plénière de la Cour de cassation, se livrant à un examen exclusivement sous l’angle des libertés, a jugé que l’interdiction imposée à une salariée de porter son foulard « tant dans les locaux de la crèche ou ses annexes qu’en accompagnement extérieur des enfants confiés à la crèche » était conforme à l’article L. 1121-1 du Code du travail[122]. Pourtant, le caractère général et absolu de l’interdiction – concernant tous l’espace et le temps de travail de l’intéressée – pouvait difficilement être contesté[123]. La chambre sociale ne s’y était d’ailleurs pas trompée en condamnant l’existence d’une « restriction générale et imprécise »[124]. Quant au Conseil constitutionnel, appelé à contrôler la loi du 11 octobre 2010 interdisant la dissimulation du visage dans l’espace public, il s’est contenté d’affirmer que la « conciliation [entre la sauvegarde de l’ordre public et la garantie des droits constitutionnellement protégés n’était] […] pas manifestement disproportionnée »[125]. Le laconisme de la motivation a fait douter certains auteurs de l’existence même du contrôle[126], alors que d’autres ont dénoncé la disproportion de l’interdiction – de nature générale et absolue – fondée sur un ordre public immatériel[127].
In fine, les contrôles de l’intérêt légitime et de proportionnalité exercés par les différents juges – sous l’angle des libertés et sous celui des discriminations – n’apparaissent guère satisfaisants au regard des préceptes libéraux et égalitaires imposant une véritable conciliation des intérêts en présence. L’écart observé avec les constatations du Comité des droits de l’Homme en atteste. En revanche, le cumul des exigences tirées des deux contrôles – liberté et discrimination – apparaît prometteur. Se référant aux arrêts de la Cour de justice de l’Union européenne, la Cour de cassation a, dans un arrêt du 22 novembre 2017, érigé le contact avec la clientèle en véritable condition de validité des clauses de neutralité dans l’entreprise[128]. Selon Bernard Bossu, « [e]xit, donc, le critère, plus général, du « bon fonctionnement de l’entreprise », ou celui, tout aussi général, mais sans doute plus flou, tiré des nécessités de l’exercice d’autres libertés ou droits fondamentaux [découlant de l’article L. 1321-2 du Code du travail issu de la loi du 8 août 2016 dite « El Khomri »], lesquels laissaient augurer d’une possibilité d’appliquer largement le principe de neutralité »[129]. Cette restriction du champ de l’interdiction a été analysée comme résultant d’un cumul des contrôles de discrimination et de liberté[130], l’arrêt ayant d’ailleurs été rendu au visa des textes intéressant l’un et l’autre champ[131].
Au-delà de l’addition des deux types de contrôles, un changement de perception du voile pourrait induire un renforcement du contrôle juridictionnel sur les réglementations tendant à limiter son port.
II – L’appréhension du voile au prisme identitaire et de l’intersectionnalité
Le voile islamique peut-être envisagé comme un élément de l’identité et/ou une expression de la liberté religieuse des personnes l’arborant[132]. Le choix en faveur de l’une ou l’autre vision est susceptible d’influencer le contrôle du juge des libertés et de la non-discrimination. En droit de la non-discrimination, le prisme de la religion, privilégié aujourd’hui, ne doit pas faire oublier que les différentes réglementations sur le foulard préjudicient avant tout aux femmes d’une certaine origine.
A – Le voile : élément de l’identité et/ou liberté religieuse
À l’heure actuelle, le voile islamique est envisagé essentiellement comme une expression de la liberté de religion, dans sa composante de liberté de manifestation de convictions. La liberté de religion comprend en effet deux éléments : la liberté de conscience, celle permettant à l’individu d’adopter la religion de son choix dans son for intérieur, et celle de la manifester à travers le culte, l’enseignement ou encore le port de vêtements et de symboles[133]. Le libre choix apparaît central dans la jurisprudence de la Cour européenne relative à l’article 9 de la Convention qui défend, en premier lieu, la liberté d’avoir ou de ne pas avoir de religion, mais aussi celle d’en changer[134]. Néanmoins, elle reconnaît aussi sa portée identitaire en jugeant que la liberté « figure, dans sa dimension religieuse, parmi les éléments les plus essentiels de l’identité des croyants et de leur conception de la vie »[135].
L’identité, si elle fait l’objet de définitions multiples, renvoie à « ce qui fait qu’une personne est elle-même et non une autre ; […] ce qui permet de la reconnaître et de la distinguer des autres »[136]. Ses éléments constitutifs sont en lien plus ou moins étroit avec la volonté : l’identité est « quelque chose qui se revendique ou se cache au grès des souhaits individuels, elle est aussi quelque chose qu’on hérite et qui en même temps se constitue »[137]. Si, classiquement, est opérée une distinction entre les marqueurs de l’identité choisis – à l’instar du statut social –, et les marqueurs de l’identité non choisis –, à l’instar du sexe, de l’origine, de la couleur de peau, de l’âge –, la dimension plus ou moins disponible des caractéristiques identitaires prête à discussion[138]. La religion fait justement partie de ces éléments situés « au confluent »[139], « à la limite de l’identité personnelle et du choix de l’individu »[140]. Si l’adoption d’une religion en général, et le port du voile en particulier, n’est évidemment pas innée, son appréhension à travers le libre choix de la personne ne concorde pas nécessairement avec la réalité : « [u]ne telle approche revient, sans aucun doute, à ignorer la perception que les croyants peuvent avoir de leur religion (ils ne l’ont pas choisie, elle s’est imposée à eux) »[141]. La dimension quasi héréditaire de certains ports de foulard a du reste été mise en évidence : les femmes d’un certain âge issues de l’immigration « portent le voile depuis leur enfance, elles ont vu leur mère le porter et sont arrivées [en France] avec lui »[142]. Que l’on considère la religion – et en particulier le voile – comme une caractéristique indépendante de la volonté ou, au contraire, comme une caractéristique soumise au bon vouloir de l’individu, la visée identitaire impose de l’envisager comme faisant « partie intégrante de […] [l’] être même »[143]
Cette perspective semble de nature, d’une part, à faciliter l’approche sous l’angle des discriminations. En matière de clauses de neutralité dans les entreprises, la circonstance que le port du voile n’ait pas été considéré comme une des « caractéristiques liées à la personne » a conduit l’avocate générale Kokott – dont les conclusions ont été suivies par la Cour de justice – à refuser d’appliquer la jurisprudence antérieure de la Cour reposant sur « une interprétation large de la notion de « discrimination directe » » et ayant « toujours reconnu l’existence d’une telle discrimination lorsqu’une mesure est indissociablement liée au motif d’inégalité de traitement en cause »[144]. La vision identitaire amène également à remettre en cause la pertinence du raisonnement tenu par la Cour de justice ayant consisté à juger comparables la manifestation des convictions religieuses et celle des autres convictions – philosophiques ou politiques – pour refuser, in fine, d’admettre l’existence d’un traitement différencié des femmes voilées[145]. Reconnaître, à l’inverse, que le port du voile n’est pas uniquement un « comportement […] reposant sur une décision ou une conviction subjective » empêche de le comparer au port d’épinglettes ou de slogans politiques sur une chemise ou un couvre-chef[146].
Plus généralement, et en extrapolant un peu, cette vision pourrait faciliter la reconnaissance des discriminations engendrées par les réglementations traitant indistinctement le voile et d’autres tenues ou signes, non religieux. Le droit de la non-discrimination peut en effet conduire à interdire le traitement identique de situations différentes[147] à travers la notion de discrimination matérielle[148]. La Haute autorité de lutte contre les discriminations et pour l’égalité (HALDE) avait ainsi identifié une discrimination religieuse au sens des articles 225-1 et 225-2 du Code pénal dans une espèce dans laquelle une salariée avait été licenciée pour avoir porté son voile en contradiction d’un règlement intérieur proscrivant le port de tout couvre-chef pour des raisons tenant à la sécurité et à la préservation de l’image de l’entreprise. L’autorité avait reproché à l’employeur d’avoir « traité indifféremment les coiffes sans portées significatives de celles manifestant une conviction religieuse », l’interdiction « concernant la seconde catégorie dev[ant] [selon elle] être entourée de garanties supérieures »[149].
