Le retrait de déclaration facultative de reconnaissance de compétence de la Cour Africaine des Droits de l’Homme et des Peuples. Le cas du Bénin
Les retraits de déclaration facultative de reconnaissance de compétence de la Cour Africaine des Droits de l’Homme et des Peuples (CADHP) indignent les associations de défense des droits de l’homme, les citoyens et même les juristes. Pourtant, ils s’inscrivent parfaitement dans la philosophie des instruments fondateurs de la juridiction. Le retrait est un acte discrétionnaire de souveraineté. La juridiction elle-même ne s’en cache pas mais s’est bornée à en fixer les limites, notamment en ce qui concerne son effet. Certes licite, le retrait peut être source d’un certain malaise. L’argument souverainiste est perçu voire vécu comme un prétexte derrière lequel se cache des desseins inavoués. Pourtant, le retrait, même s’il traduit un certain recul en matière de droits de l’homme, ne devrait néanmoins pas être analysé comme annihilateur de la protection dévolue à la juridiction. Celle-ci dispose d’autres ressources qu’il conviendrait d’explorer.
Par Thierry Sèdjro Bidouzo, Docteur en droit public et Assistant Université d’Abomey-Calavi (Bénin)
« Je comprends, (…) qu’un Etat souverain refuse d’incliner sa souveraineté devant un autre Etat souverain. […] Je ne comprends pas au contraire, qu’un Etat (…) refuse d’incliner sa souveraineté devant celle d’une Cour de Justice offrant toutes les garanties d’équité, d’impartialité et de conscience. En l’occurrence, ce n’est pas la souveraineté de l’Etat qui se dresse contre la souveraineté d’un autre Etat, c’est la souveraineté de l’Etat qui prétend se dresser contre la souveraineté du droit »[1]. Ces propos de Pierre-Henri Teitgen illustrent parfaitement les relations peu harmonieuses entre les Etats et les juridictions régionales, en l’occurrence dans le cadre de cette étude, entre les Etats africains, en s’inspirant du cas béninois, et la Cour africaine des droits de l’homme et des peuples.
Fruit d’une longue maturation[2], la Cour africaine des droits de l’homme et des peuples, comme l’idée même des droits de l’homme[3] est l’aboutissement d’une construction qui a commencé il y a plus de trois décennies[4]. Instituée en vue de compléter et de renforcer les fonctions de protection de la Commission africaine des droits de l’homme et des peuples[5], la Cour est compétente pour connaitre « de toutes les affaires et de tous les différends dont elle est saisie concernant l’interprétation et l’application de la Charte, du présent Protocole, et de tout autre instrument pertinent relatif aux droits de l’homme et ratifié par les Etats concernés »[6]. Mais la première décision au fond de la Cour est intervenue seulement en 2013[7]. Le fait est que la Cour ne peut rendre de décisions et remplir efficacement sa mission de protection des droits de l’homme et des peuples, que si des affaires sont portées devant elle. Il faut donc qu’elle soit saisie suivant les prescriptions établies par le Protocole. En effet, la Cour est compétente pour connaitre des requêtes dont elle est saisie par la Commission, par l’Etat partie qui a saisi la Commission, par l’Etat partie contre lequel une plainte a été introduite devant la Commission, par l’Etat partie dont le ressortissant est victime d’une violation des droits de l’homme, ou encore par les organisations intergouvernementales africaines[8]. Les ONG dotées d’un statut d’observateur auprès de la Commission[9] et les individus peuvent saisir la Cour uniquement à l’encontre d’Etats qui ont accepté spécifiquement la compétence contentieuse de la Cour à cette fin[10]. Une déclaration de reconnaissance de compétence que le Bénin, partie à la Charte depuis le 21 octobre 1986, avait faite le 8 février 2016, après avoir ratifié le Protocole le 22 août 2014. L’acceptation par le Bénin de la compétence de la Cour à l’égard des requêtes émanant des individus et des ONG, suivait celles du Burkina Faso (1998), du Malawi (2008), du Mali et de la Tanzanie[11] (2010), du Ghana (2011), de la Côte d’Ivoire[12] et du Rwanda[13] (2013), et précédait celles de la Tunisie (2017) et de la Gambie (2019).
Cependant, alors qu’il est fortement déploré que la grande majorité des Etats ayant ratifié le Protocole s’abstient de procéder à la déclaration[14], la massification des retraits de déclarations déjà faites apparait comme une tendance soutenue. Les derniers retraits notamment ceux du Bénin et de la Côte d’Ivoire sont assez illustratifs. Ces retraits offrent à la réflexion plusieurs éléments d’interrogation et d’analyse. A dire vrai, c’est une chose que l’Etat signataire du Protocole créant la Cour africaine, décide de ne pas faire la déclaration facultative de reconnaissance de compétence prévue à l’article 34.6 dudit Protocole. C’en est une autre qu’un Etat qui avait fait la déclaration, décide de la retirer. Dans une telle hypothèse, le retrait, qui n’est pas le retrait de l’Etat d’une organisation internationale[15], soulève de véritables questions car, entouré d’incertitudes juridiques : quelle est la nature et la portée du retrait des déclarations de reconnaissance de compétence de la Cour africaine des droits de l’homme et des peuples ?
Cette problématique révèle d’emblée le double intérêt théorique et pratique de l’étude. Au plan théorique, elle permet d’élucider la confusion entre licéité et illicéité du retrait comme un acte libre posé par des Etats souverains. Au plan pratique, se tournant dans le prospectif, l’étude expose les voies juridiques de contournement de la barrière souverainiste afin de pérenniser le système africain de protection des droits l’homme.
Ainsi, au fond, il y a un flou juridique autour des retraits de la déclaration de l’article 34.6 du Protocole de Ouagadougou. Au-delà de la Cour africaine des droits de l’homme et des peuples, il n’est pas vain d’appréhender aussi la Cour de justice de la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO), avec les retraits du Protocole A/SP.1/01/05 du 19 janvier 2005. Quand on interroge les sources, le cadre juridique du retrait est pour le moins, empreinte d’ambiguïté (I). Pour autant, les ressources du droit sont susceptibles de garantir l’affirmation d’un ordre juridictionnel communautaire (II).
I. Les ambiguïtés du droit du retrait
Le Protocole de Ouagadougou a prévu la déclaration facultative de l’article 34.6 mais il est resté muet sur la possibilité pour un Etat qui a fait ladite déclaration de se rétracter. Un Etat, après avoir fait la déclaration, peut-il donc la dénoncer à tout moment ?[16] Le retrait, qu’il soit de la déclaration de l’article 34.6 du Protocole instituant la Cour africaine ou du Protocole additionnel A/SP.1/01/05 de la Cour de justice de la CEDEAO, est-il licite ? Ce qui est certain, si dans leur lettre, aucun des Protocoles ne l’interdit (A), pour autant, le retrait n’est pas un droit absolu (B).
A. Le retrait, un droit non proscrit
Le retrait est enfermé dans des frontières juridiques parfois fluctuantes. L’examen des retraits, ceux du Bénin notamment, exige alors de s’inscrire d’abord dans la philosophie des instruments communautaires concernés (1) ; ensuite, il faut interroger les offices des juridictions, notamment la jurisprudence de la Cour africaine des droits de l’homme et des peuples qui n’a pas manqué de déclarer le retrait, conforme à la légalité internationale (2).
1. La philosophie des instruments communautaires
Dégager la philosophie des instruments communautaires requièrent d’aller à la rencontre de la déclaration de l’article 34.6 du Protocole de Ouagadougou, créant la Cour africaine des droits de l’homme et des peuples et du Protocole additionnel A/SP.1/01/05 du 19 janvier 2005 de la Cour de justice de la CEDEAO.
