Police et droit en Allemagne et en Italie
Par Kevin Mariat, Maître de conférences, Université Paris Nanterre, Centre de droit pénal et de criminologie (CDPC, EA3982)
Introduction
« Police et droit », en droit comparé[1], au sein d’un colloque sur les violences policières…vaste programme ! Si le cas américain constituait un indispensable à la réflexion comparée sur la question[2], peut-on en dire autant de l’Allemagne et de l’Italie ? Le cas allemand est, il est vrai, régulièrement cité comme un modèle à suivre[3] – ce qui l’opposerait au système américain, plus souvent utilisé comme exemple à ne pas suivre –, de la même manière que l’on insiste souvent sur le fait que la problématique des violences policières est sans commune mesure en France par rapport à l’Allemagne[4]. En revanche, l’Italie reste relativement peu citée lorsqu’il s’agit de faire un tour d’horizon des différents modèles de police[5]. Qu’à cela ne tienne ! Modèle d’un côté, relative ignorance de l’autre : deux bonnes raisons d’aller voir ce qui se passe outre-Rhin et outre-Alpes afin, espérons-le, de prendre du recul sur le débat français[6]. Pour ce faire, encore faut-il identifier la problématique générale sous-jacente aux rapports entre police et droit[7]. Rien de mieux, alors, que de repartir de la définition des termes du sujet.
Il faut, dès cette introduction, souligner un premier apport de la comparaison en matière de police : en Allemagne, en Italie et en France, le terme « police » est fortement polysémique.
Juridiquement, on dira que la police désigne à la fois l’organe – les forces de police – et leur fonction[8]. Pire, deux grandes fonctions de police existent : la police administrative et la police judiciaire[9], dualité que l’on retrouve en Allemagne[10] et en Italie[11]. Cette opposition entre prévention et répression est en réalité transcendée par l’unicité de l’organe policier : ce sont toujours les mêmes forces de police qui interviennent. La police, contrairement à la justice qui est bien séparée, en France, en Allemagne et en Italie, en organes différents (justice administrative v. justice judiciaire, à tout le moins[12]) est ainsi l’une des rares institutions à être continuellement présente dans la vie en société[13].
La polysémie dépasse toutefois la sphère juridique puisque les dictionnaires de référence[14] donnent tous plusieurs sens au terme police. En résumant, on pourrait dire que trois sens sont à chaque fois, implicitement ou explicitement, reconnus au terme « police » :
- L’institution s’occupant au moyen d’un pouvoir coercitif du maintien de la société ;
- Les membres de cette institution ;
- Les « antennes » territoriales de cette institution (« je vais à la police », sous-entendu au poste de police).
Cette autre polysémie permet de compléter les données du problème : la police est continuellement présente, c’est-à-dire avant, pendant et après la mise à mal du bon fonctionnement de la société, et a pour but d’assurer, maintenir et rétablir ce bon fonctionnement au moyen de l’usage d’un pouvoir de coercition[15]. Autrement dit, l’activité de police emporte presque par essence une contrainte, une ingérence dans les libertés des citoyens – sans considération, à ce stade, de la justification de cette ingérence. La police est donc une institution continuellement présente et disposant d’un pouvoir de coercition exercé au nom de l’État[16]. Il y a donc un lien extrêmement fort en même temps qu’évident entre police et État[17]…que l’on qualifie aujourd’hui d’État de droit.
Il n’est naturellement pas ici question de prétendre définir le droit ! On peut toutefois dire que le droit est le mode considéré comme légitime de régulation de la vie en société – par opposition à la violence[18] – en ce qu’il permet une médiation[19] entre les différents intérêts en présence. Cependant, la règle de droit, qui permet cette régulation/médiation de la vie en société, a pour particularité d’être produite par l’État, État qui dispose du monopole de la violence légitime[20]. Ainsi le droit impose, pour son effectivité, la contrainte en même temps qu’il la réglemente afin de rester dans une régulation « légitime » de la vie en société[21]. Le droit sera donc entendu ici comme le moyen d’autoriser tout en l’encadrant une certaine violence (étatique, légitime) plutôt qu’une autre (privée, illégitime), le tout dans un but de médiation, de paix sociale, de maintien du vivre ensemble[22].
Quelques mots, enfin, sur le deuxième terme du sujet. Comme souvent en droit, les conjonctions sont les plus importantes : police et droit, non pas police ou droit (il n’existe donc pas une alternative), ou encore police mais[23] droit (il n’existe donc pas une incompatibilité a priori). C’est de cette conjonction que se déduit le problème qui occupera cette contribution : comment faire en sorte que la police, présente de manière continue en société et exerçant une contrainte permise par le droit[24] afin de protéger l’ordre public, protège les droits et libertés menacés, dans l’absolu, par l’exercice de cette contrainte[25] ? Autrement dit, comment le droit opère-t-il, sur la police, cette médiation qu’il lui revient de faire au sein de la société ? Signalons dès à présent, comme avertissement de la complexité de l’analyse, que la police est elle-même un des moyens de médiation qu’utilise le droit…[26]
Avant de répondre à cette (très) vaste question, il faut encore dire quelques mots sur l’organisation de la police en Allemagne et en Italie[27]. L’Allemagne est un pays fédéral. Les lois de police, y compris les lois encadrant les manifestations, relèvent de la compétence des États fédérés, les fameux Länder. Il existe donc de nombreuses polices en Allemagne et de nombreuses lois sur la police, de même qu’une police fédérale. En revanche, la procédure pénale relève de la Fédération – il n’y a bien qu’un code de procédure pénale en Allemagne. En Italie, l’État n’est pas fédéral et, si certaines régions disposent d’une relative autonomie au regard de la Constitution, cela ne concerne, pour faire simple, que « la police administrative locale »[28]. Il existe en Italie cinq forces de police, dont trois sont particulièrement importantes : la police d’État (Polizia di Stato), l’Arma dei Carabinieri et la garde des finances (Guardia di Finanza)[29].
Pour commencer à répondre à la problématique de l’appréhension de la police par le droit, il faut immédiatement rappeler une évidence : en Allemagne comme en Italie, la police est nécessaire au droit en même temps qu’elle lui est soumise. Il en découle deux relations concomitantes et pourtant opposées entre le droit et la police :
1 – Une relation-protection : parce que la police est nécessaire au droit, le droit va la protéger. On peut dire, à l’étude des droits italien et allemand, qu’il existe deux manières pour le droit de protéger l’activité de police :
a/ Par des clauses de justification générale de l’activité. Ici, le code pénal italien se détache toutefois en comprenant un fait justificatif spécial, l’usage légitime des armes et de la contrainte. Prévu à l’article 53, ce fait justificatif est absolument particulier car extrêmement large[30]. Le code pénal allemand, de son côté, prévoit les faits justificatifs classiques de la légitime défense (§ 32) et de la nécessité (§§ 33 et 34), en plus des diverses dispositions des lois de police des Länder.
b/ Par des infractions visant à pénaliser toute résistance – au sens mécanique – opposée à l’activité (justifiée) de police[31].
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- L’Allemagne et l’Italie se rejoignent en prévoyant une série d’infractions assez similaires, notamment la résistance aux forces de l’ordre et l’agression des forces de l’ordre[32].
- L’Italie semble, en revanche, se détacher en prévoyant une circonstance aggravante générale pour toute infraction commise « contre un officier publique ou une personne chargée d’un service public » (art. 61)[33]. Toutefois, cela est à relativiser puisque le mécanisme même d’un article comportant les circonstances aggravantes générales au sein de la partie général du code est inconnu en droit pénal allemand.
2 – Une relation-sanction : parce que la police est soumise au droit, le droit va la sanctionner lorsque son comportement sera considéré comme non nécessaire au maintien du droit, c’est-à-dire comme non justifié.
C’est sur cette relation-sanction, la plus problématique, que se concentrera l’analyse. Comment le droit peut-il sanctionner les membres de l’institution charger de le faire respecter ? S’il est indéniable qu’une sanction est aujourd’hui possible (I), elle n’en demeure pas moins rare en pratique, en Allemagne comme en Italie (II).