D’autre part, considérer le voile à travers le prisme de l’identité pourrait influer sur le contrôle de proportionnalité exercé par le juge des discriminations et des libertés. Cette perspective conduit à reconsidérer, par exemple, le critère du contact avec la clientèle retenue dans bon nombre d’arrêts pour apprécier la proportionnalité d’une clause de neutralité dans l’entreprise[150]. Lorsque le voile est appréhendé exclusivement comme une liberté – celle de choisir de se voiler ou non –, il apparaît logique de juger proportionnée au regard de l’objectif d’affichage de la neutralité de l’entreprise une réglementation imposant à la salariée de ne l’enlever que dans les hypothèses de contact avec la clientèle. Au contraire, et si l’on suit les conclusions de l’avocate générale Sharpston, envisager que « pour l’adepte pratiquant d’une religion, son identité religieuse fait partie intégrante de son être même », conduit à admettre que celle-ci ne peut être « poliment écarté[e] pendant les heures de travail »[151]. La prise en compte des difficultés, voire de l’impossibilité, pour une femme d’ôter son voile – même de façon ponctuelle pour faire face à la clientèle – modifie l’opération de balance des intérêts. Consciente de ces difficultés, l’avocate générale Sharpston a proposé de juger proportionnée la seule interdiction du port de vêtement couvrant intégralement le visage au motif que la « société occidentale considère le contact visuel ou échange des regards comme d’importance fondamentale dans toute relation supposant une communication face à face entre les représentants d’une entreprise et ses clients »[152]. La proportionnalité disparaîtrait selon elle lorsque la salariée ne serait pas en contact avec le client ou lorsqu’elle revêtirait un simple foulard[153]. Dans d’autres domaines, la vision identitaire du voile pourrait conduire à prendre en compte – plus qu’à l’heure actuelle – la gravité des sanctions assortissant l’interdiction[154]. L’exclusion de l’établissement scolaire pour les élèves voilées ou encore la sanction pénale des femmes intégralement couvertes dans l’espace public apparaissent particulièrement sévères dès lors que le voile n’est pas envisagé uniquement comme une liberté qu’elles choisissent d’exercer, mais également comme une « seconde peau » dont elles ne peuvent que difficilement se séparer[155].
Dès lors, la logique inhérente à l’approche sous l’angle des libertés influence actuellement le contrôle tel qu’il devrait être mené sous l’angle des discriminations en occultant la dimension identitaire du voile[156]. Celle-ci mérite d’être prise en compte. La piste consistant à chercher à distinguer, dans la pratique, les hypothèses de port du voile dit « identitaire » et celles de port du voile dit « libre » n’apparaît ni faisable – les deux dimensions étant étroitement imbriquées dans la plupart des situations – ni pertinente. Elle aboutirait à renforcer l’effectivité du droit de la discrimination pour les premières en affaiblissant, pour les autres, « le lien entre la liberté de religion et le principe de non-discrimination, c’est-à-dire le droit d’exercer cette liberté sans s’exposer à en subir les conséquences dommageables »[157]. Elle présenterait également le danger d’essentialiser le foulard comme symbole d’oppression des femmes, déniant à celles-ci la capacité de choisir librement de se voiler[158]. Une approche médiane, consistant à maintenir le postulat selon lequel le port du voile constitue une liberté, tout en reconnaissant, par ailleurs, le lien étroit l’unissant à l’identité de la personne, permettrait en revanche de faciliter la qualification de la discrimination et de renforcer le contrôle de proportionnalité exercé sur les réglementations concernées.
Il reste que ce vœu semble appelé à rester pieux devant les juges de Strasbourg. Dans l’arrêt S.A.S contre France, le fait que la Cour européenne ait accepté de se placer sur le terrain de l’article 8 de la Convention et de considérer le port de la burqa comme « l’expression d’une identité culturelle »[159], ne l’a pas conduit à faire preuve de plus de sévérité dans son contrôle de proportionnalité[160]. Selon Gwénaële Calvès, l’adoption d’un tel point de vue – strictement libéral – est logique : « dans la mesure où la Convention protège au premier chef la liberté de changer de religion ou de conviction, l’accent doit être mis sur le libre arbitre, au détriment de l’ »identité ». Les gardiens d’une telle liberté doivent postuler que la religion, et a fortiori ses exigences, peuvent être mises à distance. Il leur incombe d’affirmer qu’en droit, elles sont choisies et non subies, même si une telle proposition est empiriquement fausse »[161]. Cette approche rend également plus délicate la reconnaissance de la dimension « raciale » de la discrimination touchant les femmes voilées[162].
B – Le voile islamique au-delà de la religion (approche intersectionnelle)
Parce que le voile constitue le signe d’une religion – l’Islam –, les considérations religieuses sur lesquelles repose la discrimination des personnes revêtues de cet accessoire sont évidentes. Néanmoins, d’autres approches – sous l’angle des discriminations sexiste et raciale – pourraient s’avérer opportunes.
Le voile islamique et la discrimination des femmes
Alors que le voile est arboré exclusivement par les femmes, les juges appelés à statuer sur les réglementations limitant le port de celui-ci se sont toujours refusés d’identifier une discrimination directe ou indirecte selon le sexe[163]. Jusqu’à maintenant, la qualification de discrimination intersectionnelle n’a pas non plus été appliquée. Le concept est inconnu du droit français et est mis en œuvre avec une certaine réticence par les Cours européennes[164]. Pourtant, la situation des femmes voilées est présentée comme l’exemple typique d’une telle discrimination[165]. Celle-ci fait partie des discriminations multiples définies par la Commission européenne comme reposant sur une combinaison quelconque de discriminations fondées sur le sexe, la race ou l’origine ethnique, la religion ou les convictions, le handicap, l’âge ou l’orientation sexuelle[166]. Ces différents motifs s’ajoutent dans le cadre d’une discrimination additive et s’imbriquent, au point d’apparaître inséparables, dans le cadre de la discrimination croisée ou intersectionnelle[167]. À cet égard, la situation des femmes voilées ne renvoie ni à la discrimination touchant les femmes en général ni à la discrimination touchant les musulmans en général[168]. Les motifs du sexe et de la religion se trouvent étroitement entremêlés, faisant peser sur elles une forme d’exclusion spécifique.
L’analyse sous l’angle de la discrimination intersectionnelle est particulièrement pertinente lorsque sont pris en compte les critères de la religion et du sexe, facilement identifiables[169]. Le Comité des droits de l’Homme des Nations-Unies a ainsi reconnu que l’interdiction de dissimulation du visage dans l’espace public français constitue une « forme de discrimination croisée fondée sur le sexe et la religion »[170]. Il a également considéré que le licenciement de la salariée voilée dans la crèche Baby-loup était une « discrimination inter-sectionnelle basée sur le genre et la religion »[171]. Cette analyse – conduisant à prendre en compte la pénalisation particulière des femmes désireuse se couvrir la tête et/ou le visage – pourrait influencer le contrôle du juge, en particulier au stade du contrôle de proportionnalité[172]. L’analyse par le prisme de l’intersectionnalité est également envisageable avec un autre critère.
Le voile islamique et la discrimination raciale
Certains textes révèlent l’étroitesse des liens unissant les discriminations religieuses et raciales. Au premier chef, l’article 1er de la Constitution française qui, en disposant que la République assure « l’égalité devant la loi de tous les citoyens sans distinction d’origine, de race ou de religion », met les trois notions – désignation constitutionnelle de la différence[173] – sur le même plan. Selon Etienne Balibar, « les catégories ainsi repérées […] ne sont pas, en réalité, disjointes : ni en théorie, ni surtout en pratique »[174]. À cet égard, l’auteur pointe la difficulté de qualifier la discrimination touchant des individus au motif qu’ils sont « « Juifs », « Arabes » voire […] « Musulmans » (désignation [n’ayant, selon lui,] rien de purement religieux) »[175]. De même, la formule employée dans la loi du 1er juillet 1972 relative à la lutte contre le racisme – reprise en substance dans le Code pénal actuel[176] – « ne procède pas du hasard » quand elle sanctionne la diffamation et la discrimination raciale motivées « par l’origine ou l’appartenance à une ethnie, une nation, une race ou une religion déterminée »[177]. Cette énumération correspond, selon Danièle Mayer, « à une réalité criminologique »[178].
Il a été montré combien la religion correspond à un motif « gigogne » de discrimination renvoyant « à bien autre chose qu’à des dissensions d’ordre théologique »[179]. La dimension raciale ou ethnique des différences de traitement fondée sur le voile peut être redoutée[180], dans la mesure où la religion visée – l’Islam – est celle de la minorité nationale, de l’immigré ou encore de l’étranger[181]. D’ailleurs, dans la première version des directives de l’Union européenne sur les discriminations, et alors que le texte insistait sur les différentes formes de rejet des musulmans en Europe, le critère de la religion apparaissait dans la directive « race ou origine ethnique » et non dans la directive « égalité de traitement »[182]. Le phénomène d’« ethnicisation du foulard » abonde en ce sens[183]. Dès lors, tout comme l’« apparence physique » et le « patronyme » ont été ajoutés aux motifs de discrimination prévus par le Code pénal et le Code du travail afin de faciliter l’appréhension de la discrimination raciale[184], il pourrait en aller de même du port du voile[185].
L’approche intersectionnelle des discriminations touchant les femmes voilées apparaît envisageable en prenant en compte les motifs de la religion et de l’origine ou de la « race » prétendue[186]. Néanmoins, et selon Gwénaële Calvès, l’opération de qualification est « difficile à conduire dans le cas d’une discrimination qui frapperait des « arabes musulmans », ces deux caractéristiques (« ethno-raciale » et religieuse) étant imbriquées au point d’être perçues comme synonymes »[187]. La seule qualification de discrimination raciale pourrait être privilégiée. La notion de discrimination raciale indirecte permettrait alors d’appréhender les désavantages particuliers que font peser la plupart des réglementations apparemment neutres sur les personnes d’origine arabe[188]. La qualification de discrimination raciale directe pourrait, quant à elle, être appliquée chaque fois que le port du voile serait avancé explicitement comme critère de différenciation d’une personne d’origine arabe ou, plus largement, d’une personne présentant « l’apparence de la différence »[189]. Quant au motif religieux, il se limiterait aux « cas d’école » : l’hypothèse de l’« Européenne blonde, grande aux yeux bleus convertie à l’Islam et portant la burqa »[190].