D’abord, relativement à la CADHP, les dispositions de la Charte sont assez claires. Aux termes des dispositions de l’article 5.3 du Protocole, « La Cour peut permettre aux individus ainsi qu’aux organisations non gouvernementales (ONG) dotées du statut d’observateur auprès de la Commission d’introduire des requêtes directement devant elle conformément à l’article 34.6 de ce Protocole » ; et l’article 34.6 prescrit : « A tout moment à partir de la ratification du présent Protocole, l’Etat doit faire une déclaration acceptant la compétence de la Cour pour recevoir les requêtes énoncées à l’article 5.3 du présent Protocole. ». La lecture combinée de ces deux dispositions conditionne et soumet la recevabilité des requêtes individuelles[17] à l’acceptation par l’Etat partie de la compétence de la Cour en la matière. Elle l’a indiqué à travers plusieurs décisions[18]. Sur la question, le droit comparé nous enseigne que Arusha est en avance sur San José et en retard par rapport à Strasbourg. En effet, les individus ne peuvent pas encore saisir directement la Cour interaméricaine des droits de l’homme[19]. La Commission a même affirmé que la Cour ne peut être directement saisie, même pour les plaintes interétatiques[20]. Par contre, le système actuel de la Cour européenne, dont le mécanisme est plus abouti[21] donne un accès direct[22] et sans conditions aux individus[23]. C’est bien la philosophie du Protocole A/SP.1/01/05 du 19 janvier 2005 de la Cour de justice de la CEDEAO. Si initialement, la Cour de Justice issue du Protocole A/P1/91 adopté le 6 juillet 1991 par la Conférence des Chefs d’Etat et de Gouvernement ne pouvait pas ouvrir son prétoire aux individus, l’affaire Afolabi a rapidement fait évoluer les choses[24] en suscitant l’élargissement des compétences de la Cour ainsi qu’une ouverture de sa saisine[25] sans le filtre de l’épuisement traditionnel des voies de recours internes[26]. La Cour est devenue protectrice des droits et libertés fondamentaux à travers une jurisprudence riche et abondante[27] découlant de son hyperactivité en cette matière[28].
En somme, contrairement à la Cour africaine des droits de l’homme et des peuples, le Protocole A/SP.1/01/05 du 19 janvier 2005 de la Cour de justice de la CEDEAO, ne met pas de filtres pour les requêtes individuelles. Il apparait que dans le système de la Cour africaine, la déclaration de reconnaissance de compétence se révèle être un moyen pour les Etats de maitriser le consentement qu’ils donnent en ratifiant les traités des droits de l’homme. Cette maitrise se prolonge-t-elle dans l’éventuelle possibilité de retrait de la déclaration déjà faite ? Doit-on inscrire le retrait dans la légalité internationale, ou doit-on, au contraire, l’analyser comme une rupture de légalité ?
2. La conformité du retrait à la légalité internationale
Le retrait est un acte discrétionnaire de souveraineté. En tant que tel, il rentre bien dans la légalité internationale. En effet, la souveraineté « ne s’érode pas, ne se limite pas, ne se divise pas, (…). Elle est ou elle n’est pas. Ce sont les compétences dont elle est la matrice qui peuvent s’exercer en commun, partagées ou transférées à une organisation internationale. (…). [Elle demeure] l’horizon indépassable en droit international »[29].
On le voit bien, le droit international est un droit consensuel. Le Statut de la Cour internationale de justice favorise d’ailleurs l’expression du consensualisme des Etats, nécessaire à la juridiction internationale[30] et est généralement présenté comme l’un des traits caractéristiques [des] membres de la communauté internationale »[31]. Il reste la règle, du moins, « l’idéologie de base des relations internationales en général. Il se caractérise par deux traits (…) : ne devient membre d’une institution que l’Etat qui en exprime la volonté formelle ; en sens inverse, tout membre doit pouvoir se retirer d’une institution à laquelle il appartient »[32].
Dès lors, d’une part, la décision DCC n° 20-434 du 30 avril 2020 de la Cour constitutionnelle du Bénin ou la lettre n°186-MAE/BM/Amp du 28 avril 2020 du Ministre ivoirien des Affaires Etrangères ne signifient, ni le retrait du Bénin de la CEDEAO, et de la Cour de justice de la communauté, ni le retrait de la Côte d’Ivoire de la Cour africaine des droits de l’homme et des peuples. Ils correspondent plutôt, pour le Bénin, au retrait du protocole additionnel A/SP.1/01/05 du 19 janvier 2005, et pour la Côte d’Ivoire, au retrait du mécanisme de l’article 34.6 du Protocole de Ouagadougou. A priori, ces retraits sont un acte de souveraineté[33].
Dès lors, dans le silence du texte de référence, et ayant été confrontée à la question de la licéité du retrait, à l’occasion de la demande de retrait du Rwanda[34], intervenue le 1er mars 2016, la Cour africaine des droits de l’homme et des peuples a considéré que le retrait est licite. En effet, dans son arrêt du 03 juin 2016 sur la validité du retrait et les conséquences à en tirer, la Cour observe que « le Protocole ne contient pas de dispositions relatives à sa dénonciation ou au retrait éventuel de la déclaration prévue par l’article 34.6 »[35], et conclut qu’au regard de « sa nature facultative et [de] son caractère unilatéral (…), les Etats sont libres de s’engager et conservent le pouvoir discrétionnaire de retirer leurs engagements »[36]. Le retrait est donc considéré par la Cour comme un acte discrétionnaire de souveraineté, valide et licite.
En effet, à l’unanimité, les membres de la Cour ont clairement indiqué dans l’arrêt du 03 juin 2016, que le droit de retrait découle de la souveraineté de l’Etat, qu’il est licite non seulement en vertu du droit international général, mais aussi au regard du Protocole à la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples portant création de la Cour africaine des droits de l’homme et des peuples[37]. Les juges d’Arusha s’appuient sur la règle résiduelle de liberté en droit international (tout ce qui n’est pas interdit est permis)[38] telle qu’elle a été édictée dans l’Affaire du Lotus (France c. Turquie)[39] Il est clair que sur la question de la déclaration de compétence, le Protocole de Ouagadougou ne méconnait pas le droit international. Sous ce rapport et sur le fondement de la jurisprudence de la Cour africaine des droits de l’homme et des peuples sur la validité du retrait, le retrait du Bénin et celui de la Côte d’Ivoire, et avant eux, les retraits du Rwanda et de la Tanzanie, sont a priori licites, conformes à la légalité internationale. Cependant, le droit de retrait est un droit non absolu.
B. Le retrait, un droit non absolu
Le droit de retrait n’est pas un droit plein ou total. Il est limité dans son exercice par les modalités de sa mise en mouvement (1). Par ailleurs, il ne produit pas d’effets immédiats (2).
1. Dans son déploiement
Si l’on entend que le retrait, c’est l’acte, la procédure ou le procédé par lequel un Etat[40] quitte une Organisation internationale ou le traité l’instituant, qu’il soit traité initial, révisé ou encore protocole additionnel, la mise en œuvre de ce droit doit rester conforme aux exigences du droit international. En effet, chaque traité peut avoir son régime juridique, et le retrait s’opère conformément aux dispositions du traité. L’article 54 de la Convention de Vienne de 1969 sur le droit des traités précise que « L’extinction d’un traité ou le retrait d’une partie peuvent avoir lieu : a) conformément aux dispositions du traité ; ou b) à tout moment, par consentement de toutes les parties, après consultation des autres États contractants »[41]. Les retraits en étude ne semblent pas s’inscrire dans ces configurations, parce que les instruments en présence sont muets sur la question du retrait et de son régime juridique.
En continuant donc le voyage dans la Convention relative au droit des traités, on s’aperçoit que le droit de retrait est enfermé dans certaines frontières. Un Etat pourrait le mettre en mouvement en présence d’un changement fondamental de circonstances. C’est l’article 62 de la Convention de Vienne du 23 mai 1969 sur le droit des traités qui précise le régime juridique de la notion de changement fondamental de circonstances[42]. La Cour internationale de justice a reprécisé la notion de changement fondamental de circonstances dans la décision relative à la compétence en matière de pêcheries. Dans cet arrêt, la Cour affirmait que, « les changements de circonstances qui doivent être considérés comme fondamentaux ou vitaux, sont ceux qui mettent en péril l’existence ou le développement vital de l’une des parties »[43] ; de plus, « le changement doit avoir entraîné une transformation radicale de la portée des obligations qui restent à exécuter. Il doit avoir rendu plus lourdes ces obligations de sorte que leur exécution devienne essentiellement différente de celles qui restent à exécuter »[44]. Une ou plusieurs décisions d’une juridiction communautaire à l’encontre d’un Etat, suffisent-elles pour que l’Etat concerné remette en cause le traité instituant ladite juridiction ? A priori, non. Les dysfonctionnements internes relatifs à la ratification d’une convention autorisent-ils l’Etat à se rétracter ? Les motivations des retraits en étude ne peuvent manifestement être inscrites dans l’un ou l’autre de ces cas, puisque ni le Bénin ni les autres Etats ne peuvent justifier d’un changement de circonstances mettant en péril leur existence ou leur développement vital.