I. Une sanction possible
En Allemagne comme en Italie, la société a pris conscience que la police pouvait parfois déployer une activité non justifiée au regard du droit (A). En conséquence, force est de constater que le droit positif prévoit déjà la sanction de ces comportements (B).
A. La prise de conscience des agissements non justifiés de la police
La prise de conscience de l’activité non justifiée de la police et de la problématique de sa sanction est le fruit, en Allemagne comme en Italie, d’un cheminement présentant quelques facteurs communs, même si leur intensité varie naturellement suivant le pays.
Le premier trait commun est sans doute le rôle qu’a pu jouer la police dans l’histoire dictatoriale du pays[34]. On connait aujourd’hui les travaux sur le rôle de la police dans la machinerie nazie[35] ou encore sur l’utilisation de la police en Italie au plus fort de la période fasciste[36]. Toutefois, il convient de noter que la prise de conscience semble être plus importante chez les Allemands, dont la police est dénazifiée – avec plus ou moins de succès – de manière bien plus attentive par les Alliés que la police italienne[37]. Surtout, l’Italie se démarque de l’Allemagne pour avoir vécu la stratégie de la tension durant les années de plomb, avec un degré de méfiance généralisée vis-à-vis d’une police (et d’une justice) dont on remettait régulièrement en cause la fidélité à la société démocratique à mesure que, pourtant, l’État en augmentait considérablement les pouvoirs[38]. Ainsi le cas de la mort – accidentelle dira la célèbre pièce de théâtre[39] – de l’anarchiste Pinelli en 1969 par défenestration au sein du commissariat où il était retenu pour son implication supposée dans l’attentat de la Piazza Fontana. On peut aussi citer la gestion par les forces de l’ordre des protestations de 1977[40]. D’où des exigences de réformes ayant mené à la loi n° 121 du 1er avril 1981, dont l’objet principal était d’opérer une démilitarisation des forces de police[41]. S’ouvre alors une « lune de miel »[42] entre les citoyens italiens et leur police, qui se terminera avec fracas lors du G8 de Gênes en 2001.
Si les comportements injustifiés ne datent pas d’hier[43], la prise de conscience a pris du temps et semble – second point commun – avoir fonctionné par à-coups, au rythme d’affaires ayant marqué l’opinion, sans doute plus encore en Italie qu’en Allemagne.
En Italie, on retrouve en effet l’idée d’un tournant, d’une rupture, d’un avant/après les manifestations altermondialistes lors du sommet du G8 à Gênes en juillet 2001[44]. Pour se rendre compte de l’importance de l’évènement, un auteur rappelait récemment qu’en 2001, en Italie, « des personnes ont été torturées non pas alors qu’elles exerçaient des droits constitutionnellement garantis, mais bien parce qu’elles avaient exercé ces droits »[45]. Trois grands « moments » se détachent : la mort de Carlo Giuliani, tué par un policier le 20 juillet 2001 ; le cas de l’école Diaz-Pertini, du nom de l’école mise à la disposition des manifestants par la municipalité et ayant subi une perquisition très violente dans la nuit du 20 au 21 juillet ; et le cas de la caserne de Bolzaneto, utilisée en urgence comme site de détention supplémentaire par où passèrent notamment des personnes arrêtées à l’école Diaz-Pertini, et où ont été recensés des actes de violences comme des passages à tabac. Comme souvent, et encore plus dans le pays du Guépard, la rhétorique de l’avant/après n’a pas mis fin aux évènements dramatiques[46]. On a ainsi reparlé d’un tournant lors de la mort de Federico Aldrovandi à Ferrare en septembre 2005[47], ou fait remarquer que les erreurs de Gênes avaient été répétées, même si de manière bien moins brutale, lors de la gestion du rassemblement romain pour la première journée planétaire des « Indignés » le 15 octobre 2011[48]. Bien plus récemment, ont été révélés des cas de tortures dans un commissariat de Vérone en juin 2023[49], pour lesquels une procédure pénale est en cours.
En Allemagne, la logique de la médiatisation de certaines affaires se retrouve aussi, même s’il est plus difficile, nous semble-t-il, d’identifier une logique avant/après aussi forte qu’en Italie pour le G8. On peut cependant parler de l’affaire Oury Jalloh, demandeur d’asile décédé dans l’incendie du poste de police où il était menotté[50], ou encore du G20 de Hambourg en 2017 – même si les évènements peuvent, d’un point de vue français, être fortement relativisés[51]. Surtout, le terme de violences policières est assez décrié en Allemagne où l’on souligne qu’il s’agirait d’une notion empreinte de militantisme[52].
Il faut ensuite, et c’est le troisième point commun à l’Allemagne et l’Italie, insister sur le rôle de la société civile. Dans les deux pays, de nombreuses associations d’observation de l’activité de police et d’alerte sur les activités injustifiées ont vu le jour[53].
En revanche, l’une des grandes différences entre l’Allemagne et l’Italie semble être l’intérêt scientifique pour la question de l’activité injustifiée de police. On note régulièrement, en l’Italie, un désintérêt global ainsi qu’une littérature « assez limitée »[54]. Signalons toutefois, outre les travaux sur le G8 de Gênes, une étude qualitative fondée sur les rapports écrits (et publics) des forces de police italiennes parue en 2017 mais ne concernant que quatre affaires – il est vrai retentissantes[55]. Tel n’est pas le cas de l’Allemagne où il existe un réel intérêt universitaire, scientifique, pour la question des violences policières. On ne compte plus les articles, ni les projets de recherche. L’une des dernières et plus intéressantes études, dont le rapport final a été publié en 2023 après cinq années de recherches, porte sur l’usage excessif de la force par la police[56].
À ce stade de nos propos, on ne peut donc que constater une prise de conscience, certes d’intensité variable, du fait que la police peut déployer une activité qui ne soit pas justifiée au regard du droit qu’elle doit garantir. Face à une telle activité, les droits positifs allemand et italien semblent assez bien armés.
B. La sanction par le droit positif des agissements non justifiés de la police
Le code pénal allemand et son cousin italien prévoient différentes sanctions au comportement des forces de police qui serait injustifié. L’Italie se démarque toutefois en prévoyant une circonstance aggravante générale pour les infractions commises par un « abus de pouvoirs ou par violation des devoirs inhérents à une fonction publique ou à une service public » (art. 61). Pour rappel, un tel mécanisme d’article sur les circonstances aggravantes générales n’existe pas en Allemagne. Au-delà de cette particularité italienne, les droits allemand et italien prévoient deux mécanismes similaires.
D’une part, certaines infractions sont aggravées lorsqu’elles sont commises par des personnes dépositaires de l’autorité publique (Amtsträger[57], pubblico ufficiale[58]). Il en va ainsi, par exemple, des différentes modalités d’entrave à l’application du droit pénal par l’officier public. En Allemagne, est puni de six mois à cinq ans d’emprisonnement (l’aggravation résultant de la prévision de la peine plancher) l’officier public empêchant l’application de la loi pénale aux auteurs d’infractions (§ 258a). Sont aussi concernées les différentes atteintes à la vie privée et au domicile[59]. L’Italie aggrave aussi la torture, incriminée depuis 2017, lorsqu’elle est commise par un officier public : les faits sont alors punis d’au minimum cinq ans et d’au maximum douze ans de prison au lieu d’un minimum de quatre ans et d’un maximum de dix ans (art. 613 bis).
D’autre part, certaines infractions ne peuvent même être commises que par des personnes dépositaires de l’autorité publique. Il en va ainsi, en particulier, des lésions corporelles infligées lors de l’exercice des fonctions, incriminées tant en Allemagne, où elles sont punies d’au minimum trois ans et d’au maximum cinq ans d’emprisonnement (§ 340), qu’en Italie dont le code pénal prévoit l’abus d’autorité sur les personnes arrêtées ou détenues, infraction punie d’une peine de trente mois d’emprisonnement (art. 608). Il en va de même de l’interférence du policier au sein d’une procédure pénale. Sur ce point, l’Allemagne prévoit tant l’extorsion de témoignage (§ 343) que l’orientation de la procédure contre une personne que l’on sait innocente ou non punissable (§ 344), fulminant dans les deux cas des peines d’au minimum un an et d’au maximum dix ans d’emprisonnement. L’Italie, de son côté, prévoit une infraction plus générale de fraude à la procédure pénale punie d’au minimum trois ans et d’au maximum huit ans d’emprisonnement (art. 375).