La mise en évidence du critère racial plutôt que religieux de la discrimination présente un intérêt certain. En droit français, si le champ de la discrimination raciale est relativement similaire à celui de la discrimination religieuse, au regard du régime juridique en revanche, la loi du 27 mai 2008 – applicable en droit civil et en droit administratif[191]– prévoit que la différence de traitement fondée sur la religion peut être justifiée, contrairement à celle fondée sur « l’origine, le patronyme ou l’appartenance ou la non-appartenance, vraie ou supposée, à une ethnie ou une prétendue race »[192]. Cette différence de régime n’apparaît néanmoins pas dans le Code pénal et dans le Code du travail[193]. En droit de l’Union européenne, les discriminations fondées sur la religion ne sont interdites qu’en matière d’emploi[194] alors que les discriminations fondées sur la race sont prohibées dans de nombreux domaines.[195] Quant aux juges de Strasbourg, ils qualifient la discrimination raciale de « particulièrement odieuse »[196], et refusent qu’une différence de traitement sur le critère de la « race » ou de l’origine ethnique puisse être justifiée « dans une société démocratique contemporaine, fondée sur les principes du pluralisme et du respect de la diversité culturelle »[197]. Ils s’opposent également à la renonciation au droit de ne pas faire l’objet d’une telle discrimination[198]. Reconnaître la dimension raciale des différences de traitement dont sont l’objet les femmes voilées présenterait, quoi qu’il en soit, une certaine force symbolique. Les discriminations raciales sont en effet, dans l’inconscient collectif, en quelque sorte « moins bien admises que de pures discriminations religieuses »[199].
Conclusion
La pratique française relative au port du voile apparaît pouvoir être remise en cause à l’aune de nouvelles grilles d’analyse, non seulement sur le terrain de la liberté religieuse, mais aussi sur celui du droit des discriminations comme en attestent les conclusions rendues par le Comité des droits de l’Homme à propos de la loi interdisant la dissimulation du visage dans l’espace public et le licenciement de la salariée voilée de la crèche Baby-Loup[200]. Le « modèle » républicain, issu du libéralisme politique, échoue à remettre en cause des réglementations dirigées contre un voile ne préjudiciant ni à autrui ni à l’ordre public, mais interprété – de façon contestable – comme l’« étendard de l’islamisme », « le signe d’une doctrine ayant le projet de faire plier la République, notamment par la diffusion d’une pression sociale attentatoire à la liberté des femmes »[201]. Cette faillite fait écho à la critique « communautarienne » reprochant aux libéraux – se déclarant « aveugles aux différences » afin de ne discriminer personne – d’imposer en réalité aux individus « un moule homogène qui ne leur est pas adapté »[202]. L’importance accordée en France aux valeurs n’autorisant pas l’expression des convictions religieuses, à l’instar de la laïcité et de la neutralité, préjudicie en effet aux minorités pour lesquelles la religion impose le port de signes ostensibles[203].
Alors que des propositions de loi sont régulièrement déposées pour étendre l’interdiction du voile aux structures privées en charge de la petite enfance[204], à l’Université[205], aux sorties et activités scolaires[206], à l’accès à la piscine[207] ou à la baignade[208], l’espoir demeure permis, dans la mesure où les conclusions du Comité des droits de l’Homme font désormais partie du contexte juridique pertinent s’imposant aux juges du fond et aux juridictions suprêmes[209]. Parmi les pistes à envisager, celle consistant à cumuler systématiquement les contrôles sous l’angle des libertés et des discriminations – tel qu’il apparaît dans l’arrêt rendu par la Cour de cassation le 22 novembre 2017 – apparaît prometteuse. Par ailleurs, si la logique propre au droit des libertés semble avoir, jusqu’ici, « contaminée » celle inhérente au droit de la non-discrimination au détriment de la protection de la femme voilée, le mouvement inverse – reposant sur la prise en compte de la dimension identitaire du voile – est possible. Sur le terrain des discriminations, la portée raciale et sexiste des différences de traitement dont font l’objet les femmes voilées devraient également être prise en compte. L’enjeu de la réflexion est de taille, dans la mesure où le repli sur soi découlant des situations d’exclusion telles qu’elles existent aujourd’hui en France à l’égard de ces femmes est de nature à favoriser le développement du communautarisme, tant redouté par notre système universaliste[210].
[1] GIUSEPPINA MUZZARELLI M., Histoire du voile. Des origines du foulard islamique, Bayard, 2017, p. 7.
[2] En dernier lieu, le voile a été qualifié de « non souhaitable dans notre société » par le ministre de l’Éducation nationale et de la jeunesse, Jean-Michel Blanquer : https://www.lexpress.fr/actualite/societe/religion/jean-michel-blanquer-le-voile-n-est-pas-souhaitable-dans-notre-societe_2103142.html
[3] Loi n° 2004-228.
[4] Loi n° 2010-1192.
[5] Art. 2 de la loi n° 2016-1088.
[6] V. la décision du Défenseur des droits n° 2018-303 ; le Guide du Ministère des sports : « Laïcité et faits religieux dans le champ du sport. « Mieux vivre ensemble » », 1re éd., mai 2009, p. 39.
[7] Il semble possible de limiter le port de tous couvre-chefs pour des considérations de sécurité : V. le Guide du Ministère des sports, op. cit., p. 36.
[8] V. les nombreux règlements prévoyant la neutralité religieuse des membres de l’association : https://www.restosducoeur.org/independance-a-legard-du-politique-et-du-religieux/ ; https://fr.theepochtimes.com/une-benevole-des-restos-du-coeur-exclue-de-lassociation-apres-avoir-refuse-de-retirer-son-voile-islamique-1130597.html ; https://www.vie-en-marche.org/l-association/nos-valeurs-universelles.html.
[9] Et ce, même si le texte ne met en avant aucune considération religieuse. CAYLA O., « Dissimulation du visage dans l’espace public : l’hypocrisie du juge constitutionnel trahie par la sincérité des circulaires ? », Dalloz, 2011, p. 1166.
[10] Pour une présentation des différents types de voiles : GIUSEPPINA MUZZARELLI M., op. cit., p. 247.
[11] Par ex : CAA Marseille, 3 juillet 2017, n° 17MA01337.
[12] V. not. l’étude de la délégation interministérielle à la lutte contre le racisme et l’antisémitisme, et la haine anti LGBT, État des lieux des discriminations et agressions envers les musulmans de France, 6 novembre 2019 et le 8e baromètre sur la perception des discriminations dans l’emploi du Défenseur des droits paru en février 2015.
[13] Art. 25 de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ; CE, Avis, 3 mai 2000, Mlle Marteaux, n° 217017, RFDA, 2001, p. 146, concl. SCHWARTZ R., AJDA, 2000, p. 602, chron. GUYOMAR M. et COLIN P., Dalloz, 2000, p. 747, note KOUBI G., RRJ, 2004, n° 4, p. 2124, note ARMAND G.
[14] V. le contentieux relatif à la suspension d’un contrôleur du travail à la suite de son refus d’ôter son voile : CAA de Lyon, 27 novembre 2003, n° 03LY01392, RFDA, 2004 p. 588, concl. KOLBERT E., AJDA, 2004, p. 154, note MELLERAY F., AJFP, 2004, p. 88, note LEMAIRE F.
[15] V. not. : MOULY J., « Le principe de neutralité dans l’entreprise », Dalloz, 2016, p. 1992 ; WOLMARK C., « Neutralité dans l’entreprise ou neutralisation des travailleurs ? », Le droit ouvrier, 2017, n° 825, pp. 226 et s. ; HENNION S., « Les clauses de neutralité dans l’entreprise », JCP G, 2018, HS, pp. 37
[16] V. l’art. 2 du TUE. V. aussi : « Pluralisme, tolérance et esprit d’ouverture caractérisent une « société démocratique » ». Cr EDH, 13 août 1981, Young, James et Webster c. Royaume-Uni, n° 7601/76 78/0677, § 63.
[17] La minorité est un « un groupe social incorporé dans un État dont la population est d’une race, d’une langue ou d’une religion autre que la leur ». ATTAL-GALY Y., Droits de l’homme et catégories d’individus, LGDJ, Bibliothèque de droit public, 2003, p. 13.
[18] JOIN-LAMBERT M. T., Politiques sociales, Presses de Sciences Po et Dalloz, 1997, p. 653.
