L’objectif d’accès des mineurs non accompagnés aux droits sociaux garantis dans le cadre de la protection de l’enfance
Perrine Dumas, Maître de conférences, Université de Corse[1]
L’objectif d’accès aux droits sociaux implique de « garantir sur l’ensemble du territoire l’accès effectif de tous aux droits fondamentaux dans les domaines de l’emploi, du logement, de la protection de la santé, de la justice, de l’éducation, de la formation et de la culture, de la protection de la famille et de l’enfance »[2]. Cet objectif nécessite que les voies de droit et moyens concrets, permettant effectivement à chacun de bénéficier des droits sociaux, soient établis par l’État. Tous les droits sociaux sont concernés qu’il s’agisse de ceux tendant à l’attribution de biens (tels que le droit au logement ou le droit aux aides sociales ou aux prestations sociales) ou à la fourniture de services (tels que le droit à l’éducation ou à la santé), peu importe que ces droits soient reconnus par des normes internationales, européennes ou de droit interne, y compris constitutionnelles. La problématique de l’accès aux droits sociaux s’intègre elle-même dans le cadre plus large de la problématique de l’accès au droit, qui implique également l’accès au juge, si l’on part de l’idée selon laquelle la protection juridictionnelle des droits sociaux est indispensable pour garantir leur effectivité. S’interroger sur l’objectif d’accès aux droits sociaux revient ainsi à se demander si l’État a mis en place les garanties matérielles et procédurales, ainsi que les voies de droit, permettant que chacun bénéficie des droits qui lui sont reconnus par le droit positif, en saisissant, au besoin, le juge qui est le garant de leur effectivité[3].
Ces droits ne seront pas nécessairement les mêmes pour tous. L’augmentation des phénomènes d’exclusion a conduit à la reconnaissance de droits catégoriels et à l’octroi de prestations à des publics « ciblés ». Ce « ciblage » et cette création de catégories de bénéficiaires de la protection sociale permettent d’appliquer un régime spécifique à des situations particulières et a donc une portée pratique. Mais la catégorisation des personnes a également toujours une dimension symbolique, en particulier lorsqu’elle concerne les étrangers[4].
En France, le « mineur non accompagné » (ci-après, MNA) n’est pas « ciblé » en tant que catégorie juridique déterminée, alors qu’il l’est en droit de l’Union européenne. L’article L. 221-2-2 CASF vise, en effet, le « mineur privé temporairement ou définitivement de la protection de sa famille ». Néanmoins, celui-ci est couramment dénommé « MNA »[5], par référence au droit de l’Union. C’est la raison pour laquelle nous utilisons cette expression pour désigner le « mineur privé temporairement ou définitivement de la protection de sa famille », et ce, bien que la définition du MNA retenue par le droit de l’Union soit restrictive en ce qu’elle exclut de la catégorie de « MNA » les mineurs qui ont la nationalité d’un État membre et les ressortissants de pays tiers ou apatrides qui résident dans l’État membre de l’Union dans lequel ils sont nés et ont été abandonnés[6]. Le droit français ne distingue pas, quant à lui, la nationalité du mineur, ni n’impose que celui-ci soit d’abord entré sur le territoire avant de se retrouver isolé. Seuls deux éléments sont pris en considération : la minorité et l’isolement. La Cour de cassation a eu l’occasion de donner une définition plutôt large de l’isolement, admettant qu’un enfant puisse être isolé bien qu’il n’ait pas rompu avec le titulaire de l’autorité parentale présent à l’étranger et que la présence sur le territoire français d’autres adultes avec lesquels l’enfant était en contact ne suffisait pas à écarter la qualification d’isolement[7]. En matière d’évaluation de la minorité, la Cour de Cassation est moins volontaire, se retranchant volontiers derrière le pouvoir souverain des juges du fond, en estimant qu’il s’agit de questions de fait[8].
Conformément aux articles 2[9] et 20 de la convention internationale relative aux droits de l’enfant[10], la législation de protection de l’enfance est applicable à tous les mineurs présents sur le territoire français[11], quelles que soient leur nationalité ou leur situation administrative, en tant que loi de police[12]. Cette égalité garantit que les jeunes se disant mineurs et isolés soient « d’abord considérés comme des enfants à protéger, relevant de ce fait des dispositions légales de la protection de l’enfance » et non comme « des étrangers, relevant de ce fait de la compétence de l’État »[13], ce qui est conforme à la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme (ci-après, CourEDH) qui a indiqué que, « dans les affaires relatives à l’accueil d’étrangers mineurs, accompagnés ou non accompagnés, il convient de garder à l’esprit que la situation d’extrême vulnérabilité de l’enfant est déterminante et prédomine sur la qualité d’étranger en séjour illégal »[14].
Les MNA sont donc, en principe, bénéficiaires de l’ensemble des droits sociaux garantis par le droit commun de l’aide sociale à l’enfance (ci-après, ASE). Le législateur a néanmoins ressenti le besoin de préciser que la protection de l’enfance « a également pour but de prévenir les difficultés que peuvent rencontrer les mineurs privés temporairement ou définitivement de la protection de leur famille et d’assurer leur prise en charge »[15]. Superflue, cette précision a été ajoutée en 2007 parce que l’accroissement du nombre de MNA[16] suscite des difficultés en pratique, lesquelles impactent l’accès de ces mineurs à leurs droits sociaux. En effet, si les MNA peuvent se prévaloir du droit commun de l’ASE, il faut pour cela qu’ils aient accès au dispositif de l’aide sociale. Or, si cet accès est de droit pour les nationaux, tel n’est pas le cas pour les étrangers.
Aux frontières extérieures de l’espace Schengen, ainsi qu’aux frontières intérieures des États membres lorsque les contrôles ont été rétablis, l’entrée est en principe refusée au MNA qui ne remplit pas l’ensemble des conditions d’entrée[17]. La décision de refus d’entrée doit être motivée et susceptible de recours[18]. Un administrateur ad hoc accompagne le MNA dans son recours contre le refus d’entrée et le placement en zone d’attente décidé en conséquence[19]. Le mineur peut bénéficier d’une mesure de protection au titre de l’assistance éducative[20], mais cela est loin d’être systématique, car les délais sont particulièrement réduits[21].
Le MNA présent sur le territoire bénéficie d’un droit de séjour et d’une protection contre l’éloignement attachés à sa minorité. Par conséquent, l’urgence est moins prégnante qu’en zone d’attente. Néanmoins, celui-ci est exposé à une contestation de sa minorité et souvent dans une situation sociale précaire. L’accès au système de protection de l’enfance reste ainsi « traversé par des réserves majeures tenant à la fois aux suspicions de fraude et au coût de la prise en charge »[22]. Cet accès a d’abord été organisé par une circulaire du 31 mai 2013 qui a institué un « dispositif national de mise à l’abri, d’évaluation et d’orientation », destiné notamment à organiser une solidarité interdépartementale en matière d’accueil de ces jeunes[23]. La loi n° 2016-297 du 14 mars 2016 relative à la protection de l’enfant l’a ensuite remplacée et complétée.
Le dispositif de prise en charge des MNA vise à favoriser l’insertion des MNA dans le système de protection de l’enfance, tout en évitant qu’il ne profite à des majeurs et qu’il créé des inégalités entre les départements recevant beaucoup de MNA et ceux en recevant peu[24]. Cette poursuite d’objectifs contradictoires, qui a d’ailleurs été admise par le Conseil constitutionnel[25], explique la complexité et les tensions caractérisant ce système qui se décompose en deux phases : la phase d’évaluation et de mise à l’abri, qui conditionne l’accès aux droits sociaux garantis dans la phase d’accompagnement proprement dit.
Durant la première phase, l’évaluation sociale, menée par le département, dans un cadre défini par un arrêté du 17 novembre 2016, a pour principal objectif la détermination de l’âge et de l’isolement, au regard notamment des déclarations de l’intéressé sur son identité, son âge, sa famille d’origine, sa nationalité et son état d’isolement, ainsi que la vérification qu’une évaluation n’a pas déjà été opérée par un autre département[26]. Le service évaluateur rend un avis motivé quant à la minorité ou à la majorité et au caractère d’isolement familial ou non de la personne. Le rapport d’évaluation et l’avis motivé sont transmis au président du conseil départemental (ci-après, PCD), qui détermine si des investigations complémentaires sont nécessaires. Des vérifications documentaires par les services de police ou la préfecture peuvent être sollicitées. S’il subsiste des doutes, des examens médicaux peuvent être demandés, mais uniquement par l’autorité judiciaire[27]. L’évaluation pouvant impliquer la mobilisation d’outils et de leviers relevant du contrôle migratoire et donc de l’État, les départements ont, après avoir contesté en vain leur compétence[28], émis le souhait que l’État devienne juridiquement responsable de l’accueil d’urgence et de l’évaluation[29]. Aucune réforme législative en ce sens n’a, pour l’heure, été opérée.
Après la phase d’évaluation, le jeune est orienté, par le procureur de la République ou le juge des enfants en tenant compte de son intérêt supérieur, dans le cadre des objectifs de répartition proportionnée de l’accueil de ces mineurs entre les départements, fixés par le ministre de la Justice qui doit rendre publique au 15 avril, pour l’année civile en cours, la clé de répartition propre à chaque département[30].
Durant la phase d’évaluation, comme pendant celle de l’accompagnement proprement dit, une obligation de protection des MNA, dont l’effectivité est garantie par le juge du référé-liberté, est impartie aux pouvoirs publics (I). La portée de cette obligation est néanmoins faible, ce qui nuit à l’effectivité des droits sociaux attachés à l’obligation de protection (II).
I. Le caractère inconditionnel de l’obligation de protection des MNA
Le dispositif législatif de prise en charge des MNA impartit aux départements l’obligation d’organiser leur protection (A). L’État peut intervenir à titre supplétif (B).
A. L’obligation de protection impartie au conseil départemental
Le conseil départemental du lieu où la personne se déclarant MNA a été repérée ou s’est présentée est tenu de mettre en place un accueil provisoire d’urgence (ci-après, APU), qui dure, en principe, cinq jours[31]. À l’issue ou avant l’expiration de ce délai, si l’évaluation a été conduite avant son terme, le PCD saisit le procureur de la République aux fins d’ouverture d’une mesure d’assistance éducative[32]. Dans ce cas, l’APU se prolonge jusqu’à l’intervention d’une décision judiciaire[33].