L’importance de la réponse à ces questions, dans la solidité des systèmes juridictionnels de protection des droits de l’homme, est telle qu’elle a suscité des réflexions sur le renforcement des conditions de dénonciation des traités relatifs aux droits de l’homme notamment. Dans un avis rendu le 16 décembre 2020 à la demande de la Colombie, suite à la dénonciation de la Convention américaine des droits de l’homme par le Venezuela, la Cour interaméricaine a posé deux conditions innovantes à la validité d’une dénonciation[45] : la décision de retrait doit être le fruit d’une procédure interne spécifique[46] et doit être prise de bonne foi[47]. Ceci traduit toute la préoccupation que représente le problème de la dénonciation des traités de droits de l’homme et doit s’analyser comme un effort de définition d’un cadre juridique limitatif des retraits.
Il apparait clairement que le retrait n’est pas un droit à caractère absolu dans sa mise en mouvement. Encore moins dans ses effets. Surtout pour ce qui est de la déclaration de l’article 34.6 du Protocole instituant la Cour africaine des droits de l’homme et des peuples.
2. Dans ses effets
Le retrait de déclaration de compétence n’est pas un droit « absolu »[48]. Sur le fondement de la théorie des droits acquis et du principe de la sécurité juridique, la Cour africaine des droits de l’homme et des peuples a considéré qu’il ne peut être d’application immédiate et par conséquent, ne saurait avoir d’effet immédiat. Dans ce sens, la Cour africaine a affirmé qu’un « préavis d’un an s’applique au retrait de la déclaration » faite en vertu de l’article 34.6 du Protocole[49]. En conséquence, le retrait ne sera effectif qu’à l’écoulement du délai d’un an. Au surplus, les affaires pendantes devant la Cour ne souffriraient en aucune manière de ce retrait[50]. Le retrait par un Etat de sa déclaration de reconnaissance de compétence de l’article 34.6, ne suspend donc pas les affaires pendantes contre lui et ne sera effectif qu’après une période d’un an, à compter de la date de notification officielle de la volonté de retrait à la Cour.
En définitive, les retraits rwandais, tanzanien, béninois et ivoirien, de la déclaration de l’article 34.6 du Protocole de Ouagadougou et du Protocole A/SP.1/01/05 du 19 janvier 2005 de la Cour de justice de la CEDEAO[51], sont a priori conformes à la légalité internationale. Cependant, ils peuvent être révélateurs d’un certain malaise. Il est vrai qu’ils ne sont pas proscrits par les différents Protocoles. Néanmoins, tout ce qui n’est pas interdit est permis, à condition que ce ne soit pas contraire à l’esprit du ou des textes de référence. En l’occurrence ici, les retraits des Etats correspondent, souvent, difficilement à l’esprit, aussi bien de la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples, du Protocole de Ouagadougou, que du Protocole A/SP.1/01/05 du 19 janvier 2005 de la Cour de justice de l’espace communautaire ouest-africain. Les ambigüités du droit du retrait se révèlent problématiques et sont susceptibles d’entrainer des fissures dans l’ordonnancement juridictionnel communautaire. Mais, sans pour autant rendre hermétique cet ordonnancement, les ressources du droit peuvent colmater les brèches.
II. Le dépassement possible des résistances par les ressources du droit
Les retraits de la déclaration de l’article 34.6 du Protocole créant la Cour africaine des droits de l’homme et des peuples, et du Protocole A/SP.1/01/05 du 19 janvier 2005 de la Cour de justice de la CEDEAO, traduisent une attitude de contestation ou de protestation de la part des Etats. Ces derniers semblent tourner le dos à ces instances continentale et communautaire. Néanmoins, il reste fort heureusement des motifs de à rassurer car, ces attitudes de « rébellion » (A) ne tarissent pas les ressources du droit continental et communautaire (B).
A. Des attitudes de « rébellion »
Les circonstances de déclenchement des retraits, sources de profonds malaises (1), les révèlent comme une « riposte », une attitude de « rébellion » envers le droit dont la souveraineté, en principe, doit être inattaquable (2).
1. L’exercice malaisé des retraits
Le sentiment de malaise vient du contexte problématique dans lequel les retraits interviennent. L’exploration du contexte des derniers retraits de déclaration de l’article 34.6 du Protocole créant la Cour africaine des droits de l’homme et des peuples corrobore à satiété le sentiment de malaise. Pour le Bénin, la décision de retrait fait suite à l’ordonnance de mesures provisoires de la Cour à l’encontre de l’Etat, dans l’Affaire Sébastien Germain Marie Aïkoue AJAVON c. République du Bénin. En effet, M. Sébastien Germain Marie Aïkoue AJAVON a déposé auprès de la Cour une requête aux fins d’octroi de mesures provisoires le 09 janvier 2020, suite à une requête introductive d’instance le 29 novembre 2019[52]. Après avoir établi sa compétence et conclu à la recevabilité de la requête, la Cour ordonne à l’Etat béninois de « surseoir à la tenue de l’élection des conseillers municipaux et communaux prévue pour le 17 mai 2020 jusqu’à ce que la Cour rende une décision au fond »[53]. C’est suite à cette décision que le Gouvernement béninois a actionné le retrait de la déclaration de compétence de l’article 34.6, protestant contre l’attitude de la Cour qui s’éloignerait de son domaine de compétence[54].
Quant au retrait de la Côte d’Ivoire, il fait suite également à l’ordonnance de mesures provisoires du 22 avril 2020, de la Cour africaine des droits de l’homme et des peuples, dans l’affaire Guillaume Kigbafori Soro et Autres c. République de Côte d’Ivoire (Requête N° 012/2020). Dans cette affaire, la Cour a ordonné à l’Etat de Côte d’Ivoire de « surseoir à l’exécution du mandat d’arrêt émis contre Guillaume Kigbafori Soro ; de surseoir à l’exécution des mandats de dépôts décernés contre les Requérants Alain Logognon (…) et de les mettre en liberté provisoire (…) »[55]. C’est alors qu’intervient la décision de retrait de la Côte d’Ivoire. Les autorités ivoiriennes estiment qu’elle fait suite « aux graves et intolérables agissements que la Cour africaine des droits de l’homme et des peuples s’est autorisée, dans ses actions et qui non seulement portent atteinte à la souveraineté de l’Etat de Côte d’Ivoire, à l’autorité et au fonctionnement de la justice, mais sont également de nature à entrainer une grave perturbation de l’ordre juridique interne des Etats et à saper les bases de l’Etat de droit par l’instauration d’une véritable insécurité juridique »[56]. Au fond, ces retraits peuvent difficilement être perçus comme des actes isolés et anodins. Ce serait peut-être une erreur et totalement réducteur de les lire uniquement par rapport à l’ordonnance en indication de mesures provisoires de la Cour africaine des droits de l’homme et des peuples, à l’encontre de ces Etats. Ils semblent s’inscrire dans une logique d’ensemble[57]. Sur les 55 Etats que compte l’Union Africaine, 30[58] ont régulièrement ratifié le Protocole de Ouagadougou et seulement 10 ont fait la déclaration de l’article 34.6[59]. Aujourd’hui, ils ne sont plus que six (6). Pour tous ces Etats, les retraits ont fait suite à des décisions de la juridiction africaine à leur encontre[60].
Quoi qu’il en soit, les instances juridictionnelles africaines subissent la méfiance, voire la défiance des Etats. Il est à craindre que les décisions des juridictions communautaires à l’encontre des Etats suscitent de nouveaux retraits, sur le fondement de leur souveraineté. Seulement, ce sera au mépris de la souveraineté du droit.