[19] NGAMENI H. B., « Non-discrimination et droit des peuples minoritaires », Les Annales de droit, 11/2017, § 18. Accessible en ligne : https://doi.org/10.4000/add.541
[20] BUI-XAN O., Le droit public français entre universalisme et différencialisme, Economica, Corpus Essais, 2004, pp. 377 et s.
[21] BUI-XAN O., op. cit., p. 379.
[22] KOUBI G., « Le droit à l’in-différence fondement du droit à la différence », Le droit à la différence, ROULAND N. (dir.), PUAM, 2002, p. 279.
[23] Ibid.
[24] V. not. l’art. 10 de la Déclaration des droits de l’Homme et du citoyen.
[25] V. l’art. 9 de la Convention européenne des droits de l’Homme, l’art. 10 de la Charte de l’Union européenne et l’art. 18 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques.
[26] CALVÈS G., « Introduction. Les discriminations fondées sur la religion : quelques remarques sceptiques », Analyse comparée des discriminations religieuses en Europe, LAMBERT ABDELGAWAD E. et RAMBAUD T. (dir.), Société de Législation comparée, Collection Colloques, 2011, p. 10.
[27] « On conviendra néanmoins que l’hypothèse devrait être rare ; mais là n’est pas l’essentiel ». MOULY J., « Le voile dans l’entreprise : nouveaux rebondissements sous l’angle de la discrimination », Dalloz, 2015, p. 1132.
[28] Si la personne se voit interdire l’accès à une salle de sport ou à une activité bénévole – telle la distribution de repas aux Restos du cœur – il sera difficile d’identifier la mise en cause d’une liberté fondamentale.
[29] LYON-CAEN A., « Variations sur la discrimination ou le pluriel derrière le singulier », Le droit social, l’égalité et les discriminations, BORENFREUND G. et VACARIE I. (dir.), Dalloz, Thèmes et commentaires, 2013, p. 53.
[30] CALVÈS G., « Introduction. Les discriminations fondées sur la religion : quelques remarques sceptiques », op. cit., pp. 9 et s.
[31] Le droit de la Convention européenne des droits de l’Homme illustre la subsidiarité de l’analyse sous l’angle des discriminations par rapport à celle sous l’angle des libertés. RINGELHEIM J., « La non-discrimination dans la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme, bilan d’étape », CRIDHO Working Paper 2017/2, pp. 5 et s.
[32] La Cour de cassation, dans son arrêt du 16 juin 2014, a refusé d’examiner le licenciement d’une femme voilée sous l’angle des discriminations, pour le valider uniquement à la suite du contrôle portant sur la restriction des libertés fondamentales (Cass. ass. plén., 25 juin 2014, n° 13-28.369, Dalloz, 2014, p. 1386, et 1536, entretien RADÉ C., AJDA, 2014, p. 1293, et 1842, note MOUTON S. et LAMARCHE T., AJCT, 2014, p. 511, obs. DE LA MORENA F., Droit social, 2014, p. 811, étude MOULY J., RDT, 2014, p. 607, étude ADAM P., RFDA, 2014, p. 954, note DELVOLVÉ P., RTD civ, 2014, p. 620, obs. HAUSER J., Droit ouvrier, 2014, p. 835, note WOLMARK C., JCP S, 2014, p. 1287, note BOSSU B., JCP E, 2014, p. 1445, note DESBARATS I.) V. l’avis du Procureur général Claude Marin sous l’arrêt (accessible sur site de la Cour de cassation, spéc. pp. 11 et s.) défendant l’exclusivité des deux approches.
[33] V. infra.
[34] V. toutefois : CE, ord., 26 août 2016, n° 402742, RGD, 2016, n° 5, note COSSALTER P., JCP A, 2016, n° 35, p. 2, note PAULIAT H., Droit administratif, 2016, n° 11, p. 31, note EVEILLARD G., AJDA, 2016, n° 37, p. 2122. Le Conseil d’État a ordonné la suspension de l’arrêté du maire de Villeneuve-Loubet interdisant l’accès à la plage aux personnes revêtues de tenues non respectueuses « du principe de laïcité ».
[35] Cr EDH, 26 novembre 2015, Ebrahimian c. France, n° 64846/11, Dalloz, 2016, p. 192, note DIEU F., AJFP, 2016, n° 1, p. 32, note ZARCA A., La Gazette du Palais, 2016, n° 2, p. 25, note SAURON J.-L., n° 9, p. 45, note ANDRIANTSIMBAZOVINA J., JCP G, 2016, n° 4, p. 164, note GONZALEZ G.
[36] Cr EDH, 4 mars 2009, Dogru c. France, n° 27058/05 et Kervanci c. France, n° 31645/04, RDT civ., 2009, p. 285, obs. MARGUÉNAUD J.-P., Journal du DI, 2009, n° 3, p. 1042, obs. DECAUX E. et TAVERNIER P., Procédures, 2009, n° 1, p. 19, obs. FRICERO N.
[37] Cons. Const. déc. n° 2010-613 DC du 7 octobre 2010, JCP G, 2010, n° 42, p. 1930, note BERTRAND M., n° 43, p. 1977, note LEVADE A., JCP A, 2010, n° 48, p. 35, AJDA, 2010, n° 42, p. 2373, note VERPEAUX M., RFDC, 2011, n° 87, p. 548, note FATIN-ROUGE S. M. et XAVIER P., RTDH, 2014, n° 99, p. 639, Constitutions, n° 2014-4, p. 483, note AFROUKH M.
[38] Cr EDH, 1er juillet 2014, S.A.S. c. France, n° 43835/11, RDLF, 2014, n° 23, chron. n° 23, note BLAY-GRABARCZYK C., JCP G, 2014, n° 28, p. 1398, note SURREL H, n° 29, p. 1425, note BONNET B., n° 39, p. 1686, note LEVADE A., RTD E, 2015, n° 1, p. 95, note DUCOULOMBIER P., JCP A, 2015, n° 7, p. 41, note DIEU F.
[39] CJUE, 14 mars 2017, Achbita, aff. C157-15, pt 35 à 43 et CJUE, 14 mars 2017, Bougnaoui, aff. C188-15, pt 32., Semaine sociale Lamy, 2017, n° 1762, p. 3, note CALVÈS G., p. 6, note LAULOM S., RTD H, 2017, n° 112, note BRIBOSIA E. et RORIVE I., RDT, 2017, p. 422, note ADAM P., Dalloz, 2017, note MOULY J., JCP S, 2017, n° 13, p. 1105, note BOSSU B, Droit social, 2017, p. 450, note PAGNERRE Y., RTD E, 2019, vol. 55, n° 1, p. 85, WEILER J. H. H., p. 105, note HENNETTE-VAUCHEZ S.
[40] Notamment : WOEHRLING J.-M., « La liberté de religion est-elle reconnue en droit constitutionnel français ? », Droit et religion en Europe. Études en l’honneur de Francis Messner, Presses universitaires de Strasbourg, Société, droit et religion, 2014, spéc. pp. 571 et s.
[41] MARGUÉNAUD J.-P., « Mariages et signes religieux : laïcité quand tu nous tiens ! (CEDH 2e sect., 20 janv. 2009, Serife Yigit c. Turquie – CEDH 5e sect., Kervanci c. France et Drogu c. France), RDT civ., 2009, p. 285 ; DOCKÈS E., « Liberté, laïcité, Baby Loup : de la très modeste et très contestée résistance de la Cour de cassation face à la xénophobie montante », Droit social, 2013, p. 388.
[42] CALVÈS G., « Introduction. Les discriminations fondées sur la religion : quelques remarques sceptiques », op. cit., p. 23. L’auteur évoque la comparaison inhérente à la qualification de la discrimination et la conciliation inhérente au contrôle des libertés.
[43] V. l’art. 2 a) de la directive 2000/78/CE du 27 novembre 2000 portant création d’un cadre général en faveur de l’égalité de traitement en matière d’emploi et de travail ; l’art. 2 a) de la directive 2000/43/CE du 29 juin 2000 relative à la mise en œuvre du principe de l’égalité de traitement entre les personnes sans distinction de race ou d’origine ethnique. En droit de la Convention européenne des droits de l’Homme, l’article 4 « protège contre toute discrimination les individus placés dans des situations analogues ». Cr EDH, 13 juin 1979, Marckx c. Belgique, n° 6833/74, § 32.
[44] CALVÈS G., « Politique de neutralité au sein des entreprises privées : un feu vert de la CJUE ? », Semaine sociale Lamy, 2017, n° 1762, pp. 3-7.
[45] CALVÈS G., « Introduction. Les discriminations fondées sur la religion : quelques remarques sceptiques », op. cit., p. 15.
[46] Ibid.
[47] Ibid., p. 16.
[48] Ibid.
[49] Loi n° 2004-228 ; art. L. 141-5-1 du Code de l’éducation ; circulaire n° 2004-084 du 18 mai 2004, JO du 22 mai 2004.
[50] CE, 6 mars 2009, n° 307764, Lebon.
[51] V. aussi à propos du code vestimentaire imposé dans les établissements scolaires turques : Cr EDH, 24 janvier 2006, Köse c. Turquie, n° 26625/02, Dalloz, 2006, p. 1717, obs. RENUCCI J.-F.