L’État intervient en prenant en charge financièrement cette phase d’évaluation et de mise à l’abri. Les modalités de cette prise en charge ont été modifiées en 2019[34] pour accroître la participation financière de l’État et mieux tenir compte de la durée des évaluations, qui est souvent loin des 5 jours en principe prévus par le législateur puisqu’elle était en moyenne de 40 jours en novembre 2017[35]. Ainsi, au titre de cette phase d’évaluation, la participation forfaitaire de l’État s’établit à 500 € par personne évaluée, montant auquel s’ajoute une somme de 90 € par personne et par jour dans la limite de 14 jours, puis de 20 € par personne et par jour dans la limite de 9 jours supplémentaires[36]. Au-delà, la charge financière pèse sur le département.
Du fait des charges administratives et financières induites par l’hébergement d’urgence des MNA, le département n’est pas toujours enclin ou en mesure de remplir ses obligations en matière de mise à l’abri durant la phase d’évaluation, ni en matière de prise en charge une fois le mineur confié au service de l’ASE. Il est donc bienvenu que le Conseil d’État ait admis que le juge du référé-liberté puisse être saisi par une personne se déclarant mineure, malgré son incapacité juridique, pour faire valoir son droit à un hébergement d’urgence[37]. Tel est le cas lorsque le mineur étranger isolé sollicite un hébergement d’urgence qui lui est refusé par le département, auquel le juge judiciaire l’a confié[38], ou lorsque le département, ou le service mandaté par celui-ci, a refusé à une personne se déclarant mineure le bénéfice de l’accueil provisoire d’urgence et de l’évaluation prévus par l’article R. 221-11 du CASF[39]. Dans ces deux hypothèses, la contestation relève de la juridiction administrative et ne conduit pas le juge à statuer sur la question de la saisine de l’autorité judiciaire ou sur celle de l’admission de l’intéressé à l’aide sociale à l’enfance.
S’il est intéressant que ce juge intervienne dans ces cas d’ineffectivité de la protection, les jeunes qui n’ont pas la chance d’être accompagnés ne connaissent pas toujours cette possibilité de déposer un recours afin d’être hébergés. Surtout, l’intervention du juge du référé-liberté est subordonnée à certaines conditions. D’abord, en cas de refus d’accès au dispositif d’hébergement et d’évaluation opposé par le PCD, il n’intervient pas lorsque la personne qui se présente ne « satisfait manifestement pas à la condition de minorité ». Ainsi que nous le verrons plus loin, la mise en doute de la minorité permet de limiter le champ d’application personnel de l’obligation de mise à l’abri (infra, partie II, A.).
Ensuite, hormis ce cas, le juge apprécie si le refus d’accès est susceptible d’entraîner des « conséquences graves » caractérisant une atteinte grave et manifestement illégale à une liberté fondamentale « en fonction des diligences accomplies par l’administration en tenant compte des moyens dont elle dispose, ainsi que de l’âge, de l’état de santé et de la situation de famille de la personne intéressée »[40]. Le refus d’accès au dispositif d’hébergement et d’évaluation est constitutif d’une telle atteinte lorsque la vulnérabilité est attestée par le fait d’être sans-abri. Dans cette hypothèse, les arguments du département relatifs aux limites de ses capacités d’accueil sont rejetés et l’existence d’une atteinte à une liberté fondamentale constatée[41]. De même, « la délivrance à une personne se disant mineure, privée de la protection de sa famille et sans abri se présentant aux services du département d’un rendez-vous à échéance de plusieurs semaines pour qu’il soit procédé à cette évaluation préalablement à son accueil constitue une carence caractérisée dans l’accomplissement de la mission d’accueil du département et porte une atteinte grave et manifestement illégale à une liberté fondamentale » ; « les contraintes inhérentes à l’organisation de cette évaluation ne sauraient justifier que le département se soustraie à l’obligation d’accueil prévue par le législateur »[42].
En cas d’ineffectivité de la mise à l’abri, faute d’exécution d’une décision de placement judiciaire, le Conseil d’État semble encore moins enclin à prendre en considération les arguments des départements tenant à l’existence de contraintes financières ou matérielles. Dans sa première décision admettant la recevabilité d’un recours en référé-liberté, le Conseil d’État a indiqué que l’appréciation « s’effectue en fonction des diligences accomplies par l’administration en tenant compte des moyens dont elle dispose, ainsi que de l’âge, de l’état de santé et de la situation de famille de la personne intéressée »[43]. Par la suite, dans ses décisions Département du Nord[44] et Département de Seine-et-Marne[45], le Conseil d’État a précisé que les mesures qui peuvent être utilement ordonnées « peuvent revêtir toutes modalités provisoires de nature à faire cesser l’atteinte grave et manifestement illégale portée à une liberté fondamentale, dans l’attente d’un accueil du mineur dans un établissement ou un service autorisé, un lieu de vie et d’accueil ou une famille d’accueil si celui-ci n’est pas matériellement possible à très bref délai ». Outre qu’il insiste sur la diversité des modes de prise en charge possibles, le Conseil d’État fait, dans ces deux affaires, référence aux « besoins élémentaires » des MNA que le département s’est abstenu de prendre en compte, à défaut de prise en charge effective. Il en conclut qu’il n’existait pas d’obstacle à ce qu’aucune solution ou forme de mise à l’abri soit trouvée pour assurer ces besoins élémentaires, notamment en ce qui concerne l’hébergement et l’alimentation.
Comme l’a souligné Loïc Azoulai, lorsque le juge fait référence à la thématique des « besoins essentiels », sa technique de raisonnement est « inspirée par une idée d’humanité » ; « elle se distingue de la technique classique du respect des droits fondamentaux. En matière de droits fondamentaux, on admet couramment que le respect de ces droits puisse céder devant des objectifs d’intérêt général. L’argument des besoins, lui, ne souffre aucune limite. C’est que, faisant appel à la compassion, il ne se soumet pas à l’exercice de la mise en balance des intérêts, à la mise en discussion des raisons […] »[46]. Dans les affaires où le MNA a été placé à l’ASE par le juge judiciaire, le Conseil d’État ne renonce pas à toute mise en balance des intérêts, mais il fait clairement pencher cette balance en faveur des MNA, lorsqu’ils se trouvent dans une situation de précarité extrême, en imposant à l’administration de faire en sorte qu’une solution de mise à l’abri, même provisoire, soit trouvée. Cette position peut s’expliquer par une solidarité entre les juges administratifs et judiciaires, le premier assurant le respect de l’autorité de chose jugée des décisions du second[47]. Le département ne semble, dans cette hypothèse, pouvoir s’exonérer de sa responsabilité que dans le cas où l’enfant aurait, « par son attitude, fait obstacle à sa mise à l’abri ou à son hébergement ». Si ce cas n’est pas exclu, il ressort néanmoins de la décision Département de Seine-et-Marne que des faits de délinquance ne sont pas nécessairement considérés comme créant un tel obstacle[48]. L’autre cas où le département peut s’exonérer de sa responsabilité est celui dans lequel il prouve que les mesures de sauvegarde à prendre excéderaient ses capacités d’action. Dans ce cas, l’État peut intervenir à titre supplétif.
B. Le rôle supplétif de l’État
La situation des personnes vivant dans le bidonville de Calais a donné l’occasion aux juridictions administratives d’indiquer « qu’en l’absence de texte particulier, il appartient en tout état de cause aux autorités titulaires du pouvoir de police générale, garantes du respect du principe constitutionnel de sauvegarde de la dignité humaine, de veiller, notamment, à ce que le droit de toute personne à ne pas être soumise à des traitements inhumains ou dégradants soit garanti »[49]. En l’espèce, les conditions de vie des migrants faisaient effectivement « apparaître que la prise en compte par les autorités publiques des besoins élémentaires des migrants vivant sur le site en ce qui concerne leur hygiène et leur alimentation en eau potable demeure manifestement insuffisante et révèle une carence de nature à exposer ces personnes, de manière caractérisée, à des traitements inhumains ou dégradants, portant ainsi une atteinte grave et manifestement illégale à une liberté fondamentale. S’agissant spécifiquement des MNA, il a été enjoint au préfet du Pas-de-Calais de recenser les mineurs isolés et en détresse et de se rapprocher du département afin de rendre possible la prise en charge sociale et sanitaire des mineurs.
Peut-on en déduire une obligation d’agir du département et/ou de l’État en matière de recensement des MNA ? Le dispositif d’accueil d’urgence repose sur le fait que les MNA se font connaître au conseil départemental ou sont orientés vers celui-ci. En l’absence de présentation spontanée ou d’orientation, certains jeunes n’ont pas accès au dispositif. Dans son arrêt Khan c. France, la CourEDH a indiqué que « le fait qu’il ait fallu attendre que le juge des enfants ordonne le placement du requérant pour que son cas soit effectivement considéré par les autorités compétentes conduit en lui-même à s’interroger sur le respect à son égard, par l’État défendeur, de l’obligation de protection et de prise en charge des mineurs isolés étrangers qui résulte de l’article 3 de la Convention »[50]. Ainsi, bien que les autorités internes ne soient pas restées totalement inactives, la Cour n’a pas été convaincue que celles-ci « ont fait tout ce que l’on pouvait raisonnablement attendre d’elles pour répondre à l’obligation de prise en charge et de protection »[51]. Dans son arrêt Kaak et autres c. Grèce, la CourEDH est parvenue à la conclusion inverse en prenant en considération le fait que les autorités avaient identifié les MNA, qui étaient logés dans une zone séparée du camp de Vial, et avaient accompli des démarches pour les prendre à charge dans d’autres types de structures[52].