2. La souveraineté méprisée du droit
Les décisions de la Cour africaine des droits de l’homme et des peuples, même s’il s’agit de mesures provisoires[61], s’imposent aux Etats car, revêtues de force obligatoire[62]. La souveraineté ne devrait pas être opposable, l’Etat en ratifiant le traité instituant la juridiction, concédant déjà une partie de cette souveraineté. Il devient alors difficile de comprendre, qu’un Etat, en face de décisions de telle juridiction, « (…) refuse d’incliner sa souveraineté devant celle d’une Cour de Justice offrant toutes les garanties d’équité, d’impartialité et de conscience »[63]. Ceci pose le problème du contrôle de l’exécution des décisions sur le fondement d’une action contentieuse internationale. En fait, l’exécution des décisions de la Cour africaine des droits de l’homme et des peuples, ressentie parfois comme une contrainte insupportable, pousse de toute évidence les Etats au retrait. Ce retrait devenant ainsi un moyen de faire échec à l’exécution des décisions de la juridiction. Désactiver ce lien à ressort entre exécution des décisions et retrait apparait dès lors comme une nécessité.
En effet, entre le contrôle judiciaire de suivi des décisions internationales de la Cour interaméricaine[64] des droits de l’homme et le contrôle politique de la Cour européenne des droits de l’homme[65], la Cour africaine des droits de l’homme et des peuples a plutôt opté pour un contrôle mixte[66]. L’article 31 du Protocole de 1998 mentionne que « la Cour soumet à chaque session ordinaire de la Conférence des chefs d’Etat et de gouvernement un rapport annuel sur ses activités. Ce rapport fait état en particulier des cas où un Etat n’aura pas exécuté les décisions de la Cour ». Mais, l’amendement de 2008 (non encore en vigueur) va plus loin[67]. Sinon, pour le moment, il n’y a pas encore un véritable mécanisme de surveillance de l’exécution des décisions de la Cour. Et pourtant, il le faut, pour rétablir la souveraineté du droit et sauter le verrou de l’obstacle du retrait. La barrière n’est pas insurmontable. Elle n’est même pas hermétique. Les fissures apparaissent à plusieurs niveaux. Le cas du Bénin s’offre en illustration. Les retraits du Bénin de la déclaration de l’article 34.6 du Protocole portant création de la Cour africaine des droits de l’homme et des peuples, et du Protocole additionnel de la CEDEAO A/SP.1/01/05 du 19 janvier 2005, semblent aller contre certains principes dégagés aussi bien en droit interne béninois qu’en droit international.
Primo, la décision DCC 10-049 du 5 avril 2010 de la Cour constitutionnelle du Bénin. Dans cette décision, le juge constitutionnel proscrit tout retour en arrière dès lors qu’on a fait un pas en avant dans la protection des droits de l’homme[68]. Sous ce rapport, en retirant aux individus et aux ONG[69] la possibilité de se porter devant les juridictions concernées pour se plaindre des violations de leurs droits, les retraits du Bénin constituent une régression, remettant en cause des avancées considérables. Ces retraits peuvent être traités d’inconstitutionnels dès lors que la Cour constitutionnelle méconnait sa propre jurisprudence puisque la décision DCC 10-049 du 5 avril 2010 énonçait un principe général devant s’appliquer à toutes les situations analogues, et sans qu’on ne puisse y voir un revirement jurisprudentiel. En concédant aux individus et ONG le droit de se porter devant la juridiction continentale, l’Etat consacre une garantie au profit de la protection des droits de l’homme qui tombe dès lors que ce droit est retiré.
D’ailleurs et deuxio, la Cour constitutionnelle n’a pas manqué d’affirmer, qu’en cas de conflit entre droit national et droit communautaire, il faut prendre en compte la présence ou non de droits ou d’avantages au profit des citoyens. Dans l’affaire Eric Dewedi[70], la Cour a considéré que le Règlement n°05/CM/UEMOA du 25 Septembre 2014 ne saurait empêcher l’inscription des enseignants permanents au barreau du Bénin, sur le fondement de la loi n°65-6 du 20 avril 1965 qui consacre un avantage supérieur aux citoyens contrairement à l’acte communautaire[71]. Le Juge constitutionnel a pris en compte la présence des droits ou des avantages supérieurs aux citoyens comparativement au droit communautaire[72]. Dès lors, on comprend mal l’admission de la suppression de ces droits et avantages consacrés au profit des individus par l’entérinement des retraits.
Tertio, la bonne foi est un principe consacré en droit international et en droit des traités. L’article 26 de la Convention de Vienne sur le droit des traités prescrit que « Tout traité en vigueur lie les parties et doit être exécuté de bonne foi ». La Cour permanente d’arbitrage parlait déjà de « bonne foi parfaite »[73] dans l’affaire des Pêcheries de la côte septentrionale de l’Atlantique. Dès lors, la décision DCC n° 20-434 du 30 avril 2020, par laquelle le Juge constitutionnel béninois considère « que le protocole additionnel A/SP.1/01/05 du 19 janvier 2005 n’est pas opposable à l’Etat du Bénin pour n’avoir pas été ratifié en vertu d’une loi votée par l’Assemblée nationale, promulguée et publiée au Journal officiel (…) »[74], est contraire à la « bonne foi parfaite » requise des Etats. L’écran que constitue l’exigence du respect des règles constitutionnelles liées à la ratification en vue de l’entrée en vigueur d’un traité dans l’ordre interne des Etats[75], est fragile. Car, on peut difficilement parler de violation manifeste de règle de droit interne ou de violation en rapport avec une règle de droit interne d’importance fondamentale[76].
Il semble bien que c’est une attitude contestataire de certains Etats à l’égard des instances juridictionnelles continentale et communautaires de protection des droits de l’homme. Seulement, ces postures contestataires n’épuisent pas les provisions du droit communautaire de protection des droits de l’homme.
B. Les provisions du droit communautaire
Les retraits de la déclaration de l’article 34.6 du Protocole de Ouagadougou et du Protocole additionnel de la CEDEAO A/SP.1/01/05 du 19 janvier 2005 ne sortent pas l’Etat de la juridiction, ni de la Cour africaine des droits de l’homme et des peuples, ni de celle de la Cour de justice de la CEDEAO, notamment pour les questions relatives aux droits de l’homme, et ne le mettent pas non plus à l’abri des requêtes individuelles. Pour la Cour africaine des droits de l’homme et des peuples, les individus et les ONG peuvent emprunter la passerelle entre la Commission et la Cour. Mais, au-delà de la courroie de la Commission (2), les personnes privées peuvent utiliser le couloir du forum prorogatum, une technique que l’on peut d’abord explorer (1).
1. Le couloir du forum prorogatum
Le Forum prorogatum est une formule latine habituellement traduite par l’expression « juridiction prorogée ». C’est le fait pour un Etat d’accepter la compétence d’une juridiction internationale institutionnalisée, telle la Cour internationale de justice, postérieurement à la saisine, soit par déclaration expresse à cet effet, soit par des actes concluants impliquant une acceptation tacite[77]. Son régime juridique est construit par la Cour permanente de justice internationale (CPJI)[78] et après elle, la CIJ.
L’un des ingrédients du forum prorogatum est logé à l’article 38.5 du Statut de la Cour internationale de justice (CIJ)[79] dont on peut dégager deux moyens à la disposition des Etats : ou bien une reconnaissance explicite par le biais d’une déclaration formelle, ou bien, une reconnaissance implicite. Par exemple, dans l’affaire des Concessions Mavrommatis à Jérusalem, la CPJI a déduit sa compétence « d’un accord des Parties résultant de la procédure écrite »[80]. Par contre, le fait de participer à l’instance pour justement contester la Compétence de la Cour ne vaut pas acceptation[81] de celle-ci[82]. Quoi qu’il en soit, l’établissement du consentement enlève à l’Etat la possibilité de retrait unilatéral. Mais, la Cour africaine s’inspire-t-elle de la technique du forum prorogatum ?