Nous devrions donc, en guise de conclusion intermédiaire, souligner, avec quelques différences naturellement, une convergence de l’Allemagne et de l’Italie vers une prise de conscience de l’activité injustifiée de police et de la nécessité de la sanctionner par le droit. Toutefois, c’est un autre visage que semblent en pratique montrer les deux systèmes.
II. Une sanction rare
Cette rareté de la sanction, il convient d’abord de la constater (A) puis de chercher à l’expliquer (B).
A. Constat
Nous traiterons ici essentiellement de l’Allemagne, où sont parus il y a peu les résultats d’une recherche de cinq années sur le traitement de l’usage illégitime de la force par la police[60]. En voici les principaux enseignements :
- Les situations où l’usage excessif de la force est le plus souvent rapporté sont les évènements de masse (manifestation, match de football), les contrôles d’identité et les interventions sur des situations conflictuelles.
- 19% des victimes rapportent des blessures physiques graves. Quant aux conséquences psychologiques, elles sont souvent les suivantes : colère et peur de la police[61], évitement de certaines situations ou de certains lieux, vigilance constante.
- Parmi les facteurs favorisant l’escalade, sont mentionnés l’absence de communication, le stress, la mauvaise préparation de l’opération de police, la remise en cause de la présence ou de la légalité de la police par la personne, les insultes, l’irrespect, le refus d’obéir ou encore la peur de perdre le contrôle de la situation.
- Seul 9% des victimes déposent plainte. Surtout, les poursuites ne sont engagées que dans 2% des cas, contre 22% en moyenne pour les autres investigations. Plus précisément, 93% des affaires sont classés pour défaut de preuve d’une infraction. Il s’agit d’un classement en application du principe de légalité des poursuites qui, prévu au § 152 du code de procédure pénale allemand, impose de n’exercer l’action publique qu’en cas de soupçon suffisant (hinreichende Tatverdacht), c’est-à-dire quand il « apparaît vraisemblable que le mis en cause a commis un acte pénalement répréhensible et qu’il sera pour cela condamné »[62]. Si ce seuil n’est pas atteint, le classement sans suite est alors obligatoire. Ce fut notamment le cas dans l’affaire Oury Jalloh. Un recours a bien été intenté pour contraindre les autorités à la poursuite mais la Cour constitutionnelle fédérale l’a définitivement rejeté[63]. Pour les 4-5% restants, le procureur utilise le classement pour faible gravité des faits prévu au § 153a du code de procédure pénale. Le procès en cours à Dortmund contre des policiers ayant causé la mort, lors d’une intervention, de Mouhamed Dramé, demandeur d’asile sénégalais âgé de 16 ans, doit donc être vu comme une exception[64]. En 2021, sur les quatre-vingts audiences de jugement organisées pour des cas de violences policières, vingt-sept ont débouché sur des condamnations, vingt-cinq sur des acquittements et les procédures restantes ont été closes avant la décision finale. Le taux de condamnation est donc de 34%, contre 81% pour l’ensemble des procédures pénales.
En Italie, où les études sont beaucoup moins nombreuses, on a toutefois pu noter un sentiment d’impunité[65]. La plupart des membres des forces de police mis en cause lors des faits commis au G8 de Gênes, par exemple, ont été acquittés ou condamnés à de faibles peines, voire promus[66].
Le constat semble donc être le même en Italie qu’en Allemagne : s’il est aujourd’hui admis que la police peut déployer une activité dépassant le seuil de justification, la réaction du système, satisfaisante du point de vue des textes, l’est beaucoup moins du point de vue pratique. Reste à savoir si les raisons avancées à ce constat en Allemagne et en Italie se rejoignent.
B. Explications
Les explications données en Allemagne et en Italie au constat de la faible sanction de l’activité injustifiée des forces de police convergent sur deux points. Tout d’abord, on retrouve l’idée de la brebis galeuse[67]. Ensuite, et surtout, se pose dans les deux pays la question du contrôle des forces de police lorsque lui est reprochée une activité injustifiée.
En Allemagne, il existe un contrôle interne, hiérarchique, très classique mais en théorie renforcé par l’obligation de dénonciation incombant aux policiers sous peine de commettre une entrave à la justice (§ 258 et 258a du code pénal). Cela semble toutefois avoir peu d’effets en pratique[68]. Un rapport du Bundestag de 2022 fait en revanche le tour d’horizon des mécanismes de contrôle externe de la police dans les Länder. Le modèle le plus fréquent reste celui du délégué de la police, nommé par le Parlement et prévu dans la moitié des Länder[69]. Ces délégués ne disposent cependant pas de véritables pouvoirs d’investigation mais plutôt d’un pouvoir d’examen[70]. Notons, tout de même, que la réflexion est récente puisque le premier délégué du genre a été institué en 2014 en Rhénanie-Palatinat[71]. Il s’agit même d’une véritable mode, tant et si bien qu’une proposition de loi a été déposée devant le Bundestag le 7 novembre 2023 afin de créer un tel mécanisme pour la police fédérale[72]. La loi a été publiée au Journal officiel du 4 mars 2024[73]. L’autre modèle, qui concerne six Länder, est l’instauration d’un service central de recueil des plaintes et signalements au sein de l’administration du ministère de l’Intérieur du Land concerné. Il n’y a donc pas de lien avec le Parlement mais toujours un lien avec l’exécutif, même si la majorité de ces services semblent jouir d’une certaine indépendance[74]. Il n’en demeure pas moins que les investigations continuent d’être faites par la police. Surtout, dans deux Länder, la Bavière et la Sarre, il n’existe aucune institution indépendante d’observation ou de recueil des signalements. En Bavière, où la réforme de la loi de police avait, il y a quelques années, déclenchées de vives manifestations[75], un projet de loi visant à instaurer un délégué de la police avait été présenté en 2021 mais n’a pas été adopté[76]. L’Allemagne s’est d’ailleurs faite condamnée par la Cour EDH, dans un arrêt retentissant concernant un contrôle d’identité discriminatoire, pour ne pas avoir assurer l’indépendance et, donc, l’effectivité de l’enquête[77]. Un autre moyen de contrôle consiste en l’identification des forces de l’ordre, imposée au compte-goutte par les différents Länder, la Cour constitutionnelle fédérale ayant simplement précisé que rien ne s’y opposait constitutionnellement parlant[78].
En Italie, où il existe aussi une obligation de dénoncer pesant sur tout officier public (art. 361 du code pénal), tout se fait en interne[79], ce qui n’est pas sans provoquer des appels à la création d’instances indépendantes – sans que ne soit mentionné, d’ailleurs, le modèle allemand mais plutôt le modèle anglais[80]. Dans le cas de l’affaire de Vérone de 2023, la presse rapporte, par exemple, la conférence de presse du chef de la police d’État, Vittorio Pisani : « Je remercie le parquet de Vérone pour la confiance accordée à la Police d’État en déléguant à la squadra mobile locale les investigations concernant les agents appartenant au même commissariat. L’autorité morale de notre administration nous permet de faire face à ce moment avec la dignité et la contenance de toujours »[81]. Quant à l’obligation d’identification des policiers, elle n’est toujours pas entrée dans la loi italienne, malgré des demandes en ce sens[82].
Au-delà de ces deux explications communes à l’Allemagne et à l’Italie que sont le biais de la brebis galeuse et la faiblesse des moyens de contrôle, l’Italie semble se distinguer sur deux points.