L’obligation positive, dégagée par la CourEDH à la charge de l’État sous l’angle de l’article 3 de la Convention, de prendre en charge les MNA présents sur son territoire, a été précisée par le Conseil d’État. Après avoir rappelé l’obligation des autorités titulaires du pouvoir de police générale de veiller à ce que le droit de toute personne à ne pas être soumise à des traitements inhumains ou dégradants soit garanti, il a indiqué que « la compétence des autorités titulaires du pouvoir de police générale ne saurait avoir pour effet de dispenser le département de ses obligations en matière de prise en charge des mineurs confiés au service de l’aide sociale à l’enfance. Par suite, le juge des référés ne pourrait prononcer une injonction à leur égard que dans l’hypothèse où les mesures de sauvegarde à prendre excéderaient les capacités d’action du département »[53]. Le Conseil d’État considère donc que l’intervention de l’État, en l’état actuel du droit, ne se justifie qu’à titre exceptionnel et dans la mesure où la situation concrète du département en cause démontre une impossibilité manifeste d’exercer sa mission de protection des mineurs[54]. Cette approche a été confirmée dans une décision du 8 novembre 2017 qui concernait les centres d’accueil et d’orientation pour les mineurs isolés (CAOMI). Le Conseil d’État a réitéré « que la compétence de principe du département en matière d’aide sociale à l’enfance ne fait pas obstacle à l’intervention de l’État, au titre de ses pouvoirs de police, pour la prise en charge, à titre exceptionnel, des mineurs, dès lors qu’une telle intervention est nécessaire, lorsqu’il apparaît que, du fait notamment de l’ampleur et de l’urgence des mesures à prendre, le département est manifestement dans l’impossibilité d’exercer sa mission de protection des mineurs »[55].
Ainsi, l’obligation positive de protection des MNA pèse, avant tout, sur les départements. Il s’agit d’une obligation de résultat, que le MNA ait été confié ou non à l’ASE par décision judiciaire, dont le juge du référé-liberté est le garant puisqu’il sanctionne systématiquement l’ineffectivité de la mise à l’abri. Le département ne peut s’exonérer de sa responsabilité que s’il prouve que le MNA a, par son attitude, fait obstacle à sa mise à l’abri ou à son hébergement, ou que les mesures de sauvegarde à prendre excéderaient ses capacités d’action. Absolue, l’obligation de protection a néanmoins une portée limitée.
II. La portée limitée de l’obligation de protection
D’une part, le doute au sujet de la minorité durant la phase d’évaluation conduit à restreindre la portée de l’obligation de protection (A). D’autre part, cette portée est réduite du fait que les prestations devant être fournies sont minimales et peuvent être modulées, tant au stade de l’évaluation et de la mise à l’abri que dans la phase d’accompagnement proprement dit (B).
A. Le champ d’application personnel de l’obligation : les bénéficiaires
La minorité étant une condition d’accès au dispositif de protection de l’enfance, il s’ensuit qu’en cas de majorité avérée d’un étranger s’étant présenté comme mineur isolé, les pouvoirs publics sont déliés de leur obligation de prise en charge et de protection attachée spécifiquement à l’état de minorité. La pratique administrative et juridictionnelle tend à considérer que l’existence de doutes au sujet de la minorité permet également de délier ces pouvoirs de leur obligation de protection, ce qui fait obstacle à l’accès aux droits sociaux attachés à cette protection et pose questions au regard des jurisprudences de la CourEDH et de la CJUE (1). Une fois qu’un mineur a été pris en charge par l’ASE, l’obligation de protection produit encore certains effets à la majorité du jeune, ce qui permet de maintenir temporairement l’accès aux droits sociaux attachés à la protection de l’enfance (2).
1. La dispense de l’obligation de protection en cas de doutes sur la minorité
En cas de doutes sur la minorité, la mise à l’abri peut ne pas être opérée. Dans le cas où un jeune n’avait pas bénéficié d’un hébergement d’urgence et ne s’était pas vu remettre une décision de refus d’admission à l’ASE écrite, motivée et assortie de la mention des voies et délais de recours[56], le Conseil d’État a, en effet, considéré, eu égard notamment aux garanties apportées tenant à un accueil immédiat en entretien et à une durée globale d’entretien suffisante, que le jeune avait bénéficié de l’évaluation prévue par l’article R. 221-11 dans des circonstances qui ne font pas apparaître une atteinte grave et manifestement illégale à une liberté fondamentale[57].
L’adoption d’une décision de refus de prise en charge met fin immédiatement à la mise à l’abri du MNA. Bien qu’il s’agisse d’une décision administrative, en principe susceptible de recours pour excès de pouvoir devant le juge administratif, le Conseil d’État refuse d’admettre ces recours, dans la mesure où il est possible pour le jeune de saisir directement le juge des enfants afin d’obtenir son admission à l’aide sociale[58]. Or, la saisine du juge des enfants n’est pas suspensive. La mise en place des mesures provisoires prévues aux articles 375-5 du code civil et 375-3 et 4 est facultative et, en pratique, peu de magistrats les accorderaient[59].
Cette jurisprudence est critiquable car elle aboutit à délier le département de son obligation de protection et à priver les MNA de l’accès aux droits sociaux attachés à cette protection, avant même que la majorité ne soit avérée par une décision du juge des enfants. Quand bien même ce juge aurait été saisi et n’aurait pas encore statué, l’interruption de la prise en charge à la suite d’une décision négative du PCD ne constitue, en effet, pas une atteinte grave et manifestement illégale au droit à l’hébergement et à la prise en charge éducative d’un enfant mineur[60]. Pourtant, en principe, « toute personne accueillie dans une structure d’hébergement d’urgence doit pouvoir y bénéficier d’un accompagnement personnalisé et y demeurer, dès lors qu’elle le souhaite, jusqu’à ce qu’une orientation lui soit proposée. Cette orientation est effectuée vers une structure d’hébergement stable ou de soins, ou vers un logement, adaptés à sa situation »[61]. Comme le souligne le GISTI[62], « dès lors que les jeunes isolés étrangers ont bénéficié d’un hébergement dans le cadre d’un accueil provisoire d’urgence, ils sont en droit, si tel est leur souhait, de s’y maintenir tant que l’État, garant du droit à l’hébergement d’urgence et du principe de continuité de l’hébergement, ne leur a pas proposé une orientation adaptée. Il appartient donc aux départements de s’assurer qu’à la fin de l’accueil provisoire d’urgence, les services de l’État soient en mesure de proposer une orientation adaptée à ces jeunes étrangers isolés. En l’absence de mise en place de solution d’hébergement par l’État, les départements ne devraient pas refuser le maintien d’une aide entrant dans le champ de leurs compétences »[63]. Néanmoins, cela n’est pas le cas en pratique. Le juge du référé-liberté accepte cette situation. Ainsi, un jeune, dont le recours devant le juge des enfants était pendant, qui n’avait pu bénéficier que sporadiquement d’un hébergement d’urgence pour majeurs à sa sortie du dispositif mineurs et ne s’était pas vu proposer une solution d’orientation pérenne, n’a pas été considéré comme ayant subi une atteinte manifestement illégale à son droit à l’hébergement d’urgence, alors même qu’il était sans domicile fixe et que ses conditions de vie étaient très précaires, en raison de l’augmentation très forte de la demande d’hébergement d’urgence dans le département et de l’extrême tension qui en a résulté[64].
Comme l’a relevé un rapport du Sénat, « la situation des jeunes qui ont été évalués majeurs mais qui ont saisi directement le juge des enfants, que l’on désigne parfois comme des “mijeurs” est particulièrement précaire puisqu’ils n’ont pas accès aux structures réservées aux majeurs »[65]. S’ils se déclarent majeurs pour espérer bénéficier d’un hébergement d’urgence réservé aux adultes, « l’administration utilisera cet « arrangement » dans sa défense en cas de contentieux »[66]. Les jeunes se retrouvent donc souvent à la rue ou sont hébergés dans des squats ou par des citoyens. Dans certains départements, ils reçoivent, dans la foulée de la décision les déclarant majeurs, une OQTF susceptible d’être exécutée avant que le juge des enfants n’ait pu statuer, les délais de jugement étant, en moyenne, de quatre mois[67]. Certains déposent une demande d’asile ; d’autres disparaissent pour se cacher[68].
La mission bipartite de réflexion sur les MNA s’est interrogée sur la possibilité d’organiser le maintien de la mise à l’abri des jeunes durant l’examen des recours, à l’instar du dispositif en vigueur pour les demandeurs d’asile majeurs pendant la durée de l’instance devant la Cour nationale du droit d’asile[69]. Elle a souligné que « sur le plan du parallélisme des droits, il apparaîtrait équitable d’accorder les mêmes droits à un jeune demandeur d’une protection par l’ASE qu’à un adulte demandeur d’une protection par l’État. En pratique, une telle réforme soulève des questions difficiles, la première étant le risque de susciter des demandes abusives d’évaluation de la part d’adultes à la seule fin de pouvoir bénéficier d’un hébergement durant leur recours et d’obérer durablement l’activité des juridictions pour mineurs. Cela supposerait en outre la création de nouvelles structures d’accueil ou la mobilisation d’un plus grand nombre de chambres d’hôtel ». La mission a évalué le coût en ressources humaines et matérielles d’une telle réforme et insisté sur le fait qu’elle devrait s’accompagner d’une maîtrise du délai d’examen des recours, un délai d’un mois étant, selon elle, optimal[70]. Néanmoins, aucune réforme législative n’a, à ce jour, été opérée. Pourtant la question se pose de savoir si le respect des engagements internationaux de la France et, en particulier, de la CEDH, mais aussi du droit de l’Union, n’implique pas une telle réforme.
La Cour européenne sera prochainement amenée à déterminer si le fait pour une « mijeure » d’avoir été contrainte de vivre dans des conditions d’extrême précarité, à la suite de l’adoption d’une décision mettant fin à sa prise en charge, est compatible avec les articles 3 et 8 de la Convention, et si un recours effectif lui a permis de formuler son grief de méconnaissance de l’article 3 de la Convention[71]. Notons qu’elle a fait droit à la demande de mesures provisoires formulée par la requérante, tendant à ce que soit assuré son hébergement. Une autre mesure provisoire a récemment été ordonnée par la Cour pour la prise en charge d’un mineur, ayant fait l’objet d’un refus d’admission à l’ASE puis saisi le juge des enfants, qui se retrouvait à la rue, en pleine épidémie de COVID-19[72]. Si l’octroi de mesures provisoires ne préjuge pas de la position que la Cour aura sur le fond, il signifie néanmoins qu’elle estime nécessaire de prévenir un risque d’atteinte grave et irréparable aux droits consacrés par la Convention.