Le mécanisme lui avait été suggéré par le Juge Fatsah Ouguergouz, à l’occasion de l’affaire Michelot Yogogombaye c. République du Sénégal[83], visant à faire déclarer illégale la procédure tendant à « inculper, juger et condamner » Hissène Habré. Le Sénégal avait soulevé une exception préliminaire « d’irrecevabilité ». Mais la Cour a fini par conclure « à son incompétence pour connaitre de la requête »[84], le Sénégal n’ayant pas fait la déclaration de l’article 34.6. Le Juge Fatsah Ouguergouz ne remet pas en cause la conclusion de la Cour, mais la démarche pour y arriver[85]. Au paragraphe 27 de son opinion individuelle, le juge se pose la question de savoir si « le dépôt de déclaration facultative par les Etats est le seul moyen par lequel ceux-ci peuvent exprimer leur consentement à la compétence de la Cour pour connaitre d’une requête individuelle dirigée contre eux ». Est-ce donc que l’article 34.6 du Protocole est limitatif dans les moyens d’expression du consentement ? Fatsah Ouguergouz en est arrivé à la conclusion que l’article 34 ne prescrit ni la forme ni n’interdit que le consentement de l’Etat puisse être donné par un autre moyen que la déclaration. L’attitude du Sénégal laissait entrevoir la possibilité d’un forum prorogatum. La Cour a donc la possibilité d’interpréter les comportements des Etats pour établir l’existence d’un consentement par forum prorogatum. La Cour de justice de la CEDEAO aussi. Mais il faut pour cela que les juges d’Arusha et d’Abuja soient plus audacieux. En attendant, les individus, notamment pour la Cour africaine des droits de l’homme et des peuples, peuvent se servir de la courroie de transmission de la Commission.
2. La courroie de la Commission
La Commission « est chargée de promouvoir les droits de l’homme et des peuples et d’assurer leur protection en Afrique »[86]. A cet effet, au-delà des plaintes interétatiques[87], elle est compétente également pour connaitre des communications individuelles[88]. « La procédure de plainte individuelle a été définie par la Commission dans son Règlement intérieur. Elle ouvre le droit de saisine aux individus et aux organisations et repose sur une procédure écrite »[89]. Les requêtes individuelles peuvent passer par la Commission qui est habilitée à saisir la Cour[90]. Ce qui conduit la Cour à l’établissement de sa compétence rationae personae. C’est le cas dans l’affaire Saif AL-Islam Gaddafi[91] contre la République de Libye[92]. Face au mutisme de l’Etat relatif aux mesures provisoires indiquées[93] par la Commission pour éviter des dommages irréparables à la victime, elle demande[94] à la Cour d’ordonner à l’endroit du Défendeur, les mesures ci-après : « a. Mettre fin à toute action portant sur des procédures judiciaires, des enquêtes ou détention, qui pourrait causer des dommages irréparables à la victime ; b. Permettre à la victime d’avoir immédiatement accès à un conseil, sans plus de délai ». Cette saisine de la Cour par le biais de la Commission a permis d’établir la compétence personnelle de la Cour sur cette affaire ; sinon, la requérante aurait eu droit à un arrêt d’irrecevabilité ou une simple décision rayant l’affaire du rôle de la Cour. Par ailleurs, cette procédure permet aux individus d’avoir le locus standi. Ils auront ainsi le droit de participer à l’affaire.
En définitive, les retraits, au-delà des interrogations qu’ils suscitent, parce qu’in fine, entre considérations politiques et incertitudes juridiques, grossissent les traits d’un mal plus profond. En effet, la déclaration de reconnaissance de compétence constitue l’une des défaillances principales du système africain de protection des droits de l’homme. La capacité de la Cour à recevoir des requêtes individuelles est fondamentale pour son efficacité dans son rôle de lutte contre les violations des droits de l’homme sur le continent. Et le besoin de faire une déclaration afin que les personnes privées puissent accéder au prétoire de la Cour est une exceptionnalité africaine. Interdire le recours individuel, c’est ainsi nier le principe de l’individualité des droits fondamentaux. La soumission des requêtes des individus et celles des ONG à la volonté des Etats tire l’ensemble du système africain de protection des droits de l’homme vers le bas. Pour la Cour africaine des droits de l’homme et des peuples par exemple, il n’est pas exclu que les six autres Etats (Burkina Faso, Malawi, Mali, Ghana, Tunisie, Gambie) qui ont fait la déclaration de reconnaissance de compétence, se rétractent. Ce qui risque de dépérir la jurisprudence[95] déjà maigre d’Arusha, comparativement à Strasbourg ou à San José.
S’il est vrai que le droit communautaire recèle fort heureusement de bien d’autres ressources pour atténuer l’effet des retraits, ces ressources ne sont, pour l’instant que peu explorer. Ce qui pousse à aller au-delà pour repenser le système. La décision de fusionner la Cour de justice de l’Union africaine dont le Protocole avait été adopté le 11 juillet 2003 à Maputo, avec la Cour africaine des droits de l’homme et des peuples est porteuse d’espoir. Ouvrira-t-elle « une nouvelle ère pour les droits de l’homme en Afrique »[96] ? Entre la physionomie actuelle du système africain de protection des droits de l’homme et la physionomie projetée[97], l’avenir est incertain. C’est pourquoi, il est urgent de tendre vers un véritable culte du droit, qui peut s’exprimer dans une révérence quasiment totémique à l’égard de la norme juridique qui protège les droits et les libertés fondamentaux.
[1] P.-H. TEITGEN, Travaux préparatoires CEDH, Vol 1, p. 297.
[2] M. KAMTO (dir.), La Charte africaine des droits de l’homme et des peuples et le protocole y relatif portant création de la Cour africaine des droits de l’homme et des peuples : Commentaire article par article, Bruxelles, Bruylant, 2011, p. 33.
[3] L. HENNEBEL, H. TIGROUDJA, Traité de droit international des droits de l’homme, Paris, Pedone, 2016, p. 59.
[4] En effet, la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples a été adoptée le 27 mai 1981 ; cinq ans plus tard, le 21 octobre 1986, elle est entrée en vigueur. Mais le besoin de renforcer le système africain de protection des droits de l’homme sur le continent africain a nécessité l’adoption le 10 juin 1998 à Ouagadougou, du Protocole à la Charte, créant la Cour africaine des droits de l’homme et des peuples, dont l’entrée en vigueur n’est intervenue que le 25 janvier 2004.
[5] Article 2 du Protocole de Ouagadougou, relatif à la Charte africaine, portant création d’une Cour africaine des droits de l’homme et des peuples.
[6] Article 3 du Protocole de Ouagadougou, relatif à la Charte africaine, portant création d’une Cour africaine des droits de l’homme et des peuples.
[7] L’arrêt du 14 juin 2013 sur les affaires jointes Tanganyika Law Society & The Legal and Human Rights Centre c. Tanzanie, et Révérend Christopher Mtikila c. Tanzanie.
[8] Article 5.1 du Protocole de Ouagadougou, relatif à la Charte africaine, portant création d’une Cour africaine des droits de l’homme et des peuples.
[9] La demande de statut d’observateur par une ONG œuvrant dans le domaine des droits de l’homme, conformément aux principes fondamentaux et aux objectifs énoncés dans l’Acte constitutif de l’UA et la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples, se fait par le dépôt d’une requête écrite auprès du secrétariat de la Commission. Celle-ci doit comprendre : les statuts de l’ONG, la preuve de son existence juridique, la liste de ses membres, ses organes, ses sources de financement, son dernier bilan financier ainsi que ses rapports d’activités. Le secrétariat désignera un Commissaire rapporteur qui sera chargé d’étudier la requête et de la présenter devant les autres Commissaires lors d’une session de la Commission pour adoption du statut d’observateur.
[10] Articles 5.3 et 34.6 du Protocole de Ouagadougou, relatif à la Charte africaine, portant création d’une Cour africaine des droits de l’homme et des peuples.
[11] La Tanzanie a retiré sa déclaration, retrait notifié à l’Union africaine le 21 novembre 2019.
[12] La Côte d’Ivoire a décidé de retirer sa déclaration de reconnaissance de compétence, le 28 avril 2020.
[13] Le Rwanda a retiré sa déclaration, retrait devenu effectif depuis mars 2017.
[14] A.-K. DIOP, « La Cour africaine des droits de l’homme et des peuples ou le miroir stendhalien du système africain de protection des droits de l’homme. », Les Cahiers de droit, volume 55, numéro 2, juin 2014, pp. 537.