D’une part, la législation italienne a pendant longtemps été assez faible. En ce qui concerne les évènements de Gênes, les trois affaires (Giuliani, Diaz-Petreni et Bolzaneto) sont allées jusque devant la Cour EDH. La Cour condamnera l’Italie pour les faits commis à l’école Diaz-Pertini et à la caserne de Bolzaneto pour violation de l’article 3, tant en raison des mauvais traitements subis – qualifiés de tortures – qu’en raison de l’application de la législation pénale à l’espèce[83]. En effet, la législation italienne d’alors n’incriminait pas la torture et n’offrait comme réponse aux faits que des infractions de droit commun prescrites très rapidement. La torture ne sera incriminée qu’en 2017[84]. Depuis lors, la torture est incriminée à l’article 613 bis du code pénal italien et est prévue une cause d’aggravation de la peine lorsque l’auteur est un officier public abusant de ses fonctions. L’article 613 ter, lui, prévoit l’instigation, de la part d’un agent public, à la torture par un autre agent public. Autre point d’insuffisance du droit italien, l’article 53 du code pénal, qui prévoit le fait justificatif d’usage légitime des armes et de la coercition physique, a pu être critiqué pour son manque de précision[85].
D’autre part, semble dominer en Italie une conception dite continentale de la police. Ainsi est-il normal de considérer que la police est au service de l’exécutif et non des citoyens (King’s police v. citizens’ police)[86]. Cette vision se traduirait jusque dans la perception de la foule et l’apparition de la figure de l’ennemi[87].
L’Allemagne, enfin, se distingue grâce au détail de l’étude de 2023, qui précise les raisons de ce traitement extrêmement lacunaire des activités illégitimes de police. Au sein de la police, tout d’abord, on note une très difficile remise en cause du comportement entre collègues. Le rôle des rapports de police est important, puisque tout est documenté[88]. Mais ces rapports sont à double-tranchant et la recherche insiste beaucoup sur le pouvoir définitionnel (Definitionsmacht) de la police sur son propre comportement. C’est elle, par la rédaction de procès-verbaux et rapports, qui va elle-même définir ce qu’a été son comportement. Ce pouvoir définitionnel est, bien entendu, un pouvoir que lui reconnaît le droit. Ce pouvoir s’exerce aussi vis-à-vis de la presse, avec laquelle la police entretient une relation privilégiée et de plus en plus professionnalisée[89]. Du côté des victimes, ensuite, les raisons avancées au très faible taux de plainte sont les suivantes : faible chance de succès, difficulté à identifier les policiers, craintes de représailles, manque de preuves[90]. Du point de vue de la justice, enfin, le taux extraordinairement élevé de classement (env. 98%) ne s’explique pas seulement par des plaintes abusives ou par la justification du comportement des forces de l’ordre. L’étude met au contraire en avant la particularité structurelle des enquêtes et de la décision du procureur dans les cas impliquant la police, où quatre circonstances principales influencent le ministère public :
- La preuve est compliquée ou contradictoire, c’est souvent parole contre parole.
- Les policiers témoins jouent un rôle très particulier, tant on sait qu’une plainte contre un policier renforce la solidarité du groupe des policiers présents. En même temps, les policiers sont des témoins professionnels et ont l’habitude des prétoires, ce qui les rends particulièrement crédibles.
- Les investigations sont en général menées par la police elle-même alors que le ministère public dispose bien du pouvoir de les mener lui-même. Mais, vu la charge de travail de la justice, le ministère public a tendance à se reposer sur les rapports internes à la police pour conclure ses investigations. On en revient au pouvoir définitionnel de la police voire, plus largement, à la policiarisation de la procédure pénale[91]. Plus encore, certains ont récemment soutenu que la police non seulement définit elle-même la légalité/légitimité de son comportement mais, ce faisant, détermine aussi la légitimité des mouvements de protestation aux yeux de l’opinion publique. En ce sens, la police serait « un acteur politique autonome »[92].
- La police entretient des liens très étroits avec la justice chargée de la juger, un lien quotidien. De là découlent des présupposés quant à la crédibilité des officiers de police. On en arrive donc à plus facilement remettre en cause la crédibilité de la victime.
Conclusion
En conclusion de cette analyse comparée des rapports entre police et droit en Allemagne et en Italie, voici les propositions que nous aimerions soumettre à la discussion :
- Le rapport entre la police est le droit est caractérisé par une profonde ambivalence, entre protection et sanction.
- La relation-protection entre droit et police ne semble ne pas être remise en cause.
- La relation-sanction entre droit et police, semble, elle, plus problématique. Si l’on a pris conscience dans les deux pays de la possibilité d’activités de police mettant en péril la société au lieu de la maintenir, le traitement de ces cas interroge.
- En particulier, l’attention allemande portée, dans la toute dernière recherche allemande de 2023, sur le pouvoir définitionnel (Definitionsmacht) de la police doit être soulignée et pourrait être féconde dans l’appréhension des rapports entre police et droit.
- La police, finalement, met à nu le paradoxe irrésolu des rapports entre (État de) droit et violence nécessaire pour maintenir ce(t État de) droit : quel degré de pouvoir doit-il être reconnu à l’État pour protéger l’État de droit[93]? Jusqu’où doit aller le droit (et sa violence) pour protéger le droit[94] ?
[1] Sauf mention contraire, toutes les traductions sont les nôtres.
[2] V. la contribution à ce colloque de S.-M. Cabon, « Police et droit aux Etats-Unis ».
[3] V. par exemple : https://www.francetvinfo.fr/faits-divers/police/violences-policieres/violences-policieres-en-allemagne-en-cas-de-coups-et-blessures-les-enquetes-ne-sont-jamais-menees-par-la-police-elle-meme_5946119.html. L’Allemagne est plus particulièrement mise en avant pour son modèle du maintien de l’ordre et sa doctrine de la désescalade, qui toutefois n’existe pas dans tous les Länder. En effet, on oppose la doctrine berlinoise de la désescalade à la doctrine hambourgeoise de tolérance zéro : v. F. Jobard, « L’art du désordre toléré. La police des manifestations en Allemagne fédérale », Savoir/Agir 2021, p. 57.
[4] L. Abdul-Rahman, H. Espin Grau et T. Singelnstein, « Mener une enquête empirique sur la force policière excessive en Allemagne », Déviance et société 2021, p. 481 (trad. V. Meunier). Deux auteurs français ont d’ailleurs pu noter que, contrairement à la France, les cas de violences policières en Allemagne n’avaient pas eu pour effet, jusqu’à présent, de remettre en cause la légitimité de la police (J. Gautier et F. Jobard, « Légitimités policières. Approches comparées », dans J. Gautier et F. Jobard (dir.), Police : questions sensibles, PUF, 2018, p. 1, disponible sur HAL). Trois facteurs, essentiellement politiques, permettraient d’expliquer une telle différence. Tout d’abord, l’État allemand s’est construit sur une myriade de petits États et, aujourd’hui encore, revêt une forme fédérative, la police administrative relevant de la loi de chaque Land. Ensuite, l’Allemagne reste profondément marquée par l’utilisation dévoyée de la police par les deux régimes autoritaires qu’elle a connus au vingtième siècle, à savoir le régime nazi puis, dans une autre mesure, la République démocratique allemande. Enfin, la défaite lors de la Première Guerre mondiale a entraîné la fin de l’expérience coloniale de l’Allemagne, empêchant alors que les relations entre police et population soient influencées par le postcolonialisme. Ce constat est nuancé, ou renforcé suivant la lecture qu’on en donne, à la lecture de deux articles d’auteurs allemands parus en 2014. Le premier remarque et critique une « focalisation sur les abus individuels [qui] fait toutefois totalement perdre de vue la nécessité d’une critique plus approfondie de la police », en particulier de son monopole dans l’exercice de la violence (M. Pichl, « Zur Entgrenzung der Polizei – eine juridische und materialische Kritik polizeilicher Gewealt », Kritische Vierteljahresschrift für Gesetzgebung und Rechtswissenschaft 2014/3, p. 249). Le second constate qu’en pratique, sur les environ deux-milles procédures ouvertes annuellement par le parquet de 2010 à 2012 pour des faits de violences commises par des policiers dans l’exercice de leurs fonctions, seuls 3% ont donné lieu à des poursuites (T. Singelnstein, « Körperveletzung im Amt durch Polizisten und die Erledigungspraxis der Staatsanwaltschaften – aus empirischer und strafprozessualer Sichet », Neue Kriminalpolitik 2014/1, p. 15).