S’agissant du risque de subir des traitements contraires à l’article 3, la Cour a déjà largement souligné la vulnérabilité des mineurs sous l’angle de l’article 3 de la Convention et souligné qu’un mauvais traitement infligé à un mineur, du fait d’une plus grande vulnérabilité, est susceptible d’avoir un impact plus grand que lorsque celui-ci est infligé à une personne majeure[73]. Par ailleurs, elle a indiqué qu’un traitement infligé sans l’intention d’humilier ou de rabaisser la victime, et résultant, par exemple, de difficultés objectives liées à la gestion d’une crise migratoire, peut être constitutif d’une violation de l’article 3 de la convention[74]. Si, en tant que telle, la situation des « mijeurs » n’a pas encore été envisagée par la Cour, elle l’a été par le Comité des droits de l’enfant qui a insisté sur la présomption de minorité : selon lui, le processus d’évaluation initiale des mineurs non accompagnés « doit […] se faire avec tout le respect dû à la dignité humaine et, en cas d’incertitude persistante, le bénéfice du doute doit être accordé à l’intéressé − qu’il convient de traiter comme un enfant si la possibilité existe qu’il s’agisse effectivement d’un mineur »[75]. La Cour pourrait s’inspirer de cette position du Comité pour considérer que les « mijeurs », sont tout comme les mineurs des personnes vulnérables, et qu’eu égard à leur vulnérabilité particulière, le seuil de gravité suffisant pour qualifier la mesure de traitement inhumain et dégradant est plus bas que lorsque des majeurs sont concernés.
S’agissant du risque de violation de l’article 3, combiné avec l’article 13, la jurisprudence de la Cour semble claire : « l’effectivité implique des exigences de qualité, de rapidité et de suspensivité, compte tenu en particulier de l’importance que la Cour attache à l’article 3 et de la nature irréversible du dommage susceptible d’être causé en cas de réalisation du risque de torture ou de mauvais traitements »[76]. Selon le Comité des droits de l’enfant, il est « impératif qu’il y ait une procédure équitable pour déterminer l’âge d’une personne, et qu’il y ait la possibilité de contester le résultat obtenu par le biais d’une procédure d’appel. Pendant que ce processus est en cours, la personne doit se voir accorder le bénéfice du doute et être traitée comme un enfant »[77]. Eu égard aux conséquences physiques et psychologiques de la privation de mise à l’abri, immédiatement à la suite de la décision de refus d’admission à l’ASE, la Cour pourrait conclure à la violation de l’article 3 combiné avec l’article 13. En effet, il est loin d’être certain que le refus du Conseil d’État de connaître des recours pour excès de pouvoirs formés à l’encontre de ce type de décisions, ainsi que d’octroyer des mesures d’urgence, soit considéré comme compatible avec le droit à un recours effectif, car il aboutit à ce que des personnes dont la majorité n’est pas avérée se retrouvent dans une situation de grande précarité durant le laps de temps où le juge des enfants n’a pas statué.
Par ailleurs, si la situation des MNA présents sur le territoire d’un État membre qui n’ont pas déposé de demande d’asile ne relève pas du droit de l’Union, tel n’est pas le cas de celle des MNA demandeurs d’asile, dont le nombre reste faible en France, certainement du fait des difficultés d’accès à la procédure d’asile, mais est néanmoins en augmentation[78]. Ces MNA bénéficient de l’égalité de traitement avec les autres MNA et d’un traitement différencié par rapport aux demandeurs d’asile adultes, puisqu’il incombe au service de l’ASE de prendre en charge leur hébergement et de pourvoir à leurs besoins[79].
Néanmoins, les textes ouvrent la possibilité qu’un MNA non pris en charge par l’ASE sollicite l’asile[80]. De même, un « mijeur » peut être demandeur d’asile. Les dispositions de la directive 2013/33/UE prévoient que les conditions matérielles d’accueil, comprenant l’hébergement, l’habillement, la nourriture ainsi qu’une allocation journalière, sont fournies au demandeur d’asile tant qu’il est admis à demeurer sur le territoire[81]. Or, les centres d’accueil de demandeurs d’asile (ci-après, CADA) ne sont pas autorisés à héberger les mineurs, à l’exception de ceux qui sont habilités en protection de l’enfance. Ceux-ci sont exclus du bénéfice de l’allocation pour demandeur d’asile (ci-après, ADA)[82]. Ils risquent donc de se trouver dans l’impossibilité de subvenir à leurs besoins essentiels.
Cette situation est illégale au regard du droit de l’Union. La CJUE a, en effet, eu l’occasion d’encadrer la possibilité ouverte aux États de limiter ou de retirer le bénéfice des conditions matérielles d’accueil par l’article 20 de la directive. Après avoir relevé que le paragraphe 5 dudit article prévoit que toute sanction « doit être objective, impartiale, motivée et proportionnée à la situation particulière du demandeur et doit, en toutes circonstances, préserver son accès aux soins médicaux ainsi qu’un niveau de vie digne », la Cour a souligné que « l’exigence relative à la préservation de la dignité du niveau de vie […] vise à garantir le plein respect de la dignité humaine et à favoriser l’application, notamment, de l’article 1er de la charte des droits fondamentaux et doit être mise en œuvre en conséquence. À cet égard, le respect de la dignité humaine, au sens de cet article, exige que la personne concernée ne se trouve pas dans une situation de dénuement matériel extrême qui ne lui permettrait pas de faire face à ses besoins les plus élémentaires, tels que ceux de se loger, de se nourrir, de se vêtir et de se laver, et qui porterait ainsi atteinte à sa santé physique ou mentale ou la mettrait dans un état de dégradation incompatible avec cette dignité »[83]. Elle en a déduit que « l’imposition d’une sanction consistant […] à retirer, fût-ce de manière temporaire, le bénéfice de l’ensemble des conditions matérielles d’accueil ou des conditions matérielles d’accueil relatives au logement, à la nourriture ou à l’habillement serait inconciliable avec l’obligation […] de garantir au demandeur un niveau de vie digne, dès lors qu’elle priverait celui-ci de la possibilité de faire face à ses besoins les plus élémentaires »[84]. Si cette décision concerne un cas de retrait des conditions matérielles d’accueil à la suite d’une sanction, la généralité des principes posés par la Cour conduit à considérer qu’une privation des conditions matérielles d’accueil des demandeurs d’asile qui les laisseraient dans l’incapacité de subvenir à leurs besoins essentiels est incompatible avec le droit de l’Union.
De plus, la Cour a précisé que lorsque le demandeur est un MNA, c’est-à-dire une « personne vulnérable », les autorités des États membres doivent prendre en compte de manière accrue « la situation particulière du mineur ainsi que le principe de proportionnalité » ; que l’intérêt supérieur de l’enfant doit, par ailleurs, constituer « une considération primordiale et que lorsqu’ils évaluent cet intérêt supérieur, ils doivent tenir dûment compte, en particulier, de facteurs tels que le bien-être et le développement social du mineur, en accordant une attention particulière à la situation personnelle de celui-ci, ainsi que les considérations tenant à sa sûreté et à sa sécurité »[85].
Ainsi, l’absence de prise en charge par l’ASE d’un demandeur d’asile mineur ou l’interruption de la mise à l’abri d’un « mijeur », non compensée par l’admission dans un CADA et l’allocation de l’ADA, est incompatible avec le droit de l’Union. Il n’est toutefois pas certain que la solution consistant à octroyer à un « mijeur » les conditions matérielles d’accueil reconnues aux demandeurs d’asile adultes soit compatible avec ce droit. En effet, en vertu de l’article 22, paragraphe 1, de la directive Accueil, « les États membres font en sorte que l’aide fournie aux demandeurs ayant des besoins particuliers en matière d’accueil conformément à la présente directive, tienne compte de leurs besoins particuliers en matière d’accueil pendant toute la durée de la procédure d’asile et que leur situation fasse l’objet d’un suivi approprié ». En tout état de cause, il serait intéressant que la CJUE soit saisie d’une question préjudicielle tendant à préciser si la présomption de minorité doit conduire à maintenir un accueil dans des structures réservées aux enfants, et ce, durant la période où la majorité n’est pas avérée.
La jurisprudence du Conseil d’État oblige le département à pourvoir aux besoins d’un jeune majeur antérieurement pris en charge, jusqu’à ce que l’État prenne le relai en octroyant à cette personne le bénéfice des conditions matérielles d’accueil des demandeurs d’asile[86]. Il serait logique qu’il en aille de même dans le cas des « mijeurs » demandeurs d’asile dont le recours est pendant devant le juge des enfants, et ce, jusqu’à ce que leur majorité soit confirmée ou infirmée par ce dernier.
2. L’extension de l’obligation de protection à la majorité
D’abord, « jusqu’à l’âge de vingt et un ans, toute personne majeure ou mineure émancipée éprouvant de graves difficultés d’insertion sociale a la faculté de demander au juge des enfants la prolongation ou l’organisation d’une action de protection judiciaire »[87]. Ensuite, les majeurs âgés de moins de vingt et un ans qui éprouvent des difficultés d’insertion sociale faute de ressources ou d’un soutien familial suffisants peuvent être pris en charge à titre temporaire par le service chargé de l’ASE[88]. Enfin, un accompagnement vers l’autonomie est proposé au mineur protégé par l’ASE, au-delà du terme de la mesure de prise en charge, pour leur permettre de terminer l’année scolaire ou universitaire engagée. Pour préparer cet accompagnement, un entretien est organisé par le PCD avec tout mineur accueilli, un an avant sa majorité, pour faire un bilan de son parcours et envisager les conditions de son accompagnement. Dans le cadre du projet pour l’enfant, un projet d’accès à l’autonomie est élaboré par le PCD avec le mineur. Il y associe les institutions et organismes concourant à construire une réponse globale adaptée à ses besoins en matière éducative, sociale, de santé, de logement, de formation, d’emploi et de ressources[89].