[52] Cr EDH, 10 novembre 2005, Leyla Sahin c. Turquie, § 165, RTD H, 2004, n° 60, p. 951, note BRIBOSIA E. et RORIVE I., Droit administratif, 2004, n° 10, note LOMBARD M., JCP A, 2004, n° 52, p. 1671, note GAUTHIER C., RDP, 2005, p. 3, note CAMBY J.-P., Journal du DI, 2005, n° 2, P. 529, note DECAUX E., Dalloz, 2005, n° 3, p. 204, note YILDIRIM G. ; Cr EDH, 30 juin 2009, Aktas c. France, n° 43563/08 (décision sur la recevabilité), JCP A, 2009, n° 46, p. 23, note DIEU F., AJDA, 2009, n° 37, p. 2077, obs. GONZALEZ G.
[53] LANGLAIS C., « La fragmentation du principe de non-discrimination devant la Cour européenne des droits de l’homme : une source d’imprévisibilité », La Revue des droits de l’homme [En ligne], http://journals.openedition.org/revdh/5202, § 20.
[54] De telles hypothèses constituent le terrain de prédilection de l’analyse en termes de discrimination indirecte : KOBLER T., Limites et potentiel du concept de discrimination indirecte, Commission Européenne, 2008, pp. 54 et s. V. le raisonnement mené par le Comité des droits de l’homme l’ayant conduit à reconnaître l’existence d’une discrimination des femmes musulmanes découlant de la loi du 11 octobre 2010 : constatations du Comité concernant la communication n° 2807/2016, § 7.14.
[55] Selon la Cour de justice, la règle doit « être considérée comme traitant de manière identique tous les travailleurs de l’entreprise, en leur imposant, de manière générale et indifférenciée, notamment une neutralité vestimentaire […] ». CJUE, 14 mars 2017, Achbita, op. cit., pt 30. V. aussi : « [c]e qui demeure est uniquement une inégalité de traitement entre les travailleurs qui veulent manifester activement une conviction donnée (qu’elle soit de nature religieuse, politique ou philosophique) et leurs collègues qui n’éprouvent pas ce besoin ». KOKOTT J., Concl. sous CJUE, 14 mars 2017, Achbita, C157-15, pt 53.
[56] LAULOM S., « Un affaiblissement de la protection européenne contre les discriminations », Semaine sociale Lamy, 27 mars 2017, n° 1762.
[57] CJUE, 12 décembre 2013, Hay, aff. C-267/12, Dalloz, 2014, p. 24, et p. 1115, obs. PORTA J., AJ fam., 2014, p. 127, obs. ROBERGE H., RTD civ., 2014, p. 342, obs. HAUSER J. V. aussi : Cass. soc., 9 juillet 2014, n° 12-20.864, Droit social, 2014, p. 854, obs. MOULY J., JCP S, 2015, n° 6, p. 32, note JEANSEN E.
[58] LAULOM S., op. cit.
[59] MOULY J., « La CJUE et le voile dans l’entreprise privée : le recul de la protection contre les discriminations », Dalloz, 2017, p. 947.
[60] CALVÈS G., « Introduction. Les discriminations fondées sur la religion : quelques remarques sceptiques », op. cit., p. 17.
[61] V. l’art. 2, § 2, point b), des directives 2000/43/CE et 2000/78/CE. V. également : Cr EDH, 7 février 2006, D.H. c. République tchèque, n° 57325/00, Journal du DI, 2008, n° 3, p. 836, obs. TAVERNIER P.
[62] Art. 2 b) de la directive 2000/78/CE.
[63] Cr EDH, S.A.S. c. France, op. cit., § 161. Un autre raisonnement était possible : v. les Constatations du Comité concernant la communication n° 2807/2016, § 7.14.
[64] Mise à part l’existence d’une présomption de discrimination indirecte, v. Cr EDH, 5 juin 2008, Sampanis e.a. c. Grèce, n° 32526/05, AJDA, 2008, p. 1929, obs. FLAUSS J.-F.
[65] MOULY J., « L’exigence de neutralité, entre discrimination directe et indirecte », Droit social, 2018, p. 330.
[66] V. not. : DUPRÉ DE BOULOIS X., Droit des libertés fondamentales, PUF, Thémis droit, 2018, n° 220 et s.
[67] Selon la définition retenue par le juge européen dans l’arrêt Affaire linguistique belge, une distinction est discriminatoire « si elle manque de justification objective et raisonnable ». Cr EDH, 23 juillet 1968, Affaire relative à certains aspects du régime linguistique de l’enseignement en Belgique, n°1474/62 et s., § 10.
[68] SURREL H., « L’appréciation contingente des justifications », SUDRE F. et SURREL F. (dir.), Le droit à la non-discrimination au sens de la Convention européenne des droits de l’homme, Actes du colloque des 9 et 10 novembre 2007 organisé par l’Institut de droit européen des droits de l’Homme à l’Université de Montpellier, Bruylant, Droit et Justice, 2008, p. 122.
[69] V. l’art. 2 b i) de la directive n° 2000/78/CE et l’art. 1 de la loi n° 2008-496.
[70] V. l’art. 4 la directive n° 2000/78/CE et l’art. 2 de la loi n° 2008-496.
[71] SURREL H., « L’appréciation contingente des justifications », op. cit., p. 135.
[72] L’exigence de « vivre ensemble » a, par exemple, été rattachée aux droits et libertés fondamentaux d’autrui pour fonder l’interdiction de dissimulation du visage dans l’espace public dans l’arrêt S.A.S contre France de la Cour européenne des droits de l’Homme (§ 121).
[73] V. HALDE, délib. n° 2008-193 du 15 septembre 2008 ; résolution de l’Assemblée nationale du 11 mai 2010 « sur l’attachement au respect des valeurs républicaines face au développement de pratiques radicales qui y portent atteinte » ; opinion conjointe des membres du Comité Ilze Brands Kehris, Sarah Cleveland, Christof Heyns, Marcia V. J. Kran et Yuval Shany (concordante) sous les constatations no 2807/2016 adoptées par le Comité des droits de l’Homme le 22 octobre 2018.
[74] Cr EDH, 15 février 2001, Dahlah c. Suisse, n° 42393/98 (décision sur la recevabilité), AJDA, 2001, p. 480, note FLAUSS J.-F., RFDA, 2003, p. 536, note CHAUVIN N. ; Cr EDH, Leyla Sahin c. Turquie, op. cit., § 111.
[75] Ibid.
[76] Cons. Const. déc. n° 2010-613 DC du 7 octobre 2010, op. cit., cons. n° 4.
[77] TULKENS F., Opinion dissidente sous l’arrêt Leyla Sahin c. Turquie, op. cit., § 12. V. sur la burqa : HENNETTE-VAUCHEZ S., « La burqa, la femme et l’État », 12 mai 2010, raison-publique.fr, https://www.raison-publique.fr/article317.html ; BÉCHILLON D., « Voile intégral : éloge du Conseil d’État en théoricien des droits fondamentaux », RFDA, 2010, p. 467.
[78] V. sur la critique libérale de l’ordre public de protection individuelle : ARMAND G., « L’ordre public de protection individuelle », RRJ, 2004, n° 2, pp. 1583 et s.
[79] Cr EDH, S.A.S. c. France, op. cit., § 119. V. en ce sens : l’étude du Conseil d’État du 25 mars 2010 « relative aux possibilités juridiques d’interdiction du port du voile intégral ».
[80] Obs. générale n° 28, 68e session, 29 mars 2000, § 13.
[81] Alors que la Cour européenne n’érige que « rarement en but légitime la protection d’un principe constitutionnel d’organisation étatique » (GONZALEZ G., « Rideau sur le voile et autres signes ostensibles », AJDA, 2009, p. 2077), elle a admis la conventionnalité de l’ensemble des réglementations sur le voile soumises à son contrôle au regard de ce fondement.
[82] VALENTIN V., « Remarques sur les mutations de laïcité. Mythes et dérives de la « séparation » », RDLF, 2016, chron. n° 14.
[83] Cr EDH, Dogru c. France, Kervanci c. France, op. cit.
[84] Cass. soc., 19 mars 2013, CPAM, n° 12-11.690, Droit social, 2013, p. 388, note DOCKÈS E., JCP S, 2013, n° 14, p. 27, note BOSSU B., RIDC, 2014, p. 723, note DOCKÈS E., p. 677, note MACHELON J.-P., AJDA, 2013, p. 1069, note DREYFUS J.-D., JCP G, 2009, n° 19-20, 542, note CORRIGNAN-CARSIN D. V. sur cette question : ARROYO J., « L’obligation de neutralité religieuse et l’externalisation des activités administratives », RFDA, 2019, n° 4, p. 719.