[15] Lire M. HOUNGBEDJI, Le retrait des Etats des organisations internationales, Mémoire de Master 2 Recherche en Droit international et Organisations internationales, Université d’Abomey-Calavi, octobre 2017, 122 p.
[16] L. B. de CHAZOURNES et M. M. MBENGUE, « Article 34 » in M. KAMTO, (dir.), La Charte africaine des droits de l’homme et des peuples et le Protocole y relatif portant créant d’une Cour africaine des droits de l’homme : commentaire article par article, Op. cit., p. 1534.
[17] Qu’elles viennent des individus ou des ONG dotées d’un statut d’observateur auprès de la Commission.
[18] Cour Africaine des Droits de l’Homme et des Peuples (CADHP) : 15 décembre 2009, Requête N°001/2008, affaire Michelot Yogogombaye c. République du Sénégal, Cour Africaine des Droits de l’Homme et des Peuples (CADHP) : 16 juin 2012, Requête N°002/2011, affaire Soufiane Ababou People c. République démocratique d’Algérie.
[19] Article 45 de la Convention interaméricaine des droits de l’homme, pour les affaires devant la Commission interaméricaine. L’article 62, pour ce qui est de la Cour.
[20] Commission Interaméricaine des droits de l’Homme (CIDH) : 08 mars 2007, Requête n° 01/06, Rapport n° 11/07, affaire Nicaragua c. Costa Rica, décision d’irrecevabilité, paragraphe 133: « In reaching its decision in the Matter of Viviana Gallardo et al., the Court also concluded that the procedures before the Commission cannot be dispensed with in this kind of case without impairing the institutional integrity of the protective system guaranteed by the Convention. The Court further found obiter dictum that these procedures may therefore not be waived or excused unless it were to be clearly established that their omission, in a specific case, would not impair the functions that the Convention assigns to the Commission, as might be the case when a matter is initially presented by a State against another State and not by an individual against a State. However, such exceptional circumstances must be demonstrated and it would be wrong to conclude that the proceeding before the Commission could be dispensed with in all interstate cases».
[21] Voir sur la protection européenne des droits de l’homme, J.-P. MARGUENAUD, La Cour européenne des droits de l’homme, Paris, Dalloz, 2012, 208 p. P. ALSTON (dir.), L’Union européenne et les droits de l’homme, Bruxelles, Bruylant, 2001, 983 p. D. DERO-BUGNY, Les rapports entre la Cour de justice de l’union européenne et la Cour européenne des droits de l’homme, Bruxelles, Bruylant, 2015, 232 p. V. BERGER, Jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme, Paris, Sirey, 2014, 968 p.
[22] Voir, J.-P. MARGUENAUD, La Cour européenne des droits de l’homme, Op. cit. ; V. BERGER, Jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme, Op. cit.
[23] Bien sûr, les requêtes doivent remplir les conditions de recevabilité. Cette (r)évolution est opérée par les Protocoles n°9 et n°11 à la Convention européenne des droits de l’homme. Ici, la déclaration de compétence n’existe plus. La ratification de la Convention européenne par l’Etat vaut compétence contentieuse automatique de la Cour européenne pour connaitre des requêtes individuelles.
[24] Cour de Justice de la CEDEAO : 27 avril 2004, affaire Afolabi Olajidé c. République Fédérale du Nigéria.
[25] T. ZOGBELEMOU, Droit des organisations d’intégration économique en Afrique (CEDEAO-CEMAC-UEMOA-ZMAO), Paris, L’Harmattan, 2014, p. 124.
[26] A. SALL, « Les débuts des cours de justice de la CEDEAO et de l’UEMOA : Propos sur la faiblesse du droit jurisprudentiel de l’intégration en Afrique de l’Ouest », Nouvelles Annales Africaines, Revue de le Faculté des Sciences Juridiques et Politiques de l’Université de Dakar, CREDILA, n° 1, 2010, pp. 5-72, (spéc., p. 18).
[27] Voir entre autres décisions : Arrêt du 27 avril 2004, affaire Ofolabi Olajidé c. République du Nigéria : droit à la libre circulation des personnes (Traité CEDEAO, article 12 CADHP) ; Arrêt du 7 octobre 2005, affaire Jery Ugokwé c. République fédérale du Nigéria : droit à un procès équitable en matière de contentieux électoral (DUDH, article 7 CADHP, section 36 de la Constitution nigérienne de 1999) ; arrêt du 22 mars 2007, affaire Moussa Léo Keita c. République du Mali : droit de propriété sur des œuvres d’art ; arrêt du 28 juin 2007, affaire Alhaji Hammani Tijani c. République du Mali, du Bénin, du Nigéria et autres : droit à un procès équitable et impartial (article 6 CADHP) ; Arrêt du 29 octobre 2007, affaire Pr Etim Moses Essein c. République de Gambie : droit à un salaire égal pour un travail égal (article 23 DUDH, article 5 et 15 CADHP), etc…
[28] Sur environ soixante-sept affaires pendantes devant la Cour depuis le début de l’année 2020, soixante-et-une, sont relatives aux violations des droits de l’homme. Voir G. KISHIBA, Abuja plutôt qu’Arusha : une efficacité sous régionale de la protection des droits de l’homme ?, Mémoire de Master 2 en Droit international public, Aix-Marseille Université, 2020, 84 p.
[29] S. SUR, Les dynamiques du droit international, Paris, Pedone, 2012, pp. 23-24.
[30] Cour Permanente de Justice Internationale (CPJI) : 23 juillet 1923, Avis consultatif, Statut de la Carélie Orientale, Série B, p. 27.
[31] M.-C. DOCK, « Le retrait des membres des Organisations internationales de la famille des Nations Unies », Annuaire français de droit international, volume 40, 1994. pp. 106-155.
[32] M. HOUNGBEDJI, Le retrait des Etats des organisations internationales, Op. cit. p. 9.
[33] A. PIZZORUSSO, « Préface », in C. SEVERINO, La doctrine du droit vivant, Aix-en-Provence, Presses universitaires d’Aix-Marseille, Paris, Economica, 2003, 282 p. (spéc., p. VII).
[34] Lire D. PAVOT, « Réflexions sur l’interprétation des actes unilatéraux des Etats à la lueur de la décision de la Cour africaine des droits de l’homme et des peuples du 3 juin 2016 dans l’affaire Victoire Ingabire Umuhoza c. Rwanda », Revue de droit international et de droit comparé, n° 1, 2018, pp. 85-112.
[35] Cour Africaine des Droits de l’Homme et des Peuples (ADHP) : du 03 juin 2016, Arrêt sur les effets du retrait de la déclaration faite en vertu de l’article 34.6 du Protocole, §. 53.
[36] Cour Africaine des Droits de l’Homme et des Peuples (ADHP) : du 03 juin 2016, Arrêt sur les effets du retrait de la déclaration faite en vertu de l’article 34.6 du Protocole, Op. cit., §. 58.
[37] Sur les rapports entre le droit international des droits de l’homme et le droit international général, lire A. A. CANÇADO TRINDADE, International Law for Humankind : Towards a New Jus Gentium, Leiden, Boston, Martinus Nijhoff Publishers, 2010, 726 p. L.-A. SICILIANOS, « L’influence des droits de l’homme sur la structure du droit international : la hiérarchisation de l’ordre juridique international », Revue générale de droit international public, vol. 116, n° 1, 2012, pp. 5-30.
[38] R. KOLB, « La règle résiduelle de liberté en droit international public (Tout ce qui n’est pas interdit est permis) – Aspects théoriques – » Revue belge de droit international, n° 01, vol. 34, 2001, pp. 100-127.
[39] Cour permanente de justice internationale (CPJI) : 7 septembre 1927, arrêt série A, n° 10, Affaire du Lotus (France c. Turquie).
[40] Il peut s’agir aussi d’une Organisation internationale.
[41] Article 54, Convention de Vienne sur le droit des traités, 23 mai 1969.