Le Conseil d’État considère qu’il résulte de ces dispositions que la prise en charge peut s’étendre « dans certaines circonstances, aux majeurs de moins de vingt et un ans confrontés à des difficultés familiales, sociales et éducatives susceptibles de compromettre gravement leur équilibre. À cet égard, une obligation particulière pèse sur ces autorités lorsqu’un mineur privé de la protection de sa famille est sans abri et que sa santé, sa sécurité ou sa moralité est en danger. Lorsqu’elle entraîne des conséquences graves pour le mineur intéressé, une carence caractérisée dans l’accomplissement de cette mission porte une atteinte grave et manifestement illégale à une liberté fondamentale »[90]. Le PCD dispose ainsi « sous le contrôle du juge, d’un pouvoir d’appréciation pour décider de la prise en charge par le service chargé de l’aide sociale à l’enfance, qu’il n’est pas tenu d’accorder ou de maintenir, d’un jeune majeur de moins de vingt et un ans éprouvant des difficultés d’insertion sociale ». Le contrôle restreint exercé par le juge permet notamment d’obliger le département à motiver les refus de conclusion de « contrats jeunes majeurs ». Néanmoins, il ne met pas fin aux lacunes de ce dispositif tendant à considérer ce contrat comme facultatif, alors que les besoins augmentent et que leur mise en place donne lieu à des divergences importantes entre les départements, ce qui explique la proposition de loi Bourguignon de création d’un « contrat d’accès à l’autonomie », qui rendrait obligatoire la prise en charge des majeurs de moins de 21 ans par l’ASE[91].
Si la conclusion d’un contrat jeune majeur est facultative, il incombe, en revanche, au département « d’assurer l’accompagnement vers l’autonomie des mineurs pris en charge par ce service lorsqu’ils parviennent à la majorité et notamment, à ce titre, de proposer à ceux d’entre eux qui éprouvent des difficultés d’insertion sociale, faute de ressources ou d’un soutien familial suffisants, toute mesure adaptée à leurs besoins en matière éducative, sociale, de santé, de logement, de formation, d’emploi et de ressources, propre à leur permettre de terminer l’année scolaire ou universitaire engagée »[92]. En d’autres termes, lorsqu’une mesure de prise en charge d’un mineur parvenant à sa majorité, quel qu’en soit le fondement, arrive à son terme en cours d’année scolaire ou universitaire, le PCD doit proposer à ce jeune un accompagnement, qui peut prendre la forme de toute mesure adaptée à ses besoins et à son âge, pour lui permettre de ne pas interrompre l’année scolaire ou universitaire engagée.
Ainsi, si la jurisprudence du Conseil d’État dispense le département de l’obligation de protéger les MNA en cas de doutes au sujet de leur minorité, elle leur impose, en revanche, d’assurer cette protection de manière extensive lorsqu’un jeune majeur antérieurement bénéficiaire de la protection attachée à la minorité est engagé dans un cursus scolaire ou universitaire, y compris s’il ne s’agit pas d’une formation qualifiante ou diplômante[93]. D’où l’importance de la reconnaissance de la minorité qui, outre qu’elle conditionne l’accès aux droits sociaux garantis par le droit commun de la protection de l’enfance, permet également de bénéficier d’un accompagnement à la majorité.
B. Le champ d’application matériel de l’obligation de protection
Le champ d’application matériel de l’obligation de protection se définit par référence aux missions de protection de l’enfance et du service de l’ASE. La protection de l’enfance vise à garantir « la prise en compte des besoins fondamentaux de l’enfant, à soutenir son développement physique, affectif, intellectuel et social et à préserver sa santé, sa sécurité, sa moralité et son éducation, dans le respect de ses droits »[94]. Il relève des missions du service de l’ASE de « mener en urgence des actions de protection en faveur des mineurs », ainsi que d’apporter un « soutien matériel, éducatif et psychologique » et de « pourvoir à l’ensemble des besoins des mineurs confiés au service »[95]. Le soutien matériel implique, notamment, que le département organise les moyens nécessaires à l’accueil et à l’hébergement des enfants confiés au service »[96] et qu’il prenne en charge financièrement les dépenses d’entretien, d’éducation et de conduite de chaque mineur[97].
Durant la phase d’évaluation, la perception de la contribution forfaitaire de l’État est subordonnée, notamment, à ce que la personne ait bénéficié d’un « hébergement adapté à sa situation », ainsi que d’une première évaluation de ses besoins en santé et d’un premier accompagnement social[98]. La jurisprudence n’exclut pas l’accès à la scolarisation[99]. Un refus de scolarisation a pu être annulé en ce qu’il se fondait sur un refus de bénéfice de l’ASE en raison de doutes sur la minorité[100]. Cette jurisprudence, fondée sur l’exigence constitutionnelle et conventionnelle d’égal accès à l’instruction, confirme que le bénéfice du droit à la scolarisation ne peut, par principe, être refusé durant la phase d’évaluation, alors même qu’en pratique il est rarement mis en œuvre durant cette phase.
L’analyse des pratiques montre que, de façon générale, les prestations fournies durant la phase d’évaluation sont minimales. Ainsi, pourtant prévue, la prise en charge sanitaire est insuffisante[101]. Sauf exception, les psychos-traumatismes ne sont pas pris en charge. Les bilans de santé ne sont pas systématiques ; l’ouverture de droits à la protection universelle maladie (PUMa) ou à l’aide médicale d’État (AME) durant la phase d’évaluation est rare. Globalement, la couverture financière des dépenses de santé des MNA pose problème : « le système qui leur est applicable dénote la difficulté à penser les contours d’un statut juridique qui leur serait spécifique »[102]. Selon la situation du MNA (pris en charge ou non par l’ASE) et sa nationalité (citoyen de l’Union ou ressortissant de pays tiers), les régimes de protection maladie sont différents. Les MNA bénéficiant d’une prise en charge par l’ASE doivent être affiliés à l’assurance-maladie via la PUMa. Seule l’ASE est habilitée à solliciter l’ouverture des droits d’un MNA auprès de la CPAM, ce qui empêche les MNA ne bénéficiant pas d’une prise en charge de solliciter la PUMa par le biais d’associations ou de particuliers[103]. Ces derniers sont éligibles à l’AME[104]. L’éligibilité à cette aide réservée aux personnes en situation irrégulière révèle une certaine incohérence juridique, dès lors que la présomption de minorité qui devrait bénéficier au migrant non évalué, implique une présomption de régularité du séjour[105]. Il serait donc cohérent qu’une réforme soit envisagée afin que les MNA ne bénéficient pas de la PUMA seulement une fois leur statut déterminé, mais également durant l’évaluation[106] et ce d’autant plus que l’ouverture de droits AME reste compliquée pour les mineurs non pris en charge car ils doivent justifier d’une domiciliation, souvent difficile à obtenir.
S’agissant de l’hébergement, en raison de la saturation des structures classiques de l’ASE[107], les départements recourent, dans leur majorité, à un modèle d’hébergement spécifique pour les jeunes en attente d’évaluation, souvent en confiant l’accueil à des associations. Néanmoins, du fait de la saturation de ces structures associatives, l’accueil hôtelier est la principale forme d’hébergement d’urgence. Le recours massif aux nuitées d’hôtel est insatisfaisant, de l’aveu même des départements qui s’efforceraient de l’éviter pour les jeunes les plus vulnérables en essayant de les faire admettre rapidement à l’ASE[108]. Les conditions d’hébergement sont souvent sommaires. Le département n’est pas tenu de conclure avec l’hôtel une convention définissant les conditions minimales d’hygiène et de sécurité. Les lieux ne sont régulièrement contrôlés, malgré l’obligation impartie à l’ASE de contrôler les personnes physiques ou morales à qui il a confié des mineurs, en vue de s’assurer des conditions matérielles et morales de leur placement[109]. Les jeunes sont souvent isolés. Certains jeunes cantonnés dans ces hôtels indignes devraient les « quitter à 7h du matin pour ne revenir qu’au soir. Sans rien à faire, ni aucun accompagnement, ni parfois de repas »[110]. Cette absence d’accompagnement peut s’expliquer par le fait que la première évaluation opérée par le département n’a pas pour objectif premier d’évaluer les besoins de protection du mineur au sens large du terme[111], lesquels ne sont évalués qu’une fois le placement ordonné.
Dans cette phase d’accompagnement à proprement dit, un « projet de vie » pour l’enfant et un rapport de situation doivent être établis. Ce projet pour l’enfant « vise à garantir son développement physique, psychique, affectif, intellectuel et social. Ce document accompagne le mineur tout au long de son parcours au titre de la protection de l’enfance »[112]. Le Conseil départemental est le garant de ce projet, avec lequel les autres documents de prise en charge de l’enfant doivent s’articuler. Néanmoins, le PPE demeurerait quasiment inappliqué[113], en particulier pour les MNA[114], et le Conseil d’État ne tire pas nécessairement de conséquences de son défaut[115].
Par ailleurs, bien que sa jurisprudence recommande l’« accueil du mineur dans un établissement ou un service autorisé, un lieu de vie et d’accueil ou une famille d’accueil »[116], le Conseil d’État s’accommode de modes de prise en charge inadaptés, tels que des hôtels ou des squats, du moins à titre temporaire. Si à la suite du placement à l’ASE, les départements essaient d’orienter les MNA vers des types de logements mieux adaptés que les hôtels[117], c’est loin d’être toujours le cas. Les dispositifs d’hébergement des MNA se caractérisent par leur grande diversité[118]. Le placement en famille d’accueil, qui est le type d’hébergement majoritaire pour les mineurs pris en charge par l’ASE, n’est pas celui le plus proposé aux MNA[119]. Cette tendance à développer une différenciation entre la protection de l’enfance « généraliste » et la protection de l’enfance « pour les MNA »[120] s’accompagne d’une grande hétérogénéité des pratiques en fonction des départements.
L’offre d’hébergement des mineurs confiés à l’ASE est ainsi différente selon les départements : il existe de grandes disparités à la fois au niveau des places disponibles et des structures d’accueil[121]. Pourtant, ainsi que l’a relevé Delphine Burriez, « il n’est pas acceptable qu’un administré obtienne un traitement différent en matière de prestations sociales en fonction du département duquel il relève. L’intervention du pouvoir central constitue une obligation en matière sociale qui doit reposer sur une juste conciliation entre le principe de libre administration et celui d’égalité. Ainsi que l’a considéré le Conseil constitutionnel de longue date, il appartient au législateur de prendre « les mesures appropriées pour prévenir des ruptures caractérisées du principe d’égalité pouvant résulter de l’attribution au département du service et de la gestion de la prestation »[122]. Le système de répartition des MNA par départements n’a pas mis fin à ces disparités, auxquelles s’ajoutent parfois une grande hétérogénéité des conditions d’hébergement au sein d’un même département.