[85] V. étude adoptée par l’assemblée générale du Conseil d’État le 19 décembre 2013, à la demande du Défenseur des droits, pp. 29-34. Sur les sorties scolaires : TA Nice, 9 juin 2015, n° 1305386, AJDA, 2015, p. 1933, note BRICE-DELAJOUX C., AJCT, 2015, p. 544, obs. ROUQUET P. Sur les activités en classe : CAA Lyon, 23 juillet 2019, n° 17LY04351, JCP A, 2019, note GAY-PHILIP M. et DELIANCOURT S.
[86] Le Conseil d’État a exclu que la laïcité puisse fonder l’arrêté visant à interdire le port de certaines tenues sur la plage : CE, ord., 26 août 2016, op. cit.
[87] DIEU F., « L’affaire Baby-Loup : quelles conséquences sur le principe de laïcité et l’obligation de neutralité religieuse ? Note sous CA Paris, 27 novembre 2013, n° 13/02981 », JCP A, 2014, n° 15, 2114.
[88] HENNETTE-VAUCHEZ S. et VALENTIN V., L’affaire Baby loup ou la nouvelle laïcité, LGDJ, Lextensoéditions, 2014.
[89] VALENTIN V., « Remarques sur les mutations de laïcité. Mythes et dérives de la « séparation » », op. cit.
[90] Cr EDH, S.A.S. c. France, op. cit., § 139.
[91] CE, 27 novembre 1996, n° 172686 ; HALDE, délib. n° 2007-117 du 14 mai 2007 ; Cr EDH, S.A.S. c. France, op. cit., § 135.
[92] Constatations adoptées par le Comité en vertu du Protocole facultatif se rapportant au Pacte concernant la communication no 2662/2015, 10 août 2018, § 8.8. ; HENNETTE-VAUCHEZ S., « Pour une lecture dialogique du droit international des droits humains. Remarques sur les constatations du Comité des droits de l’Homme dans l’affaire Baby Loup, et quelques réactions qu’elles ont suscitées », La Revue des droits de l’homme [En ligne], http://journals.openedition.org/revdh/4643, § 12.
[93] MOULY J., « L’affaire Baby Loup devant le Comité onusien des droits de l’homme : vers une révision déchirante de la jurisprudence interne ? », Dalloz, 2018, p. 2097. D’ailleurs, la Cour européenne des droits de l’Homme avait admis qu’il « est bien difficile d’apprécier l’impact qu’un signe extérieur fort tel que le port du foulard peut avoir sur la liberté de conscience et de religion d’enfants en bas âge ». Cr EDH, Dahlab c. Suisse, op. cit.
[94] Validation d’un licenciement d’une vendeuse portant le voile, jugé contraire à l’image de marque : CA, Saint Denis de la réunion, 9 septembre 1997. V. la même solution pour une vendeuse dans un centre commercial : CA Paris, 16 mars 2001.
[95] V. CJUE, 14 mars 2017, Achbita, op. cit., pt 37-38. La Cour européenne des droits de l’Homme a également affirmé, dans une espèce où une hôtesse de l’air s’était trouvée licenciée en raison du port d’une croix que « la volonté qu’avait un employeur de projeter une certaine image commerciale » est « assurément légitime ». Cr EDH, 27 mai 2013, Eweida et a c. Royaume-Uni, n° 48420/10 et a., § 5, JCP G, 2013, n° 7, note BLAY-GRABARCZYK C., RJPF, 2013, n° 3, p. 14, note PUTMAN E., RDT, 2013, n° 5, p. 337, note LARONZE F., AJDA, 2013, n° 31, note BURGORGUE-LARSEN L., RDC, 2013, n° 4, p. 1503, note MARGUÉNAUD J.-P.
[96] Ce raisonnement conduit à prendre en compte les préjugés des clients. BRIBOSIA E. et RORIVE I., « Affaire Achbita et Bougnaoui : entre neutralité religieuse et préjugés. Obs. sous CJUE, Gde Ch, arrêts Achbita et Bougnaoui », 14 mars 2017, RTDH, 2017, n° 112, p. 1033 ; HENNETTE-VAUCHEZ S. et WOLMARK C., « Plus vous discriminez, moins vous discriminez. À propos des conclusions de l’avocat générale dans l’affaire CJUE Achbita, C-157/15 », SSL, 2016, n° 1739. Pour une vision moins critique : VINCENT V. « Quelles perspectives pour la religion dans l’entreprise ? », RDLF, 2017, chron. n°1.
[97] ADAM P., « La CJUE ou l’anticyclone européen (À propos de la neutralité religieuse dans l’entreprise privée) CJUE 14 mars 2017, C-188/15, Bougnaoui c. Micropole SA et CJUE 14 mars 2017, C-157/15, Achbita c. G4S Secure Solutions NV », RDT, 2017, p. 422.
[98] Les impératifs de santé ou d’hygiène peuvent amener l’employeur à imposer le port de tenues susceptibles de ne pas être compatibles avec le maintien de signes religieux (v. HALDE, délib. n° 2009-311 du 14 septembre 2009 et n° 2010-106 du 10 octobre 2010). Des considérations de sécurité – tenant à la limitation des risques de falsification et d’usurpation d’identité – justifient également l’obligation de poser tête nue sur une photographie de documents d’identité ou celle de retirer le voile à l’entrée d’un consulat (v. Cr EDH, 4 mars 2008, El Morsli contre France, n° 15585/06).
[99] VALENTIN V., « Remarques sur les mutations de laïcité. Mythes et dérives de la « séparation » », op. cit.
[100] ONILLON T., « La valeur des constatations du Comité des droits de l’homme de l’ONU. Sortir de la dichotomie obligatoire/non obligatoire », AJDA, 2019, p. 1040.
[101] Constatations concernant la communication n° 2807/2016, § 7.10 et 7.11.
[102] Constatations concernant la communication n° 2622/2015, § 8.9. V. aussi à propos de l’exclusion d’un élève sikh d’un établissement scolaire en application de la loi du 15 mars 2004 : constatations concernant la communication n° 1852/2008, § 8.1 et s.
[103] KOKOTT J., Conclusions, op. cit., pt 125-127.
[104] Selon Gwénaële Calvès, le risque de la reconnaissance d’une telle marge nationale aurait été « d’aboutir à des variations sensibles, d’un État membre à l’autre, dans la protection contre les discriminations religieuses ». CALVÈS G., « Le critère « religion ou conviction », même sens et même portée à Luxembourg et à Strasbourg ? », Droit social, 2018, p. 323.
[105] En ce sens : CALVÈS G., « Politique de neutralité au sein des entreprises privées : un feu vert de la CJUE ? », op. cit., p. 3.
[106] CJUE, 14 mars 2017, Achbita, op. cit., pt 43.
[107] MOULY J., « La CJUE et le voile dans l’entreprise privée : le recul de la protection contre les discriminations », Dalloz, 2017, p. 947. Du reste, l’utilisation par la Cour de justice dans l’affaire Achbita de l’adverbe « notamment » (pt 30) laisse entendre qu’il existe d’autres hypothèses dans lesquelles un code vestimentaire neutre pourrait être exigé. PINATEL F., « Le port du voile islamique confronté au principe de neutralité (suite) », Note sous Cass. soc., 22 novembre 2017, n° 1319.855, JCP S, 2017, n° 49, 1400.
[108] Cr EDH, Leyla Sahin c. Turquie, op. cit., § 109 ; Dogru c. France, op. cit., § 103 ; Cr EDH, S.A.S. c. France, op. cit., § 129.
[109] Cr EDH, Ebrahimian c. France, op. cit.
[110] Ibid., § 53.
[111] ARMAND G., « La neutralité des agents publics en question. À propos de CE, Avis, 3 mai 2000, Melle Marteaux », RRJ, 2004, n° 4, p. 2128.
[112] WILLOCX L., « Le port des « signes religieux » au travail par des agents du service public », RDT, 2016, p. 348.
[113] ARMAND G., op. cit., p. 2128.
[114] WILLOCX L., op. cit., p. 348. V. aussi : ZARCA A., « Interdiction du port du voile par les agents publics : les dits et non-dits de la Cour européenne des droits de l’homme », AJFP, 2016, p. 35 ; O’LEARLY, Opinion en partie dissidente, en partie concordante sous Cr EDH, Ebrahimian c. France, op. cit.
[115] Le contrôle limité de la proportionnalité est, selon G. Gonzalez, révélé par le fait que « la Cour n’évoque les solutions alternatives d’enseignement offertes aux élèves exclus définitivement que « par ailleurs », après avoir conclu que » la sanction […] n’apparaît pas disproportionnée » ». GONZALEZ G. « Rideau sur le voile et autres signes ostensibles », obs. sous Cr EDH, 30 juin 2009, Aktas c. France, AJDA, 2009, n° 37, p. 2077.
[116] V. en ce sens également : CE, 6 mars 2009, n° 307764, AJDA, 2009, p. 1006.
[117] MARGUÉNAUD J.-P., op. cit., p. 285. V. également : Cr EDH, S.A.S. c/ France, op. cit. et les commentaires critiquant le contrôle de proportionnalité effectué, not. BONNET B., « La CrEDH et la dissimulation du visage dans l’espace public », JCP G, 2014, n° 29, 835.