[42] « 1. Un changement fondamental de circonstances qui s’est produit par rapport à celles qui existaient au moment de la conclusion d’un traité et qui n’avait pas été prévu par les parties ne peut être invoqué comme motif pour mettre fin au traité ou pour s’en retirer, à moins que : a) l’existence de ces circonstances n’ait constitué une base essentielle du consentement des parties à être liées par le traité ; et que b) ce changement n’ait pour effet de transformer radicalement la portée des obligations qui restent à exécuter en vertu du traité. 2. Un changement fondamental de circonstances ne peut pas être invoqué comme motif pour mettre fin à un traité ou pour s’en retirer : a) s’il s’agit d’un traité établissant une frontière ; ou b) si le changement fondamental résulte d’une violation, par la partie qui l’invoque, soit d’une obligation du traité, soit de toute autre obligation internationale à l’égard de toute autre partie au traité. 3. Si une partie peut, conformément aux paragraphes qui précèdent, invoquer un changement fondamental de circonstances comme motif pour mettre fin à un traité ou pour s’en retirer, elle peut également ne l’invoquer que pour suspendre l’application du traité ».
[43] Cour internationale de justice (CIJ) : 02 février 1973, arrêt n°56, Compétence en matière de pêcheries, arrêt du, paragraphe 19.
[44] Ibid., paragraphe 21.
[45] Cour Interaméricaine des Droits de l’Homme (CIDH), The obligations in matters of human rights of a state that has denounced the american convention on human rights and the charter of the organization of american states, Advisory opinion OC-26/20, Novembre 2020.
[46] Ibid., Paragraphe 64 : « elle doit avoir fait l’objet d’un débat public, pluraliste et transparent parce qu’il s’agit d’une décision d’intérêt général qui peut entraîner un affaiblissement de la protection des droits et une limitation de l’accès des individus à la justice internationale »
[47] Ibid., Paragraphe 73. A cet effet, la Cour considère que la bonne foi d’un Etat devrait être évaluée lorsqu’il dénonce un traité de protection des droits de l’homme dans le contexte d’une érosion progressive des institutions démocratiques.
[48] Cour Africaine des Droits de l’Homme et des Peuples (CADHP) : 18 mars 2016, requête n° 003/2014, affaire Ingabire Victoire Umuhoza c République du Rwanda, paragraphe 18.
[49] Ibid., §. 66.
[50] Ibid., §§. 67-68.
[51] Pour le Bénin notamment.
[52] Cour Africaine des Droits de l’Homme et des Peuples (CADHP) : 17 avril 2020, Requête n° 062/19, affaire Sébastien Germain Marie Aïkoue Ajavon c. République du Bénin, Ordonnance de mesures provisoires.
[53] Cour Africaine des Droits de l’Homme et des Peuples (CADHP) : 17 avril 2020, Requête n° 062/19, affaire Sébastien Germain Marie Aïkoue Ajavon c. République du Bénin, Op. cit., VII, para. 4.
[54] On peut considérer qu’il y a un lien, direct ou indirect, entre cette décision et la décision DCC n° 20-434 du 30 avril 2020 de la Cour constitutionnelle du Bénin selon laquelle « le Protocole additionnel A/SP.1/01/05 du 19 janvier 2005 [de la Cour de justice de la CEDEAO] n’est pas opposable à l’Etat du Bénin pour n’avoir pas été ratifié en vertu d’une loi votée par l’Assemblée nationale, promulguée et publiée au Journal officiel ».
[55] Cour Africaine des Droits de l’Homme et des Peuples (CADHP) : 22 avril 2020, Requête n°012/2020, affaire Guillaume Kigbafori Soro et Autres c. République de Côte d’Ivoire, Ordonnance de mesures provisoires, Op.cit., pp. 10-11, paragraphe 42.
[56] Communiqué du Gouvernement ivoirien, signé du Ministre de la communication et des médias, Porte-parole du Gouvernement, Sidi Tiémoko Touré, Abidjan, 29 avril 2020.
[57] I. SALAMI, « Le retrait de déclaration de compétence de la Cour africaine par le Bénin ou le bal des perdants », 4 mai 2020, URL : https://www.banouto.info/article/politique/20200504-retrait-de-dclaration-du-bnin–la-cour-africaine-opinion-de-professeur-salami/, consulté le 13 mai 2020.
[58] Il s’agit de l’Algérie, du Bénin, du Burkina Faso, du Burundi, de la Côte d’Ivoire, des Comores, de la République du Congo, du Gabon, de la Gambie, du Ghana, du Kenya, de la Libye, du Lesotho, du Mali, du Malawi, du Mozambique, de la Mauritanie, de Maurice, du Nigéria, du Niger, du Rwanda, de la République arabe sahraouie démocratique, de l’Afrique du Sud, du Sénégal, de la Tanzanie, du Tchad, du Togo, de la Tunisie, de l’Ouganda et de la République du Cameroun.
[59] Le Burkina Faso (1998), le Malawi (2008), le Mali et la Tanzanie (2010), le Ghana (2011), la Côte d’Ivoire et le Rwanda (2013), le Bénin (2016), la Tunisie (2017) et la Gambie (2019).
[60] Y. MOYNAT, S. PEPIN, A.-L. MARTEL et N. BOEGLIN, « Le retrait du Venezuela de la Convention américaine relative aux droits de l’homme », En ligne : https://www.quidjustitiae.ca/taxonomy/term/254 (Consulté le 27 février 2022). Aussi, On se rappelle galement l’acte du Gouvernement des Etats-Unis qui a donné avis du retrait de sa déclaration d’acceptation de la juridiction obligatoire de la CIJ le 26 août 1946, soit dix-sept mois après l’ordonnance indiquant des mesures conservatoires rendue par la CIJ le 10 mai 1984Suite à l’arrêt du 26 novembre 1984 dans lequel la Cour s’est déclarée compétente pour trancher l’affaire des activités militaires et paramilitaires au Nicaragua et contre les Etats-Unis.
[61] Lire H. TIGROUDJA, « La force obligatoire des mesures conservatoires indiquées par la cour européenne des droits de l’homme », Revue générale de droit international public, 2003, pp. 601-633.
[62] Lire, sur les conditions de l’effectivité des organes internationaux judiciaires et quasi-juridictionnels, L. HELFER, A.-M. SLAUGHTER, « Toward a Theory of Effective Supranational Adjudication », Yale Law Journal, vol. 107, n° 2, 1997, pp. 273-392.
[63] P-H. TEITGEN, Travaux préparatoires CEDH, Vol 1, p. 297
[64] Lire L. BURGORGUE-LARSEN et A. U. de TORRES, Les grandes décisions de la Cour interaméricaine des droits de l’homme, Bruxelles, Bruylant, 2008, 995 p. ; H. TIGROUDJA et I. PANOUSSIS, La Cour interaméricaine des droits de l’homme : Analyse de la jurisprudence consultative et contentieuse, Bruxelles, Bruylant, 2003, 330 p.
[65] . HENNEBEL, H. TIGROUDJA, Traité de droit international des droits de l’homme, Op.cit., pp. 1445-1454.
[66] Ibid., pp. 1441-1443.
[67] En effet, « l’article 46 semble établir un mécanisme plus équilibré que le mécanisme interaméricain en conférant à la Cour la possibilité de saisir la Conférence des chefs d’Etat et de gouvernement pour dénoncer la situation d’un Etat qui n’exécuterait pas ses décisions (article 46.4 du Protocole portant statut de la Cour africaine de justice et des droits de l’homme). La Conférence pourra, le cas échéant, adopter des sanctions prévues à l’Acte constitutif de l’Union africaine (article 46.5 du Protocole de 2008) ».
[68] Cour constitutionnelle du Bénin : 5 avril 2010, DCC 10-049, Contrôle de conformité Loi d’abrogation de la loi portant organisation RENA et LEPI, p. 43.
[69] Les ONG n’ayant pas le statut d’observateur auprès de la Commission, pour ce qui concerne la Cour africaine des droits de l’homme et des peuples.