La jurisprudence du Conseil d’État admet, du moins à titre temporaire, des modalités d’accueil inadéquates, en raison de la pénurie de structures d’accueil. Ainsi, dans une affaire concernant un mineur qui avait été placé par l’ASE après avoir été pris en charge au sein d’un centre d’accueil d’urgence et scolarisé dans un collège, qui se plaignait de ce que la décision de placement n’avait pas été exécutée, ce qui, selon lui, l’avait privé de prestations et garanties dont il aurait dû profiter au sein des centres d’aide sociale à l’enfance de droit commun et du bénéfice du projet pour l’enfant, au sens de l’article L. 223-1-1 du code de l’action sociale et des familles, le Conseil d’État a annulé l’ordonnance du juge du référé-liberté de première instance[123]. Il a autorisé une modulation des conditions matérielles de prise en charge, au motif de « circonstances particulières » tenant à l’« augmentation substantielle du nombre de mineurs non accompagnés depuis 2015, avec notamment une hausse de 85 % en 2017 ».
Dans une autre affaire, la modulation de ces conditions a été acceptée alors que celles-ci étaient beaucoup plus inadaptées. Le Conseil d’État a ainsi conclu à l’absence de carence du département, alors même que celui-ci n’avait pas exécuté une décision de placement et qu’un MNA était hébergé dans un squat[124]. Il a relevé que l’intéressé « est scolarisé dans une plateforme de première scolarisation, bénéficie de repas chauds ainsi que, s’il le sollicite, de l’appui médical et éducatif de l’ADDAP, association à laquelle le département a confié l’accueil des mineurs non accompagnés ». Ainsi, alors même que le département n’était pas à l’origine des mesures dont l’intéressé bénéficiait, puisque l’aide était apportée par une personne privée, l’absence de prise en charge adaptée n’a pas été considérée comme entraînant des conséquences graves pour lui. Cette décision montre que le département peut fortement moduler les conditions de mise en œuvre de la protection, du moins temporairement puisque le Conseil d’État souligne qu’il lui incombe « de permettre de mettre en œuvre, effectivement et au plus tôt, la prise en charge adaptée du requérant ». Dans l’attente, il lui incombe de veiller à la prise en charge des besoins du MNA, « dont il doit s’enquérir » et de « pourvoir à ceux qu’il est déjà en mesure de satisfaire ». C’est donc bien d’un « service minimum » dont il s’agit. Il s’ensuit qu’il peut ne pas y avoir beaucoup de différence entre les prestations fournies dans la phase d’évaluation et la phase post évaluation, du moins pendant un certain laps de temps.
In fine, le Conseil d’État, tout en affirmant que l’obligation de protection des MNA est une obligation de résultat, qui pèse essentiellement sur le département, et dont le juge du référé-liberté est le garant, adapte les modalités matérielles de la prise en charge eu égard à l’engorgement du dispositif de protection de l’enfance. Il s’ensuit que l’accès des MNA aux droits sociaux garantis dans le cadre de la protection de l’enfance s’apparente à une « loterie » en ce qu’il varie entre les départements et au sein d’un même département. Cet accès dépend également de l’existence d’une contestation ou non de la minorité. Le doute au sujet de la minorité conduit le Conseil d’État à délier le département de son obligation de protection, ce qui conduit à priver les « mijeurs » de l’accès aux droits sociaux attachés à la protection de l’enfance, et pourrait donner lieu à une condamnation de la France pour violation des articles 3 et 13 de la CEDH. En revanche, bien que la CEDH ne l’impose pas, la jurisprudence du Conseil favorise l’accès aux droits sociaux des jeunes qui sortent du système de protection de l’enfance, en ce qu’elle tire les conséquences du caractère obligatoire de l’exercice par le département de sa compétence en matière d’accompagnement des jeunes majeures qui suivent un cursus scolaire ou universitaire.
[1] J’adresse mes remerciements à Mme Johanna Benredouane pour l’organisation de cette recherche collective sur L’accès aux droits sociaux, ainsi qu’à Me Magalie Leroy et à Me Antoine Mary pour leurs précieux conseils lors de la rédaction de cet article.
[2] Art. L. 115-2 du Code de l’action sociale et des familles (ci-après, CASF).
[3] Voir en ce sens, I. Sayn, « Accès au juge et accès au droit dans le contentieux de la protection sociale, Revue française des affaires sociales, 2004, n°3, pp. 113-135, p. 113.
[4] En effet, « la formulation d’un fait social en catégorie juridique est en soi une opération de transformation » du réel. Elle permet au droit de saisir la situation d’un individu et de lui assigner un statut, une place, une identité, mais aussi un parcours, et est donc loin d’être neutre surtout lorsque le rattachement d’un individu à une catégorie n’est pas optionnel comme c’est le cas du rattachement d’une personne à la catégorie d’étranger, S. Barbou des Places, « Les étrangers “saisis” par le droit : enjeux de l’édification des catégories juridiques de migrants », Migrations Société, 2010/2, n° 128, https://www.cairn.info/revue-migrations-societe-2010-2-page-33.htm, p. 9.
[5] Dépêche conjointe DACG-DPJJ-DACS du 11 juillet 2016 relative à l’application des dispositions de l’article 375-5 du code civil et de l’article L. 221-2-2 du CASF.
[6] La définition la plus précise est fournie par l’article 2, f), de la directive 2001/55/CE du Conseil du 20 juillet 2001 relative à des normes minimales pour l’octroi d’une protection temporaire en cas d’afflux massif de personnes déplacées et à des mesures tendant à assurer un équilibre entre les efforts consentis par les États membres pour accueillir ces personnes et supporter les conséquences de cet accueil (JOCE L 212 du 7 août 2001, p. 12), qui dispose que les « mineurs non accompagnés » sont des « ressortissants de pays tiers ou apatrides âgés de moins de dix-huit ans qui entrent sur le territoire des États membres sans être accompagnés d’un adulte qui soit responsable d’eux, de par la loi ou la coutume, et tant qu’ils ne sont pas effectivement pris en charge par une telle personne, ou les mineurs qui ne sont plus accompagnés après leur entrée sur le territoire des États membres ». Cette définition a été reprise par les autres textes du régime d’asile européen commun.
[7] Civ. 1re, 16 nov. 2017, n° 17-24.072, Publié au bulletin, AJDA 2017. 2276 ; D. 2017. 2367 ; ibid. 2018. 313, obs. O. Boskovic, S. Corneloup, F. Jault-Seseke, N. Joubert et K. Parrot ; ibid. 1664, obs. P. Bonflis et A. Gouttenoire ; ibid. 2039, chron. C. Barel, S. Canas, V. Le Gall, I. Kloda, S. Vitse , S. Gargoullaud, R. Le Cotty, J. Mouty-Tardieu et C. Roth ; AJ fam. 2018. 172, obs. P. Pedron ; RDSS 2018. 155, note F. Monéger ; F. Jault-Seseke, RCDIP 2018. 810.
[8] F. Jault-Seseke, RCDIP 2018. 810.
[9] « Les États parties s’engagent à respecter les droits qui sont énoncés dans la présente Convention et à les garantir à tout enfant relevant de leur juridiction, sans distinction aucune […], tenant notamment à la nationalité ».
[10] « Tout enfant qui est temporairement ou définitivement privé de son milieu familial, ou qui dans son propre intérêt ne peut être laissé dans ce milieu, a droit à une protection et une aide spéciales de l’État ».
[11] Art. L. 111-1 et L. 111-2, alinéa 1 du CASF.
[12] « Il résulte de l’article 3 du code civil que les dispositions relatives à la protection de l’enfance en danger sont applicables sur le territoire français à tous les mineurs qui s’y trouvent, quelle que soit leur nationalité ou celle de leurs parents », Cass. Crim., 4 novembre 1992, n° C 91-86.938 ; v. ég., Cass. Civ., 27 octobre 1964, publié au Bulletin.
[13] Audition du Défenseur des droits par la mission désignée conjointement par le Premier ministre et l’Assemblée des départements de France relative aux phases d’évaluation et de mise à l’abri des mineurs non accompagnés, 5 décembre 2017, p. 4.
[14] CEDH, 5 avril 2011, Rahimi c. Grèce, req. n°8687/08, § 87.
[15] Art. L. 112-3 du CASF
[16] En 2004, le nombre de MNA présents dans les services de l’ASE était estimé à 2500. En 2010, les estimations du nombre de ces mineurs variaient entre 4 000 et 8 000. La création d’une mission dédiée (MMNA) au sein de la DPJJ en 2013 a permis d’avoir une connaissance plus robuste du nombre de mesures de placement de MNA par l’autorité judiciaire. En 2013, 9000 jeunes auraient été confiés à l’ASE. En 2016, ils sont 16 760 à l’avoir été. Voir le rapport d’information fait au nom de la commission des affaires sociales du Sénat sur la prise en charge sociale des MNA, n° 598 du 28 juin 2017, p. 23 pour les chiffres antérieurs à 2013, et le site de la MMNA pour des chiffres actualisés, http://www.justice.gouv.fr/justice-des-mineurs-10042/mineurs-non-accompagnes-12824/
[17] Art. 14, paragraphe 1, du règlement (UE) 2016/399 du Parlement européen et du Conseil du 9 mars 2016 concernant un code de l’Union relatif au régime de franchissement des frontières par les personnes (code frontières Schengen), JOUE L 77 du 23 mars 2016, p. 1.
[18] Les pratiques consistant à intercepter aux points de passage autorisés les étrangers, à ne pas les admettre sur le territoire et à les renvoyer sur le territoire d’un autre État sont ainsi illégales, Voir Décision du Défenseur des droits du 25 avril 2018, n° 2018-100.
[19] Art. L. 221-5 du CESEDA.