[5] Ainsi Le Monde ne mentionne-t-il pas l’Italie dans son article comparant le contrôle des polices en Europe : https://www.lemonde.fr/les-decodeurs/article/2023/04/05/maintien-de-l-ordre-dans-les-autres-pays-d-europe-qui-controle-les-agissements-de-la-police_6168388_4355770.html.
[6] Sur les buts de la comparaison, v. K. Mariat, « Ce que comparer veut dire », D. 2023, p. 1471.
[7] Il s’agit ici d’appliquer, au moins comme point de départ, la méthode fonctionnelle, selon laquelle « toute société organise son droit essentiellement pour répondre à des problèmes identiques » (K. Zweigert et H. Kötz, Einführung in die Rechtsvergleichung, 3e éd., J. C. B. Mohr, 1996, p. 33).
[8] K. Mariat, « [séparation des] Fonctions », dans J. Jourand-Marques (dir.), Les mots en procédure, source des maux ?, LexisNexis, à paraître. On dira même qu’historiquement, et à rebours de ce que les révolutionnaires jacobins ont bien voulu nous faire croire, « la police est […] une fonction avant d’être une institution » : J. Gautier et F. Jobard, « Légitimités policières. Approches comparées », dans J. Gautier et F. Jobard (dir.), Police : questions sensibles, PUF, 2018, p. 1, disponible sur HAL.
[9] Pire de pire, la frontière entre ces deux grandes fonctions est de plus en plus floue : R. Parizot, « La distinction entre police administrative et police judiciaire est-elle dépassée ? », dans M. Touiller (dir.), Le code de la sécurité intérieure, artisan d’un nouvel ordre ou semeur de désordre ?, Dalloz, 2017, p. 133.
[10] Cette présentation est assez répandue : v. V. Krey et M. Heinrich, Deutsches Strafverfahrensrecht, 2e éd., Kohlhammer, 2018, n° 294 ; W. Beulke et S. Swoboda, Strafprozessrecht, 14e éd., C. F. Müller, 2018, n° 103 ; C. Roxin et B. Schünemann, Strafverfahrensrecht, 29e éd., C.H. Beck, 2017, p. 59 et s. H.-H. Kühne, Strafprozessrecht, 9e éd., C.F. Müller, 2015, n° 146 et s. ; U. Kindhäuser, Strafprozessrecht, 3e éd., Nomos, 2013, p. 59 ; J. Brüning, Der Richtervorbehalt im strafrechtlichen Ermittlungsverfahren, Nomos, 2005, p. 27 ; H. Henkel, Strafverfahrensrecht, 2e éd., Kohlhammer, 1968, p. 147.
[11] V. par exemple A. Morgigni, L’attività della polizia giudiziaria, Giuffrè, 2002, p. 61 et s. ; M. Bargis et al., Compendio di procedura penale, 9e éd., CEDAM, 2018, p. 77-78 ; P. Tonini, Manuale di procedura penale, 19e éd., Giuffrè, 2018, p. 126. On peut aussi parler de police de sécurité pour l’opposer à la police judiciaire (v. par ex. O. Dominioni et al., Procedura penale, 6e éd., Giappichelli, 2018, p. 126).
[12] L’Allemagne connaît en effet cinq ordres de juridictions !
[13] Pour une distinction entre la police du Prince (du maintien de l’ordre), la police du quotidien et la police de l’information (police judiciaire et renseignement), v. F. Jobard, « Police et État : Quel rapport ? », Séminaire Repenser l’État au XXIe siècle, Atelier de création libertaire, 2023, disponible sur HAL.
[14] Nous avons consulté : pour la France, le Dictionnaire de l’Académie française ; pour l’Allemagne, le Duden ; pour l’Italie, le Zingarelli.
[15] En France aussi, l’acte de police a pu être analysé comme un acte de contrainte, notamment par Jacques Buisson, pour qui l’acte de police est « l’acte qui, accompli par un agent de la force publique, consiste à exercer la contrainte dans le but d’assurer l’ordre public » (J. Buisson, Police. Pouvoirs et devoirs, 2e éd., Dalloz, 2018, p. 31). Cet auteur emploie toutefois plusieurs définitions de la contrainte : « soumission du citoyen à l’ordre donné, de quelque manière qu’elle se produise » (J. BUISSON, « La contrainte », dans Justice et droit du procès. Mélanges en l’honneur de Serge Guinchard, Dalloz, 2010, p. 915, spéc. p. 919) ; « tous les moyens, juridiques ou matériels, qui forcent le citoyen à obéir à la loi » (J. BUISSON, L’acte de police, Thèse Lyon 3, 1988, Tome I, p. 298), ou encore, reprenant Jhéring, « la réalisation d’un but au moyen de l’assujettissement d’une volonté étrangère » (ibid).
[16] Une autrice allemande a justement fait remarquer que « dans tous les États modernes, la police dispose du monopole de la contrainte » : I. Hunecke, « Polizei und Gewalt », Kritische Vierteljahresschrift für Gesetzgebung und Rechtswissenschaft 2014/3, p. 267. Dans le même sens, T. Singelnstein, « Körperveletzung im Amt durch Polizisten und die Erledigungspraxis der Staatsanwaltschaften – aus empirischer und strafprozessualer Sichet », Neue Kriminalpolitik 2014/1, p. 15. V. enfin, affirmant que « l’État est le monopole de la force, la police son instrument » : F. Jobard, « Police et État : Quel rapport ? », Séminaire Repenser l’État au XXIe siècle, Atelier de création libertaire, 2023, disponible sur HAL.
[17] Au point qu’on a pu dire en Italie que « la « police » est une sorte de redéfinition continuelle de l’État » : S. Palidda, « Analyse critique des violences policières et politiques en Italie », dans X. Crettiez et L. Mucchielli (dir.), Les violences politiques en Europe, La Découverte, 2010, p. 251.
[18] N. Molfessis et F. Terré, Introduction générale au droit, 15e éd., Dalloz, n° 1.
[19] B. Oppetit, Philosophie du droit, Dalloz, réed. 2022, p. 31.
[20] P. Deumier, Introduction générale au droit, 7e éd., LGDJ, 2023, n° 22. Au sens de la définition de Weber, l’adjectif légitime revêtirait un sens particulier : « ce qui fait la légitimité du monopole de la violence par l’État est simplement le fait empirique de son acceptation implicite par la majorité des habitants du territoire de cet État » (C. Colliot-Thélène, « Violence policière, violence d’État », Savoir/Agir 2021, p. 33).
[21] V., en dernier lieu, Cons. const., 16 novembre 2023, n° 2023-855 DC, cons. 25.
[22] Nous laissons volontairement de côté, au regard du sujet, les hypothèses où « la règle de droit opère également par d’autres voies que l’intimidation et la punition » : v. P. Deumier, Introduction générale au droit, 7e éd., LGDJ, 2023, n° 22 puis 26 et s.
[23] V. la phrase de Sartre, « L’État n’est pas fasciste, mais sa police l’est déjà » (nous soulignons), disséquée par F. Jobard, « Police et État : Quel rapport ? », Séminaire Repenser l’État au XXIe siècle, Atelier de création libertaire, 2023, disponible sur HAL.
[24] « Ce que l’État moderne monopolise n’est pas en vérité la violence physique, mais la garantie du droit, qui implique en dernier ressort le recours à la violence physique » : C. Colliot-Thélène, « Violence policière, violence d’État », Savoir/Agir 2021, p. 33.
[25] Comme l’ont fait remarquer deux auteurs allemands, la police doit faire usage de la violence en même temps qu’elle ne peut le faire que dans le strict respect des formes légales : B. Derin et T. Singelnstein, « Systemversagen ? Zur Aufarbeitung problematischer polizeilicher Geweltausübung in Deutschland », Verfassungsblog 9 mai 2022, accessible en ligne https://verfassungsblog.de/systemversagen/.
[26] S. Palidda, « Analyse critique des violences policières et politiques en Italie », dans X. Crettiez et L. Mucchielli (dir.), Les violences politiques en Europe, La Découverte, 2010, p. 251 : les policiers sont des « professionnels qui font partie de la société et qui doivent sans cesse inventer la médiation entre le haut et le bas ou entre les divers segments ou cercles de l’organisation politique de la société ».