[118] SURREL H., « L’appréciation contingente des justifications », op. cit., p. 147 ; RINGELHEIM J., op. cit., p. 25.
[119] Cr EDH, 23 juin 1993, Hoffmann c. Autriche, n°12875/87, § 36. V. pour un autre exemple de contrôle de proportionnalité strict : Cr EDH, Palau-Martinez c. France, 16 décembre 2003, n° 6492701, § 42.
[120] Cr EDH, Leyla Sahin c. Turquie, op. cit., § 165 ; Cr EDH, Aktas c. France, op. cit. V. à propos de la discrimination fondée sur le sexe : Cr EDH, Dahlab c. Suisse, op. cit.
[121] Cr EDH, S.A.S. c. France, op. cit., § 161.
[122] Cass., ass. plén., 25 juin 2014, op. cit.
[123] V. not. : CORRIGNAN-CARSIN D., « Entre laïcité et liberté religieuse, l’art difficile du compromis », note sous Cass. soc., 19 mars 2013, JCP G, 2013, n° 19-20, 542, p. 937.
[124] Cass. soc., 19 mars 2013, op. cit.
[125] Cons. Const. déc. n° 2010-613 DC, op. cit., § 5.
[126] BOUMGHAR M., « Conclusions », DUARTE I. (dir.), Manifester sa religion : Droits et limites, L’Harmattan, 2011, p. 253. V. également : WOEHRLING J.-M., op. cit., p. 572.
[127] V. not. : BONNET B., op. cit.
[128] Cass. soc., 22 mars 2017, n° 13-19.855, JCP S, 2017, n° 49, 1400, note BOSSU B., Droit social, 2017, n° 4, p. 348, note NASOM-TISSANDIER H., Dalloz, 2018, n° 4, p. 218, note MOULY J., JCP E, 2018, n° 1, p. 55, note CHONNIER J.-M., Droit ouvrier, 2018, n° 835, p. 76, note BIED-CHARRETON M.-F.
[129] BOSSU B., « Le port du voile islamique confronté au principe de neutralité (suite) », Note sous Cass. soc., 22 novembre 2017, n° 13-19.855, op. cit..
[130] MOULY J., « L’exigence de neutralité, entre discrimination directe et indirecte », op. cit., p. 330.
[131] Ibid.
[132] V. l’article : GONZALEZ G., « Identité et/ou liberté de religion dans la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme », RDLF, 2019, chron. n° 23.
[133] V. l’art. 9 § 1 de la CEDH ; « Guide sur l’article 9 de la Convention européenne des droits de l’homme. Liberté de pensée, de conscience, de religion », 31 décembre 2019, § 25 ; Cr EDH, Eweida et a. c. Royaume-Uni, op. cit., § 94 ; Cr EDH, 5 septembre 2017, Hamidovic c. Bosnie, n° 57792/15, § 30.
[134] RENUCCI F., L’article 9 de la Convention européenne des droits de l’homme, Édition du Conseil de l’Europe, Dossier sur les droits de l’homme, 2004, n° 20, § 16.
[135] Cr EDH, 25 mai 1993, Kokkinakis c. Grèce, n° 14307/88, § 31. V. aussi : constatations du Comité des Droits de l’Homme, 22 juillet 2011, Ranjit Singh c. France, communication no 1876/2009, § 8.3
[136] CORNU G. (dir.), Vocabulaire juridique, 8e éd., P.U.F., « Quadrige », 2007, p. 463.
[137] BIOY X., « L’ambiguïté du concept de non-discrimination », Le droit à la non-discrimination au sens de la Convention européenne des droits de l’homme, op. cit., p. 61.
[138] Ibid.
[139] BRIBOSIA E. et RORIVE I., op. cit., p. 1028.
[140] HENNETTE-VAUCHEZ S. et WOLMARK C., op. cit. V. aussi : AST F., « Regards croisés des juridictions et de la HALDE », Manifester sa religion : Droits et limites, op. cit., p. 186.
[141] CALVÈS G., « Le critère « religion ou conviction », même sens et même portée à Luxembourg et à Strasbourg ? », op. cit., p. 323.
[142] JOVELIN E., « Sociologie de la femme voilée. Du voile hérité au voile révélé », Pensée plurielle, 2009/2, n° 21, pp. 113 et s. Elle cite l’étude de GASPARD F. et KHOSROKHAVAR F., « La République et le voile », La Découverte, 1995.
[143] SHARPSTON E., Conclusions sous CJUE, 14 mars 2017, Bougnaoui, aff. C188-15, pt 118.
[144] KOKOTT J., op. cit., pt 44-45.
[145] Selon l’avocate générale Kokott, l’impératif de neutralité « affecte un travailleur religieux exactement de la même manière qu’il affecte un athée convaincu qui manifeste de manière visible sa position antireligieuse par sa tenue vestimentaire ou un travailleur politiquement actif qui affiche, par des pièces d’habillement, son parti politique préféré ou certains contenus politiques […] ». KOKOTT J., op. cit., pt 52.
[146] Contra : KOKOTT J., op. cit., pt 52. V. SHARPSTON E., op. cit., pt 118 : « Mais on aurait tort de supposer que, en quelque sorte, tandis que le sexe ou la couleur de peau suivent une personne partout, la religion ne le ferait pas ».
[147] V. en droit de l’UE : CJCE, 17 juillet 1963, Italie c. Commission, aff. 13/63 ; CJCE, 30 juin 1998, Brown, aff. C-394/96, pts 30 et 31. En droit de la CEDH : Cr EDH, 6 avril 2000, n° 34369/97, Thlimmenos c. Grèce, § 42 et s., Journal du DI, 2003, n° 2, p. 551, note DECAUX E. et TAVERNIER P. La Cour européenne reprochait en l’espèce qu’une réglementation ne distingue pas entre « les personnes condamnées pour des infractions commises exclusivement en raison de leurs convictions religieuses et les personnes reconnues coupables d’autres infractions ».
[148] DAUGAREILH I., « Les discriminations multiples. Une opportunité de repenser le droit à la non-discrimination », Hommes et migrations, Dossier « la discrimination au féminin pluriel », 1292/2011, pp. 34 et s., n° 4, Accessible en ligne : https://doi.org/10.4000/hommesmigrations.627.
[149] HALDE, délib. n° 2006-126 du 19 juin 2006, § 23. V. également : délib. n° 2005-26 du 19 septembre 2005.
[150] V. supra.
[151] SHARPSTON E., op. cit., pt 118.
[152] Ibid., pt 130.
[153] Ibidem.
[154] V. supra.
[155] V. les constatations concernant la communication n° 1852/2008 (spéc. § 8.7) rendues à propos de l’exclusion d’un élève sikh d’un établissement scolaire en application de la loi du 15 mars 2004, transposables à l’hypothèse de l’exclusion d’une élève voilée.
[156] CALVÈS G., « Le critère « religion ou conviction », même sens et même portée à Luxembourg et à Strasbourg ? », op. cit., p. 323.
[157] CALVÈS G., « Introduction. Les discriminations fondées sur la religion : quelques remarques sceptiques », op. cit., p. 15.
[158] SHARPSTON E., op. cit., pt 75.
[159] Cr EDH, S.A.S c. France, op. cit., § 120.
[160] Même si son raisonnement s’appuie essentiellement sur l’article 9 dans le cadre du contrôle de proportionnalité V. supra.
[161] CALVÈS G., « Le critère « religion ou conviction », même sens et même portée à Luxembourg et à Strasbourg ? », op. cit., p. 323.
[162] Selon G. Calvès, cette vision est susceptible de remettre en cause « le mécanisme même de la discrimination religieuse indirecte à raison […] de l’origine ethnique. (Car si le lien entre la foi (ici, musulmane) et son expression (par le port, ici, d’un foulard islamique) est jugé contingent (subordonné à un acte de volonté), on voit mal qu’il puisse en aller autrement du lien entre la foi et […] telle ou telle origine ethnique.) ». CALVÈS G., « Le critère « religion ou conviction », même sens et même portée à Luxembourg et à Strasbourg ? », op. cit., p. 323.
[163] Cr EDH, Dahlab c. Suisse, op. cit. ; Cr EDH, Kurtulmus c. Turquie, op. cit. V. également : KOKOTT J., op. cit., pt 112. Contra, à propos de la loi du 15 mars 2004 : MARGUÉNAUD J.-P., op. cit., p. 285.
[164] MOIZARD N., « La CJUE limite la reconnaissance de la discrimination multiple. Note sous CJUE, 24 novembre 2016, C-443/15, Davide L. Parris », RDT, 2017, p. 267 ; LANGLAIS C., op. cit., n° 15.
[165] Notamment : VEYRETOUT L., op. cit., p. 229 ; MERCAT-BRUNS M., « Les discriminations multiples et l’identité au travail au croisement des questions d’égalité et de libertés », RDT, 2015, p. 28.
[166] Commission européenne, Lutte contre la discrimination multiple ? : pratique, politiques et lois, septembre 2007.
[167] DAUGAREILH I., op. cit., n° 5.