[20] Art. 375 du Code civil.
[21] Le mineur peut, en effet, faire l’objet d’une mesure d’éloignement à l’issue du délai d’un jour franc (Art. L. 213-2 du CESEDA). Il peut également déposer une demande d’asile qui, si elle n’est pas manifestement irrecevable ou infondée, lui permettra d’accéder au territoire.
[22] V. Tchen, « Les méandres de l’accès à l’aide sociale des mineurs étrangers non accompagnés », in F. Faberon, Le droit de l’aide et de l’action sociales à la croisée des chemins : dynamiques et perspectives, Cujas, Paris, 2018, p. 74.
[23][23] Circulaire annulée par la décision CE, 30 janvier 2015, Département des Hauts-de-Seine et autres, n° 371415, n° 371730 et n° 373356, au motif que la clef de répartition géographique n’était pas prévue par la loi.
[24] Sur la répartition des MNA par départements, voir MMNA, Rapport annuel d’activités 2018, juin 2019, p. 10 et s.
[25] Décision n° 2019-797 QPC du 26 juillet 2019, Unicef France et autres, pt. 8, D. 2019. 1542 ; AJDA 2019. 1606, et 2133, note D. Burriez ; JA 2019, n° 604, p. 10, obs. S. Zouag ; AJ fam. 2019. 434 ; Constitutions 2019. 387, chron. L. Carayon, et 439.
[26] L’évaluation est, en principe, réalisée par une équipe pluridisciplinaire formée dans « une démarche empreinte de neutralité et de bienveillance ». Les garanties sont néanmoins faibles : les jeunes ne bénéficient pas d’un accompagnateur durant les entretiens, contrairement aux demandeurs d’asile, et ils n’ont pas accès au rapport d’évaluation, Arrêté du 17 novembre 2016 relatif aux modalités de l’évaluation des mineurs privés temporairement ou définitivement de la protection de leur famille pris pour l’application du décret n° 2016-840 du 24 juin 2016, lui-même pris pour l’application de l’art. L. 221-2-2 du CASF, NOR: JUSF1628271A, JORF n° 269 du 19 novembre 2016.
[27] Art. 388 du Code civil.
[28] CE, 14 juin 2017, Assemblée des départements de France, n° 402890, AJDA 2017. 1696 ; AJ fam. 2017. 378.
[29] IGA, IGAS, IGJ et ADF, Rapport de la mission bipartite de réflexion sur les mineurs non accompagnés, 15 février 2018, p. 6.
[30] Art. R. 221-13-I du CASF.
[31] Article L. 223-2 du CASF.
[32] Art. L. 223-2, al. 4, du CASF.
[33] Art. R. 221-11–IV, al. 1, du CASF.
[34] Voir le décret n° 2019-670 du 27 juin 2019 relatif à la participation forfaitaire de l’État à la phase de mise à l’abri et d’évaluation des personnes se déclarant mineures et privées temporairement ou définitivement de la protection de leur famille et au comité prévu à l’art. R. 221-15 du CASF et l’arrêté du 28 juin 2019 pris en application de l’art. R. 221-12 du CASF et relatif à la participation forfaitaire de l’État à la phase de mise à l’abri et d’évaluation des personnes se déclarant mineures et privées temporairement ou définitivement de la protection de leur famille (NOR: SSAA1906009A). Auparavant, la mise à l’abri était financée pendant cinq jours par l’État sur la base d’un montant forfaitaire de 250 euros par jeune et par jour.
[35] IGA, IGAS, IGJ et ADF, Rapport de la mission bipartite de réflexion sur les mineurs non accompagnés, op.cit., p. 4.
[36] Art. 1er et 2 de l’arrêté du 28 juin 2019 pris en application de l’article R. 221-12 du code de l’action sociale et des familles et relatif à la participation forfaitaire de l’État à la phase de mise à l’abri et d’évaluation des personnes se déclarant mineures et privées temporairement ou définitivement de la protection de leur famille, NOR : SSAA1906009A, JORF n° 165 du 18 juillet 2019.
[37] CE, ord., 10 février 2012, Fofana, req. no 356456, AJDA, 2012. 295, obs. Brondel ; AJDA 2012. 716, note Duranthon ; JCP Adm. no 2059, note Le Bot ; D. 2012. 555.
[38] CE, réf., 12 mars 2014, Kaibo, n° 375956, AJDA 2014. 588, obs. de Montecler ; AJ fam. 2014. 251, obs. Slama ; RDSS 2014. 531, note Rihal et Cavaniol ; JCP Adm. 2014. Actu. 287 ; JCP Adm. 2014, no 2329, chron. Le Bot.
[39] CE, réf., 13 juillet 2017, n° 412134.
[40] Ibid.
[41] CE, réf., 25 août 2017, Département de l’Isère, n° 413549.
[42] CE, réf., 25 janvier 2019, n° 426949, n° 427169, n° 427170, n° 427167 et n° 426950.
[43] CE, réf., 12 mars 2014, n° 375956, op.cit.
[44] CE, réf., 27 juillet 2016, n° 400055, Département du Nord, AJDA 2016. 1543 ; AJDA 2016. 2115, concl. J. Lessi ; AJCT 2016. 634, obs. C. Teixeira.
[45] CE, réf., 27 décembre 2017, Département de Seine-et-Marne, n° 415436, n° 415437, n° 415438, n° 416530 et n° 416529, AJDA 2018. 15, et 1099, note H. Rihal et A. Cavaniol ; AJCT 2018. 212, obs. C. Teixeira.
[46] L. Azoulai, « Le droit européen de l’immigration, une analyse existentielle », RTD eur., 2018., p. 519.
[47] H. Rihal et A. Cavaniol, « La protection de l’enfance, exigence incontournable pour le département », ibid.
[48] CE, réf., 27 décembre 2017, Département de Seine-et-Marne, op.cit.
[49] TA de Lille n° 1508747 du 2 novembre 2015 confirmé par CE, réf., 23 novembre 2015, Commune de Calais, n° 394540, AJDA 2016. 556, note J. Schmitz ; ibid. 2015. 2238 ; D. 2015. 2624 ; ibid. 2016. 336 ; RDSS 2016. 90.
[50] CEDH, 28 février 2019, Khan c. France, req. n° 12267/16, Pt. 88, AJDA 2019. 489 ; D. 2019. 1092, et les obs., note A.-B. Caire ; ibid. 1096, entretien K. Parrot ; ibid. 1732, obs. P. Bonfils et A. Gouttenoire ; AJ fam. 2019. 111 et les obs. ; AJCT 2019. 292, obs. E. Aubin.
[51] Ibid., Pts. 91-92.
[52] CEDH, 3 octobre 2019, Kaak et autres c. Grèce, req. n° 34215/16, Pts 67 et s.
[53] CE, réf., 27 juillet 2016, Département du Nord, n° 400055, AJDA 2016. 1543 ; ibid. 2115, concl. J. Lessi ; D. 2017. 261, obs. O. Boskovic, S. Corneloup, F. Jault-Seseke, N. Joubert et K. Parrot ; AJCT 2016. 634, obs. C. Teixeira.
[54] Pour un exemple de cas où une telle situation a été constatée, voir Tribunal administratif de Lille, Ordonnances n° 1704402, 1704456, 1704458, 1704459, 1704460, 1704462, 1704463, 1704464, 1704465, 1704492, 1704493 et 1704494 du 19 mai 2017.
[55] CE, 8 novembre 2017, Groupe d’information et de soutien des immigré.e.s [GISTI], n° 406256, AJDA 2017. 2408, chron. S. Roussel et C. Nicolas ; AJCT 2018. 158, obs. C. Teixeira.
[56] Le PCD est, en principe, tenu de notifier une décision motivée de refus de prise en charge mentionnant les voies et délais de recours applicables, ainsi que les droits reconnus aux personnes majeures en matière d’hébergement d’urgence, d’aide médicale, de demande d’asile ou de titre de séjour.
[57] CE, réf., 13 juillet 2017, n° 412134.
[58] CE, 1er juillet 2015, Département du Nord, n° 386769.
[59] GISTI, Tierce intervention dans l’affaire S. M. K. contre la France, introduite le 15 mars 2019 et communiquée le 28 mars 2019 (Requête n° 14356/19), p. 3., https://www.gisti.org/IMG/pdf/tierce_intervention_gisti.pdf
[60] CE, réf., 28 juillet 2016, n° 401626, AJDA 2016. 1601 ; RDSS 2016. 975, obs. F. Faberon.
[61] Article L. 345-2-3 CASF.
[62] GISTI, Tierce intervention dans l’affaire S. M. K. contre la France, op. cit., p. 7.
[63] CE, 30 mars 2016, Département de la Seine-Saint-Denis, n° 382437 ; AJDA 2016. 632 ; D. 2017. 261, obs. O. Boskovic, S. Corneloup, F. Jault-Seseke, N. Joubert et K. Parrot ; AJDI 2018. 97, étude F. Zitouni ; AJCT 2016. 456, obs. M.-C. Rouault ; ibid. 2017. 319, étude C. Teixeira ; RDSS 2016. 521, concl. J. Lessi.
[64] CE, réf., 16 juin 2017, n° 411051.
[65] Rapport du Sénat n° 598, op.cit., p. 68.
[66] La Cimade, Des enfants mal protégés car étrangers, octobre 2018, p. 15, https://www.lacimade.org/wp-content/uploads/2018/11/La_Cimade_Jeunes_en_danger_2018.pdf
[67] IGA, IGAS, IGJ et ADF, Rapport de la mission bipartite de réflexion sur les mineurs non accompagnés, op.cit., p. 40.
[68] La Cimade, Des enfants mal protégés car étrangers, op.cit., p. 15.
[69] IGA, IGAS, IGJ et ADF, Rapport de la mission bipartite de réflexion sur les mineurs non accompagnés, op. cit., p. 5.
[70] Ibid.