[27] Sur le statut de la police, en particulier de la police judiciaire, v. K. Mariat, L’équilibre des pouvoirs dans la phase préparatoire du procès pénal. Réflexions françaises à la lumière des droits allemand et italien, Thèse Lyon 3, 2019, n° 463 et s. (pour l’Allemagne) ainsi que n° 472 et s. (pour l’Italie). Disponible sur HAL.
[28] Constitution de la République italienne, arts. 117, al. 2 h) et 118 (traduction du Sénat italien). Pour la répartition entre communes, provinces, métropoles et régions, v. les articles de P. Bonetti, « L’allocazione delle funzioni amministrative e le forme di coordinamento per le materie dell’ordine pubblico, della sicurezza e dell’immigrazione nel nuovo art. 118 della Costituzione », Le Regioni, 2002, p. 1121 ; « L’ordinamento della polizia locale tra Stato e Regioni (commento a Corte cost. sent. 167/2010), Le Regioni 2011, p. 705.
[29] V. loi n° 121 du 1er avril 1981, art. 16. Il existe en plus une police pénitentiaire et des polices forestières.
[30] Il peut être considéré comme l’une des traces persistantes de l’empreinte historique du code, adopté en 1931 : F. Palazzo, Corso di diritto penale. Parte générale, 8e éd., Giappichelli, 2021, p. 392.
[31] Sur la perception de cette violence sur les forces de l’ordre en Allemagne, v. I. Hunecke, « Polizei und Gewalt », Kritische Vierteljahresschrift für Gesetzgebung und Rechtswissenschaft 2014/3, p. 267. Sur la question de la criminalité politique exercée sur les forces de police en Allemagne, v. M. Mletzko, « Les actes de violence des militants d’extrême gauche et d’extrême droite en Allemagne », Revue des sciences sociales, 2011, p. 116, notant (p. 124) que la police est le deuxième groupe le plus touché par la criminalité d’extrême gauche.
[32] En ce qui concerne la résistance aux forces de l’ordre en exercice, elle est incriminée en Allemagne par le § 113 du code pénal et punie – après de nombreuses réformes – d’au maximum trois ans d’emprisonnement. En Italie, la résistance aux forces de l’ordre est incriminée à l’article 337 du code pénal et est punie d’au minimum six mois et d’au maximum cinq ans d’emprisonnement. S’agissant de l’agression des forces de l’ordre, elle est punie par le § 114 du code pénal allemand d’au minimum trois mois et d’au maximum cinq ans d’emprisonnement, tandis que l’article 336 du code pénal italien la punie des mêmes peines que la résistance aux forces de l’ordre
[33] La définition de l’officier public par le code pénal comprend naturellement l’agent de police : « tous ceux qui exercent une fonction publique législative, judiciaire ou administrative » (art. 357). Signalons aussi la problématique particulière de l’infraction de « dévastation et de pillage » qui a été utilisée pour des procédures à l’encontre de participants aux émeutes de Gênes en 2001 lors du G8 et qui a donné lieu à la saga Vecchi, du nom du manifestant dont l’exécution du mandat d’arrêt européen a finalement été refusée par la chambre de l’instruction de Lyon en mars 2023 après, tout de même, deux arrêts de chambres de l’instruction différentes, quatre arrêts de la Cour de cassation et une question préjudicielle à la CJUE ! Sur cette procédure v. R. Parizot, « (Ne pas) comprendre les refus de remise à l’Italie par le juge français de ressortissants italiens condamnés à de lourdes peines », AJ Pénal 2023, p. 281 et B. Aubert, « La remise de personnes », Rev. sc. crim. 2023, p. 427.
[34] Pour une comparaison de la police sous les régimes fasciste, nazi et espagnol, v. J. Dunnage, « Policing Right-Wing Dictatorships: Some preliminary comparisons of Fascist Italy, Nazi Germany and Franco’s Spain », Crime, History & Societies 2006, p. 93.
[35] V. par exemple l’édifiant C. Browning, Des hommes ordinaires. Le 101e bataillon de réserve de la police allemande et la Solution finale en Pologne, Tallandier, 2007.
[36] M. Cuxac, « Les sources de la Police Politique fasciste », Les Carnets du LARHRA [En ligne], 2016 | 1 | 2018, mis en ligne le 24 septembre 2018, consulté le 01 mars 2024. URL : https://publications-prairial.fr/larhra/index.php?id=191. Sur les liens, s’agissant de la répression par la police de l’opposition politique, entre ère préfasciste et période fasciste, v. G. Tosatti, « La repressione del dissenso politico tra l’età liberale e il fascismo. L’organizzazione della polizia », Studi Storici 1997, p. 217.
[37] J. Dunnage, « Historical Perspectives on Democratic Police Reform : Institutional Memory, Narratives and Ritual in the Post-War Italian Police, 1948-1963 », Policing and Society: An International Journal of Research and Policy 2017, p. 797. L’auteur décrit notamment le « mythe institutionnel » persistant du maintien d’une police libéral sous le régime fasciste, notamment parce que nombre des institutions existaient avant la prise de pouvoir par Mussolini. Ce mythe a ensuite été battu en brèche par de nombreuses études. Pour le cas de Turin, v. P. Chirico, « La costruzione e « normalizzazione » della polizia della nuova Italia democratica. Il caso di Torino (1944-1948), Le Carte e la Storia 2007, p. 191.
[38] L’Italie est alors marqué par ce que l’on a appelé la législation d’urgence, ensemble de lois prises en réaction aux années de plomb qui ont notablement augmenté les pouvoirs de police en amoindrissant l’intervention de l’autorité judiciaire. Ces lois, majoritairement temporaires, ont tout de même marqué de leur esprit certains pans de la procédure pénale italienne, notamment en matière de criminalité organisée : v. S. CENTONZE et L. GIOVEDÌ, Terrorismo e legislazione d’emergenza, Key, 2016, p. 53 et s. V., parlant de « radicalisation progressive du registre juridique », F. Rossi, La « lutte armée » entre justice politique et histoire. Usages et traitements des « années de plomb » dans l’Italie contemporaine (1968-2010), Thèse Nantes, 2011, p. 80 et s. Sur le processus de sortie de la législation d’urgence au cours des années quatre-vingt, v. E. AMODIO, « Il processo penale nella parabola dell’emergenza », Cassazione penale 1983, p. 2114.
[39] D. Fo, Morte accidentale di un anarchico, 1970.
[40] Sur cette année, v. en français la récension d’un ouvrage par M. Lazar, « Luca Falciola, Il movimento del 1977 in Italia », Histoire Politique [Online], http://journals.openedition.org/histoirepolitique/10860. Pour une critique de l’interprétation classique insistant sur la culture répressive de l’époque, qui simplifierait les choses en n’exploitant pas les sources documentaires produites par les forces de police elles-mêmes, v. L. Falciola, « Gli apparati di polizia di fonte al movimento del 1977 : organizzazione e dinamiche interne », Richerche di storia politica 2013, p. 161.
[41] D’une manière générale, la France, l’Allemagne et l’Italie ont toutes les trois disposés d’une police coloniale ayant participé à la militarisation historique de la police : v. J. Gautier et F. Jobard, « Légitimités policières. Approches comparées », dans J. Gautier et F. Jobard (dir.), Police : questions sensibles, PUF, 2018, p. 1. Accessible sur HAL.
[42] A. Zamperini, V. Siracusa et M. Menegatto, « Accountability and Police Violence : a Research on Accounts to Cope with Excessive Use of Force in Italy », J. Police Crim. Psych. 2017, p. 172.
[43] Pour l’époque coloniale, v. par ex. M. Muschalek, « Honneur masculin et violence policière ordinaire. Une affaire de viol dans le Sud-Ouest africain allemand (1910) », Vingtième Siècle 2018/4, p. 83.