[168] Le concept d’intersectionnalité a été forgé par une juriste afin de démontrer la protection insuffisante des requérantes noires américaines, obligées de formuler leur grief sous l’angle soit de la discrimination sexuelle soit de la discrimination raciale. V. HENNETTE-VAUCHEZ S., « Pour une lecture dialogique du droit international des droits humains (…) », op. cit., n° 22.
[169] Il en va différemment à propos des critères de la religion et de l’origine ou de la « race » prétendue. CALVÈS G., « Introduction. Les discriminations fondées sur la religion : quelques remarques sceptiques », op. cit., p. 13 (voir en note de bas de page).
[170] Constatations, op. cit., § 7. 17.
[171] Constatation, op. cit., § 8.13. V. également : constatations révisées adoptées par le Comité au titre de l’article 5 (par.4) du Protocole facultatif, concernant la communication n° 2274/2013 du 22 octobre 2018, § 7.8.
[172] MOIZARD N., op. cit., p. 267.
[173] HUBER G., « Diversité, différence, multitude : comprendre la proposition qui nous est faite de retirer le mot race de la Constitution », Sans distinction de…race., BONNAFOUS S. HERSZBERG B. et ISRAEL J.-J. (dir.), Université Paris XII-Val de Marne et Presses de la fondation nationale des sciences politiques, Mots les langages du politique, 1992, p. 104.
[174] BALIBAR E., « Le mot race n’est pas de « de trop » dans la Constitution française », Sans distinction de…race, op. cit., p. 249.
[175] Ibid.
[176] L’article 225-1 du Code pénal évoque la discrimination en raison de l’appartenance ou de la non-appartenance « vraie ou supposée, à une ethnie, une Nation, une prétendue race ou une religion déterminée ». V. aussi l’art. R625-8 du même Code.
[177] MAYER D., « L’appréhension du racisme par le code pénal », Sans distinction de…race, op. cit., p. 332.
[178] Ibid. V. pour une analyse plus nuancée : LOCHAK D., « La race : une catégorie juridique ? », Sans distinction de…race, op. cit., p. 300.
[179] CALVÈS G., « Introduction. Les discriminations fondées sur la religion : quelques remarques sceptiques », op. cit., p. 13.
[180] Not. : VEYRETOUT L., « Les femmes et les discriminations religieuses », Analyse comparée des discriminations religieuses en Europe, op. cit., p. 230.
[181] V. FROMONT M., « Conclusion générale. Les discriminations religieuses et les moyens de lutte contre celles-ci », Analyse comparée des discriminations religieuses en Europe, op. cit., p. 281 ; CALVÈS G., « Introduction. Les discriminations fondées sur la religion : quelques remarques sceptiques », op. cit., p. 13.
[182] CALVÈS G., « Le critère « religion ou conviction », même sens et même portée à Luxembourg et à Strasbourg ? », op. cit.
[183] Expression utilisée par : BRIBOSIA E. et RORIVE I., op. cit., p. 1035. L’ethnicisation désigne « le processus de la saillance des catégorisations ethniques dans nombre de situations concrètes en France ». BERTHELEU H., « Sens et usage de l’ »ethnicisation ». Le regard majoritaire sur les rapports sociaux ethniques », Revue européenne des migrations internationales, 2007, vol. 23 n° 2/2007, https://doi.org/10.4000/remi.4167, n° 5. V. aussi : HAJJAT A. et MARWAN M., Islamophobie. Comment les élites françaises fabriquent le « problème musulman », La Découverte, coll. « Cahiers libres », 2013.
[184] Le législateur a, s’agissant du « patronyme », vraisemblablement « confondu un indice de la discrimination raciale et un motif nouveau de différenciation illicite ». GARDIN A. et ZABEL A.-L., « Les discriminations raciales au travail », RJS, 2/03, p. 90. V. pour un ex. d’application : Cass. soc., 10 novembre, 2009, n° 08-42.286, Dalloz, 2009, p. 2857, obs. MAILLARD S., et 2010, p. 672, obs. PORTA J., RDT, 2010, p.169, obs. AUBERT -MONPEYSSAN T., RTD civ., 2010, p. 75, obs. HAUSER J.
[185] V.
[186] BRIBOSIA E. et RORIVE I., op. cit., p. 1025.
[187] CALVÈS G., « Introduction. Les discriminations fondées sur la religion : quelques remarques sceptiques », op. cit., p. 13 (voir en note de bas de page).
[188] La « Commission for racial equality » au Royaume-Uni, dont les avis n’ont pas de force contraignante, a affirmé que l’interdiction du foulard dans une école publique était une discrimination raciale indirecte au motif qu’elle affectait de façon disproportionnée la population d’origine indienne (Affaire de la Grammar school d’Altrincham, 1988). V. pour un même raisonnement tenue par la Chambre des Lords à propos du refus d’accès à l’école opposé à un enfant sikh ne pouvant revêtir la casquette de l’uniforme : Mandla c. Dowell Lee, 1983.
[189] La « race » – dénuée de toute réalité scientifique – est parfois définie comme « la propriété de celui qu’on considère comme différent ». LANGANEY A., « Le poids des mots, le choc des idées », Sans distinction de…race, op. cit., p. 170.
[190] KARAGIANNIS S., « Conclusions », Analyse comparée des discriminations religieuses en Europe, op. cit., p. 208.
[191] MEDARD INGHILTERRA R., « L’inégale multiplication des critères de discrimination », Actes du colloque « Multiplication des critères de discrimination. Enjeux, effets et perspectives », 2018, p. 78. Accessible en ligne : https://juridique.defenseurdesdroits.fr/doc_num.php?explnum_id=18337
[192] Art. 2, 3° de la loi n° 2008-496.
[193] Art. 225-3 du Code pénal et art. L. 1333-2 du Code du travail. V. le problème dénoncé de « modalités de prohibition de la discrimination […] actuellement posées en des termes différents » par les textes en droit français. MEDARD INGHILTERRA R., op. cit., p. 74.
[194] Art. 3 de la directive 2000/78/CE.
[195] Art. 3 de la directive 2000/43/CE. En revanche, les dérogations admises sont relativement similaires : FLAUSS J.-F., « L’action de l’Union européenne dans le domaine de la lutte contre le racisme et la xénophobie », RTD H, 2001, n° spécial, p. 508.
[196] Cr EDH, 13 mars 2006, Timichev c. Russie, n° 55762/00 et 55974/00, op. cit., § 56.
[197] Cr EDH, Timichev c. Russie, op. cit., § 58.
[198] Cr EDH, D. H. et a. c. République Tchèque, op. cit., § 204.
[199] AST F., op. cit., p. 227.
[200] V. aussi les constatations concernant la communication n° 1852/2008 rendues à propos de l’exclusion d’un élève sikh mais susceptibles de concerner l’exclusion des élèves voilées également en application de la loi du 15 mars 2004.
[201] VALENTIN V., « Remarques sur les mutations de la laïcité. Mythes et dérives de la « séparation » », op. cit.
[202] TAYLOR C., Multiculturalisme : différence et démocratie, Flammarion, 1997, p. 63. V. aussi : « l’alignement sur le droit commun peut conforter les inégalités de fait, servir de support à la xénophobie et provoquer ce qu’il est censé éviter : les réactions identitaires ». ROULAND N., « Note d’anthropologie juridique : l’inscription juridique des identités », RTD civ., 1994, p. 287.
[203] La dimension « chrétienne » de la laïcité est fréquemment dénoncée : POLLET-PANOUSSIS D., « Manifester sa religion : droits et limites. Le point de vue du juge administratif », Manifester sa religion : Droits et limites, op. cit., p. 156. V. sur l’absence de neutralité de la sphère publique : HENNETTE-VAUCHEZ S. et VALENTIN V., op. cit., spéc. pp. 83 et s. ; BUI-XAN O., op. cit., spéc. p. 419. De façon générale, « le droit positif, malgré une apparence de neutralité, favorise indirectement ceux qui appartiennent à la majorité ». ATTAL-GALY Y., op. cit., p. 533.
[204] Rapport n° 144 (2011-2012).
[205] Texte n° 386 (2017-2018).
[206] Texte n° 2379 (2019-2020).
[207] Texte n° 54 (2019-2020)
[208] Texte n° 4286 (2016-2017).
[209] V. le discours du premier président de la Cour de cassation, audience solennelle d’installation du 3 septembre 2018, accessible en ligne : https://www.courdecassation.fr/publications_26/prises_parole_2039/discours_2202/montagnier_premier_8930/installation_3_40023.html. V. aussi les propos de Maître Waquet évoquant une action indemnitaire devant les juridictions administratives dans l’affaire Baby-Loup : http://www.wk-rh.fr/actualites/detail/102191/baby-loup-la-responsabilite-de-l-etat-pourrait-etre-engagee.html
[210] V. par ex. en matière d’emploi le développement d’« entreprises communautaires » : QUIGBON C., « EntreMuslims.fr, Deenjob, Oummawork : réponse à l’exclusion ou communautarisme ? », Le Monde, 24 mars 2017.
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