[70] Eric Dewedi est Agrégé des facultés de droit de nationalité béninoise, souhaitant accéder à la fonction d’avocat, avait rencontré l’opposition du Conseil de l’ordre des avocats, au motif qu’en vertu du Règlement numéro 5 de l’Union économique et monétaire ouest-africaine (UEMOA) du 25 Septembre 2014, la fonction d’avocat est incompatible avec la fonction d’enseignant permanent ou titulaire. On peut lire à l’article 35 du règlement que « La fonction d’avocat est compatible avec la fonction d’enseignant vacataire ». Cependant, cette disposition va à l’encontre de la loi de 1965 qui régit le Barreau au Bénin, qui autorise les professeurs agrégés à accéder à la fonction d’avocat. C’est alors que devant le refus de son inscription au barreau, Monsieur Eric Dewedi a exercé un recours devant la Cour constitutionnelle béninoise, alléguant la violation du principe d’égalité, car avant lui, d’autres professeurs agrégés ont vu leurs demandes acceptées. L’article 20 de la loi n°65-6 du 20 avril 1965 institue en effet une voie dérogatoire pour l’accès à la profession d’avocats au Bénin pour les professeurs agrégés en les dispensant de stage.
[71] Cour constitutionnelle du Bénin : 22 août 2019, DCC n° 19-287, affaire Éric DEWEDI contre Conseil de l’Ordre des Avocats.
[72] Mais l’article 06 du traité de l’UEMOA dit le contraire : « Les actes arrêtés par les organes de l’Union pour la réalisation des objectifs du présent Traité et conformément aux règles et procédures instituées par celui-ci, sont appliqués dans chaque Etat membre nonobstant toute législation nationale contraire, antérieure ou postérieure ». C’est pourquoi la Commission de l’UEMOA a saisi la Cour de justice de l’UEMOA (Requête n° 20-8002 du 22 janvier, aux fins de mise en œuvre de l’article 14 du protocole additionnel n° 1 relatif aux organes de contrôle de l’UEMOA. Affaire, La Commission de l’Union Economique et Monétaire Ouest Africaine (UEMAO) contre La décision n° 19-287, 22 août 2019 de la Cour constitutionnelle du Bénin) afin qu’elle se prononce sur « les errements juridiques de la Cour constitutionnelle béninoise » (D. ZAN et N. ZOROME, « La primauté absolue du droit communautaire toujours contestée par le Juge constitutionnel béninois », Revue juridique du Faso, En ligne : https://revuejuris.net/2020/06/11/la-primaute-absolue-du-droit-communautaire-est-toujours-contestee-par-le-juge-constitutionnel-beninois/ ).
[73] Cour permanente d’arbitrage (CPA), Sentence du 7 septembre 1910, Affaire des pêcheries de la côte septentrionale de l’Atlantique.
[74] Cf. Décision DCC n° 29-434 de la Cour constitutionnelle du Bénin, 30 avril 2020, Op.cit.
[75] A. KPODAR et D. KOKOROKO, « Cour de justice CEDEAO-Bénin : les professeurs Adama Kpodar et Dodzi Kokoroko analysent la décision de la Cour constitutionnelle », 29 mai 2020, URL : https://www.banouto.info/article/securite%20humaine/20200529-cour-de-justice-cedeao-bnin-universitaires-kpodar-kokoroko-analysent-dcision-cour-constitutionnelle/, consulté le 10 juin 2020.
[76] S. KPOTON, « Cour de justice de la CEDEAO : arguments techniques contre la décision de la Cour constitutionnelle du Bénin », 7 mai 2020, URL : https://www.banouto.info/article/politique/20200507-cour-de-justice-cedeao-arguments-techniques-dcision-cour-constitutionnelle-bnin/, consulté le 20 mai 2020.
[77] F. OUGUERGOUZ, Opinion individuelle, §. 32, in Cour Africaine des Droits de l’Homme et des Peuples (CADHP) : 15 décembre 2009, requête n°001/2008, Affaire Michelot Yogogombaye c. Sénégal.
[78] La paternité de l’introduction du forum prorogatum revient à la CPJI. En effet, « à l’occasion de la révision, en 1934, de l’article 35 du règlement de la CPJI relatif aux mentions que devrait contenir une requête introductive d’instance, plusieurs juges avaient insisté sur le fait que l’institution du forum prorogatum était dans l’intérêt de la justice internationale, dans la mesure où elle permettait une certaine souplesse quant aux conditions à remplir par un État qui voudrait s’adresser à la Cour pour régler un différend », V. POULIOT, « Le forum prorogatum devant la Cour internationale de Justice : L’affaire Djibouti c. France », Journal judiciaire de La Haye (JJH), vol. 3, n°3, 2008, p. 35.
[79] Article 38.5 du Statut de la CIJ.
[80] Cour Permanente de Justice Internationale (CPJI) : 26 mars 1925, requête Série A, n° 5, affaire Concessions Mavrommatis à Jérusalem, p. 27.
[81] Voir CIJ : 25 mars 1948, Arrêt sur l’exception préliminaire, Détroit de Corfou, C. I. J. Recueil 1947-1948, p. 29 et Droits de minorités en Haute-Silésie (écoles minoritaires), op.cit., p. 25.
[82] C’est en tout cas à cette conclusion qu’est arrivée la CIJ dans l’affaire de l’Anglo-Iranian Oil. La Cour a estimé en l’espèce que : « pour pouvoir s’appliquer (…), le principe du forum prorogatum devrait être fondé sur quelque acte ou déclaration du Gouvernement de l’Iran impliquant un élément de consentement à l’égard de la compétence de la Cour. Mais ce Gouvernement n’a pas cessé de contester la compétence de la Cour (…) Aucun élément de consentement ne saurait être déduit de l’attitude adoptée par l’Iran.
[83] Cour Africaine des Droits de l’Homme et des Peuples (CADHP) : 15 décembre 2009, Requête n°001/2008, affaire Michelot Yogogombaye C. République du Sénégal.
[84] Cour Africaine des Droits de l’Homme et des Peuples (CADHP) : 15 décembre 2009, Requête n°001/2008, affaire Michelot Yogogombaye c. Sénégal, Op. cit., §. 40.
[85] « Je partage l’avis de mes collègues quant aux conclusions auxquelles la Cour est parvenue », F. OUGUERGOUZ, Opinion individuelle, Op. cit., §. 1.
[86] Article 30, Charte africaine des droits de l’homme et des peuples.
[87] Articles 47, 49 de la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples.
[88] Article 55 de la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples.
[89] Ludovic HENNEBEL et H. TIGROUDJA, Traité de droit international des droits de l’homme, Op. cit., p. 394.
[90] Cour Africaine des Droits de l’Homme et des Peuples (CADHP) : 03 juin 2016, Requête n°002/2013, affaire Commission ADHP c. Libye, §. 51.
[91] Saïf Al-Islam était détenu sans inculpation ni poursuite et sous menace imminente d’un procès à la suite duquel il encourrait la peine de mort.
[92] Lire O. WINDRIDGE, « In default: African Commission on Human and peoples’ Rights v. Libya”, African Human Rights Law Journal, n° 18, 2018, pp. 758-776.
[93] Lire H. TIGROUDJA, « La force obligatoire des mesures conservatoires indiquées par la Cour européenne des droits de l’homme », Op. cit., pp. 601-633.
[94] La Commission a soumis, de son propre chef, plusieurs requêtes à la Cour contre la Libye. Cette attitude fait suite et est justifiée par le chao né de l’intervention de l’OTAN en Libye. La décision qui nous intéresse ici est celle soumise par un individu à la Commission qui décide de poursuivre l’affaire devant la Cour. Voir Commission ADHP c. Libye, requête n°002/2013, arrêt du 03 juin 2016.
[95] Lire H. G. COHEN, « Theorizing Precedent in international Law », in A. BIANCHI et al., Interpretation in international Law, Oxford, Oxford University Press, 2015, pp. 268-289; G. GUILLAUME, “The Use of Precedent by International Judges and Arbitrators”, Journal of International Dispute Settlement, vol. 2, n° 1, 2011, pp. 5-23.
[96] Laurence Boisson de Chazournes et Makane Moïse Mbengue, « Article 34 » dans Maurice Kamto, dir, La Charte africaine des droits de l’homme et des peuples et le protocole y relatif portant créant d’une Cour africaine des droits de l’homme : commentaire article par article, Bruxelles, Bruylant, 2011, p. 1517.
[97] Le protocole de 1998 ayant fait l’objet de modifications par les Protocoles de 2008 et 2014, qui eux-mêmes, ne sont pas encore entrés en vigueur.