[44] Parmi d’innombrables analyses, v. récemment F. Bacco, « « Dentro » lo Stato, « fuori » dal diritto. A 20 anni dal massacro della Diaz e dalle torture di Bolzaneto (Genova, 2001) », Medea 2022, p. 1. ; v. encore S. Palidda, « Appunti di ricerca sulle violenze delle polizie al G8 di Genova », Studi sulla questiona criminale 2008, p. 33 ; D. della Porta et H. Reiter, « Protesta noglobal e ordine pubblico », Il Mulino, 2001, p. 871. En français, v. l’épisode d’Affaires sensibles du 1er octobre 2018 intitulé « G8 de Gênes : violences alter et folie policière », disponible sur https://www.radiofrance.fr/franceinter/podcasts/affaires-sensibles/g8-de-genes-violences-alter-et-folie-policiere-9180440 ; ainsi que LSD La Série Documentaire du 14 février 2022 intitulé « Gênes 2001, manifester tue », disponible sur https://www.radiofrance.fr/franceculture/podcasts/serie-la-manif-est-a-nous. Pour une interprétation marxiste, v. P. Napoli, « Misura di polizia. Un approccio storicoconcettuale in età moderna », Quaderni storici 2009, p. 523. Sur la question de la mise en récit et des mémoires de ces évènements, v. M. Jansen, « Narrare le forze dell’ordine dopo Genova 2001 », Italian Studies 2010, p. 415, ainsi que B. Cousin, « Les violences policières de Gênes 2001. Entre mise à l’épreuve du récit et mise en forme publique », Déviance et société 2006, p. 67.
[45] F. Bacco, « « Dentro » lo Stato, « fuori » dal diritto. A 20 anni dal massacro della Diaz e dalle torture di Bolzaneto (Genova, 2001) », Medea 2022, p. 1. On a aussi pu parler de suspension du droit de la police et des droits de l’Homme : D. della Porta et H. Reiter, « Protesta noglobal e ordine pubblico », Il Mulino, 2001, p. 871.
[46] Plus largement, pour les faits marquants en Italie, v. S. Palidda, « Analyse critique des violences policières et politiques en Italie », dans X. Crettiez et L. Mucchielli (dir.), Les violences politiques en Europe, La Découverte, 2010, p. 251.
[47] V. Scalia, « I miasmi della canteen culture. Il caso Aldrovandi e la cultura della polizia », Studi sulla questione criminale 2018, p. 11.
[48] D. della Porta et L. Zamponi, « Protest and policing on October 15th, global day of action : the Italian case », Policing and Society 2013, p. 65.
[49] Pour un article en français, v. https://www.courrierinternational.com/article/societe-tortures-un-scandale-de-violences-policieres-indigne-l-italie.
[50] Sur cette affaire et son dénouement en 2023, v. T. Feltes, « Opferrechte in der Sackgasse », en ligne sur Verfassungsblog : https://verfassungsblog.de/opferrechte-in-der-sackgasse/.
[51] F. Jobard, « L’art du désordre toléré. La police des manifestations en Allemagne fédérale », Savoir/Agir 2021, p. 57, qui indique en note 24 avoir dû insister lors d’un séminaire en Allemagne « pour certifier que les clichés d’équipes policières en civil, LBD en bandoulière, avaient bien été pris à Paris et non dans quelque lointaine et obscure dictature ». V. l’article du Monde de l’époque : https://www.lemonde.fr/europe/article/2017/07/10/g20-polemique-sur-la-securite-apres-les-violences-a-hambourg_5158403_3214.html.
[52] L. Abdul-Rahman, H. Espin Grau et T. Singelnstein, « Mener une enquête empirique sur la force policière excessive en Allemagne », Déviance et société 2021, p. 481 (trad. V. Meunier).
[53] I. Hunecke, « Polizei und Gewalt », Kritische Vierteljahresschrift für Gesetzgebung und Rechtswissenschaft 2014/3, p. 267 ; V. Scalia, « I miasmi della canteen culture. Il caso Aldrovandi e la cultura della polizia », Studi sulla questione criminale 2018, p. 11.
[54] S. Palidda, « Analyse critique des violences policières et politiques en Italie », dans X. Crettiez et L. Mucchielli (dir.), Les violences politiques en Europe, La Découverte, 2010, p. 251, soulignant qu’il n’existe pas de statistiques officielles sur la question. V. déjà, parlant d’absence totale de recherches scientifiques sur le corps des Carabinieri, D. della Porta et H. Reiter, « Protesta noglobal e ordine pubblico », Il Mulino, 2001, p. 871. V. aussi V. Scalia, « I miasmi della canteen culture. Il caso Aldrovandi e la cultura della polizia », Studi sulla questione criminale 2018, p. 11. La même année, v. E. Gargiulo, « Rappresentazioni della folla e prescrizioni comportementali nei manuali per i Reparti mobili », Etnografia e ricerca qualitativa 2015, p. 481.
[55] A. Zamperini, V. Siracusa et M. Menegatto, « Accountability and Police Violence : a Research on Accounts to Cope with Excessive Use of Force in Italy », J. Police Crim. Psych. 2017, p. 172.
[56] Les différents documents, en allemand et en anglais, sont disponible sur https://kviapol.uni-frankfurt.de/. Pour une présentation en français, v. L. Abdul-Rahman, H. Espin Grau et T. Singelnstein, « Mener une enquête empirique sur la force policière excessive en Allemagne », Déviance et société 2021, p. 481 (trad. V. Meunier).
[57] Cette catégorie comprend les forces de police : § 11 n° 2 du code pénal allemand.
[58] Cette catégorie comprend les forces de police : art. 357 du code pénal italien.
[59] Pour l’Allemagne, v. le § 201 du code pénal ; pour l’Italie, v. les arts. 615 à 615 ter, ainsi que 617 à 617 quater du code pénal.
[60] Les différents documents, en allemand et en anglais, sont disponible sur https://kviapol.uni-frankfurt.de/. Pour une présentation en français, v. L. Abdul-Rahman, H. Espin Grau et T. Singelnstein, « Mener une enquête empirique sur la force policière excessive en Allemagne », Déviance et société 2021, p. 481 (trad. V. Meunier).
[61] L’étude italienne de 2017 insiste elle aussi sur le sentiment de ne plus être protégé par la police lorsque cette dernière agit de manière illégitime : A. Zamperini, V. Siracusa et M. Menegatto, « Accountability and Police Violence : a Research on Accounts to Cope with Excessive Use of Force in Italy », J. Police Crim. Psych. 2017, p. 172.
[62] W. Beulke et S. Swoboda, Strafprozessrecht, 14e, C. F. Müller, 2018, n° 357.
[63] Cour constitutionnelle fédérale allemande, 21 décembre 2022, 2 BvR 378/20.
[64] Les auteurs italiens insistent aussi sur le chiffre noir de l’activité de police injustifiée : v. par ex. V. Scalia, « I miasmi della canteen culture. Il caso Aldrovandi e la cultura della polizia », Studi sulla questione criminale 2018, p. 11.
[65] S. Palidda, « Analyse critique des violences policières et politiques en Italie », dans X. Crettiez et L. Mucchielli (dir.), Les violences politiques en Europe, La Découverte, 2010, p. 251.
[66] S. Palidda, « Appunti di ricerca sulle violenze delle polizie al G8 di Genova », Studi sulla questione criminale, 2008, p. 33.
[67] L. Abdul-Rahman, H. Espin Grau et T. Singelnstein, « Mener une enquête empirique sur la force policière excessive en Allemagne », Déviance et société 2021, p. 481 (trad. V. Meunier) ; F. Bacco, « « Dentro » lo Stato, « fuori » dal diritto. A 20 anni dal massacro della Diaz e dalle torture di Bolzaneto (Genova, 2001) », Medea 2022, p. 1.
[68] L. Abdul-Rahman, H. Espin Grau et T. Singelnstein, « Mener une enquête empirique sur la force policière excessive en Allemagne », Déviance et société 2021, p. 481 (trad. V. Meunier).
[69] Deutscher Bundestag, Unabhängige Polizeibeauftragte in den Ländern, 28 avril 2022, WD 3-3000-057/22, p. 4 et s.