[71] La requérante est une jeune camerounaise qui, après avoir bénéficié d’un APU, a été remise à la rue, fin septembre 2018, à la suite du refus du procureur d’ordonner son placement provisoire à l’ASE. Elle n’a eu d’autre choix que de dormir dans un squat pendant plusieurs mois. Ses demandes d’hébergement d’urgence ont été rejetées au motif qu’elle affirmait être mineure. À la suite du refus du département de réexaminer sa situation à la lumière de nouveaux documents, la requérante a saisi le juge des enfants d’une demande de protection fondée sur les articles 375 et suivants du code civil. Elle a sollicité des mesures provisoires mais sa demande est restée sans réponse. Le juge des référés a ensuite fait droit à la demande tendant à ce que son hébergement soit assuré. La requérante a donc, à partir de fin janvier 2019, été logée dans un hôtel. Sur appel du département, le Conseil d’État a annulé ladite ordonnance, conformément à sa jurisprudence selon laquelle aucune atteinte grave et manifestement illégale à une liberté fondamentale n’est établie s’agissant d’une demande de mise à l’abri dans l’attente de la décision du juge des enfants, CEDH, SMK c. France, req. n° 14356/19 introduite le 15 mars 2019.
[72] Décision du 31 mars 2020, req. n° 15457/20, http://www.infomie.net/spip.php?article5835.
[73] CEDH, 1er février 2011, Yazgül Yılmaz c. Turquie, req. n° 36369/06 ; CEDH, 9 avril 2013, Iurcu c. République de Moldova, req. n° 33759/10.
[74] CEDH, 15 décembre 2016, Khlaifia et autres, req. n° 16483/12, § 184, D. 2017. 261, obs. O. Boskovic, S. Corneloup, F. Jault-Seseke, N. Joubert et K. Parrot ; Rev. crit. DIP 2017. 389, note Anselm Zölls.
[75] CDE, 1er septembre 2005, Observation générale n° 6, Traitement des enfants non accompagnés et des enfants séparés en dehors de leur pays d’origine, § 20.
[76] CEDH, 2 février 2011, I.M. c. France, req. n° 9152/09, § 130, AJDA 2012. 244 et 1726, chron. L. Burgorgue-Larsen.
[77] Décisions du 31 mai 2019 contre l’Espagne, aff. CRC/C/81/D/22/2017 et CRC/C/81/D/16/2017, § 12.3.
[78] « En 2016, moins de 500 MNA ont effectué une demande d’asile […] les interlocuteurs de la mission ont unanimement signalé l’insuffisance d’information sur cette procédure. La désignation d’administrateurs ad hoc est encore très peu développée, à la fois au stade de la mise à l’abri et de la prise en charge à l’ASE. L’information sur la demande d’asile apparaît largement perfectible », IGA, IGAS, IGJ et ADF, Rapport de la mission bipartite de réflexion sur les mineurs non accompagnés, op.cit., p. 33.
[79] CE, 23 décembre 2016, Association La Cimade et autres, no 394819, AJDA 2017. 6 ; ibid. 238, concl. Domino.
[80] D. Burriez, « Mineurs isolés situés sur le territoire : une atteinte au droit de solliciter l’asile en France », RDLF 2018, chron. n° 21, p. 4.
[81] Art. 2 g), 3 et 17 de la directive 2013/33/UE du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 établissant des normes pour l’accueil des personnes demandant la protection internationale (refonte), JOUE L180 du 29 juin 2013, p. 96.
[82] CE, 23 décembre 2016, Association La Cimade et autres, no 394819, op.cit.
[83] CJUE, 12 novembre 2019, Haqbin, C-233/18, ECLI:EU:C:2019:956, pt. 46, AJDA 2019. 2268 ; D. 2019. 2183.
[84] Ibid., pt. 47.
[85] Ibid., pts. 53-54.
[86] Le Conseil d’État a, en effet, décidé qu’« eu égard aux difficultés d’insertion sociale de M. X., qui est dépourvu de toute ressource et de tout soutien familial et dont l’autonomie est extrêmement restreinte, et alors même qu’il n’était pas en cours de scolarité, le refus du département de Meurthe-et-Moselle de lui proposer, après sa prise en charge pendant près de deux ans en qualité de mineur et à l’issue de la période complémentaire d’un mois pendant laquelle il a accepté de financer ses dépenses d’hébergement et d’alimentation, toute forme d’accompagnement, y compris autre qu’une prise en charge au titre du contrat “jeune majeur“ qu’il avait sollicité, propre à concourir, avec l’ensemble des institutions et organismes compétents, à une réponse globale et adaptée à ses besoins et à assurer la stabilité de sa situation et son accompagnement jusqu’à ce qu’il puisse bénéficier des conditions matérielles d’accueil du demandeur d’asile qu’il incombe à l’Office français de l’immigration et de l’intégration de lui proposer à bref délai en vertu de l’article L. 744-1 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile, est en l’espèce constitutive d’une carence caractérisée qui, compte tenu des conséquences graves qu’elle entraîne pour M.X, porte une atteinte grave et manifestement illégale à une liberté fondamentale ». Par suite, c’est à bon droit que le juge des référés de première instance a pu enjoindre au conseil départemental de proposer à M. X un accompagnement comportant l’accès à une solution de logement et de prise en charge de ses besoins alimentaires et sanitaires ainsi qu’un suivi éducatif. CE, réf., 22 mai 2019, Département de Meurthe-et-Moselle, n° 429718.
[87] Art. 1er du décret n° 75-95 du 18 février 1975 fixant les modalités de mise en œuvre d’une action de protection judiciaire en faveur de jeunes majeurs.
[88] Art. L. 222-5, alinéa 6, du CASF.
[89] Art. L. 222-5-1 du CASF.
[90] CE, réf., 28 décembre 2017, Métropole de Lyon, n° 416390.
[91] Voir le dossier Accompagnement des jeunes majeurs vers l’autonomie, AJ Famille, 2020, p. 271 et s.
[92] CE, réf., 27 juin 2018, Département de Seine-et-Marne, n° 421338.
[93] Voir aussi, CE, réf., 21 décembre 2018, n° 421326 ; n° 420393 ; n° 421324 ; n° 421325 ; n° 421327.
[94] Art. L. 112-3 du CASF.
[95] Art. L. 221-1 du CASF.
[96] Art. L. 221-2 du CASF.
[97] Art. L. 228-3 du CASF.
[98] Art. 1er et 2 de l’arrêté du 28 juin 2019, op. cit.
[99] TA Nancy, Ord., 5 octobre 2018, n° 1802680.
[100] CAA de Paris, 14 mai 2019, n° 18PA02209.
[101] IGA, IGAS, IGJ et ADF, Rapport de la mission bipartite de réflexion sur les mineurs non accompagnés, op.cit., p. 33.
[102] Rapport du Sénat n° 598, op.cit., pp. 65-66.
[103] Circulaire n° DSS/2A/2011/351 du 8 septembre 2011 relative à des points particuliers de la réglementation de l’aide médicale de l’État, notamment la situation familiale et la composition du foyer (statut des mineurs), NOR : ETSS1124699C.
[104] La condition de résidence de trois mois est écartée pour les mineurs.
[105] En outre, « la non-admission des jeunes migrants non-accompagnés à la Puma les empêche d’accéder aux structures de soins psychologiques réservées aux jeunes, telles les centres médico-psychologiques (CMP), dont les frais ne sont pas couverts par l’AME », Rapport du Sénat n° 598, op.cit., p. 65-66.
[106] Ainsi que l’a souligné le rapport du Sénat, l’ouverture de la Puma aux MNA évalués présents en France depuis moins de trois mois repose sur un support juridique incertain étant donné que le décret du 1er décembre 1999 pris pour l’application de la loi instaurant la CMU ne précise pas que la condition de durée de résidence ininterrompue sur le territoire français d’au moins trois mois n’est pas applicable aux MNA, ibid., pp. 65-66.
[107] Ibid., pp. 44-49.
[108] IGA, IGAS, IGJ et ADF, Rapport de la mission bipartite de réflexion sur les mineurs non accompagnés, op.cit., p. 30.
[109] Art. L. 221-1 du CASF.
[110] Voir, La Cimade, Des enfants mal protégés car étrangers, op. cit., p. 9.
[111] Voir les six points d’entretien prévus à l’article 8 de l’arrêté du 20 novembre 2019 pris en application de l’article R. 221-11 du code de l’action sociale et des familles relatif aux modalités de l’évaluation des personnes se présentant comme mineures et privées temporairement ou définitivement de la protection de leur famille,
NOR: SSAA1920987A, JORF, n° 273 du 24 novembre 2019.
[112] Art. L. 223-1-1 du CASF. Voir, R. Lafore, « L’enfant confié à l’aide sociale à l’enfance – le renforcement du rôle de l’ASE – Le projet pour l’enfant », Journal du droit des jeunes, 2017, n°368-369-370, pp. 20-25.
[113] Exposé des motifs de la proposition de loi visant à moderniser le système de protection de l’enfance du 15 juillet 2019.
[114] CNAPE, Accompagner et accueillir les MNA en fonction de leurs besoins, février 2018, p. 7.
[115] CE, réf., 13 mars 2018, n° 418451.
[116] CE, réf., 27 décembre 2017, Département de Seine-et-Marne, n° 415436, op. cit.
[117] Voir la lettre de l’Odas, « Les modes d’accueil adaptés aux mineurs non accompagnés : Face à l’urgence, des départements innovent », https://odas.net/actualites/les-modes-daccueil-adaptes-aux-mineurs-non-accompagnes-face-lurgence-des-departements
[118] Ces structures peuvent être gérées directement par les conseils départementaux ou par des associations délégataires. Il peut s’agir de structures spécifiques aux mineurs ou spécialisées pour les MNA ayant des besoins spéciaux identifiés, ou encore d’appartements partagés avec l’encadrement de travailleurs sociaux du département, de dispositifs d’accueil par un tiers bénévole ou d’hôtels « sociaux ».
[119] Ibid., p. 23.
[120] CNAPE, Accompagner et accueillir les MNA en fonction de leurs besoins, op.cit., p. 6.
[121] EMN, Les approches mises en œuvre en France à l’égard des mineurs non accompagnés suite à la détermination de leur statut, février 2018, p. 21.
[122] D. Burriez, « L’étatisation de la protection des mineurs isolés étrangers », AJDA 2019. 802.
[123] CE, réf., 13 mars 2018, n° 418451.
[124] CE, réf., 3 octobre 2019, n° 434416.