[70] L. Abdul-Rahman, H. Espin Grau et T. Singelnstein, « Mener une enquête empirique sur la force policière excessive en Allemagne », Déviance et société 2021, p. 481 (trad. V. Meunier). On est donc encore loin, souligne la doctrine, de véritables organes indépendants d’investigation (M.-T. Piening, M. Kühne et E. Töpfer, « Parlamentarische Polizeibeauftragte. Vermittlungs- statt Ermittlungsstellen », Bürgerrechte & Polizei/CILIP130 (2022), p. 17).
[71] M. Kühne, « Sprachrohr für zwei Seiten », Verfassungsblog 27 novembre 2023, accessible en ligne https://verfassungsblog.de/sprachrohr-fur-zwei-seiten/.
[72] Deutscher Bundestag, Entwurf eines Gesetzes über die Polizeibeauftragte oder den Polizeibeauftragten des Bundes beim Deutschen Bundestag, 7 novembre 2023, Drucksache 20/9148. Les pouvoirs du délégué de la police fédéral seraient toutefois plus importants que le modèle classique à l’œuvre dans les Länder : M. Kühne, « Sprachrohr für zwei Seiten », Verfassungsblog 27 novembre 2023, accessible en ligne https://verfassungsblog.de/sprachrohr-fur-zwei-seiten/.
[73] https://www.gesetze-im-internet.de/polbeauftrg/BJNR0480A0024.html.
[74] M. Kühne, « Sprachrohr für zwei Seiten », Verfassungsblog 27 novembre 2023, accessible en ligne https://verfassungsblog.de/sprachrohr-fur-zwei-seiten/
[75] Depuis 2018, les lois renforçant les prérogatives de la police administrative se multiplient, attisant les craintes d’une partie de la doctrine et de la population. Le droit de la police relevant des Länder, chaque Land a compétence pour renforcer ou non les pouvoirs de police. Le coup d’envoi du renforcement de ces pouvoirs a été donné par la Bavière avec la loi du 18 mai 2018, adoptée malgré les manifestations et attaquée sans succès devant la Cour constitutionnelle fédérale (Cour constitutionnelle fédérale allemande, 8 octobre 2018, 1 BvR 1658/18).
[76] Deutscher Bundestag, Unabhängige Polizeibeauftragte in den Ländern, 28 avril 2022, WD 3-3000-057/22, p. 17.
[77] Cour EDH, 18 octobre 2022, Basu c. Allemagne, n° 215/19 (concernant la Saxe). L’arrêt a même été traduit par le ministère de la Justice…italien ! Toutefois, dans une autre condamnation de 2017, la Cour relevait que le fait d’avoir confié l’enquête sur des mauvais traitements imputés à la police de Munich en marge d’une manifestation sportive à une division des services de police de Munich spécialisée dans les infractions commises par la police ne permet pas, en soi, de prononcer une condamnation (Cour EDH, 9 novembre 2017, Hentschel et Stark c. Allemagne, n° 47274/15).
[78] Elle a ainsi rejeté le recours constitutionnel individuel d’une commissaire de police : Cour constitutionnelle fédérale allemande, 4 novembre 2022, 2 BvR 2202/19.
[79] D. della Porta et H. Reiter, « Protesta noglobal e ordine pubblico », Il Mulino, 2001, p. 871.
[80] V. Scalia, « I miasmi della canteen culture. Il caso Aldrovandi e la cultura della polizia », Studi sulla questione criminale 2018, p. 11.
[81] https://www.repubblica.it/cronaca/2023/06/06/news/torture_e_pestaggi_alla_questura_di_verona_arrestati_5_poliziotti-403362213/
[82] V. Scalia, « I miasmi della canteen culture. Il caso Aldrovandi e la cultura della polizia », Studi sulla questione criminale 2018, p. 11.
[83] Pour l’école Diaz-Petrini, v. Cour EDH, 7 avril 2015, Cestaro c. Italie, n° 6884/11. Pour la caserne de Bolzaneto, v. Cour EDH, 26 octobre 2017, Blair et autres c. Italie, n° 1442/14, 21319/14 et 21911/14 ainsi que Cour EDH, 26 octobre 2017, Azzolina et autres c. Italie, n° 28923/09 et 67599/10. Pour le cas Giuliani, la grande chambre reviendra finalement sur l’arrêt de chambre et conclura à la non-violation de l’article 2 – qui n’avait au demeurant été retenue, par la chambre, que sur son volet procédural : Cour EDH, GC, 24 mars 2011, Giuliani et Gaggio c. Italie, n° 23458/02.
[84] Le communiqué de presse de la Cour EDH (7 avril 2014) souligne d’ailleurs que la législation pénale italienne est « inadéquate et dépourvue d’effets dissuasifs pour prévenir efficacement la réitération de possibles violences policières ». Sur l’historique, très contrasté, du droit italien en matière de torture, v. P. Gonnella, « Storia, natura e contraddizioni del dibattito istituzionale che ha condotto all’approvazione della legge che criminalizza la tortura », Politica del diritto, 2017, p. 415.
[85] E. Gargiulo, « Rappresentazioni della folla e prescrizioni comportementali nei manuali per i Reparti mobili », Etnografia e ricerca qualitativa 2015, p. 481. V. aussi F. Palazzo, Corso di diritto penale. Parte générale, 8e éd., Giappichelli, 2021, p. 391 et s.
[86] D. della Porta et H. Reiter, « Protesta noglobal e ordine pubblico », Il Mulino, 2001, p. 871. En Allemagne, la police est considérée comme une « branche de l’administration interne » du pays (Zweig der inneren Verwaltung : H. HENKEL, Strafverfahrensrecht, 2e éd., Kohlhammer, 1968, p. 147).
[87] V., pour une étude des manuels de police, E. Gargiulo, « Rappresentazioni della folla e prescrizioni comportementali nei manuali per i Reparti mobili », Etnografia e ricerca qualitativa 2015, p. 481.
[88] Au regard de ce que peut provoquer au sein de la police des accusations de violences (découragement, dissolution du lien entre membres des forces de l’ordre, peur des procédures, etc.), il existe la pratique des Geradeschreiben (littéralement écriture bien droite, redressée), qui vise à omettre ou ajuster certaines situations ambiguës lors de la rédaction du rapport afin d’éviter tout problème par la suite.
[89] Ce point est aussi souligné en Italie : A. Zamperini, V. Siracusa et M. Menegatto, « Accountability and Police Violence : a Research on Accounts to Cope with Excessive Use of Force in Italy », J. Police Crim. Psych. 2017, p. 172.
[90] Les avocats interrogés admettent même déconseiller à leurs clients de porter plainte ! En tout état de cause, il apparaît que certains postes de police refusent de prendre les plaintes.
[91] Sur cette question, d’inspiration allemande, v. K. Mariat, L’équilibre des pouvoirs dans la phase préparatoire du procès pénal. Réflexions françaises à la lumière des droits allemand et italien, Thèse Lyon 3, 2019, n° 22 ainsi que n° 395 et s., accessible sur HAL.
[92] M. Pichl et E. von Dömming, « (Il-)Légitime Proteste, (Il-)légitime Polizeigewalt », Forschungsjournal Soziale Bewegungen 2023, p. 242. V. aussi S. Palidda, « Polizie, sicurezza e insicurezze ignorate, in particolare in Italia », Revista Critica Penal y Poder 2017, p. 233.
[93] D. della Porta et H. Reiter, « Protesta noglobal e ordine pubblico », Il Mulino, 2001, p. 871.
[94] Là encore, on peut même affiner le problème : la police représente-t-elle l’État ? Existe-t-il une seule police ? L’agent X qui maltraite un individu représente-t-il lui-même, sa brigade, la ville, la préfecture, l’administration, l’État ? : v. F. Jobard, « Police et État : Quel rapport ? », Séminaire Repenser l’État au XXIe siècle, Atelier de création libertaire, 2023, disponible sur HAL. Sur la nécessité de se prémunir des abstractions et de s’intéresser à la police dans son ancrage social local et dans son évolution continue, ce qui nécessiterait d’abandonner la vision classique du monopole de la contrainte, v. S. Palidda, « Polizie, sicurezza e insicurezze ignorate, in particolare in Italia », Revista Critica Penal y Poder 2017, p. 233.